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Suite des foins du Porcher.

Il eft bon d'avoir deux Etables feparées, l'une pour mettre les Ver& l'autre pour enfermer les Truyes, parce que ceux-là feroicnt dangereux de faire avorter les meres, ou de manger leurs petits Cochons fitôt qu'ils feroient nez. Cette Etable ou ce toît aura fon aire pavée de grés, afin que les Cochons ne puiffent la foüiller avec leur groüin, & qu'un air corrompu ne les y infecte pas. On en fera la porte avec des barreaux de bois éloignez l'un de l'autre de quatre pouces.

Nous avons déja dit quelque chofe de ce que devoit faire un Porcher pour bien gouverner les Cochons; voici encore quelques foins qui le regardent, & qui ne font pas moins effentiels que les premiers.

Quoique les Cochons foient naturellement très-fales, & qu'ils fe veautrent dans la boue quand ils en trouvent, cependant ils aiment à l'étable la paille fraîche, & plus on les y entretient nettement, plus ils devien nent beaux,

Quand mener paître les Cochons:

E Porcher aura foin depuis le mois de Mars jufqu'en Juillet, de menes paître les Cochons dès le matin, aprés neanmoins que le foleil aura diffipé la rofée ; parce que cette humeur hâte interieurement ce bétail. De

puis

la fin deJuillet jufqu'au commencement d'Octobre,il les fera fortir dès la pointe du jour jufqu'à dix heures du matin dans l'une & l'autre faison, & depuis deux heures aprés midi jufqu'au foir. Mais depuis le mois d'O&obre jufqu'en Mars ces Cochons refleront toute la journée aux pâturages, & ils y feront conduits le plus matin qu'il fera poffible, excepté lorfque le temps eft tout dérangé, qu'il pleut, qu'il nége, ou que les Aquilons fe faffent rudement fentir. Un Porcher peut conduire quarante ou cinquante Cochons de differens âges.

Nourriture ordinaire des Cochons:

Es. Cochons s'élevent très-bien en tout pays, foit terres labourables, en friche, montagnes ou vallons, mais à la verité beaucoup mieux en pays aquatiques, parce qu'en ceux-là ils y trouvent dequoi fe veautrer pendant les grandes chaleurs, ce qui leur fait beaucoup de plaifir. Ces animaux aiment beaucoup les Forêts, il s'y trouve du gland, des faânes, des châtaignes, toutes fortes de fruits fauvages, qui cft la nourriture qui leur plaît le plus. C'eft dans ces endroits qu'ils prennent une bonne graiffe fans qu'il en coûte beaucoup ; on a foin auffi pour cela d'amaffer du gland pour n'en point manquer pendant l'hyver,de leur donner à la maifon des fruits verds que les vents ont abatus avant leur maturité, & toutes fortes de fruits pourris. Les figues leur font très-bonnes, d'où vient qu'on leur en donne dans Tes pays où elles font abondantes..

Les Jardins fourniffent prefqu'en tout temps aux Cochons dequoi les bien nourrir. Les choux, les raves, les naveaux, les citrouilles, les concombres & les melons, tout cela leur fert d'un aliment folide pour l'armere faifon; les olives bouillies & données aux Cochons leurs font très

bonnes ; c'eft pourquoi on en fait provifion dans les contrées où il y croît beaucoup d'oliviers pour s'en fervir pendant toute l'année on employe encore très-utilement pour la nourriture des Cochons les feuilles de plufieurs arbres differens, comme de Figuier, de Noyer, de Mûrier, d'Orme & de Vigne dont on fait amas, & qu'on met fecher fur quelque plancher pour les faire bouillir après, & les donner ainfi mêlées d'un peu de fon aux Cochons, cet aliment les entretient parfaitement bien.

