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pefche frequente diminueroit cofiderablement le nombre du poiffon qu'il contiendroit, & altereroit beancoup par là l'argent qu'on en devroit tirer. Si les Etangs font amodiez, il y faut encore moins toucher, que fi tout le poiffon vous en appartenoit ; ainfi il faut donc abfolument fe contenir là deffus, on a le fecours des Viviers, qui contiennent le poiffon pour la provifion de la maison: voyons ce que c'est que ce Vivier, quelle en eft la conftruction & l'utilité qu'on en peut tirer.

Du Vivier.

E Vivier proprement parlant, eft une efpece de réfervoir où l'on met

y

où on l'appelle Serre. On prétend qu'en quelque endroit qu'on creufe ce Vivier, il faut toûjours qu'il foit expofé au foleil, cet aftre fait refpirer aux poiffons un air pur, ce qui les fortifie beaucoup.

Il faut, pour bien faire, qu'un Vivier foit dans l'enceinte de la maifon, qu'il foit profond de quatre pieds, & faire enforte que dans les fechereffes il ne manque point d'eau ; c'eft pourquoi il faut prendre garde où on le fait, c'est-à-dire, qu'il ait pour fource ou un ruiffeau ou une décharge de quelque baffin d'eau: car les Viviers qui ne s'attendent qu'à Feau qui tombe du ciel font fouvent en danger de devenir fecs pendant les grandes chaleurs, & il n'en faut pas davantage pour faire mourir le poiffon.

Un Vivier tombe encore dans un autre inconvenient, fi l'on n'y prend garde; le terrein où on le creufe, eft quelquefois trop pierreux, & ne tient point l'eau long-temps, c'eft ce qu'on voit arriver fort fouvent au préjudice de ceux qui les font faire; pour éviter cette perte d'eau, & lorfqu'on voit que la terre ne peut d'elle-même la contenir, il faut à ce Vivier faire un fond de bon conroi fait avec de la terre d'argile, ou de la glaife, & élever les quatre côtez de même en les foutenant d'un petit mur épais feulement d'un pied.

Si l'on fe trouve dans une terre forte ou argileufe, & qui puiffe contenir l'eau, ce fera bien de la dépense épargnée, ce n'eft pas qu'il faille efperer que dans un tel baffin naturel, l'eau demeure fans qu'il s'y en perde, mais il en refte toûjours affez pour nourrir le poiffon, fur tout lorfque tous les interstices de cette terre font remplis.

Il vaut mieux pour fe précautionner contre ces accidens ne faire qu'un petit Vivier, & le conftruire comme il faut, que d'en creufer un grand qui ne fera la plupart du temps qu'un foffé à fec, & où le poiffon perira.

Pendant que le poiffon eft dans le Vivier, on le nourrit de tripailles d'animaux qu'on égorge à la cuifine, on lui jette du pain, & d'autres cho fes de cette nature. Le poiffon n'engraiffe point dans le Vivier, quelque bien nourri qu'il puiffe être, parce qu'il n'y trouve pas naturellement assez de fubftance pour cela ; c'eft pourquoi on en pefche tous les jours maigress pour en fervir fur table. ou pour envoyer vendre.

Il y en a qui font des Viviers à la queue des Etangs, choiffifant pour cela un endroit d'eau, autant spacieux qu'ils le fouhaitent ; ils l'environ

nent de pieux éloignés l'un de l'autre de deux ou trois doigts;ces pieux font fichez fortement en terre, & entrelaffez avec des gaules pliantes, puis ils mettent dans ce Vivier autant de poiffon qu'ils fouhaitent pour leur provifion. Il eft vrai que l'invention eft bonne, parce que le poiffon y elt toûjours nourri en bon point, n'y manquant ni d'eau ni d'autres alimens qui conviennent pour l'engraiffer. Quand on veut pefcher du poiffon dans un Vivier, on a une truble, qui eft une espece de filet à Pescheur, & dont on fe fert pour cette pesche.

De la Mare pour du Poiffon.

U lieu du Vivier, il y en a qui fe contentent de faire creufer une Mare dans leur cour, lorfqu'elle eft grande, afin d'y mettre du poiffon; mais ce poiffon pour l'ordinaire fent la bourbe, de maniere qu'il en eft fouvent défagréable au goût; c'eft pourquoi on ne fait gueres d'état de, femblables refervoirs, cependant, fi l'on en fouhaite, voici ce qu'on peut y pratiquer.

Pemierement, il faut creufer cette Mare jufqu'au terrein le plus folide qu'on peut trouver, & toûjours dans une encognûre de la cour, du côté qu'elle va en pente, & où l'écoulement des eaux tend naturellement : après cela, quand elle eft pleine d'eau on l'empoiffonne de Cheneveaux, de Tanches, de quelque peu de Carpeaux ; tous ces poissons y croissent assez bien, pourvû qu'ils n'y manquent point d'eau.

Il faut, autant qu'on le peut, éloigner cette Mare des fumiers, parce que le fuc qui y coule ne peut que donner un très- mauvais goût au poiffon: il ne faut pas que les Oyes ni les Canes aillent fur la Mare la premiere année qu'elle eft empoiffonnée, parce que ces Oiseaux en feroient un trop grand dégât.

