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rien, on peut l'ôter sûrement, & en tirer la richeffe qu'il porte. Cet infecte eft admirable dans la production de la foye, il file d'abord comme un certain petit coton de peu de valeur, & qui lui fert comme de bafe pour foutenir la veritable foye qu'il file après & qu'il entortille trèsartistement tout autour de ce coton; il ne faut point differer à détacher les cocons des branches dans le temps qu'on a marqué directement après que l'ouvrage a été commencé ; car fi l'on compte du jour que les Vers ont monté dans les charmilles, ce temps ira à fix jours, d'autant qu'ils font toûjours deux ou trois jours à fe difpofer à filer, avant que de commencer. Si on retardoit davantage, on rifqueroit de convertir la foye en filofelle, qui eft une espece de fleuret ou de groffe foye, qu'on appelle ailleurs Filarice ou Padone, par le loifir qu'on donneroit au papillon de cocon pour aller faire fa graine.

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Il faut enlever doucement ces cocons, crainte de bleffer l'infecte qu'il renferme, d'où il arrive fouvent que ces petits corps bleffez jettent une huincur, qui venant à tacher le cocon, empêche qu'on n'en puiffe devider entierement la foye, étant obligé après de carder ce qui en refte, pour la filer à la quenouille, ce qui en diminue beaucoup le prix & le luftre.

Des moyens d'amaffer de la femence pour la multiplication des Vers à foye.

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Omme les Vers à foye fe détruiroient avec le temps, fi l'on ne foignojt de faire amas de leur femence pour en multiplier l'efpece, on prend un cerrain nombre de cocons qu'on enfile en chapelet, non pas par le milieu, parce qu'on tuëroit l'infecte qui eft dedans, mais par la premiere filofelle qui fe prefente, puis on les fufpend à des chevilles dans un endroit plus frais que chaud, où neanmoins l'humidité ne regne point.

A mesure qu'on verra fortir les Papillons du cocon, on les mettra fur des feuilles de Noyer étendues fur une table, on les y voit s'accoupler en peu de temps, & les femelles donner leurs oeufs fur ces feuilles, defquelles on les détache aifément après qu'elles font feches. Il y en a qui mettent pondre les papillons fur du papier, mais l'avantage n'en eft pas fi grand, parce que ces oeufs adherant fortement au papier, on n'en peut ôter la graine qu'en les raclant avec un couteau, ce qui fait qu'il y en a beaucoup qui fe caffent.

Ceux qui mettent pondre leurs Papillons fur du linge font encore plus. mal, parce que la graine qui s'y attache fortement n'en peut être détachée qu'on n'en perde beaucoup; & pour éviter cette perte, il faut garder ce linge jufqu'au printemps, l'échauffant alors, on fera éclore les oeufs qui y feront attachez.

Les cocons qui auront fervi pour la graine ne pourront après être emploïés qu'en filofelle, à caufe de la foye qui eft toute coupée par les Papillons qui en font fortis. On voit quelquefois des cocons qui font doubles, parce qu'il y a eu deux Vers qui fe font joints enfemble pour filer leur foye, ce qui arrive ordinairement forfque les Vers à foye font logez trop étroitement. Les cocons doubles ne font point les meilleurs, parce que la foye qui y, eft filée confufément ne fe devide que difficilement.

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Tous les Vers à foye ne montent pas également dans les arcades qu'on 1eur a dreffez pour y filer leur foye. Il y en a qui tombent à terre, d'autres qui font pareffeux, & d'autres qui donnent leur foye parmi leur ordure. Lorfqu'on s'apperçoit de ce défordre, il faut amaffer tous ces Vers, & les mettre chacun à part dans des cornets de papier pour leur aider à perfectionner leur ouvrage, fans ce foin important, on voit beaucoup de Vers à foye qui fe perdent fans rien faire.

