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qui les levent l'une après l'autre, & regardent à la clarté du soleil, s'il n'y a point quelques filets fanglans pour les jetter, & c'eft ce qui les trompe; car comme nous l'avons dit, il faut que dans ce temps', & pour faire que le Poulet fe forme dans l'oeuf, il y paroiffe une ligne de fang vermeil, fans quoi cet oeuf ne vaut rien ; ainfi l'on voit qu'au lieu de fe faire un bien, on fe cause un préjudice très-considerable: outre qu'il y a des Poules qui du moment qu'on a touché à leurs oeufs, ne veulent plus retourner deffus; c'eft pourquoi la bonne maxime eft toûjours de ne point toucher aux oeufs d'une Poule qui couve, que les pouffins n'en foient éclos.

On défapprouve encore ces femmes, qui dans le doute que tous leurs oeufs ne foient bons, & que les petits n'en puiffent fortir par la dure téde leur coque, les mettent environ le dix-huitième jour dans de l'eau tiede, pour l'attendrir, ôtent les oeufs qui furnagent, & remettent les autres fous la poule ; à quoi bon tout ce miftere quand il n'opere rien? Est-ce que pour le peu de temps que ces oeufs reftent dans l'eau, leur coque peut s'amolir; ainfi, c'eft donc peine inutile, & foins plus capables de Lout gâter, que de produire de bons effets.

On peut fe vingtiéme jour de la couvée, & lorfque la poule eft allé prendre de la nourriture, voir fi les pouffins n'ont point piqué, & percé les oeufs de leur bec: il ne faut les remuer que trés peu, voir s'il y a quelque poulet qui ne puiffe fortir à cause de la dureté de la coque, & ouvrir l'oeuf legerement avec l'ongle. Si neanmoins on ne veut pas le faire, c'est encore mieux; laiffons tout faire à la nature, & ne lui aidons que dans les chofes où nous voyons abfolument qu'elle a befoin de notre fecours. Un pouffin a toûjours affez de force pour rompre les portes fa prison, & la plûpart de tous ces foins qu'on a inventez font des foins très-inutiles; on veut juger de ce qu'on ne connoît pas, & fe piquer d'être plus habiles dans les ouvrages de la pure nature qu'elle même.

de

Enfin quand le terme de l'incubation eft arrivé, qui eft le vingt-uniéme jour qu'on a mis les oeufs fous la Poule, il faut la vifiter, voir ce qu'elle a de Poulets, ôter du nid les coques d'oeufs & ceux qui n'ont rien valu, & prendre garde que la mere en fe levant trop brufquement n'écrafe quelqu'un de fes petits: fi par hazard il y en avoit encore qui ne fuffent pas hors de la coque, il faudroit attendre qu'ils en fuffent fortis pour leur donner à manger; ils peuvent ainfi demeurer un jour ou deux fous leur mere fans aucun rifque.

Les Poules qui couvent veulent être en repos, c'est pourquoi, comme on a déja dit, il eft bon de les mettre couver dans quelque endroit dérobé où il n'y va perfonne, & où les chiens, les chats & autres bêtes qui leur nuifent, ne puiffent approcher, pas même les autres Volailles qui font capables d'interrompre les couveufes dans leur travail jufqu'à les obliger à quiter leur nid.

Itôt

Soin qu'on doit prendre après les Pouffins.

les Pouffins font tous éclos, on prend un crible ou un panier percé, on les met dedans, puis on fait fumer deffous quelques herbes

aromatiques qu'on aura brulées; les Anciens recommandent fort pour cela le pouliot, le thim, la fauge & autres plantes de cette forte font encore merveilleufes; on a éprouvé que cette fumigation garantiffoit les petits poulets nouveaux nez de la pepie à laquelle ils font alors fort fujets.

Après ce premier foin, on les met avec leur mere fous une grande cage d'ozier, qu'on appelle Mue; ce doit être dans une chambre fort éclairée, ou dans quelqu'endroit d'une Cour où le foleil donne ; la chaleur de cet aftre les fortifie beaucoup ; il faut veiller en ce dernier lieu, qu'il n'y vienne point de pluye; car alors on doit vîte rentrer les poulets à la maison, l'eau les morfond quand ils font fi jeunes, & les fait fouvent mourir.

La nourriture ordinaire qu'on donne aux poulets nouvellement éclos Leur nour eft d'abord le Millet'cru, ce grain les nourrit fort bien & convient à leur riture. petit gofier par où il defcend aifément. On leur donne deux ou trois jours après de l'orge, ou du froment bouilli, des miettes de pain trempées quelquefois dans du vin, dans du lait ou dans du caillé, & tout cela alternativement, afin de les mettre toûjours en appetit.

Quand les pouffins feront un peu plus forts, on prendra des feuilles de porreaux bouillis qu'on leur hachera fort menu, & qu'on leur donnera une fois ou deux feulement en guife de médicament; cette herbe les échauffe & leur fortifie le coeur. Il ne faut point les laiffer manquer de nourriture; c'est le Millet qui leur doit être la plus ordinaire, après cela, les autres grains dont on a parlé. On foignera auffi de leur donner à boire de l'eau qui foit nette, autrement ils feroient bientôt attaquez de la pepie.

