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ainfi qu'on doit à la campagne accoûtumer les enfans au travail, chacun felon leur âge & leur force, & c'eft par ce moyen qu'on voit fleurir l'Agriculture, & que la terre prépare fes richeffes pour recompenfer le Laboureur.

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CHAPITRE II.

Du Laboureurs de fon emploi pendant l'année, & de tous les inftrumens
qui conviennent au labourage.

bon laboa

reur.

IL n'y a pas de profeffion qui n'exige des talens particuliers dans ceux Des quali qui l'exercent; la culture des terres eft laborieufe, & demande par con- tez d'un fequent des perfonnes robuftes, vigilantes, & d'un bon temperamment. Un bon Laboureur doit avoir ces qualitez naturelles pour ne fe point rebuter dans le travail :nous nous fommes étendu là-deffus affez au long dans l'article du Valet Charretier, qui a tout le rapport poffible avec un Laboureur; il eft bon d'y avoir recours à la page 233. afin de profiter des inftructions qu'on y donne: voici encore neanmoins quelques qualitez propres à un Laboureur, & dont on n'a point parlé, c'eft pourquoi on ne fera pas mal d'y faire attention.

La prudence d'un Laboureur ne veut point qu'il entreprenne jamais aucun ouvrage qu'il ne voye d'abord que le profit n'y excede la dépenfe; il faut qu'il tâche toûjours de faire ce qui rend beaucoup de profit, en ne dépenfant gueres.

Il doit connoître le génie de la terre qu'il laboure, afin de s'y conformer, & labourer en temps & lieu; la connoiffance des Chevaux lui eft très-neceffaire, s'il laboure avec ces animaux, afin de s'y laiffer tromper le moins qu'il pourra ; il faut qu'il feconnoiffe en harnois pour le labourage, qu'il fache au befoin les racommoder, diftinguer la bonne femence d'avec la mauvaise, & les temps aufquels ont doit donner les laboures aux terres, & les enfemencer; il faut qu'il foit adroit à tenir la charruë, & à conduire les Chevaux ou les Boeufs qui la tirent; il doit avoir fest temps & fes travaux reglez pendant toute l'année, & felon que nous Pallons preferire.

U

Travaux d'un Laboureur pendant toute l'année.

N bon Laboureur ne doit jamais être fans occupation; il doit toû- Travaux jours s'employer & ne point laiffer manquer d'ouvrage ceux qui dé de janvier. pendent de lui. Au mois de Janvier, quand le tems le permet, il coupera le bois qu'il deftinera pour bâtir ou pour quelqu'autre ufage, il pourra porter du fumier aux pieds de fes arbres fruitiers, s'il voit qu'ils languiffent: il fera tailler fes vignes, s'il fait beau temps, & fur la fin il labourera fes Terres legeres & fabloneufes qu'il voudra défricher ; c'eft la veritable faifon quand on ne l'a pas fait au mois d'Octobre; s'il a des faules à couper,

il

Travaux

de Février.

Travaux de Mars.

Travaux

d'Avril.

Travaux

de May.

Travaux

y fera bon, pourvû que le froid le lui permette; il préparera les échalats pour fes vignes, foit en les aiguifant, ou ne faifant de faules ou d'autre bois pour fon ufage, ce qui le fait en fendant en deux les plus gros, & laiffant entiers ceux qui ne font point trop gros. Il prendra garde que fes charrettes, fes tombereaux, fes charrues & autres inftrumens neceffaires au labourage foient en bon état, & les raccommodera lui-même, s'il en est befoin; il aura fa provifion d'outils tranchans propres à fa profeffion, & il fera rémoudre ceux qu'il jugera lui pouvoir encore fervir.

Sil a des vignes à planter, il pourra s'y exercer; il fumera fes prez & fes vignes, & les taillera encore, s'il ne l'a pas fait, & les échaladera, s'il eft en pais où cela fe pratique: il commencera à donner les façons aux terres pour femer l'orge, l'avoine, le millet & autres menus grains qui compofent les femailles de la faifon, & qu'on appelle les Mars; il fera accommoder les hayes de fes jardins, il plantera des faules, des ormes, des ofiers & autres arbres tant fruitiers qu'autres qu'il jugera lui devoir apporter beaucoup de profit; il nettoyera le Colombier, s'il en a un commis à fes foins, & ôtera du poulaillier la fiente que la volaille y aura faite, parce que c'eft fur la fin de ce mois que les Poules commencent à pondre & à couver, & que cette fiente leur nuit en quelque façon.

