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dont on prend le lait.c eft aparemment qu'en l'étrillant on ouvre davantage les pores de la peau, & qu'on donne par ce moyen un plus libre paffage aux vapeurs fuligineufes qui cherchent continuellement à s'échapper, & qui, fi elles y étoient retenuës, fe mêleroient avec les parties du lait, & pourroient le rendre moins propre à produire de bons effets.

Les Laboureurs bons menagers gardent la peau de leur Ane pour en faire du cuir,dont ils font faire de bons fouliers qui durent beaucoup,principalement ceux qui font faits de l'endroit du dos ; il faut à la verité avoir la peau des pieds bien dure pour fe fervir de tels fouliers: on fait aufli les tambours de la peau des Anes.

Outre tout l'avantage qu'on tire de ces animaux, ils fçavent encore prédire quel temps il doit faire. On raconte à ce fujet qu'un certain Seigneur Breffan ayant reçû des fruits qu'un de fes amis lui envoyoit par fon Jardinier, celui-ci le pria de le vouloir renvoyer au plûtôt, parce qu'il craignoit, dit-il, que la pluye ne le furprit en chemin, ce Seigneur fit venir là-deffus un Aftrologue (on ne fçait pas fi c'est à l'occasion du Jardinier, ou pour quelque autre raifon, ) il lui demanda s'il pleuvroit ou non ce jour-là, le Philofophe afsûra des plus le contraire: le Jardinier là-deffus s'en retourna, & à peine eut-il fait une lieuë que la pluye tomba en abondance; le Seigneur Breffan envoya courir après ce Jardinier, avec ordre de le lui amener, & s'étant informé à lui même du fecret de fa prédiction, le Jardinier lui répondit que fon Ane lui avoit toute la journée donné des fignes de pluye, en tenant fes oreilles collées le long de fon cou pendant Ton voyage. Le Gentilhomme fit venir l'Aftrologue, & fe moquant de lui, alle chaffa de fes terres comme un ignorant, & lui dit qu'aulieu de gens de fon caractere, il nourriroit des Anes à l'avenir.

CHAPITRE XXIV.

Où l'on apprend la maniere de nourrir les Mouches à miel, les foins qu'il fant y apporter, & le profit qu'il y a d'en avoir à la campagne.

Ous allons prefentement parler des Mouches à miel, que nous confeillons de nourrir à la campagne, à caufe du grand profit qu'on en tire, & qui eft d'autant plus confiderable, qu'il y a bon nombre de ruches qui en font remplies. Nous ne nous arrêterons point ici à ce qu'en dit la Fable, ni à ce qu'en ont écrit quelques Naturaliftes, ce n'est qu'une curiofité, qui ne pourroit fervir que d'amufement au Lecteur, & dont il fe paffera trés-bien. Les Mouches à miel demandent de grands foins, & l'on ne peut s'attendre à tirer d'elles bien du miel & beaucoup de cire, fi on les neglige: & c'eft fur ce foins que celui qui en a la conduite doit abfolument compter: commençons par choisir up Lieu propre pour les placer..

Virg. Geor. 1. 4.

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De l'Endroit où l'on doit placer les Abeilles.

N doit en premier lieu mettre les Abeilles ou Mouches à miel, c'est la même chofe, dans un endroit qui foit à couvert des vents; car ils empêchent qu'elles ne portent leur nourriture dans leurs ruches ; ce lieu doit être retiré & fcitué, s'il fe peut, au bas de quelque colline, afin que les Mouches puiffent plus aifément voler en haut, & redefcendre avec plus de facilité, quand elles font chargées de butin.

Il n'y doit point entrer ni Brebis ni Chevres qui fautent fur les fleurs, & l'on prendra garde que les Geniffes errantes par les champs, n'aillent point abattre la rofée aux environs de ce lieu, & n'y foulent point les herbes qui y naiffent; tous ces animaux, ainsi que les Chiens, les Poulles & autres Oifeaux de la Baffe-cour font incommodes aux Abeilles, les uns, les détournent de leurs ouvrages, & les autres leur font la guerre pour s'en

nourrir.

Les Mouches ont encore pour ennemie les Guefpes, les Oifeaux & fur tout l'Hirondelle qui en fait un grand dégât, prenant les Mouches à miel dans le temps qu'elles volent, & les emportant avec leur bec pour en repaître leurs petits.

Que ce lieu foit proche de quelque Fontaine, d'un Etang ou de quelque Ruiffeaux qui ferpentent aux environs; éloignez toûjours les Abeilles des mauvaises odeurs, des marécages, des Bourbiers & d'autres endroits infects qu'il y ait des arbres proches les ruches, afin qu'au printemps, quand les nouveaux Rois menent leurs premiers effaims, & que les jeunes Abeilles fe jouent hors de leurs paniers, les rivages d'alentour les invitent à fe repofer pour fe garantir du chaud, & que les arbres qui font vis à vis les y puiffent retenir par une retraite couverte d'ombre..