Les Cochons ne font jamais raffafiez de manger ou de dormir, auffi Naturel des font-ils toûjours l'un ou l'autre, c'eft ce qu'on fouhaite en eux, parce qu'ils Cochons, engraiffent plûtôt. Ces animaux font fi gourmands que non contens d'avoir. pâturé, ils veulent encore qu'on leur donne quelque chofe au retour des champs, principalement en hyver. Les uns leur font chauffer les lavûres des écuelles, ou le petit lait qui dégoute des fromages; d'autres fe contentent de prendre de l'eau, de la faire chauffer, & d'y metrte dedans des herbes champêtres avec du fon.

Ileft à propos de leur en faire autant le matin, ou de leur jetter un peur d'orge pour greneter; tous ces alimens les fortifient, & corrigent la crudité de la mauvaise nourriture qu'ils ont prife dans la campagne,c'eft ainsi qu' étant traitez de longue main,ils profitent à vûë d'oeil.

Outre que ce foin qu'on prend des Cochons les maintient en bonne. chair, l'efperance qu'ils ont d'avoir de tels mets à la maison, fait qu'ils ne s'en écartent point, qu'ils y dreffent droit leurs pas, & que par confequent on a moins de peine à les ramener.

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De la neceffité de châtrer les Cochons, quand faire cette operation,

& à quel âge.

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Our bien engraiffer les Cochons, il faut les châtrer; fans cette operation on ne peut en venir à bout. La raifon eft qu'il fe fait affez fouvent une perte confiderable des principes les plus fpiritueux, & les plus balfamiques de la maffe de leur fang par les partics de la generation. Or ce changement de temperamment, caufé par ce manque de l'émiffion feminale: fait que la portion du fang qui devoit former la femence, fe convertiten la fubftance du corps.

Le temps de châtrer les Cochons eft le Printemps ou l'Automne, que les châleurs ni le grand froid ne fe font point fentir. Il faut que Fair foit temperé, autrement il y auroit trop de danger: on châtre les Cochons depuis quatre mois jufqu'à fix, & tout au plus à un an, encore eft-ce trop tard. Quand ils font châtrez plus jeunes ils en croiffent bien mieux; c'eft par incifion que fe fait cette operation ; fe fait cette operation; il y a des gens qui y font fort experts, & qu'on paye pour cela. La plupart des Chaudronniers s'en mêlent, c'eft pourquoi on n'a pas jugé à propos de s'éten

dre fur cette matiere.

Aprés qu'on a nourri les Cochons pendant fix mois, on fonge à les engraiffer pour les tuer ou pour les vendre.

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De la maniere d'engraisser les Cochons dans les Forêts,

N engraiffe les Cochons dans les Forêts lorfque le gland tombe, ce qui marque fa maturité, & que les châtaignes quittent leur envelope; les Cochons courent avec avidité à ces alimens, ils les mangent d'appetit, comme étant la nourriture qu'ils aiment le mieux. Si l'on veut que les Chochons nourris ainfi engraiffent en peu de temps, il faut foigner le foir au retour des champs à leur donner à boire de l'eau tiede mêlée d'un peu de fon ou de farine d'yvroye, cela endort ces animaux, & fait qu'ils profitent très-bien de leur nourriture. Il ne faut qu'un an fans autre foin pour faire prendre aux Cochons une très-belle croiffance & de la graiffe fuffifamment pour être tuez ou vendus. Il y en a qui les laissent deux ans fe nourrir dans les bois, & c'eft de là qu'on voit des Cochons gros & fi gras; car tant qu'ils vivent, dit-on, ils croiffent comme les Boeufs. Cette maniere d'engraiffer les Cochons dans les Forêts ne convient que lorsqu'on en a un grand nombre,qui couteroit trop à engraiffer à la mais fon& l'on ne pratique cette methode que dans les lieux où il y a beaucoup de futayes.

