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d'environ onze toifes en quarré, & l'on continue ainfi tant que le pré a d'étenduë.

Les gazons étant ainfi tous coupez, & dans chaque efpace où on les a levez, on les laiffe fecher au foleil pendant dix jours, puis on en forme un fourneau fait en rond, ayant d'un côté dans le fond un trou, afin d'y pouvoir mettre le feu ; il faut que le four ait deux braffes de diamettre en dedans foignant bien d'étouper le tout, afin que le fourneau ne s'évente point, ce qui détruiroit l'effet qu'on en attend : il doit avoit une brasse & demie de hauteur.

Tout cela obfervé, on prend de la paille dont on couvre ces mottes, puis on met deffus deux bonnes fafcines de bois en travers pour mieux le maintenir en état, obfervant de le placer toûjours en étressissant jusqu'à ce que le fourneau en foit tout environné.

Enfuite on y met le feu qui refte ainfi allumé durant vingt-quatre heures, Loignant-pendant tout ce temps de l'attifer avec des fourches, afin que les mottes en cuifent mieux, tournant même celles qu'on juge ne devoir pas être affez brûlées.

Quand ces mottes font brûlées, on les laiffe réfroidir pendant fix ou fept jours, puis on en répand la cendre le plus également qu'il est poffible par tout le champ. Il n'y a rien de meilleur que cet amandement, il porte des fels avec foi qui font merveilleux pour la vegetation; on commence à dreffer ces fourneaux dès le mois d'Avril jufqu'à la fin d'Août.

Il faut fe donner garde dans ces terres novales ainfi amandées, d'y femer du froment les deux premieres années, ce grain rendroit plus de paille que de bled, on y met au contraire du millet, puis du feigle, & enfuite du méteil.

Les prez qui font maigres & qui ne font que comme une pelouse rase, tels que font ceux qui font fituez dans un fond argileux & pierreux, ne font point propres à faire des terres novales, il cft befoin, comme on a déja dit, qu'ils ayent de terre trois doigts d'épaiffeur qu'on puiffe couper; cette méthode de changer ainfi les prez de nature paroît très-bonne, on confeille de la fuivre.

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Des differens Fumiers dont on fe fert pour engraiffes les terres, du temps de les fumer, & de ce qu'on y doit obferver pour

Les bien fumer.

que

N fçait de tout temps & l'experience nous le confirme tous les jours, que c'eft par le du fumier moyen par le long travail, retrouvent dans la fuite des forces capables d'agir comme auparavant; que c'eft ce fumier qui en corrige les défauts, & d'où procede cette grande fertilité qu'on regarde en elle, & que c'eft enfin dans ce fu mier qu'il y a de certains fucs, qui par les rapports qu'ils ont à la conf

titution des plantes qu'on commet à cette terre, penetrent à travers leurs pores, les font germer & leur donnent l'accroiffement.

pro

Mais comme on employe en Agriculture plufieurs fortes de fumiers, & que les fucs qui en découlent ne fe trouvent pas tous également dans la portion neceffaire à la fermentation des femences, ni à leur accroiffement, foit par rapport aux lieux où les terres font fituées, foit par rapport au foleil qui les échauffe, on a jugé à propos de les diftribuer par claffes, & d'examiner comment on les peut utilement employer chacun en particulier.

Les fumiers qu'on employe le plus communement dans les terres, font les fumiers de Mouton & de Vache; parlons d'abord du premier, puis nous dirons ce qui concerne les autres.

Du Fumier de Monton, fa proprieté.

Left conftant que ce fumier-ci eft le meilleur de tous pour engraiffer les terres de quelque nature qu'elles puiffent être, cet amandement a des fels en très-grande abondance & des principes qui quoique bien volatiles, fe fixent aisément & en quantité dans la tiffure des femences qu'on commet à la terre où ce fumier eft répandu: la terre forte, la legere, celle qui est sabloneufe & toutes les autres generalement s'en accommodent très-bien.

