Imágenes de páginas
PDF
EPUB

mille chofes qu'on eft obligé d'acheter bien cher dans les Villes.

Il faut auffi avoir fa provifion de Foin,d'Avoine,& de Paille pour les CheFoin, Avoi- vaux, & d'autres fourages pour les beftiaux. On ne fe laiffera point au déne, Pailles, pourvû de Bois, tant pour chauffer le four, que pour le feu de la Cuisine Fourages, & la Chambre du Maître,

Bois.

de fuif.

Nous traiterons dans la fuite de cet Ouvrage de la maniere de faire les Beures, Fromages, Confitures de toutes fortes & Liqueurs de plufieurs façons, n'étant proprement ici qu'un memoire des provifions généralement qu'il convient avoir à la Campagne, pour n'être point obligé d'aller chercher chez fes voifins ce qu'on peut avoir chez foy.

Il faut encore avoir pour la provifion de la Cuifine des Pois, des Haricots fecs & verts felon les faifons, des Féves pour le Carême, du Miller, du Ris, du Panis, de l'Orge mondé, du Gruau felon la commodité des lieux qu'on habitera, des Artichaux & des Champignons fecs, des Concombres, & du Pourpié confits au vinaigre, tout cela s'amaffe à peu de frais dans une maison de campagne. Il ne faut qu'un certain foin, une certaine attention pour l'ordonner, c'est l'ouvrage d'une ménagere avec fes Servantes, & rien plus.

Il y a diverfes matieres qui fervent à nous éclairer pendant la nuit ; telChandelles les font les Chandelles de fuif & les Lampes. Il faut donc en avoir fa provision, & ne point manquer d'huile pendant toute l'année: on fe munira beaucoup de linge, car on n'en fçaura trop avoir pour la table, les lits & autres ufages aufquels on l'employe.

Lingei

Meubles.

Un des principaux foins que doit avoir une femme ménagere, eft de s'ap pliquer à faire faire beaucoup de toile, elle n'en fçauroit trop avoir dans fon ménage, & pour commencer par la fource elle aura des morceaux de bonnes terres où elle ordonnera qu'on feme du Chanvre ou du Lin,puis lors qu'ils feront venus & cueillis, elle foignera au reste à tout ce qui peut contribuer à rendre leur dépouille en état de lui être utile.

Outre les Fileufes de la maison, elle en aura encore dehors aufquelles elle diftribuera fon Chanvre & fon Lin par poids, & dont elle tiendra un Regiftre, afin qu'on lui rende auffi pefant de fil. Ces Fileufes étrangeres fe payent fouvent en danrées qui fortent du logis. Il eft vray que les danrées font de l'argent, mais il n'importe, c'eft toûjours autant de vendu, & une commodité trés-grande.

Excepté les linges courans, dont la Maîtreffe chargera une principale Servante pour lui en rendre compte, tout le refte fera mis fous clef ; il ne faut point les laiffer déperir, quand on voit qu'ils font percez, ou découfus, une petite reparation alors les met en état de rendre encore de bons fervices, au lieu que fi on les délaiffoit ils tomberoient en ruine en peu de temps.

Pour tenir une maifon bien fournie de linge, il faut tous les ans avoir foin de lui en donner de nouveaux, tout s'ufe à force de fervir, & où il y a grand train il faut beaucoup de linge,

Les autres meubles de la maison regardent encore le foin d'une mere de famille; c'est à elle à voir s'ils font en bon ordre, & de foigner autant qu'elle pourra que ce foit fon industrie qui les lui donne la plûpart, comme

par

par exemple, d'avoir des Lits, des Couffins & des Oreillers par le moyen des plumes d'Oyes ou de Canes qu'elle aura amaffées, ou d'autres volailles pour des lits des domeftiques; des tours de lits, à l'aide des laines dont elle aura eu foin de faire faire de la farge, ces mêmes laines la fourniront encore de matelats.

Si elle veut pouffer fa petite ambition plus loin & qu'elle ait des filles qu'elle veuille occuper, elle les employera à la tapifferie, ce travail eft honnête, divertiffant & digne de l'occupation d'une fille de famille, puifque nous voyons même celles du premier rang qui en font leurs amufemens.