Pour garantir les pouffins d'indigeftion, il faut, dit-on, au commence- Columel. 1. ment qu'ils font éclos, les laiffer trois jours avec leur mere, & avant que 8. ch. 5. de leur donner la nourriture nouvelle, leur tâter à tous l'un après l'autre le jabot, pour voir s'il n'y refte point de mangeaille du jour précedent, car s'il y en avoit, ce feroit une marque qu'elle ne feroit pas digerée, & que la nature par confequent n'auroit pas eu affez de force pour la confommer; pour lors il ne faudroit leur rien donner, & attendre que la chaleur ait cuit & fait paffer cet aliment, après cela, aller fon train ordinaire.

L'air pris à propos contribue beaucoup à fortifier les petits poulets, comme par exemple, de les mettre au foleil fous leur cage, quand ils font encore bien nouyeaux, on les y laiffe environ deux ou trois heures, puis on les retire pour les remettre dans leur chambre ordinaire ; ce foin fe continue pendant quinze jours qu'ils font devenus plus forts, & alors on les abandonne à la conduite de leur mere qui les mene promener à la campagne & qui les éleve jufqu'à ce qu'ils fe fequeftrent de fa compagnie.

duite des

Si l'on a plufieurs couvées de pouffins qui ayent éclos à peu près en même Remarques
temps; c'eft-à-dire huit à dix jours l'une de l'autre, on peut en donner à con- fur la con-
duire à une poule jufqu'à trente, & jetter dans la baffe-cour celle à laquelle petits Pou-
on aura ôté les petits, afin qu'elle fe remette à pondre de bonne heure; mais lets.
il eft effentiel de prendre garde que cette poule à la conduite de laquelle on
abandonne tous ces poulets, foit d'un inftinct qui foit doux & de bonne ami-
tié; car fi elle étoit acariâtre, qu'elle blefsât fes petits en grattant la terre,
qu'elle ne les échauffât pas bien fous fes aîles, & qu'elle grimpât fouvent

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Maif. Ruft. 1. 1. ck. 15.

des Pouf

Ans.

dans des endroits où fes petits ne pourroient la fuivre, on fe garderoit bien de lui commettre toute cette bande, au contraire il faudroit lui ôter les ficns propres, pour les donner à une autre : c'eft un ménage que d'en agir ainfi ; car plus il y a de Poules qui fe remettent à pondre, plus & plûtôt on a d'oeufs pour la provifion de la maifon. Liébault dit qu'il faut que les Poulets foient quarante jours fans fortir du couvoir; mais cette maxime ne s'obferve tout à fait exactement, pourvû, lorfqu'ils ont trois femaines, qu'ils fe promennent dehors fur un terrain fec, & que ce ne foit pas par la pluye, ils croiffent toûjours bien, moyennant les bons foins qu'on en prend d'ailleurs, & la nourriture ordinaire qui ne doit point leur manquer,

pas

On peut décharger, fi l'on veut, toutes les Poules de la conduite de leurs petits, qu'on donnera à des Chapons, qu'on aura inftruit exprès, & pour cela.

Choififfez un Chapon de bonne corpulence, affez jeune & bien éveillé, Chapons plumez-lui le ventre, & le lui frottez avec des orties piquantes, enfuite propres à enyvrez-le avec du pain trempé dans du vin, & continuez de le traitter ainfi conduire l'efpace de deux ou trois jours, pendant lefquels vous le tiendrez enfermé dans une futaille où il ait de l'air, crainte qu'il n'étouffe, après cela, mettez-le fous une mue avec deux pouffins, qui mangeant avec ce Chapon l'obligeront de les prendre en affection, de maniere qu'il les couvera de fes ailes. Ces petits Poulets qui feront fous fon ventre, qui eft tout plumé adouciront la cuiffon que les orties y auront caufées, & ce Chapon qui fentira d'abord du foulagement dans fa douleur, en attribuera tout l'effet aux poulets, fi bien que craignant dans la fuite de les perdre, & que par là sa cuiffon ne revienne, il ne veut plus à l'avenir les abandonner. Quand le Chapon eft ainfi accoûtumé, on lui augmente foir & matin, & peu à peu le nombre des Poulets qu'on veut qu'il conduife; il ne faut que deux jours pour cela, après lequel temps il les conduit avec toute l'affection poffible, étant continuellement aux aguets & tout prêt de les défendre dans l'occafion. Ce Chapon les follicite à manger avec tout l'inf tinct poffible; il les promene autant qu'il peut fans les perdre de l'oeil, & ne les quitte point qu'ils ne foient tous grands & en état de fe paffer de lui, & de fe défendre eux-mêmes contre les infultes qui pourroient leur arriver; c'eft dans ce temps à peu près qu'il faut chaponner les mâles, c'est-à-dire les châtrer.