Il y a encore un autre inconvenient qui arrive au cocon qui eft double, c'eft qu'il ne fort jamais qu'un Papillon de dedans, quoiqu'il y en ait plufieurs, dautant que ne pouvant tous être produits en même temps, le premier qui en fort détruit les autres par l'air qu'il laiffe entrer dans le cocon qu'il perce, d'où vient que ces autres papillons meurent & deviennent inutiles pour la femence.

Quand devider la foye, & des précautions qu'il y a à prendre.

Lne faut point perdre de temps à devider la foye quand les cocons font parfaits, & qu'on les a tirez des rameaux qui les tenoient attachez, parce qu'alors il n'y a point de déchet, au lieu que lorfqu'on les garde quelque temps, la gomme avec laquelle le Ver attache fes fillets l'un à l'autre étant fechée, endurcit tellement ces cocons, qu'on ne les peut aprés devider que très difficilement&avec perte;mais comme dans les païs où l'on nourrit beaucoup de Vers à foye, on ne pourroit apporter toute la diligence neceffaire à devider à propos tous les cocons qu'on deftine pour en tirer la foye, il faut, fi l'on manque d'ouvriers, tirer les papillons qui font dans les cocons qui peuvent refter, & par ce moyen, on n'apprehendera point qu'ils percent les cocons, & qu'ils en endommagent la foye. Pour détruire ainfi les papillons, on expofe les cocons au foleil du midi, dont la chaleur étouffe le Ver même dans fon ouvrage ; on les y met pendant trois ou quatre jours, deux heures avant midi & deux heures après. On prend garde de manier doucement ces cocons, crainte de tuer le Ver dedans pour les raifons qu'on en a dites.

S'il n'y a pas fuffifamment de foleil dans le tempsqu'il feroit à propos de fe donner ces foins, ou parce qu'il feroit furvenu un temps pluvieux, ou quelque nuage qui empêcheroit cet aftre d'agir comme il faut fur ces cocons, on pourra fe fervir alors d'un four, dont la chaleur fera très-moderée, & les mettre dedans fur des petites planches, crainte que l'air de ce four ne gâte la foye; on les y laiffe ainfi une heure ou une heure & demie, & on continue de les y remettre jufqu'à ce que les papillons foient morts, ce qu'on éprouvre en fendant un cocon en deux : ce n'eft pas à dire pour cela que quoiqu'il femble que les cocons foient en sûreté par ces expediens, il faille retarder long-temps à les devider, il y a toûjours du déchet quand on le fait, c'eft pourquoi il n'eft rien tel que d'être diligent dans. ce travail.

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Du choix qu'on doit faire des Cocons, & des outils propres à tirer la foye.

A Vant que de devider la foye, il faut feparer les bons cocons des mauvais, c'est-à-dire, mettre à part ceux qui font percez & tachez d'un côté pour en faire de bonne filofelle, & de l'autre les cocons entiers & qui font nets, pour en tirer de la foye belle & pure.

Il faut pour bien tirer la foye des fourneaux, des baffins & des devidoirs, appellez Guindres en certains endroits, Tours & Rouets en d'autres ; les baffins de plomb doivent être préferez à tous les autres, parce qu'ils rendent la foye plus claire que ceux de cuivre, à caufe du verdet auquel il est sujet pour peu que l'eau fejourne dedans.

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Les rouets des devidoirs doivent être grands, l'ouvrage en avance davantage, & fi l'on peut, il faut qu'il tire deux échevcaux à la fois; le feu des. fourneaux doit être de charbon, ou au moins de bois bien fec, afin qu'il n'y ait point de fumée qui puiffe gâter la foye.

Les Vers à foye font d'un grand profit dans les païs où ils font communs, où il y a grande abondance de Mûriersblancs, qui eft la feule nourriture qui leur convient le mieux, & fans laquelle on ne peut heureu fement en élever..

CHAPITRE X X V I.

La Garenne & le Clapier, ce que c'eft, & comment les rendre
fertiles en Lapins: Proprietez de ces animaux.