La Cuifine doit être fournie d'une baterie qui convienne à l'emploi plus ou moins confiderable qu'on y en veut faire. Ces meubles tombent bientôt en ruine fi l'on n'y veille de près, foit parce que les Domestiques les laiffent déperir tout-à-fait, faute d'avertir qu'il les faut racommoder quand il en eft befoin, foit parce qu'ils les manient trop rudement, & les Laiffent tomber étourdiment: c'eft pourquoi il eft bon de quelque matiere qu'ils foient, de les donner par compte à une Servante, & de l'obliger à vous en répondre ; fon interêt pour lors la rendra vigilante, & vôtre baterie en durera plus long-temps.

Dans les pays où il y a des laines, on trouve ordinairement beaucoup Laine d'ouvriers qui les travaillent, les uns les employent à des farges & des draps, les autres à de la tiretaine & de la bure ou bureau:ces étoffes conviennent à habiller les Domeftiques, & nous voyons beaucoup de bonnes ménageres en faire fabriquer de leurs laines pour vêtir les leurs; elles les leur donnent fur leur gages, c'eft autant de payé : ces Valets ou Servantes qui ne l'achettent point fi cher que chez les Marchands, font bien aifes de ne point perdre une pareille occafion, ainfi que le Maître qui y trouve auffi fon avantage, tellement que les uns & les autres font contens, & c'est un ménage de part & d'autre; car la plûpart de ces laines font filées à la maifon & à des heures qui ne détournent en rien les travaux les plus importans de l'Agriculture. Les laines font encore d'un grand fecours pour faire tricoter des bas pour fon ufage.

S l'on eft dans les lieux où la foye foit commune par le moyen des vers Soyer qui la donnent, on aura foin d'en nourrir, & de ce qui en proviendra de foye, on en fera filer autant qu'on le jugera à propos, foit pour la vendre ou l'employer chez foi à la tapifferie ou autre chofe ; cet emploi à la verité ne convient gueres qu'à des filles de famille qui ne peuvent paffer leur temps à d'autres ouvrages à la campagne.

Toutes ces maximes établies für la veritable oeconomie femblent être détaillées affez au long pour qu'un bon ménager de campagne y trouve fuffifamment de quoi remplir fa curiofité : la ménagere y apprend ce qui eft de fon reffort, & tous les deux font inftruits de ce qu'il faut qu'ils fiffent également s'ils veulent que leur maison fe foutienne, & jouir dụ plaifir d'y voir regner l'abondance,

N

Proprietez du Pain. Lemery, trait. des

xlv.

CHAPITRE XV.

Qu'il ne fuffit pas d'ufer des alimens dont on a fait provision, qu'il eft à propos encore d'en fçavoir les proprietez, afin de s'en

nourrir avec avantage pour la fanté.

L n'y a perfonne qui ne fente à chaque inftant le befoin indifpenfable qu'il a d'alimens pour reparer la perte qui fe fait des parties solides & fluides du corps & conferver fa vie & fa fanté. Quand il y a long-temps qu'on n'a pris d'aliment on fe fent attenué; & certains picotemens qui incommodent l'eftomac, ce qui ce qui provient de la maffe du fang qui devient plus âcre qu'elle n'étoit auparavant, ce qui fait pour lors que la nature nous invite à chercher des fecours, pour reparer les principes de ce fang qui font épuifez à la réparation des parties folides.

le

Nous avons donc befoin d'alimens tous les jours pour nourrir & réta blir ces parties, & les entretenir dans un-même état ; & quoique le pain foit l'aliment le plus fimple qu'on prenne, c'eft néanmoins celui dont corps fe trouve le mieux, & qui lui eft le plus convenable. Il en eft d'autres qui font plus ou moins nouriffans fuivant qu'ils abondent davantage en parties huileuses, balfamiques, & propres à s'attacher aux parties folides, & fuivant qu'il a plus de rapport par la tiffure de fes parties avec celles de nôtre corps.

C'est donc une neceffité d'alimens qui doit nous obliger d'ufer de précautions, faisant enforte d'en avoir fa provifion pour toute l'année à la campagne. C'est un trait de prudence auquel un bon ménager ne doit pas manquer; mais comme il ne fuffit pas de fe fervir indifferemment des alimens qu'on prend fans fçavoir à quoi ils font propres pour la fanté, & que cette connoiffance ne peut que faire plaifir; voici quelques propriétez d'une partie de ceux dont on a parlé dans le Chapitre précedent: nous refervons à traiter de la vertu des autres à mesure qu'ils tomberont fous nâtre plume, & felon que nous le jugerons à propos. Voyons à quoi le pain peut être propre pour nos corps.