Le temps froid eft toûjours plus propre à engraiffer les Cochons que lorfqu'il fait chaud, il ne fe fait pas en eux pendant l'Hyver une fi grande diffipation des parties du fang que durant l'Eté, tant leur nourriture fe convertit en bonne fubftance, outre que l'Eté, & dans les faisons où la terre peut fe remuer, ils ne font que chercher avec leur groüin des racines & de la vermine, qui n'eft pas pour eux un aliment à beaucoup prés fi folide que le gland & la châtaigne;& les Cochons mêmes s'amuferoient toûjours à fouiller ainfi, & à fe repaître de cette nourriture, qui ne les maintient que mediocrement, fi on ne fçavoit y apporter du remede par le moyen de petits anneaux de fer qu'on leur met au groüin avec un petit poinçon pointu. La douleur que ces anneaux leur caufent les empêchent de fouil ler, & pour lors ils fe remettent à manger de meilleures chofes qui les engraiffent plûtôt. Il y en a au lieu de fe fervir de ces anneaux, qui leur font une taillade au nez, cette operation a bien le même effet, mais comme elle fe cicatrife trop, il faut la recommencer trop fouvent, ce qui eft in

commode.

On ne doit point fe contenter que les Cochons mangent du gland dans les Forêts, il faut encore faire une bonne provifion de ce fruit à la maifon pour en donner à manger à quelque petit nombre de Cochons choifis au retour de la Forêt, & qu'on tient enfermez dans l'Etable pendant dix ou douze jours, afin d'achever de les engraiffer parfaitement, & par ce moyen en faire, comme on dit, des lards de haute graiffe.

Ce glandfert encore pour bien entretenir à la maifon les Cochons qu'on a feparé de ceux qui font gras, & qu'on veut engraiffer avec le temps, & pour nourrir ceux qui languiffent pour avoir été malades, ou qui font trop jeunes pour être tuez; enfin on donne à manger de ce gland aux Truyes qui font pleines, comme à celle qui ne le font pas, & aux Verrats: on leur difpenfe cet aliment en Hyver & durant le Printemps jufqu'à ce que

la faifon plus favorable leur permette de trouver par les champs une nourriture qui y fupplée.

Secret pour garder long-temps du Gland.

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L feroit à fouhaiter que le gland fe pût garder auffi aisément

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ne craindroit point d'en faire une bonne provision, cependant on a trouvé quelques fecrets pour cela, en voici un.

Amaffez du gland ce que vous jugerez en avoir befoin, ammoncelez-le dans un endroit qui foit fec, laiffez-le fuer ainfi en monceaux fans le remuer, & à mesure que vous en aurez befoin, prenez-en toûjours par un même côté, afin de ne lui point laiffer prendre air, car alors il germeroit, & ce feroit du gland perdu; mais quand une fois ce fecret a réuffi, on ne doit point craindre d'en faire même un amas pour deux ans, car il arrive rarement que le gland foit abondant deux années de fuite en un même endroit, les chênes étant la plûpart d'un genie à ne fructifier beaucoup que de deux années l'une.

Comment engraiffer les Cochons à la maison..

P Our ce qui regarde la maniere d'engraiffer les Cochons à la maison, elle demande d'autres foins ; il faut toûjours choisir pour cela un ou deux Cochons d'un beau corps, ou de fe fervir de ceux qu'on a élevez tous jeunes tels qu'on les a. II eft neceffaire, pour bien faire, qu'ils ayent un an ou dix-huit mois, puis on les enferme dans un toît à part avec bonne litiere, foignant de la leur renouveller de temps en temps, parce qu'ils en prennent plûtôt graiffe.

Cela obfervé, les Cochons ont une auge de pierre ou de bois devant eux pour y mettre la nourriture qu'on leur donne, & qu'il faut leur diftribuer avec jugement; car qui les en iroit tout d'un coup engouer, empêcheroit le bon effet qu'elle doit produire, la chaleur naturelle n'ayant pas affez de force pour cuire cette abondance d'aliment qui lui furvient extraordinairement, d'où il arrive qu'au lieu de fe convertir en un bon fuc, elle ne cause que des cruditez qui rendent les Cochons malades.