Quand on le met dans la terre forte il en détache les parties qui en font le corps, de manierè que de compacte bien fouvent que cette terre eft, elle fe rend aisée à manier & devient ce qu'on appelle terre meuble, c'est-à-dire, comme en pouffiere, outre qu'il en corrige les défauts qu'elle peut avoir contractée, foit pour s'être épuisée à donner fes productions, foit par quelque accident qui lui eft arrivé.

La terre legere trouve dans ce fumier un fuc dont les fels fixent dans leur mouvement ce qu'elle a de plus volatile, en telle forte que ce qui devroit en elle, s'échapper des principes propres à la vegetation, fe porte avec fuccés à la tiffure des femences, les fair germer & prendre après à la plante tout l'accroiffement qui lui eft neceffaire.

Le fumier de Mouton eft encore trés-bon pour les terres fabloneuses, il y opere le même effet que dans les terres legeres, parce que l'une & l'autre font prefque d'une même conftitution. Si on l'employe dans une terre humide, il y met en mouvement les fels, qui pour être trop embaraffez dans les parties aqueufes dont la terre eft empreinte, n'agiffent fouvent que très-imparfaitement; enfin ce fumier a des proprietez merveilleufes pour tous les vegetaux.

Q

Du Fumier de Vache, fes proprietez & autres.

Uant au fumier de Vache il tient le fecond rang dans l'Agriculture, parce que les fels y font moins feconds & n'y agiffent pas tant que dans le fumier de Mouton, ils s'y trouvent plus embaraffez par les parties groffieres de l'humidité que contient celui de Vache, d'autant que celles-ci quelquefois qui y dominent, en émouffent tellement ces fels, qu'il s'y en diffipe beaucoup fans rien produire d'avantageux ; ce n'est pas

malgré cela, qu'on ne puiffe charricr ce fumier dans toutes fortes de terres, s'il n'y profite pas tant que celui du Mouton, il ne laiffe pas que d'y donner de très belles productions.

il

Si l'on veut fe fervir de fumier de Cheval pour engraiffer les terres, ne faut pas l'employer récemment forti de l'écurie, les parties fubtiles qui en émanent alors, y fermentent trop fortement, ce qui feroit capable de détruire le bon effet que les fels des terres où on les répandroit ainfi, pourroient produire; il faut laiffer paffer, cette éferveffence, & le mettre pour cela dans la Baffe-cour à l'endroit où l'on a coûtume de mettre les fumiers; puis quand il eft comme putréfié, on le mene dans les terres qu'on lui a destinées

Les terres fortes & humides lui conviennent très-bien, il y facilite le mouvement aux principes qui font comme enveloppez dans une maffe par les parties groffieres de l'eau qui les y tiennent, & il 'les dégage de maniere que les vegetaux en reçoivent fuffifamment pour prendre une belle croiffance; le fumier de Cheval n'eft point propre pour les autres terres. Les fumiers de Mulet & d'Ane ont à peu près les mêmes proprietez que celui de Cheval, c'eft pourquoi il faut les employer aux terres de la même

maniere.

Fumier de cheval, fes proprietez

Famier de

Mulet & d'Ane, leurs proprietez.

cochon,

tez.

Fiente de

Pour le fumier de Cochon, l'experience nous a fait voir jufqu'ici qu'il Fumier de ne contenoit aucuns bons principes pour ameliorer les terres, c'eft pour- fes proprie quoi on ne s'en fert gueres, s'il n'eft mêlé avec d'autres, qui aide à faire mouvoir fes parties pour agir efficacement. La fiente de Pigeon eft de tous les engrais celui qui eft le plus rempli de parties volatiles, & elles y font toûjours dans un mouvement fi rapide, que fi l'on ne fçait les y moderer, quand on employe ce fumier dans les terres, il y altere la femence qu'on y jette, de telle forte, que bien fouvent il en détruit les premiers principes.

Il faut donc, avant que de s'en fervir, le laiffer de repos à l'air, c'est le remede pour rendre ce fumier propre à quelque chofe dans l'Agriculture; on le regarde comme un amandement très-propre à ameliorer les prez qui s'amaigriffent à force d'avoir porté de l'herbe ; on l'employe trèsutilement dans les Chénevieres, mais il faut les répandre à claires voyes, & prendre garde encore que la terre ne foit point trop legere : il ne convient pas aux terres labourables, ainfi on n'en fera point amas en cette vûë.

ainfi

Pigeon, fes proprieiez.

proprietez.

