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pierre de touche noire; le corps en gaîne eft fait de » marbre verd antique, rayé de blanc. Ces trois piéces » réunies forment une figure de cinq pieds cinq pouces. » Elle eft fort entiére, & d'une beauté achevée. Un Mabaucher,c'eft-à-dire, un de ces Cophtes, qui depuis la conquête d'Egypte par les Arabes fe font mis au » fervice des Grands du pays, auxquels ils fervent d'écrivains, me la vendit affez chérement, & avec beaucoup de peine. Pour l'obtenir, je fus même obligé de lui promettre que je n'en parlerois jamais à perfonne. Ce Mabaucher me jura fur l'Evangile, que cette figure avoit été trouvée dans une pyramide il y avoit fept ou huit » cents ans ; elle avoit, difoit-il, été fauvée du brisement auquel le Roi, qui avoit fait faire l'ouverture de la

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mide, l'avoit condamnée, par un de fes ancêtres qui » en donna cent sequins, en affûrant que c'étoit la représentation de la Sainte Vierge. C'eft certainement une des plus belles antiquités qui jamais foit fortie d'Egypte. Pour moi je fuis perfuadé que cette figure eft la repréfentation de quelque Dame de haute confidération peut-être même d'une Reine; & j'ose dire que par fingularité, elle mériteroit d'avoir place dans le cabinet d'un grand Prince.

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Le récit que ce Cophte avoit fait au Conful François, eft revêtu de circonftances fi ridicules, que je fuis prefque honteux de l'avoir rapporté ; & je m'étonne qu'un homme auffi éclairé que M. Maillet en ait conclu que les Egyptiens plaçoient dans leurs tombeaux & auprès des corps des perfonnes les plus diftinguées, des ftatues de marbre qui en donnoient la représentation. Aucune nation n'a portée plus loin le refpect pour les morts; mais dans les foins religieux que ces Peuples ont pris des corps, ils ne femblent s'être occupés qu'à leur procurer un repos & une tranquillité que rien ne pût troubler, & fi l'on veut encore, une durée prefqu'éternelle. Je doute qu'ils aient

jamais connu ni pratiqué l'ufage dont parle M. Maillet. On fait tous les jours de nouvelles découvertes de puits ou catacombes de momies; & fi ce que ce Voyageur fuppofe, étoit vrai, on devroit y trouver quelques ftatues femblables à celle-ci : ce qui n'eft cependant point encore arrivé, que je fçache. Je ne fuis pas du refte éloigné de croire que la tête de cette ftatue eft un portrait. Elle eft pofée fur une gaîne qui fe termine en Terme; & les Grecs qui certainement en avoient emprunté l'ufage des Egyptiens ne représentérent pas autrement leurs hommes illuftres, lorfqu'ils commencérent à faire leurs portraits en marbre. L'un ne fait-il pas la preuve de l'autre ? Quoique tout ne foit que par maffe dans cette tête, & n'offre que des formes générales ; qu'elle foit dépourvûe de ces details que demande un portrait pour être reffemblant; on ne laiffe pas d'y appercevoir une phyfionomie, un caractère particulier, que l'imitation feule de la nature & une imitation réfléchie a pû donner; & fi les traits ne font pas auffi recherchés qu'ils devroient l'être, c'eft uniquement parce que l'art n'en avoit pas encore enfeigné davantage aux Egyptiens. Ce qui pourra paroître plus furprenant c'eft de n'y pas voir gravés quelques hieroglyphes, fans lefquels ces Peuples n'expofoient guère leurs monumens fur-tout ceux qui devoient confacrer à la poftérité la mémoire des événemens, ou des perfonnes qui s'étoient diftinguées parmi eux.

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Ce que M. Maillet dit fur les proportions de la ftatue eft exact il a auffi connu l'efpéce de la pierre dont la tête & les pieds font formés, & l'a nommée avec raison pierre de touche, que quelques Auteurs modernes confondent affez ordinairement avec la pierre nommée bafalte, espéce de marbre qui a la dureté & la couleur du fer. Les Egyptiens qui lui avoient donné le nom de ce métal, le tiroient d'Ethiopie, & en faifoient yenir des blocs d'une grandeur confidérable, La pierre de Tome I.

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& 22.

Bert.

803.

d Salm. Exercit. Plinia. p. 304.

