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fus deffous, les balayer & les nettoyer ; il faut à l'égard des planches en faire la même chofe,

Aprés que les fromages font faits, il eft bon de les fçavoir conferver; Secret pour car enfin on ne les fait pas en vûë de les manger auffi-tôt & de les vendre, conferver il est un temps propre pour cela, afin d'en tirer un bon profit ; & voicy là les froma deffus quelques fecrets.

Les uns mettent ces fromages dans de grands tas de millet, ou pour le mieux dans de la graine de lin, ces femences les entretiennent frais pendant les grandes chaleurs, & fçavent les garantir des gelées ; ce qui contribue beaucoup à les affiner ; d'autres les mettent dans des chambres, dont ils ferment toutes les fenêtres, & dans lefquelles ils font du feu, il eft vray que cela les feche promptement, mais auffi cette méthode eft fujette à les faire aigrir, & pour les vouloir trop avancer, on en diminuë la qualité & le prix.

Les fromages qu'onfait mêlez de lait deBrebis & deVaches font meilleurs que ceux qui font faits avec le dernier fimplement ; au lieu de lait de Brebis il y en a qui fe fervent de celui de Chévres, il en faut pour cela nourrir de grands troupeaux ; nous dirons à l'article de la Chévre en quel pays cela fe pratique.

Il n'y a rien de tout ce qu'on vient de dire des fromages qui ne fe puiffe faire ailleurs que dans la Breffe, & on n'écrit icy des diverfes manieres d'agir en fait d'agriculture de bien des pays differens, differens, qu'afin que d'autres tâchent d'en profiter à leur avantage, & c'eft le but qu'on fe doit former en faifant des ouvrages de la nature dont eft celui-cy.

Pour reprendre par ordre les matieres dont nous avons parlé dans ce Chapitre, & dire les bons & les mauvais effets qu'ils produifent tant en aliment qu'en Medecine, nous commencerons par le fait qui eft fort en ufage.

long-temps

ges.

Varron prétend que de tous les alimens dont nous nous fervons, le lait Effets du eft le plus nourriffant. D'autres Auteurs veulent auffi qu'il foit le meilleur lait. & le plus falutaire, ce qui n'eft point difficile à croire, puifqu'il y a des pays où les peuples ne fe nourriffent prefque de laitage, & vivent tres-longtemps. On en voit la preuve dans quelques endroits des pays Septentrionaux, où il se trouve plufieurs perfonnes qui ne mangent toute leur vie que du pain, du bogur & du fromage. Beaucoup de payfans dans la HolFande Septentrionnale, & dans la plus grande partie de la Frife, fe contentent de boire du petit lait pour boiffon, & fe portent à merveille.

Quand le lait eft bon, il fe digere aifément; il est beaucoup nourriffant, augmente l'humeur feminale; il eft fpecifique pour rétablir les perfonnes maigres & attenuées, il appaife les ardeurs de l'urine, & les douleurs de la goute, il adoucit les acretez de la poitrine, on s'en fert dans les dif fenteries & dans les diarrhées caufées par des humeurs âcres & pi

cotantes.

Quelquefois aufft il incommode l'eftomac quand on l'a foible, ou qu'on en prend plus que de raifon, le lait de Vache eft plus ou moins falutaire, fuivant les faifons differentes ; dans le Printemps & dans l'Eté il eft plus fereux, moins épais & plus aifé à digerer qu'en aucun autre temps.

Lait caillé, fes effets.

Petit lait,

Les effets.

Beurre.

Ses offers.

Lait de

effets.

Fromages,

Le lait caillé eft un peu de difficile digeftion, & produit des humeurs grofliers. Un Auteur ancien prétend qu'il nourrit beaucoup. Le petit lait eft fort rafraîchiffant, & humecte confidérablement les parties.

On fe fert de beure par tout en cuisine. C'est ce qui fait la base de la plupart des fauces dont les ragoûts font compofez. Plus le beure eft nouveau, plus il eft agréable & falutaire; quand il eft vieux, il eft fujet à fentir le rance, il devient huileux & défagreable.

