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Si-tôt qu'on rentrera le Cheval à l'écurie, il faudra le deffeller & le debrider auffi-tôt, puis lui donner une jointée d'avoine, & le flatter; ce petit apât qu'on lui donne fait qu'il fouffre plus aifément à l'avenir qu'on le harnache. Pour la premiere fois qu'on felle un Cheval il ne faut le fangler que très-legerement, & quelquefois point du tout felon que le jeune Cheval paroît rétif à la fangle.

Cette felle fera fans étriers d'abord, crainte que le Poulain par fantaisie venant à faire le mauvais fous ce harnois, ne s'attrape les pieds dedans & ne fe rompe la jambe. On le promenera ainfi pendant cinq ou fix jours le fanglant tous les jours plus fortement, & lui mettant la croupiere & le poitrail.

Quand on le voit affuré avec tout cela, on le careffe de la voix & de la main, on lui donne de l'apât, comme on l'a dit: enfin on le mene dan's une terre labourée, & l'ayant careffé, on fait monter une perfonne deffus. le tenant néanmoins toûjours en bride pour voir quelle figure il fera fous fon homme, & pour cela on le tirera par les refnes, on le fera ainfi marcher dans le champ, ce manege peut durer deux ou trois leçons.

Enfuite on lui met les refnes fur le cou, on le monte, on le fait aller, & l'on tient en main une petite houffine dont on lui donne doucement fur le cou, lui lâchant un peu la bride de temps en temps, afin de lui faire la bouche.

On le preffe tous les jours petit à petit, de plus en plus, c'eft-à-dire, après l'avoir laiffé aller doucement le pas, on le fait trotter, puis le petit galop, puis on le pouffe plus fort. Ces leçons fe doivent repeter avec prudence, jufqu'à ce qu'on voye que le Cheval y foit tout dreffé: après cela on le monte à l'ordinaire, on le mene par divers chemins dans des valons, fur des collines, afin de l'accoûtumer fous l'homme à toute forte de maneges.

Et pour l'accoûtumer à l'éperon, il ne faut pas d'abord l'y approcher brusquement, mais commencer par lui ferrer le gras des jambes, puis approcher legerement l'éperon; on yerra à cette premiere atteinte quelle posture il tiendra, & felon qu'on le jugera à propos, on lui donnera plus ou moins fortement, & après que le Cheval fera bien affuré & bien dressé on pourra le monter quand on voudra, obfervant de le bien ménager fous l'homme, comme au harnois, fi l'on veut qu'il rende de bons & de longs fervices.

Le Haras pour des Mulets.

Omme le Mulet eft un animal engendré d'un Ane & d'une Cavale,

val pour couvrir une Aneffe, ou un Ane pour couvrir une Cavale ; mais comme les meilleurs Mulets & les plus beaux font ceux qui font engendrez d'un Ane & d'une Cavale, nous nous arrêterons à ceux-ci,

Du choix d'un Ane pour Etalon, & de la Jument Pouliniere.

N prendra donc un Ane pour Etalon, qu'il foit beau, de bonne race, âgé tout au plus de trois ans, gros de corps, bien membru, ayant les côtez forts & larges, la poitrine ouverte & mufculeuse, l'oeil vif, l'air éveillé, les oreilles droites & de couleur brune noirâtre, afin que les Mulets qui en viendront foient noirs, ce font les plus beaux & les plus eftimez.

La Jument fera choifie, comme nous l'avons dit à l'égard du corps; quant au poil il la faut prendre noire, autant qu'il eft poffible, parce que les Mulets & les Mules qui en proviennent font ordinairement plus eftimez fous ce poil.

Il faut auffi bien préparer l'Etalon avant que de lui donner la Jument, c'est-à-dire, lui faire manger de l'avoine une fois le jour feulement, avec du bon foin, & s'en fervir pour couvrir les Cavales quand il a eu du repos.

Mais comme l'Ane eft ordinairement bien plus bas de jambes que la Cavale, il faut, quand on veut qu'il la couvre, le mener dans un lieu où il y ait une hauteur deffus, & approcher le derriere de la Cavale de cette éminence, & par ce moyen l'Etalon fait des mieux fon devoir.

Le temps de faire couvrir les Cavales pour avoir des Mulets eft le même que pour avoir des Chevaux, & lorfque les jeunes Mulets font nez on les traite comme les Poulains, excepté qu'ils ne tetent leur mere que fix à fept mois ; & tandisque nous voici fur l'article des Mulets, voyons dans un Chapitre particulier à quoi ils font propres, & quel profit on en peut retirer à la campagne.

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Du Mulet, & de l'utilité qu'on en peut tirer.

Out le monde fçait l'utilité qu'on tire des Mulets par rapport aux longs fervices qu'ils rendent; ces animaux font nez pour porter de gros fardeaux, c'eft pourquoi on s'en fert à la guerre pour les équipages des Princes. Il n'y a pas bêtes de charge plus propres à porter des Litieres que des Mulets ou des Mules; celles-ci en Efpagne & en beaucoup d'autres endroits fervent d'attelage magnifique pour les Carroffes. Les Marchands Forains, les Meûniers ont la plupart des Mulets pour tranfporter leur marchandife & leur bled.