Quand le mois de Mars eft arrivé, le Laboureur dès les premies jours femera le lin, s'il ne l'a pas fait en Février, les Avoines, l'orge, le millet, le panis, le chanvre, les pois, les lentilles, les ers, les lupins, le bled de Turquie, la vefce & les autres Mars; il donnera une feconde façon à fes guérets pour y femer tous les grains dont on vient de parler, il gréfera fes arbres & foignera fon jardin de la maniere qu'on le dira dans la fuite.

Le Laboureur dans ce mois achevera d'enfemencer fes terres fi elles ne le font pas toutes; il fera foigneux de donner à manger aux pigeons, parce qu' 'en ce tems ils ne trouvent encore gueres de nourriture par les champs, il nettoyera les Ruches, & fera la chaffe aux papillons qui font frequens quand les mauves fleuriffent, & aura foin de labourer fes vignes pour la premiere fois.

Le mois de Mai eft le temps de tondre les brebis, de faire provision de beurre & de fromages. Le Laboureur alors commencera à veiller de près fes Mouches à miel & fes Vers à foye, afin d'y apporter les foins que ces infectes exigent de lui ; il aura foin de farcler les bleds, & de donner le fecond labour à fes vignes & la culture qui leur convient encore en ce temps.

Le mois de Juin commence à inviter le Laboureur à préparer l'aire de de Jain. fa Grange, à la nettoyer des fourages qui y font, & des ordures qui s'y font amaffées; il fauchera fes prez, & moiffonnera l'orge quarré, autrement dit l'efcourgeon, il ébourgeonera fa vigne & binera fes terres.

Travaux

En Juillet il donnera tous fes ordres pour la moiffon, & recueillera de Juillet. foigneufement toutes les legumes qu'il aura femées ; il donnera le troifiéme labour à fes vignes, fi elles le demandent, & tiercera les terres.

Travaux d'Août.

C'eft dans le mois d'Août qu'il faut que le Laboureur arrache le lin & le chanvre; qu'il faffe du verjus, fi le temps le permet, & qu'il commence à fonger d'amaffer des yaiffeaux & autres chofes neceffaires pour les vendanges.

Le

Le Laboureur donnera dans ce mois la derniere façon à fes guérets, il Travauxde menera fes fumiers dans fes terres, il les fera répandre & couvrir auffitôt, Septembre. commencera à femer le feigle, il fera fes vendanges, il abatra fes noix, il fauchera ses regains, il fera amaffer du chaume pour lui fervir de litiere en cas de befoin, ou pour chauffer le four,ainfi que cela fe pratique dans les lieux où le bois eft rare ; il cüeillera la Garence, & aura foin d'en amaffer la femence, & moiffonnera le Millet.

Il faut dans le mois d'Octobre que le Laboureur veille à fes vins nou- Travaux vellement faits, crainte qu'il ne leur arrive quelqu'inconvenient ; il fera fon d'Octobre Miel & fa Cire, & foignera que fes Ruches foient en bon état, & il femera fon Méteil & fon Froment.

Travauxde

C'est dans ce temps qu'il faut encaver les vins nouveaux s'ils ne le font Novembre. pas, qu'on amaffe du gland pour nourrir les cochons, qu'on fait la recolte des Châtaignes & des Marons, & qu'on cueille les fruits du jardin qui font de garde. Le Laboureur arrachera fes racines de terre, les dépouillant de leurs feuilles, & les mettant fous le fable pour les garantir de la gelée, il fera fes huiles, il coupera fes ofiers, & il aura foin de vifiter la fruiterie pour voir fi fes fruits ne s'y endommagent point.

Le devoir d'un bon Laboureur demande de lui en ce mois qu'il vifite fouvent fes terres, pour voir s'il n'y a rien à y faire: c'eft encore le temps de fumer les prez, il coupera du bois pour se chauffer, & lorfqu'en ce mois la gelée, les glaces, la neige & les autres frimats empêchent qu'on ne puiffe faire dehors aucun travail, le Laboureur à couvert racommode fes outils pour le labourage,& les autres inftrumens qui fervent au ménage: voici une lifte des uns & des autres, qui pourra fervir d'instruction à ceux qui en auront befoin à la campagne.