On dira peu de chofe du fumier de Poule, parce qu'il eft ordinairement Fumier de en fi petite quantité qu'on ne peut l'employer feul; cependant, fi l'on veut roule, fes entrer en connoiffance de ce qu'il peut operer au fujet des terres, on a remarqué jufqu'ici que la volatilité de fes parties pourroit alterer en quelque façon les vegetaux, fi on n'en laiffoit paffer les premiers mouvemens, on n'employe ce fumier qu'après l'avoir laiffé repofer à l'air : on en peut mettre, fi l'on veut, dans les Chénevieres, mais il eft quelquefois fi fujet à produire des pucerons quand on l'employe tout pur, que pour éviter cet inconvenient, on le mêle avec d'autres. On rejette comme mauvais fumiers toute fiente d'animaux aquatiques quatiques que le fels dont ils font remplis ne puiffent agir, à caufe des parties dangerense.

foit

Fiente d'a

nimaux a

De la haux.

aqueufes qui les enveloppent, ou que ces fels dans leur action n'ayent au cu.. rapport à la tiffure des plantes qui croiffent dans la terre où ces fumiers font employez, ainfi de quelque côté que vienne ce défaut, il est toujours affez grand pour faire méprifer ces excremens.

Outre les fumiers des animaux de la Baffe-cour, il y en a encore d'autres qui font tres-fpecifiques pour faire croitre les plantes; car par exemple, la chaux vive mélée avec d'autres fumiers, bien pourris, & répandue dans les terres froides & humides au commencement de l'hyver fait très-bien végetter les femences qu'on leur confie, & l'on tient qu'elle y détruit même les infectes qui s'y font engendrez & les malignes herbes qui leur nuisent: cette maxime fe pratique fur tout dans la Gueldre au païs de Juliers: on peut ailleurs l'experimenter, particulierement dans les terres d'un tempeFéves, bon ramment froid & humide.

amande

Les Féves engraiffent la terre où on les a femées, fi on y laisse les coffats meat pour mélez lorfqu'on laboure; il y en a qui lorfque les féves font en fleur, n'atles terres. tendent pas qu'ils en ayent cueillis le fruit pour les renverser avec la charrue, ils prétendent que c'eft un très-bon amandement & beaucoup meilleur que quand il n'y a que les coffes : l'experience peut décider du fait, & ils ajoûtent même que c'eft un avantage trés-grand, & qui dédommage avec ufure non feulement de la dépenfe qu'on a faite pour l'achat des féves, mais encore du temps & de la peine qu'on s'eft donnée à les femer, c'est environ la fin d'Avril que ce labour fe doit donner.

table aux

teries.

Lupins enOn eftime encore les Lupins pour bien ameliorer une terre, on s'en grais proffert beaucoup en Piedmont & ailleurs, on feme ces legumes fur la fin du mois de Juin ou au commencement de Juillet fur les vieux guérets qu'on destine pour femer les bleds d'automne, ce qui fe fait à la deuxième façon, puis on laiffe croître ces lupins, & quand ils ont feulement pouffés leurs feuilles fans attendre la fleur & le fruit, on les renverfe pêle-mêle avec la terre, faifant en forte, autant qu'il eft poffible, que la terre les couvre; cette plante a, dit-on, un certain acide qui abforbe les mauvais prin cipes des terres où on la feme, & qui en détruit les infectes qui lui font préjudiciables.

De la Marac.

Nous avons encore la Marne qui renferme en foi des proprietez merveil leufes pour aider aux vegetaux à prendre un accroiffement parfait. Cette Marne eft une terre foflile, graffe & molle, il y en a de blanche, c'est la meilleure de toutes, de rouge, de colombine,& d'autre, qui tient d'argile, du tuf & du fable ces dernieres efpeces ne font point eftimées.