Quoique la Garenne ne foit point enfermée dans l'enceinte d'une basse

cour, cependant on peut dire qu'elle y a quelque rapport par les Lapins qu'ellecontient,& qu'on nourrit quelquefois à la maifon : ces animaux produifent un revenu qui fe confond avec toutes les menuës danrées qui fe tirent de la maifon, c'eft pourquoi on n'a pas jugé hors de propos de la placer ici, refte à prefent à dire comment elle doit être située.

De la fituation de la Garenne.

LA Garenne, pour apporter beaucoup de profit, doit être fituée fur un coteau un peu élevé, ayant pour afpect le levant ou le midy, parce que les Lapins cherchent à creufer leurs terriers, plûtôt à ces deux expotions qu'à toute autre.

La terre en doit être legere, ou d'un fable ferme, afin qu'elle ne s'éboule point après que les Lapins y ont fait leurs terriers: cette terre ne doit pas auffi être forte, d'autant que ces animaux ne la. pourroient foüir pour s'y loger.

Une Garenne eft auffi une efpece de bois taillis qu'on trouve tout planté ou qu'il faut planter, s'il ne l'eft pas de la maniere que nous le dirons dans

T'article d'élever les taillis ; ce bois eft ordinairement garni de chènes, chêneaux en abondance, d'un peu de hêtres & de bouleaux, de quelques châtaigniers & autres bois fauvages.

Il eft bon que la Garenne foit près de la maison, tant pour le plaifir qu'on a de la vifiter fouvent pour en tirer le profit, que pour conferver les Lapins qui y font, & empêcher qu'on ne les fureté à la dérobée. Cebois neanmoins fera placé de maniere qu'il n'ôte point la principale vûë de la maison.

Il y en a, mais c'eft mal à propos, qui confeillent d'entourer la Garenne de murailles; il faudroit faire une dépenfe qui passeroit de beaucoup de revenu ainfi ce ne feroit point un ménage, outre que ce mur n'empê cheroit point que les Lapins ne creufaffent des tanieres au-delà, fi la fantafie leur en prenoit ; & pour parler nettement, on ne doit point fonger à clorre la Garenne de quoi que ce foit, parce que c'eft peine perduë & argent dépensé inutilement: ni murs, ni foffez à fec, ou pleins d'eau, ni haye, tout cela ne peut empêcher qu'ils ne fortent de la Garenne, quand ils veulent: on laiffe donc l'endroit comme il eft fitué fur un côteau, & planté de bois fauvages.

Pour l'étenduë qu'elle peut avoir, cela dépend du terrain qu'on y juge propre : elles font ordinairement de quatre, cinq, jufqu'à fept arpens, on ne détermine point cet efpace, & l'on prétend qu'une Garenne de cette étendue, bien fournie & bien confervée, peut donner tous les ans deux cens douzaines de Lapins & davantage.

Nos anciens autrefois vouloient qu'on environnât la Garenne de grands foffez d'eau, lorfque la fituation du lieu le permettoit ; mais cette maxime femble s'oppofer à ce qu'ils ont dit touchant l'affiete de la Garenne, qu'ils placent fur un côteau ; il n'y a gueres d'eau ordinairement en ces endroits capables de remplir des foffez qu'on y auroit creufez; c'eft pourquoi on fe defera de cette opinon, comme étant d'ailleurs (quand le lieu y fe foit très commode) très préjudiciable aux Lapins.

A

Comment peupler une Garenne.

Près avoir dreffé la Garenne, il n'eft plus queftion que de la peupler; car d'attendre que la nature la fourniffe abondamment d'elle-même, ee feroit bâtir fur un mauvais fondement. Quelques-uns pour y réüffir, fe contentent, fans aucun miftere, de jetter dans cette Garenne quelque petit nombre de femelles pleines, lefquelles par les petits qu'elles rendent tant mâles que femelles, meublent après abondamment la Garenne; il eft vrai que cette voye tire un peu en longueur, & que celle du Clapier va bien plus vîte, voyons quelle elle est.