Lifte de tous les Inftrumens qui conviennent au Labourage.

Travauxde

Decembie.

Left du labourage comme des autres Arts, on ne fçauroit s'en acquitter comme il faut, fi l'on n'eft pourvû de tous les inftrumens qui y conviennent. Un Laboureur aura une ou deux Charrettes, felon la quantité des Charette.) terres qu'il a à cultiver; car il lui faut pour lors plus de Chevaux & par confequent plus d'équipages pour les employer; ces Charrettes feront plus ou moins grandes qu'il jugera à propos en avoir affaire; on appelle ces grandes Charrettes en des païs, des Gerbiers, parce qu'elles font principalement deftinées pour charrier les gerbes pendant la moiffon; ailleurs on les nomme Charrettes ridelées, parce qu'elles font accommodées avec des ridelles,cesįcharrettes feront bien faites debon bois,garnies de bonnes roues avec debons bandages de fer,attachezavec de gros clous à tête. Il faut qu'elles foient affez élevées, plus étroites dans le fond que par le haut ; il y a des endroits où le derriere de ces charrettes paroît plus élevé que le devant, étant plus commodes de cette maniere dans les pais de montagne, où elles fatigueroient trop les bêtes qui les traînent, fi elles étoient construites

autrement.

Il y a des endroits où on fe fert de Chars, au lieu des Charrettes, ils Chars. ont quatre rouës, mais ils ne font pas fi commodes à manier, on ne Ss

Chars.

Charrette à fumier.

Tombe

reaux.

Civiéres.

Brouettes.

fçauroit preferire ici pofitivement la maniere de conftruire ces harnois. dépendant de l'ufage des lieux & de la fantaisie, quelquefois de ceux qui les font faire.

Il y a des endroits où on fait des Chars qu'on allonge & qu'on accourcit comme on veut, & felon que l'exige le plus ou le moins de marchandifes ou autres chofes qu'on a à voiturer. Ces Chars font accompa gnez chacun de deux petites échelles, l'une devant & l'autre derriere pour y mieux tenir en état les gerbes, les foins, chanvres, lins & autres chofes femblables qui y foit entaffécs: il faut auffi en avoir pour les Charrettes ridelées, & ces échelles fervent pour tenir arrêtée une perche qui regne tout le long de la charrette ou du char dans le deffus ; quelquesuns ne fe fervent que d'une échelle dans le devant avec la perche dont on vient de parler, & une corde attachée au bout, qui defcend jufqu'au bas, dans un moulinet qu'on tourne à force de bras avec un bâton pour que la corde foit tendue bien roide. La plupart de ces Charrettes & de ces Chars font garnis de planches dans le fond, & on en voit d'autres qui ne le font

pas.

Il eft bon auffi d'avoir une charrette legere pour charrier les fumiers, on s'en fert beaucoup à la campagne au lieu de tombereaux ; les Chevaux ne font point fatiguez deffous & la tirent fort à leur aife ; ces charrettes font encore très-commodes pour les Boeufs, & même on en ufe plus ordinairement que des tombereaux.

Il faut avoir des tombereaux propres à conduire les fumiers & les autres engrais convenables à amander les terres, ces harnois ne font gueres d'ufage pour les Boeufs: il faut que les roues en foient fortes & legeres, qu'ils foient de bons bois, que le coffre en foit fait de bonnes planches, foutenuës fermement par des appuys, afin qu'ils contiennent mieux ce qu'on voudra mettre dedans, foit fumier ou fable, ou autre chofe de cette nature qu'on veuille charrier dedans pour l'utilité de la maison.

Les Civieras font neceffaires dans une maison de campagne, il en faut deux ou trois, faites d'un bois bien choifi & qui foit fort, elles fervent pour porter ce qu'on ne peut tranfporter avec les charrettes, ces civieres fe manient à la main.