Soit qu'il y ait une eau dormante ou un ruiffeau, mettez-y de petites branches d'arbres en travers & jettez-y des cailloux, afin qu'elles puiffent s'arrêter deffus, & ouvrir leuraîles, pour les faire fecher aux ardeurs du foleil; en cas qu'un vent impetueux ait difperfé les moins diligentes, ou les ait précipitées dans l'eau.

Il faut qu'il y ait dans ce lieu des herbes odoriferantes, commè le thim, le, romarin, la fariette, le ferpolet ou autres: les Abeilles aiment les odeurs, & la rofée qu'elles y vont fuccer, ainfi que fur les fleurs, donnent un goût admirable à leur miel. & leur en font produire en abondance.

On a foin en Languedoc d'éloigner les mouches à miel des fleurs de l'orme, du tythimal, du genêt, de l'arboufier, du buys, parce que le fuc que cet infecte en tire, diminue beaucoup de la bonté du miel, outre qu'il y a de ces fleurs qui rendent les Abeillles malades.

Le lieu ainfi choisi, on fongera à y affeoir leurs ruches ou paniers, comme on voudra dire, on ne doit jamais les pofer à terre, mais toujour fur des manieres de bancs; ou de fieges conftruits de bois ou de pierres.

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Des Bancs propres pour affeoir les Ruches.

Es Bancs les plus bas doivent être élevez de terre d'un demi pied, I ce font ordinairement de grandes planches ou autres pieces de bois affez larges, qu'on pofe für des pierres fimplement, ou fur une maçonerie de moillon, ou bien ces bancs ne feront que de pierres larges ainfi qu'on les trouve, ou de pierres maçonnées artiftement, cela dépend de là fantaisie.

Dans les païs où il y a grande abondance d'Abeilles, on place les Ruches en amphitheatre, faifant en forte que les bancs ne fe joignent point, qu'il y ait un vuide entre deux, afin d'y paffer librement pour vifiter les Mouches quand il en eft befoin, & il faut que les paniers y foient placez en échiquier fans fe toucher l'un l'autre, afin que chaque Ruche foit frappée des rayons du foleil qui les fortifie. Quand les bancs font conftruits de cette forte, on ne craint point que les ferpens, les limaçons & autres ennemis des Mouches les y viennent attaquer; nous donnerons une Figure dans la fuite de la maniere qu'on doit placer les Ruches felon l'idée qu'on vient d'en donner, quand nous aurons parlé de ces Ruches.

Des differentes fortes de Ruches.

A matiere dont on doit former les Ruches n'eft point abfolument déterminée, les uns en font de bois, de pierre, de terre cuite, de brique, d'écorce d'arbres, ou de paille; il y en a qui les enferment dans les murs, qui les laiffent à l'air ou à couvert, felon qu'il leur en prend fantaifie toutes ces manieres réüffiffent très-bien, tant il eft vrai de dire, que les Abeilles font aifées à conduire : cependant les Ruches les plus communes & les plus commodes font celles qui font de bois d'ofier ou de paille. Quelques Auteurs ont raifonné differemment fur chaque ef pece de Ruches, faifant valoir les unes plus que les autres, en les appropriant le mieux du monde au genre de l'infecte qu'elles doivent renfermer; mais comme on experimente tous les jours que toutes ces Ruches rétiffiffent également bien, on laiffe la liberté de s'en fervir comme on voudra.

On prétend que pour les Ruches de bois, on doit fe fervir de planches de Chêne, de Chateignier, de Noyer, de Sapin, ou de Hêtre : où le liege eft commun, on doit le préferer à tous autres bois pour la fabrique de ces Ruches, & de quelque matiere qu'elles foient, il faut foigner qu'il n'y ait aucun jour par où les vents froids puiffent fe gliffer; on fait aufli des Ruches de troncs d'arbres qu'on creufe artiftement, & on fe fouviendra qu'il faut que toutes les Ruches foient garnies en dedans de deux bâtons en croix, pour aider aux Mouches à y affeoir fermement leur ouvrage ; il y a des Ruches de deux pieces, mais on ne les eftime pas tant que celles qui ne font que d'une piece: celles de planches ont diverfes figures, il y en a de quarrées, de triangulaires & autrement, telles qu'on fouhaite que le Menuifier les fabrique..

Nn iij.

On fe fert des Ruches percées pour changer les Mouches, elles y font commodes, & après avoir montré comment toutes les Ruches doivent être faites, examinons maintenant quelle en peut être la capacité.

I

De quelle grandeur doivent être les Ruches, & de certaines remarques qu'il faut faire fur ces Ruches.

Left important de faire chaque Ruche d'une grandeur convenable à l'effain qu'elle renferme ; une Ruche trop grande donne à la verité beaucoup de miel & de cire, mais peu d'Abeilles pour la mutltiplication de l'efpece, parce que cet infecte ayant de quoi s'y loger au large, les vieilles & les jeunes y reftent tant qu'elles ne peuvent plus y être confervées, & lorfque les Ruches font trop petites, elles rendent plus de Mouches que d'ouvrage, parce que ne pouvant trouver à fe nicher dans un fi petit efpace, elles font obligées à fortir de leurs paniers pour aller chercher à fe loger ailleurs. Il faut donc chercher un milieu entre ces deux extremitez afin d'avoir en même temps beaucoup de Mouches tous les ans, & une bonne quantité de miel & de cire.