UN

Du Clapier.

N Clapier eft un endroit clos de murailles, bien maçonné, qu'on fait tant grand & tant petit qu'on veut, partie couvert, partie découvert, dans lequel on enferme des Lapins & des Lapines pour en mul→

Liebant Mail. Ruft. 4.2.1.7.

tiplier l'efpece, il faut vingt-cinq ou trente femelles pour un mâle, d'au-
tres n'en veulent que huit ou dix, mais cela ne fuffit
pas.

Il feroit neceffaire que les murs qui environnent le Clapier, euffent leurs fondemens conftruits de bon libage pour empêcher que les Lapins en fouillant leurs terriers ne les minaffent; mais je crois qu'on auroit encore bien de la peine d'arrêter par-là ce défordre, s'il eft vrai ce que Pline rapporte à ce fujet. Il dit qu'il y eut autrefois en Espagne une Ville toute entiere minée & creufée par des Lapins; c'eft pourquoi, fans s'embarafser l'efprit là-deffus, il faut clore le Clapier de murs tels qu'on le juge à propos pour y contenir les Lapins; s'il s'en échappe quelques-uns par deffous, ce n'eft pas une affaire, ni un incident qui doive arrêter ceux qui le font bâtir; il refte toûjours affez de ces animaux dans ce Clapier pour en faire ce qu'on fouhaite.

Nourriture des Lapins dans le Clapier.

le d'autres imens de cette nature. Es Lapins font nourris dans le Clapier d'herbages de jardin, de fruits

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qui peuvent leur convenir.

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La race des Lapins fe multiplie beaucoup en cet endroit, parce que les femelles font prefque toutes des petits tous les mois, & ces petits en produifent d'autres qui deviennent ainfi feconds à l'infini, & par fucceffion de temps, de maniere que par cette voye le Clapier fournit de quoi commencer à peupler abondamment une Garenne, & pour en manger fi l'on fouhaite; mais ces Lapins ont ordinairement la chair infipide & groffiere, au lieu que les Lapins fauvages font biens plus délicats.

Ces animaux multiplient beaucoup, ce qui fait dire à plufieurs que le Lapin étoit hermaphrodite; les Lapines font fujettes à la fuperfétation, c'eft à dire, à concevoir de nouveau, quoique déja pleines: en effet un certain Auteur rapporte que quelques Chaffeurs en avoient obfervé, qui dans le temps qu'elles allaitoient leurs petits, ne laiffoient pas d'en remettre deux ou trois au monde, & qu'au bout de quatorze ou quinze jours, elles en concevoient de nouveau un égal nombre, ce qui faitaffez connoître pour quoi ces animaux multiplient en fi grande abondance.

Il eft bon dans les Clapiers qu'on fait exprès d'y conftruire auffi des efpeces de terriers pour les loger; on les bâtit avec des aix ou des pierres plates: un Clapier peut fervir à deux fins, foit pour en tirer des Lapins pour peupler la Garenne, ou pour en ufer comme d'une Garenne d'où l'on prend des Lapins directement pour manger ou pour vendre.

Il n'importe pas à quel endroit on bâtiffe le Clapier, pourvû qu'il foit près de la maison & du jardin, afin d'être à portée de donner tous les jours à manger aux Lapins des fruits & herbages qui en proviendront.).

Comme nous avons dit que les femelles des Lapins étoient fujettes à la fuperfetation, il eft inutile de fuivre la maxime de ceux qui veulent qu'incontinent après qu'elles ont mis bas leurs petits, on les accouple feparement avec le mâle, la nature fçait ce qu'elle a à leur infpirer là deffus, & tous les foins qu'on voudroit fe donner pour croire qu'on fera mieux qu'el le, feroient tous foins inutilement pris..

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