Le beurre nourrit beaucoup, il eft bon pour la poitrine, il lâche le ventre, il refout les humeurs, il fe digere aifément, & on l'employe pour appaifer les douleurs & les inflammations, étant appliqué exterieurement. On s'en fert dans les lavemens pour la diffenterie. Le trop grand ufage du beurre affoiblit l'eftomac, & caufe quelquefois des envies de vomir, il échauffe, ce qui fait que les perfonnes d'un temperamment bilieux ne s'accommodent point de cet aliment.

Le lait de beurre qui eft celui qui refte dans la barate après qu'on a beure, fes batu le beurre, & qu'en certains endroits on appelle Baris, eft une fiqueur qui rafraîchit beaucoup, & qui humecte confidérablement les parties. Comme les fromages font la partie du lait la plus groffiere & la plus leurs effets. compacte, ils font auffi des alimens qui nourriffent beaucoup, ils aident à la digeftion, quand ils font affinez; car lorfque le fromage eft nouvellement fait il fe digere difficilement, il pese fur l'eftomac, il caufe des vents & des obstructions: quand au contraire il eft trop vieux, il échauffe beaucoup, il produit un mauvais fuc, & refferre le ventre, de maniere que pour en attendre de bons effets, il faut qu'il ne foit ni trop vieux ni trop nouyeau. Au refte on croit que la plûpart de tous ces effets,bons ou mauvais, dépendent autant de la bonne ou mauvaise conftitution de ceux qui mangent du fromage, que des proprietez qu'il peut contenir,

Ages des
Chévres

CHAPITRE XV.

De la Chévre & du Bouc,

Omme les Boucs & les Chévres portent des cornes, on a crû les devoir placer ici pour ne point déranger l'ordre qu'on s'eft prescrit, de vouloir traiter de fuite des bêtes à cornes; ces animaux font de grand profit, principalement dans les lieux où on en nourrit beaucoup; leur chair, leur lait, leurs peaux font des marchandifes dont on fait de l'argent.

Les grands pâturages ne font point les lieux où les Chévres fe plaifent le plus, pourvû qu'elles trouvent des halliers, des buiffons & des ronces, elles font contentes. Elles aiment les pays montagneux, & il y a de certaines contrées où on les voit toûjours grimpées fur des rochers. La Chévre vit ordinairement huit ans.

Quel doit être le Chévrier, fes foins pour fon troupeau.

Ans les lieux où l'on en nourrit à troupeaux, on prend des Paftres pour les conduire, qu'on appelle Chévriers. Il faut que celui qui conduit les Chévres foit agile pour les fuivre fur les montagnes où elles montent, robufte pour marcher toûjours dans les brouffailles & parmi les ronces; cinquante Chévres lui fuffifent à conduire, parce que ce bétail s'écarte beaucoup, n'étant point obéiffant ni à la voix de l'homme, ni au mouvement des chiens; il obfervera de ne les point laiffer paître dans des lieux marécageux, car le marécage leur eft contraire.

Il menera paître fon troupeau dès la pointe du jour, que les herbes & les feuilles des arbriffeaux qu'il broute, font encore toutes mouillées de la rofée, c'est ce qui leur fait avoir beaucoup de lait, & il ramenera ce troupeau fur les neuf heures du matin, où il refte enfermé jufqu'à trois heures après midy, qu'il retourne au pâturage jufqu'à la nuit.

Ce Chévrier en Hyver ne menera fes Chévres aux champs qu'à neuf heures du matin jufqu'au foir, fans craindre que le froid ni le ferain les incommode en aucune maniere, tant elles font d'un temperamment robufte; il n'y a que la neige & les frimats qui leur puiffent caufer quelque infirmité; c'eft pourquoi on les tient enfermées à l'Etable pendant ces mauvais temps.

Il faut avoir foin tous les jours de tenir leur Etable nette, & prendre garde qu'il n'y croupiffe point d'eau, ou qu'il s'y amaffe de la fange, cela fuffit pour rendre les Chèvres malades & les empêcher d'avoir du lait, qui eft le fruit principal qu'on en attend. Nous parlons ici pour les Païs où les Chévres font en grand nombre; car dans ceux où l'on n'en éleve que très-peu, il eft inutile d'avoir un Paftre exprés: on les mene aux champs ou avec les Vaches, ou avec les Brebis, elles y profitent & s'y portent à merveille.