On aura encore une ou deux Brouettes pour porter de la terre des tranchées qu'on peut avoir faites, ou pour ôter le fumier des étables; ces broüettes n'ont qu'une roue & font fabriquées, comme on le peut voir dans la planche qui fuit. Charretain. Il y a des païs où les Laboureurs ont des Charretains pour charrier leurs vendanges, & les vins qu'on veut tranfporter; ces charretains font de bois. d'orme avec des roues garnies de bandages avec de bons clouds à tête, & d'une chaîne ou d'une corde propre à lier ce qu'on charge deffus.

Charruë.

Outre les inftrumens dont on vient de parler, un Laboureur a fa charruë garnie d'un foc, fait de maniere que quand il laboure, fes raies font toûjours droites: il faut que la queue y foit mife avec art & d'une longueur raifonnable, & ce Laboureur doit fur tout prendre garde que l'oreille de la charrue renverse commodement la terre; car par ce moyen les Chevaux ou les Boeufs la traînent avec moins de peine. Il fe fabrique des charruës de

plufieurs façons felon les differens ufages des pays : il y en a à roues, & d'autres qui n'en ont point. Quand on ramene la Charrue des champs, on entrelaffe la queue d'un traîneau qui éleve le foc au-deffus de terre, de maniere qu'il ne peut s'accrocher à rien par le chemin. La charruë aura auffi fon contre pour fendre la terrre, fon timon & la felette fur laquelle on pofe ce timon. Il y a la fléche où lon attelle les chevaux ou les boeufs, & le chaîmon qui tient en arrêt le timon attaché au train de devant de la charruë.

Les herfes font encore neceffaires à un Laboureur, car, comme dit le Herfe. proverbe, il ne faut pas moins herfer la terre mal labourée, que labourer celle qui eft mal berfee. C'eft pourquoy il faut qu'un Laboureur en ait deux fabriquées de bon bois, faites folidement, bien ferrées & fournies de dents longues pour rompre & brifer plus facilement la terre. Il en aura une autre dont les dents feront moins longues, & qui fera plus legere que la précedente; ces herfes auront fix pieds de long, faites en équiete avec des pieces de bois.

Il'eft befoin d'un Caffe-morte, qui eft un inftrument de bois fait comme Caffeune Maffuë longue d'un pied & demi : & de la groffeur de la jambe d'un motte. homme; on la ferre par le bout de deux ou trois cercles de fer, puis on l'emmanche d'un bâton long de quatre pieds, enfuite on en bat les motes P'une aprés l'autre pour les écrafer.

Un Laboureur à befoin de quelques Tarrieres pour percer les harnois Tarriere. qu'il veut raccommoder lui-même, afin de n'être pas obligé de courir toujours au Charron.

Il luy faut une Machoire pour broyer le chanvre en chenevottes, & cette Machoire, Machoire eft un gros morceau de bois d'un pied & demi, rond, ferré par le bout d'en bas d'un petit cercle de fer, ayant environ huit à dix pouces de tour par le haut, & fix par le bas, & emmanché d'un morceau de bois long de deux pieds.

Une Pince eft un outil dont le Laboureur a befoin; c'eft un gros levier Pince de fer aiguifé d'un côté en bifeau, les Paveurs s'en fervent pour détacher les pavez, & les Laboureurs pour planter des faules ou des pieux quand il eft queftion d'en faire une haye: les Vignerons s'en fervent auffi planter la vigne.

pour

Il faut qu'il foit fourni de Coignées, de petites Haches pour couper du Coignées bois, de Serpes de plufieurs grandeurs ; il lui faut des Faucilles pour moif- Haches, fonner les bleds, des Faux pour faucher les prez, un Croiffant pour tondre pes les hayes, ou un Gorias, qui eft une espece de grande cerpe longue d'un Faux, pied & demi ou de deux pieds, recourbée par le bout, & emmenchée d'un Croiffant, manche de bois avec une virole.

Faucilles,

Gouias.

Il aura des tenailles, une Scie, des Marteaux de plufieurs fortes, tant pour Tenailles, ferer les Chevaux, que pour cogner des clouds lorfqu'il en a befoin; il fera encore fourni de Pioches de differentes fortes felon les pays, & de Piochons pour remuer la terre.

Scie, Marteaux, Pio

ches riochons.

Il fe munira d'un Villebrequin, cet outil eft fort commode en bien des Villebreoccafions quand on a befoin de percer quelque planches, ainfi que de deux quin. ou trois Vrilles les unes plus groffes que les autres ; il a befoin de Rateaux

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