On mange de plufieurs fortes de pains. Le Pain de froment eft très-nourriffant, & fort agréable au goût; mais felon quelques Medecins, moins on laiffe de fon avec la farine, plus il eft de difficile digeftion & plus peAlim, ch. fant fur l'eftomac,'parce, difent-ils, que les parties fubtiles de la farine s'uniffent fi étroitement les unes aux autres, qu'elles ne fouffrent entre elles prefque aucuns pores, ce qui rend le pain compacte, au lieu que lorfqu'il y a un peu de fon mêlé dans le pain, ce fon par ces parties grof fieres empêche l'union trop étroite des parties de la farine, rend le pain plus poreux, & par confequent plus aifé à digerer, parce que le fon produit de très-bons effets.

Omnis repletio ma

la, panis ve

Le Pain trop tendre gonfle l'eftomac, il vaut mieux attendre qu'il foi raffis, il produit de mauvais effets quand on en ufe avec excès, ou qu'on

fui donne une façon qui ne lui convient pas, comme lorfqu'il eft trop rò peffimas cuit ou qu'il ne l'eft pas affez. Нуроста

Le Pain de Méteil ne nourrit point tant que celui de froment, il eft plus laxatif à la verité, & le Pain de Segle encore davantage; on prétend même qu'il rafraîchit, mais il eft le moins nourriffant.

L'Orge eft auffi employé, comme nous avons dit, pour faire du pain; mais le Pain d'Orge a un goût qui ne plaît point à tout le monde, il pefe fur l'eftomac quand il eft mal fait, & il caufe des vents & des aigreurs terribles; quelques-uns prétendent qu'il eft rafraîchifsant, mais pour cela il faut qu'il foit mêlé avec d'autre farine.

On fait à la verité rarement du Pain d'Avoine, il n'y a que quelques Peuples Septentrionaux, chez qui les autres efpeces de froment ne croiffent point, qui ufent du pain d'Avoine; on s'en fert encore dans la cherté du bled: ce Pain, dit-on, eft affez nourissant.

Le Pain de bled noir ou Sarrazin, fe digere aifément & nourrit peu; le Pain de bled de Turquie eft de difficile digeftion, & pefe beaucoup fur l'eftomac, c'eft pourquoi il ne convient gueres qu'aux perfonnes fort robuftes; cependant nous voyons dans les pays où ce grain eft commun, que chacun en mange indifferemment & s'en accommode fort bien.

On fait encore du Pain de Millet, de Ris, de Panis, de Bled- Barbu, d'Efpeautre & d'Efcourgeon, autrement dit Orgeprime ou Orge quarré: mais ces Pains font difficiles à digerer, & ils ne nouriffent pas à beaucoup près tant que les précedens.

tas.

Quelques-uns des Grains dont nous venons de parler ne s'employent pas Orge monfeulement pour faire du Pain, il y a encore l'Orge Mondé, il fe prend en dé, fes ver décoction dans de l'eau, ou dans du lait pour produire de bons effets, on doit le choifir nouveau, bien nourri, blanc & fec; cet aliment humecte & adoucit la poitrine; il eft foporatif, rafraîchissant, & rétablit les parties du corps alterées par un trop de confomption.

Le Gruan n'eft autre chofe que l' Avoine bien mondée de fa peau & de Gruau, fes fes extremitez & reduite en farine groffiere par le moyen d'un moulin fait vertus. exprès ; il fe prend en décoction comme l'orge mondée, & contient les mêmes vertus. Le Gruau néanmoins eft plus nourriffant,il pefe quelquefois un peu fur l'eftomac quand on l'a trop foible, & excite des vents; on s'en fert en tout temps, à tout âge & à toute forte de temperamment, & il eft propre fur tout à ceux dont les humeurs font trop fubtiles, trop acres & trop agitées.

verius.

On fait avec la farine de froment de la Bouillie ordinaire qui humecte Boullie or & nourrit beaucoup, & de celle de bled de Turquie, des Gandes, qui eft dinaire, fes auffi une espece de Bouillie, dont les Peuples de la Comté de Bourgogne, ceux qui leur font limitrophes & les Breffans ufent beaucoup en nourritu re; ce dernier aliment, ainfi que le pain, eft pefant, & n'est bon que pour ceux qui y font accoûtumez.