Il n'est pas neceffaire de donner de la litiere à ces animaux, pourvû que de nuit ils foient à couvert des injures de l'air, c'eft affez, un plancher fouvent nettoyé, comme on a dit, leur convient très-bien.

des Chevres.

Ce bétail vit de peu, & ne coûte guéres; car fa nourriture la plus ordi- Nourriture naire eft les feuilles des ronces & de 'plufieurs autres arbriffeaux champê tres qu'il broute; le païs des Landes eft un veritable pâturage pour les Chévres, & c'eft en quoi ces terres incultes rendent plus de revenu, n'étant prefque propres à nulle autre chofe. On les nourrit pendant l'Hyver à l'Etable de petits rejettons d'herbes cueillis dès le mois de Septembre, fechez au foleil, & confervez foigneufement dans un grenier ou autre endroit à couvert de la pluye. Les feuilles de Noyer, de Vigne, de Frêne, de Meurier & de Châtaignier contribuent beaucoup à leur faire avoir du lait; enfin il faut, comme on dit, que l'herbe soit bien courte, avant que la Chévre meure de faim.

les Che

L'Automne eft la faifon que les Chévres entrent en chaleur, c'eft à dire, Temps que depuis le mois de Septembre, jufqu'à la faint Martin, afin qu'elles mettent bas leurs petits au Printemps, où les arbres boutonnent, & que les bois

vies font en

chaleur.

Choix du

Bouc

Belle Forêt commencent à jetter de nouvelles feuilles, ce bétail porte cinq mois. Jour 12. Les Chévres font rendues fecondes en Chévreaux par l'accouplement du Bouc, mais il faut que ce mâle foit bien choifi ; & pour cela, on le prend d'une bonne corpulence, ayant les jambes groffes & courtjointées, le poil doux, uni & de couleur noire, parce qu'il eft plus robufte que le blanc, quoique ce dernier ne foit point mauvais quelquefois. Il aura les oreilles grandes & pendantes, & une barbe longue & des plus touffuës, la tête petite, le cou gros & tortu, l'oeil gay & le corps fort alerte.

Choix de

Quand à la Chevre, elle fera choisie de même, & l'on obfervera outre la Chévre. cela qu'elle ait une groffe mammelle, ou un pis fpacieux, pour parler en terme d'Agriculture, de maniere qu'elle en élargiffe les cuifes en marchant. II des Chévres & des Boucs qui ont des cornes, & d'autres qui n'en ont point; ces parties accidentelles ne contribuent en rien à leur bonté, ainsi que ce bétail en ait ou n'en ait point, cela eft indifferent. On en trouve de bons & de mauvais avec ces marques, comme lorfque ces cornes ne leur croiffent point.

Autre fen

timent fur le temps que les

Chévtes

doivent faillir.

De ce qu'il faut faire au Bouc aprés qu'il a failli les Chévres, & en quel temps les faire faillir,

DE's qu'on a donné le Bouc aux Chévres, il faut les nourir de foin

& de fon, on luy en fait prendre cinq ou fix gorgées de chacun aprés la premiere faillie, puis on le redonne à la Chévre, & l'on continuë ainfi jufqu'à trois fois, puis on attache le Bouc, crainte qu'il ne s'affoibliffe, & ne s'énerve aprés la femelle, ayant encore befoin de fes forces pour s'accoupler avec d'autres. L'experience a fait voir qu'un Bouc pendant deux mois pouvoit fuffire à cent ou cent cinquante Chévres. Un Bouc n'eft de bon fervice pour faillir les Chévres que trois années confecutives, à commencer à la fin de fa premiere année, fi bien que lorf qu'il a cinq ans, il n'eft plus propre qu'à engraiffer. Les femelles durent plus long-temps, elles font fecondes jufqu'à huit ans, & commencent à porter à deux.

Nous avons marqué le temps que les Chévres commençoient à entrer en chaleur, & jufqu'où cette chaleur duroit, mais il faut remarquer que plus ces femelles failliffent tard, plus elles ont de lait quand elles chévretent; parce qu'elles font leur Chévreaux en Mars où les herbes commencent à pouffer. Au lieu que lorfqu'ils ont le mâle plûtôt, elles nous donnent des petits en Février, où on eft obligé de les nourrir de fourage, qui a bien moins de fubftance; & comme dans la multiplication de ces animaux on recherche plus le lait que leurs petits, on obfervera de në faire chevreter les Chévres que paffé la my-Octobre.