La veritable grandeur des Ruches, felon la remarque de nos Anciens, eft déterminée à trois differentes grandeurs, obfervant qu'elles foient un tiers 'plus hautes que larges, & que le haut foit conftruit en maniere de yoûte.

On fait des Ruches de quinze pouces de diametre en dedans par le bas, & de vingt-trois pouces de hauteur; il y en a d'autres qui n'ont que treize pouces de diametre & vingt de hauteur & d'autres aufquelles on ne donne qu'onze pouces de large & dix-fopt de haut.

Les premieres Ruches fervent à enfermer les effains qui s'envolens jufqu'au dix ou douze du mois de Juin, parce que ce font les plus abondans; les fecondes font p opres pour les effains fortis depuis le douziéme de Juin jufqu'à la faint Jean. Quand aux derniers, on les employe pour mettre les effains qui jettent après la faint Jean, comme étant le moins

nombreux.

Les Mouches à miel fe plaifent en toutes fortes de climats, ou peu s'en faut, toutes les Abeilles en France font exposées dehors à toutes les injures du temps, parce que le climat eft temperé, au lieu qu'il y a des païs où on les met à l'entrée de l'hyver fous des perches ou des apentis faits exprès pour les garantir du trop grand chaud, ou du trop grand froid, & les en fortent au commencement du printemps.

Pour empêcher que les Abeilles ne mouruffent de faim, les Anciens changeoient leurs Ruches de place pendant l'année, & les portoient dans les endroits où la nature fucceffivement faifoit naître des fleurs ou des herbes nouvelles. Les Hollandois obfervent encore cette maxime. Ils tranfportent leurs Ruches de place en place dans leurs champs femez de navets & de millet, ou bien de bled farrafin; mais ce remuëment ne fe pratique que lorsque ces grains font en flour, ce qui fournit alors aux Mouches une nourriture abondante, & pendant un temps affez raisonnable, les fleurs de ces plantes ne tombant que fort tard de leur calice.

,

Cette méthode ne paroît point mauvaise, & il femble que fi elle fe pratiquoit en France, les Mouches à miel n'en vaudroient que mieux, & que le Maître auquel elles appartiennent, en retireroit plus de profit.

Differentes efpeces d'Abeilles, du choix qu'on en doit faire, & comment en faire le transport.

Os prefieres font fort mauvaifes, elles ont le corps plus grand, plus

N remarquera qu'il y a des Abeilles fauvages & des Abeilles franches;

rond & plus noir que les autres, & font plus difficiles à approcher. Les bonnes Mouches font d'une couleur plus claire & plus jaune, & ne font pas velues, c'est fur ces marques qu'il faudra établir fur le choix qu'on voudra faire des Mouches.

Il faut outre cela examiner les paniers pour juger de la fecondité des Mouches par leur ouvrage, ce qu'on fait aifément en ôtant le couvercle qui couvre les Ruches, & les confiderer par-dessous, les renverfant tout doucement de côté.

Les Mouches à miel n'aiment point qu'on les tourmente; c'eft pourquoi quand on veut les acheter, il faut toûjours que ce foit le plus près du logis qu'il eft poffible: le long tranfport les rebute, outre que le changement d'air & de terroir les rend farouches & moins fructueufes dans la fuite.

Quand il s'agit de les tranfporter, on envelope la Ruche d'une grande nape qu'on nouë par le haut, puis deux hommes prennent un grand bâton qu'ils paffent à travers le noeud, enfuite ils le mettent chacun fur une épaule & le porte comme on fait une tine en vendange, ou ces Luftres de crif tal qu'on tranfporte à Paris ; il faut marcher doucement & uniement, en forte qu'on n'ébranle point la Ruche: car il ne faudroit que ce mouvement à contre-temps pour épouvanter les Abeilles: la Figure fuivante fera comprendre ce qu'on vient de dire.

Le printemps eft la vraye faifon de ce tranfport, qui fe doit toûjours faire la nuit où tout eft calme, & que la nature invite les animaux au repos; on laiffera les Ruches envelopées pendant deux jours, crainte qu'il n'en forte quelques Mouches effarouchées du mouvement qu'elles ont éprouvé: Cos deux jours écoulez, & fur le foir, on ôte la nape, puis après les Abeilles tranquilles, ne fe fouvenant plus qu'on les ait agitées reftent dans le licu, comme fi elles y avoient pris naiffance.

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Des moyens de trouver des Effains dans les Bois.

"'Eft ici un profit tout clair pour celui qui pourroit trouver dans les

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très-bonne race, foit pour s'y être multipliées de race en race, ou pour s'être échappées de quelque paniers domestiques dans le temps qu'elles ont jetté.

On va donc par les Forêts au printemps, & par tout où l'on paffe on prête attentivement l'oreille;pour peu qu'on entende bourdonner, on s'ap

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