Il y a beaucoup de Marnieres en France, il n'eft queftion que de fçavoir connoître cette terre & la mettre en ufage. On commence d'abord par la tirer de laMarniere pour la mettre après fur le champ en monceaux pour l'y laiffer repofer un peu de temps,afin qu'elle fe puiffe mieux réduire en pouf fiere;car fi-tôt qu'on la tire de fon trou,clle durcit & ne fçauroit facilement fe répandre, il faut pour bien faire la tirer avant l'hyver.

Ce temps paffé, & avant que de donner le fecond labour aux terres, on y charrie cette Marne, on l'y met en petits monceaux ou fumeraux, éloignés l'un de l'autre felon qu'on juge à propos que la terre a befoin de cet engrais, mais toûjours on remarquera de ne le point répandre bien dru, parce

que laMarne eft remplie de beaucoup de fels convenables à la vegetation,& d'ailleurs fi volatiles qu'ils détruifentles principes des plantes, quand ils font trop abondans, c'eft pourquoi on en laiffe exhaler une bonne partie.

Après avoir mis cet amandement en petits monceaux, on le répand pour fincorporer enfuite avec la terre qu'on laboure. C'eft une chofe étonnante de voir combien cette Marne rend un champ fertile, & cette fertilité fe manifefte tellement dès la premiere année, que les bleds, comme on dit, en verfent, tant leurs épis font chargez de grains : la Marne convient à toutes fortès de terres.

Une terre bien marnée, c'est-à-dire, avec prudence ; car le trop de mar ne nuit à la terre, rend un grand profit pendant dix-huit à vingt ans, fans qu'il foit befoin d'y charrier aucun autre fumier. 11 feroit à fouhaiter qu'il y eût par tout des Marnieres, ou du moins dans les lieux où les terres ont bien befoin d'être fumées pour produire beaucoup de grain. L'Agriculture n'en fleuriroit que mieux, & le Laboureur n'en feroit que plus content, mais quand les fels de cette Marne font tous épuisez, il faut recommencer à marner les terres, autrement elles n'apportent que très-peu de choses.

Des cen

Les cendres, il n'importe, d'où elles viennent, foit du foyer ou de la leffive, des fourneaux à tuile, à chaux, ou à charbon, font un très-bon dres. engrais pour rendre les terres fecondes, & les parties volatiles qu'elles contiennent ont des rapports de convenance merveilleux à la fabrique des plantes qui croiffent dans la terre où on répand ces cendres; c'eft pourquoi on voit germer ces plantes, & prendre un accroiffement qui fait plaifir : les terres fortes & les terres humides font celles qui s'en accomodent le mieux.

vez &

Les immondices des Privez & les bouës des rues, lorfqu'on les a laiffé Immondirepofer affez pour fe décharger de tout ce qu'elles on d'humidité, engraif- ces des rrifent les terres. On en voit l'experience aux environs de Paris, où les terres Boues des affez maigres par elles-mêmes, deviennent trés-fécondes par le fecours de ces amandemens.

rues.

Feuilles

Les feuilles de toutes fortes d'herbages & de fruits de jardin qu'on jette', comme celles de melons, concombres & d'autres de cette nature; tout cela d'arbres à mis en monceaux & réduit en pouffiere avec le temps, concourt beaucoup dins, fuits de jarà la formation du bled, & le fait multiplier à foifon.

On fe fert encore de Marc de raifin pour ameliorer les terres, mais il Marc de faut que ce foit des terres graffes, ou humides, les principes trop exaltez raifin. de cet amandement veulent trouver d'autres parties moins volatiles qu'eux pour les fixer, fans cela, fe portant trop brufquement à la tiffure des plantes, ils en dérangent la fabrique, les froiffent & n'y produisent par ce moyen qu'un effet très médiocre.

Enfin les fumiers, comme on vient de dire, doivent être appliquez à propos, fi l'on veut qu'ils rendent tout le fruit qu'on en attend. Telle eft l'idée phyfique qu'on a dû en concevoir; en effet, on peut dire qu'il faut pour que les bleds croiffent & pullulent beaucoup dans les terres, que leurs parties foient d'une tiffure propre à faire recevoir aux fucs qui s'exaltent des fumiers les mêmes déterminations que la matiere a reçuë quand le

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