Il y a des Auteurs fur l'Agriculture qui ne font pas d'accord fur le temps que nous avons dit qu'on devoit faire faillir les Chévres, ils prétendent qu'on peut manger des Chévreaux dés le mois de Decembre; c'estpourquoy, felon les cinq mois de temps que la nature donne aux Chévres pour mettre bas les Chévreaux, il faut qu'elles ayent failli environ le mois d'Août, & tout cela a de la vray-femblance; puifqu'on mange en effet

des

des Chévreaux à Noël. Ainfi de tous ces temps marquez on choifira lequel on voudra pour accoupler ces animaux; & fi l'on prend foin de bien nourrir les Chévres, qui auront chévreté en hyver, elles feront toûjours abondantes en lait.

Les Chévres pour l'ordinaire ne font qu'un Chévreau d'une ventrée, Portée of on en voit cependant qui en donnent deux quelquefois, & la raifon de dinaire des cela, c'eft qu'il s'est détaché deux oeufs de l'ovaire, qui font décendus Chévres, dans la matrice de la Chévre, ou que dans un feul oeuf il y ait eu deux foetus renfermez, ce qu'il n'eft pas extraordinaire de voir. Quelques Auteurs difent qu'il y a des Chévres qui en font jufqu'à trois, cela n'eft pas impoffible par les mêmes raifons qu'on vient d'apporter ; cela dépend de la nature qui fe jouë bien fouvent dans la géneration des animaux, & non pas d'une fecondité que bien des gens de campagne croyent ordinaire à une Chévre, ce qui fait qu'ils confeillent pour le profit de la chair qu'on tire de ce bétail, de faire choix de femelles de ce temperamment, mais il ne faut quelquefois que la premiere ventrée pour les défabufer de leur erreur.

Lors donc qu'une Chévre a donné deux Chévreaux, il faut pour ne point l'épuifer de lait en prendre un, & le faire alaiter par une autre Chévre qui n'aura point de petit, elle ne lui refufera point ce bon office ; ces animaux en cela font d'un naturel fort docile, & nous l'experimentons tous les jours à l'égard des Chévres qu'on donne pour nourrice à des enfans, & qui vont d'elles-mêmes au berceau leur presenter le tetin.

On peut traire les Chévres l'efpace de quatre ou cinq mois deux fois Profit du par jour, foir & matin; elles rendent par jour, quand elles font bonnes lait deChé laitieres deux pintes de lait ; ce qui eft d'un revenu confiderable pour ceux vre. principalement qui en nourriffent beaucoup, fi l'on a égard auffi au peu de dépenfe qu'il faut faire pour les nourrir. On ne laiffe les Chévreaux fous leurs meres que quinze jours ou trois femaines qu'on les vend aux Rotif feurs, après lequel temps on commence à les traire; s'il y a quelque femelle qu'on veuille garder pour en multiplier la race, on la laiflera teter deux mois, puis on l'envoyera aux champs avec fa mere pour y broutter ce qu'elle y trouvera; ce qu'on dit ici regarde les lieux, où on n'éleve que trèspeu de Chévres & feulement pour avoir du lait pour aider à fuftenter la maifon, ainfi que cela fe pratique parmi les pauvres gens à la campagne, qui n'ont pas toûjours le moyen de nourrir des Vaches.

Mais dans les pays où l'on voit beaucoup de ce bétail, & où le com- Utilité des merce en eft confiderable, tant par rapport au lait, dont on fait des froma- Boucs. ges, qu'au fujet des peaux de Bouc qu'on en tire pour differens ufages, on agit bien autrement qu'on ne vient de dire, le profit ne confifte pas en ces lieux à vendre les Chévreaux ; s'il s'en débite quelques-uns, ce n'eft pas une affaire, mais on les laiffe tous croître en vûë de garder les femelles pour le lait, & les mâles, qui font les Boucs, pour en avoir les peaux & la chair quand ils ont cinq ans, on les appelle Menons en certains endroits. Et pour faire que ces Boucs foient de grand débit, on les châtre & on n'en laiffe pour la multiplication de l'efpece que ce qu'on juge à pro- · Cc

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