Les Mulets font fort eftimez en Auvergne, à caufe de la rareté des Chevaux & des Boeufs ; on les employe en ce pays pour labourer la terre, pour travailler & faire autres chofes neceffaires pour la commodité de la maifon : on leur fait auffi battre le bled en bien des endroits : on peut donc juger déja par-là combien il eft utile d'avoir des Haras pour des Mulets.

Choix d'un

Mulet.

Hero'e

Talentin.

Mule.

Pour connoître fi un Mulet eft bon quand on veut l'acheter, il doit avoir les jambes groffes d'offemens & rondes, le corps étroit & ferme, & la croupe en bonne chair, quoiqu'ordinairement un peu élevée vers l'échine. II faut qu'il ait l'oeil éveillé & Foreille bien dreffée; les Mulets font plus forts, plus puiffans & plus agiles que les Mules, & vivent même plus long-temps.

On rapporte à ce fujet que les Atheniens voulant conftruire un Temple en l'honneur de Jupiter, ordonnerent que tous ceux qui avoient des bêtes de fommes, euffent à fe rendre à Athenes. Parmi tous ceux qui en amenerent il y eut un Païfan qui y vint avec un Mulet, âgé de quatre-vingt ans. Le peuple en fut furpris de maniere que pour honorer fa vicilleffe, il voulut que ce Mulet marchât à la tête des autres fans porter aucun fardeau, & défendit à tous ceux qui apportoient du grain au Marché, de fui empêcher d'en manger pour fon repas, fien paffant il s'arrêtoit à eux, fauf à les dédommager de ce qu'il en auroit pris.

Choix de la La Mule pour être choifie de bon fervice, doit être groffe & ronde de corps, ayant les pieds petits & les jambes menuës & feches, la croupe pleine & large, le poitrail de même, le cou long & la tête feche & petite.

Comment dreffer les Mulets pour le fervice.

Il neft pas tout d'un coup bien aifé de dreffer les jeunes Mulets aux ufa ges aufquels on les deftine ; il faut de la patience pour réduire à l'obéissance ces bêtes extrémement fantafques de leur nature, & fi on ne s'y prend doucement, on ne tient rien, leur caprice les prend alors, & on n'en peut faire chofe qui vaille.

Il faut donc careffer ces animaux pour avoir d'eux ce qu'on fouhaite, & on commence à les dreffer lorfqu'ils ont trois ans, on leur met de temps en temps de petits fardeaux fur le corps, on les fait marcher par la longe ainfi chargez, puis on leur met le poid plus fort, & contiuant ainfi toûjours ce manege, on les accoûtume enfin à faire ce qu'on veut qu'ils faffent.

Si l'on fouhaite qu'ils rendent service au tirage, on les y dreffe comme les jeunes Chevaux, on peut y avoir recours; mais fur tout qu'on aille doucement dans les inftructions qu'on leur voudra donner. On prétend qu'il ne faut faire fervir les Mulets qu'à cinq ans, que c'eft pour lors qu'ils font dans leur force, & que c'eft les ruiner que de les employer plûtôt à porter les fardeaux.

L'âge de ces animaux fe connoît aux dents, comme celui des Chevaux & il y en a qui difent que l'on peut juger de la hauteur que pourra avoir un Mulet ou une Mule dès leur jeuneffe, & qu'on fe regle pour cela fur leurs jambes qui ont prefque tout leur accroiffement à trois mois, & que ces jambes font la moitié de la hauteur du Mulet ou de la Mule, lorf qu'ils ont pris leur croiffance.

Il faut particulierement prendre garde que le Mulet ne foit point ombrageux, qu'il foit docile & aifé à harnacher, & qu'il ne foit point vicieux d'ailleurs, ni difficile à ferter.

Les Mulets & les Mules font fujets aux mêmes maladies que les Chevaux, on en a traité affez au long pour n'en rien dire ici davantage, on

peut

peut y avoir recours, après avoir exactement obfervé les fymptômes qui les fuivent ordinairement.

CHAPITRE XXIII

A quoi l'Ane eft propre dans une Maison de Campagne.

Uoique l'Ane femble être un animal qu'on méprife, cependant on peut dire qu'il eft fort neceffaire dans une Maifon de campagne ; il y rend beaucoup de fervice en certaines chofes, aufquelles il faudroit employer d'autres bêtes de charges ou de tirage, qui feroient bien plus utiles ailleurs.

L'Ane a fes commoditez particulieres, il fert à porter les danrées de la Baffe-cour au marché & le bled au moulin, c'eft à quoi principalement les Meûniers les employent, & il y a bien des païs où les Anes labourent la terre & tirent la Charrette.