Le Milletfait une bouillie qui eft affez agréable au goût: cet aliment a- Millet, fes doucit les âcretez de la poitrine, il refferre un peu le ventre & arrête les vertus humeurs trop agitées. Il caufe des flatuofitez, il pese fur l'ettomac & eft

de difficile digeftion; cependant comme ce n'est pas une nourriture ordi

Ris, vertus.

fes

naire on en mange en bien des endroits en guife de Ris.

Pour le Ris on fçait affez l'ufage ordinaire qu'on en fait dans les familles; il adoucit les humeurs âcres, il reftaure les parties alterées & les nourrit beaucoup, il excite des vents, arrête le crachement de fang, & fon ufage trop frequent peut caufer des obftructions par fon fuc lent & groffier, qui fejournant trop long-temps dans les petits conduits de l'eftomac, empêche les liqueurs d'y circuler.

Panis, fes Le Panis fe mange encore en bouillie, il a les mêmes proprietez que. le Millet.

vertus.

Harang,

[ocr errors]

Le Harang falé dont on fait provifion, doit être choifi, bien nourri & fes proprie bien blanc, c'eft un aliment dont les effets ne font pas trop bons; il échauffe beaucoup, il altere & caufe des aigreurs par les rapports défagréables & frequens qu'il excite. Le Harang foré a des proprietez encore plus mauvaises étant d'une digestion très-difficile. Cependant c'eft un mets qu'on fert beaucoup à la campagne, où il y a beaucoup de domeftiques, dont l'estomac de la plûpart a affez de chaleur pour cuire cet aliment.

Morue, fes

Il y en a auffi qui font provifion de Morne falée: cet aliment eft fujet à proprietez. échauffer beaucoup quand il n'eft pas affez deffalé, il eft un peu indigefte, foit qu'alors fes parties interieures ayent été dérangées par une petite fermentation qu'elles ont fouffertes, ou que le fel marin ait en quelque façon fixé fes principes les plus volatiles, & ait en même temps rendu la chair plus compacte.

Huile de

vertus.

Si l'on veut fe fervir d'Huile de Noix ailleurs que dans les lampes, & Noix, fes qu'on la veuille employer en ce qui concerne le corps humain, efle a la vertu de réfoudre, digerer, de fortifier les nerfs, de chaffer les vents & d'adoucir les tranchées des femmes nouvellement accouchées. Quant à l'Huile d'Olive elle adoucit l'âcreté des humeurs, elle eft refolutive & déterfive, elle lâche le ventre & eft propre pour la colique & la diffenterie; on l'employe encore à beaucoup d'autres ufages dont nous ne parlerons point ici, parce que cette matiere nous porteroit trop

Huile d'Olive, fes

Vertus.

Pois, leurs

loin.

Les Pois qu'on mange en purée excitent des vents, & font dangereux proprietez. pour ceux qui font attaquez de la gravelle; les bons effets qu'ils produifent confiftent à adoucir les âcretez de la poitrine, appaifer la toux, & à fervic d'une bonne nourriture. Le premier bouillon qu'on en tire est émolient & laxatif.

Pois chi

Les Pois chiches ne s'employent gueres pour alimens, & l'on tient qu'en ches, leurs Medecine ils provoquent l'urine & les mois aux femmes, & adouciffent les âcretez de la poitrine.

vertus.

Féves fe

Les Féves feches qu'on garde ordinairement pour la provifion du Carê ches, leurs me font flatueufes & dangereufes à caufer la colique, à caufe de leur fubf proprietez. tance un peu vifqueufe, qui en fermentant fe rarefie dans les intestins, Cet aliment eft pefant fur l'eftomac, & difficile à digerer.

Haricots,

Où il y a beaucoup de train, on doit faire bonne provifion d'Haricots, leurs pro- ou Féverolles, comme on voudra les appeller. La bonncproprieté des HaPrietez. ricots eft de nourrir beaucoup; ils font diuretiques, réfolutifs & émolliens, & les mauvais effets qu'ils produifent, confiftent à exciter des vents & des envies de vomir; ils font outre cela de très-difficile digestion,

« AnteriorContinuar »