Au bout de deux ans qu'on a peuplé la Mare, on en pesche le poiffon avec une truble, feulemenr pour la table de la maifon, & aux jours maigres, on choifit les plus gros poiffons de ceux qu'on a pesché, & on rejette les plus petits dans l'eau afin de les laiffer croître.

Il faut auffi pour l'uilité du ménage planter des faules autour de cette Mare, il y en a qui y mettent des ormes, il n'importe, cela dépend de la fantaifie

Fin du fecond Livre.

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LE

NOUVEAU THEATRE

D'AGRICULTURE.

LIVRE TROISIE ME.

L'AGRICULTURE UNIVERSELLE

N

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OUS paffons de la Baffe-cour à l'Agriculture, qui renferme des douceurs qui paffent l'imagination. L'Agriculture n'a affaire qu'à la terre, qui eft toûjours prête à obéir, & à répondre à nos foins, & qui rend avec plus ou moins d'ufure ce qu'on lui a confié qu'elle a été plus ou moins cultivée.

C'eft dans cette forte de vie que M. Curius, après avoir triomphé du Roi Pyrrhus, des Sabins & des Samnites, a voulu finir fes jours. Et n'a-t-on pas vû Quintius Cincinnatus, la Charrue à la main, lorfqu'on lui vint dire qu'il étoit élû Dìctateur; & toutes les fois que le Senat s'affembloit, on appelloit ces. grands Hommes de leur campagne, pour y affilter.

On doute qu'il y ait aucune forte de vie plus heureuse que celle qu'on mene aux champs, non feulement par l'utilité qu'on en retire, & qui fair fubfifter tout le genre humain, mais encore par le plaifir qu'elle donne.

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& par l'abondance de toutes fortes de bien qu'elle apporte.

Par le fecours de l'Agriculture, on voit toûjours dans les celliers d'un pere de famille, foigneux & bon menager, du vin, de l'huile en abondance & toutes autres fortes de provifions: fa maifon eft riche d'un bout à l'autre, elle produit à foifon des Agneaux, des Cochons, de la Volaille, du Lait, du Fromage & du miel, fans compter ce qu'on tire des jardins qui font une autre reffource, & que les gens de la campagne appellent leur fecond magafin.

Pour comble de douceur & de plaifir, on a encore dans fes heures de relâche des divertiffemens fort innocens. Qui a-til de plus utile, ni qui faffe plus de plaifir qu'une maifon de campagne bien tenue & bien cultivée ?

Il n'y a rien que d'honorable dans les travaux de l'Agriculture, & les plus grands hommes l'ont toûjours tant eftimée, qu'ils l'ont même jugéc digne d'occuper les Rois. Lyfander étant un jour venu trouver à Sarde le jeune Cirus Roi de Perfe, ce Prince lui fit toutes fortes d'honnêtetez & de careffes, & entr'autres chofes, il lui fit voir un Parc planté avec beaucoup de foin & d'une merveilleufe propreté. Lyfandre qui étoit un Capitaine Lacedemonien, également furpris de la beauté des arbres & de la douce odeur des fleurs ayant dit à Cirus qu'il ne pouvoit fe laffer d'admirer non feulement le foin & l'exactitude, mais encore l'efprit & l'induftrie de celui qui avoit tracé tout ce beau plan; c'eft moi-même, lui répondit Cirus, qui en fuis l'ouvrier, & il n'y a rien là qui ne foit de ma façon, & la plupart de ces arbres ont été plantez de ma main.

Ce n'eft donc pas d'aujourd'hui que les grands hommes fe font adonné à l'Agriculture, & qu'ils ont trouvé que la vie ruftique renfermoit toutes fortes de plaifirs & de richeffes, & que ce n'étoit pas feulement les moiffons, les prez, les vignes & les bois qui la rendoient agréable, mais que c'étoit encore les jardins, les vergers, les beftiaux & tous les animaux de la Baffe-cour.

Rien n'eft plus infuportable, ni plus digne de blâme, que des gens qui demeurant dans une fertile campagne, negligent de la cultiver; ce font des terres en friches qui crient contre ceux qui pourroient les rendre abondantes.

La vie champêtre, c'eft-à-dire, les perfonnes qui font obligées ellesmêmes à cultiver leurs terres, doivent être laborieufes pour mettre l'Agriculture dans fa perfection; il n'y a que les pareffeux qui puiffent laiffer tomber cet Art; c'eft pourquoi il faut que les gens de campagne élevent leurs enfans au travail & au joug de la vic champêtre : la terre n'eft jamais ingrate, elle nourrit toûjours de fes fruits ceux qui la cultivent foigneufement, elle ne refufe fes tréfors qu'à ceux qui craignent de lui donner leurs peines.

Il n'eft rien tel que la bonne conduite d'une famille pour ce qui regarde les travaux ruftiques: il faut dès leur jeuneffe apprendre aux enfans à fecourir leurs peres & leurs meres, donner aux plus jeunes la garde des troupeaux à laine, les autres qui font plus avancez en âge meneront les plus grands troupeaux; enfin les plus âgez laboureront avec leur pere,c'eft

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