Dans la Bresse les Bergers montent fur des Anes quand ils vont garder leurs Troupeaux, trouvant cette monture fort commode, en ce que lorfqu'ils font defcendus de deffus, & qu'ils font dans les pâturages, ces animaux paiffent l'herbe avec les moutons & les bêtes à cornes, fans les troubler: c'eft auffi fur ces Anes que ces Bergers mettent tout leur équipage.

Les Vachers ont des Anes plus grands que ceux des Bergers, parce qu'il faut qu'ils portent tous les uftenciles dont ils ont befoin pour ramaffer le lait des Vaches qu'ils traïent dans les champs (c'est la coûtume d'en agir ainfi dans le païs Bressan. )

Combien voyons-nous de gens fur les grandes routes nourrir beaucoup d'Anes pour les louer & fervir de voiture aux Voyageurs ; l'Ane n'eft pas fi fujet à tomber malade qu'un Cheval & qu'un Mulet, il eft d'un tempe ramment robuste; ainfi on voit par ce qu'on vient de dire, que l'Ane n'est pas un animal fi meprifable qu'on s'imagine. Il y a bien des endroits en Italie où on vend un Ane jufqu'à cinquante écus, & on dit qu'à Sevile en Espagne on les achete même davantage pour les envoyer au Perou & dans le Mexique, où l'on s'en fert d'Etalons pour avoir des Mulets.

Et ce qu'il y a encore d'avantageux dans un Ane, c'eft qu'il ne coute gueres à nourrir, que quelques chardons broutez çà & là par les champs, avec un peu d'herbe fait fa nourriture: on n'a pas befoin d'avoine pour le maintenir.

Sa nourriture en hyver eft de paille, ou d'un peu de foin qu'on lui dontemps en temps pour le maintenir en bon corps.

ne de

Du choix d'un Ane & d'une Aneffe.

Our choisir un bon Ane, il faut qu'il ait le poil grand, le poil doux, uni, & d'un gris brun, avec des manieres d'anneaux aux jarrets de

Nn

Elelmont.

même poil, ayant une raye noirâtre qui regne depuis le mufcau tout le long du dos jufqu'à la queuë: il eft bon qu'il foit ramaffé en fes membres, qu'il ait les jambes groffes, nerveufes & bas jointées, qu'il ait la corne du pied noire & dure, les cuiffes charnues, le ventre un peu long & non large, la croupe ronde, le dos uni & pendant des deux côtez, le devant large, ouvert & nerveux, le cou gros & fort, la tête petite, les oreilles alerres, les yeux gros, noirs & éveillez, les nafeaux larges & ouverts, & les machoires grandes; il y en a qui prennent un Ane fauvage pour couvrir les Aneffes, on dit que les Anes qui en proviennent font forts & très actifs.

Pour l'Aneffe elle fera de même corpulence, ayant le ventre un peu plus ample, afin que l'Anon qu'elle produira en devienne plus beau.

Du temps de faire couvrir les Anesses.

A faifon de faire couvrir les Anelles eft la même que celle qu'on choifit pour les Jumens, parce que le terme de leur portée eft égal, & qu'ordinairement les Anons trouvent le lait de leurs meres plus fubftantiel quand elles paiffent les nouveaux herbages, que lorfqu'elles font nourries de vieux fourages.

L'Anon pour devenir beau, doit teter dix-huit mois, mais la plûpart

'des gens de campagne, qui n'ont égard qu'à la multiplication de l'efpece,

fans s'embarraffer que l'Anon prenne une belle croiffance ou non, ne le font teter qu'un an; l'Aneffe n'en vaut pas mieux auffi, il feroit plus à propos qu'elle ne portât que de deux ans en deux ans, que de porter chaque

année.

L'Ane n'eft de bon fervice qu'à trois ans, on l'envoye aux pâturages avec les Jumens & autres bêtes de la Baffe-cour; nous avons déja dit, qu'il coûtoit très-peu à nourrir, le refte du foin que les Chevaux laiffent dans leurs rateliers, ou celui qu'ils jettent eft bon pour les Anes: un peu de fon quelquefois, quelques criblûres de bleds; tous ces alimens donnez en petite quantité leur conviennent, mais il faut pour cela qu'on le deftine à un travail extraordinaire, comme à labourer dans les terres legeres, ou pour voiturer quelque chofe dans une Charrette. L'Anerend bon fervice jufqu'à dix ans,

Si l'on voit que l'Ane fe trouve dérangé par quelque maladie qui lui foit propre, on en confultera d'abord les fymptômes, puis pour le guerir, on aura recours au Traité des Maladies des Chevaux, les infirmitez des Anes étant les mêmes, & provenant toutes des mêmes causes.

Du lait d'Aneffe, & de ses proprietez.

L'antile encore pour fon lais : il a beaucoup de rapport par 'Aneffe n'eft pas feulement utile par les petits Anons qu'elle donne, fa confiftance & par fes vertus avec celui de femme ; on l'employe pour la phtyfie, & pour les autres maladies du poulmon.

Un Medecin ancien dit qu'il faut faire étriller tous les jours l'Aneffe,

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