Temps de Faire des Chapons.

Il faut faire autant de Chapons qu'il y a de Poulets dans une Baffe-cour, c'eft un ménage ; & la veritable faifon de faire cette operation eft le mois de Juin. Si néanmoins il y avoit des Poulets qui ne fuffent pas affez forts pour la fupporter on attendroit plus tard; tout l'été y eft propre, mais le mois de Juin plus que tout autre temps.

Il y a des pays où l'on chaponne auffi les Poulettes pour leur rendre la chair plus délicate. Cette operation fe fait par incifion à la partie génitale & un peu à côté où l'on juge que font les tefticules : cette incifion faite, Comment on y inferre le doigt pour chercher ces parties; on les tire, puis on coûd chaponner la playe, & on la frotte avec du beurre frais, ou d'autre graiffe qui ne foit les Poulet- point falée: fi l'on a quelque baume fpecifique & propre à confolider les playes, elles n'en feront que plûtôt guéries. Columelle ordonne de bru

tes.

L. 8. ch. 1.

ler les argots des Chapons avec un fer chaud, & prefque jufqu'au vif, puis de les leur frotter avec de la terre à Potier ou d'Argile. Cet Auteur prétend que cela amortit entierrement en eux ce qui peut y refter d'aiguillon de l'amour, à caufe qu'ils fentent qu'ils ne peuvent plus faillir les Poules.

On doit donc, comme nous avons dit, chaponner les Poulets bien-tôt après qu'ils ont quitté leur mere; car fi on les faiffe jufqu'à un an, l'operation en eft trop dangereufe, il n'y faut plus penfer. Les Poulets qu'on choifit pour chaponner, doivent être drus & de belle venue, & fi l'on a befoin de quelques Poulets pour en faire quelques Coqs, on prendra les plus éveillez les plus hardis, & ceux qui fembleront les plus propres pour careffer les Poules.

I

Maniere d'engraiffer la Volaille.

L fuffit du feul grain pour engraiffer la Volaille, pourvû qu'on leur en donne fuffifamment & aux heures reglées, & cela s'appelle, l'engraiffer fur le Paillier, la dépenfe n'en eft pas bien grande à la campagne, où le grain ne manque point, outre que les Poules & autres oiseaux de Baffe-cour trouvent encore beaucoup de quoi fe nourrir autour des chevaux aufquels on donne du grain, fans compter la Verminiere qui leur eft d'un grand secours, & dont on a parlé.

Chapons

Mais qui voudroit engraiffer cette Volaille à la maniere des Chapons du Mans, & de ceux qu'on tire de Cuifeaux en Bourgogne, ou de la Breffe, gras ou il faudroit en agir de cette forte.

On prend un Chapon, ou une Poularde, on lui plume la tête, les entrecuiffes & le deffous des ailes, de peur qu'il ne s'y engendre de vermine, car il ne faudroit que cet inconvenient pour diffiper en eux la meilleure partie de la fubftance qui devroit les engraiffer, après cela on les enferme dans une Epinette, qui eft une espece de cage faite exprès, & comme on le peut voir dans la figure qui fuit.

Poulardes.

Figure d'une Epinette propre à mettre des Chapons ou Poulardes, pour

les engraiffer.

Ette Epinette, comme on voit, eft à petits barreaux devant & derriere, féparée par plufieurs cloifons capables chacune de contenir juste un Chapon, ou une Poularde; le deffous n'eft traverfé auffi que par des petits bâtons écartez l'un de l'autre comme les barreaux, afin que la fiente de ces Oiseaux n'y féjournant point, leur derriere ne puiffe recevoir aucune incommodité par les parties âcres & volatiles qui en exhaleroient, & qui leur ulcereroient la peau. Le deffus eft couvert d'une planche attachée aux barreaux; & c'eft dans cette Cage qu'on met les Chapons, de maniere que la tête paffe à travers les barreaux de devant, & leur queuë de ceux de derriere.

On obfervera que l'Oifeau foit mis à l'étroit dans la cloifon, de forte qu'il ne puiffe s'y remuer; car moins il aura de mouvement, moins les parties de la fubftance qui fe doivent convertir en graiffe, fe diffiperont inutilement. Il y en a qui leur mettent un peu de foin fur le devant de la Cage, & laiffent le derriere ouvert pour les raifons qu'on en a apportées, & qui leur crevent les yeux ; d'autres fe contentent feulement de les mettre avec leur Cage dans un endroit obscur & chaud, & qui les nourriffent en cette maniere,

Nourriture pour engraiffer la Volaille.

Ls prennent de la farine d'orge, ils la paitriffent avec de l'eau tiede, & en forment des pillules capables de pouvoir paffer par le gofier d'un Chapon, enfuite ils prennent cet Oifeau, ils lui ouvrent le bec, & lui font avaller ces pillules tant qu'il en peut prendre.

Il faut paître cette Volaille deux ou trois fois le jour, & obferver néan◄

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