Or pour y proceder avec ordre, on commence d'abord par donner à ces. Cochons des beuvées avec de l'eau dans laquelle on aura fait bouillir des choux ou de gros navets coupez par morceaux ou d'autres herbages de jardin, on y ajoûte du fon, comme pour en épaiffir l'eau, & quand le tout eft bien remué & réfroidi on le donne à manger aux Cochons. Il faut que ces herbages nagent un peu dans le commencement, & pendant quinze jou donne cette beuvée épaiffe de plus en plus, de maniere neanmoins que l'eau domine toûjours.

Ce temps paffé, on leur ôte les herbages, & on ne les nourrit plus que de fon & d'eau; le premier alors y doit être mis en plus grande quantité que l'autre. On en augmente chaque jour la dofe, de telle forte que le tout ayant bouilli, le fon domine entierement l'eau, en observant que cela foir

comme une bouillie de fon fort épaiffe. Il faut alors donner de cette nourriture aux Cochons tant qu'ils en laiffent de refte; c'eft par ce moyen & lẹ repos continuel que prennent ces animaux, qu'ils engraiffent ainfi en un mois ou deux tout au plus.

On leur peut donner par intervale quelque poignée de grain pour les amuser, mais on ne doit point leur en faire une nourriture ordinaire; car on prétend que cela les rend ladres. Les Cochons gouvernez, comme on vient de dire, deviennent quelquefois fi gras, que lorfqu'on les fort de leur toît pour les tuer, ils ne fçauroient marcher. Il y a bien des Boulangers & des Hôteliers qui font ce ménage à caufe du fon & de bien d'autres chofes que leur art leur fournit, & qui feroient perdues, fi on ne les donnoit aux Cochons aufquels elles conviennent très-bien pour les rendre gras; la maniere d'engraiffer les Cochons à la maifon eft de plus grande dépenfe que celle qui fe pratique dans les Forêts, mais comme on ne jouit pas par tout de cet avantage, on fe contente d'en nourrir ainfi un ou deux, felon qu'on juge en avoir befoin pour fa provifion, outre que la chair des Cochons qu'on engraisse dans les toîts, est bien plus délicate que les autres.

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Moyen de les en guerir, & comment connoître fi un Cochon eft

malade ou non.

Es Cochons font fujets à plufieurs maladies; & on connoît qu'un Cochon eft malade, quand il panche beaucoup l'oreille, qu'il eft plus lent & plus pefant à marcher que de coûtume, & qu'il eft dégoûté; la marque infaillible, dit-on, qui donne à juger qu'un Cochon eft malade c'eft lorfqu'après lui avoir arraché à contre poil un peu de fes foyes, si F'on voit qu'elles font fanglantes, on n'en doit point douter, au lieu que fi elles ne le font point, le Cochon eft fain.

Indigestion Les Cochons fe trouvent quelquefois incommodez feulement pour avoir mangé des herbes de difficile digeftion, ce qui leur cauferoit fans doute une maladie, fi on ne la prévenoit par une diéte de dix-huit à vingt heures, qu'on leur fait garder dans un toît; après quoi on leur donne à boire beaucoup d'eau tiede où l'on aura laiffé infufer pendant douze ou quinze heures des racines de concombres fauvages pilées, çe remede les garantit des maladies contagieufes aufquelles ils font fujets.

ladres.

Cochons Il y a des Cochons qui font ladres ; c'eft pourquoi on les languaye & qu'on leur regarde derriere les oreilles pour voir s'ils le font ou non ; c'eft ordinairement dans les grands Marchez & dans les Foires que cette vifite fe fait par des Languayeurs en titre d'office..

Cette ladrerie eft une lêpre qui provient d'une obftruction generale de toutes les glandes de la peau du Cochon ou de quelque partie feulement. La lépre commence d'abord par rendre le Cochon pefant & endormi, il a la langue, le palais & la gorge toute grainée de petites éminences noirâtres, la tête, le cou & tout le refte du corps remplis de tubercules, &

il

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