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Lib. 36. c. 20. touche à laquelle Pline donne le nom de Bafanites lapis a, eft d'un noir complet, & n'a pas le même grain que le bafalte. On en trouvoit dans cette partie de l'Egypte, Ptolem. Geogr. qui eft entre le Nil & la Mer Rouge b, & à laquelle on 1.4. p. 121. Edit. a donné quelquefois le nom d'Arabie c. Je fuis ici le texte Strab. 1. 17. p. de Ptolémée, fans adopter la correction que Saumaise d a propofé. Ce fçavant homme, qui ne connoiffoit peutêtre pas la diftinction que nous venons d'établir, & qui Lib. 36. Cap. 7. avoit vû le mot bafaltes dans Pline ", crut qu'au lieu de Baravirov aibou qui eft dans l'endroit cité de Ptolémée, il falloit mettre βασαλίτου λίτου : ce changement n'eft que d'une lettre ; & la correction feroit heureuse, fi elle étoit bien fondée. Mais j'avoue que je n'en conçois ni les raisons, ni la néceffité : car 1°, il eft très-douteux que pour exprimer en Grec le mot bafaltes, on ait dit au génitif βασαλί του λίτου, plutôt que βασάλτου. 29, Il eft évident que le marbre dont parle Ptolémée est le même que celui que Pline appelle bafanites lapis, pierre d'épreuve ou de touche. Je ne doute point que l'on ne foit bien aise de trouver ici ce petit éclairciffement, qu'on m'a donné. J'en avois befoin pour moi-même, fur une chofe que j'ai prefque toujours entendu confondre aux Antiquaires, dont les idées feront dans la fuite plus fixes, & le jugement plus afsuré.

Ce marbre ou cette pierre de touche eft d'une grande dureté, & fufceptible d'un poliment parfait. Quand je n'en aurois pas d'autre preuve, le monument que je produis ici fuffiroit pour nous en convaincre. L'ouvrage eft d'une maniére large & grande; les idées de la chair fe font sentir dans la tête & dans les pieds de la ftatue; ce qui mérite beaucoup de confidération du côté de l'art, & fait oublier qu'il y manque quelque chofe du côté de la fineffe du deffein & de l'expreffion de la nature. On doit admirer encore les proportions de la gaîne. Quoiqu'elle foit d'un autre marbre, elle est très-bien d'accord avec le refte;

& les veines blanches dont parle M. Maillet, font fi petites & fi rares, qu'on les diftingue à peine.

N°. II.

CET amulette percé au-deffus de la tête, fans doute pour être porté fur la perfonne, n'a que onze lignes de hauteur. Il eft de pierre de touche ; & fon travail, qui a quelque chofe de grand, eft néanmoins fi fimple, & même fi groffier dans le détail, que je crois ce morceau d'une très-haute antiquité, ou d'un fiécle très-bas; car le propre du mauvais travail & du mauvais goût, eft de faire confondre les temps. La fingularité de ce morceau eft la feule chofe qui m'ait engagé à le rapporter.

No. III.

Ce petit Lion, exécuté en relief fur une magnifique cornaline, eft au contraire d'un très-beau travail, & d'un temps où l'on étoit très-éclairé dans ce qui concerne les Arts. Je ne fçais quelle forme il a eu autrefois, car il a été coupé, mais de façon à laiffer voir une partie du trou qui le traversoit dans toute fa longueur : il eft à préfumer qu'il étoit fait pour être également pendu au cou. Il n'a que neuf lignes de longueur; mais indépendamment du mérite de fon travail, on peut le regarder comme une espéce de bijou, à cause de fon peu d'étendue, & de la beauté de la pierre.

PLANCHE II.

No. I.

CET Ofiris de bronze, dont le travail eft affez groffier a fept pouces de haut. Il n'a rien de remarquable, quand on le confidère en face , que la draperie qui le couvre entiérement, & qui tombant jufqu'à terre, enveloppe jufqu'à fes pieds; mais en regardant cette figure fous fon

autre afpect, elle devient un morceau des plus curieux & des plus rares. On voit au dos de la même figure, une Ifis représentée en bas-relief, & dont la tête eft de profil: elle n'a que quatre pouces de haut jufqu'à l'extrémité des cornes, dont le difque qu'elle a fur la tête est environné. La draperie qui la couvre eft tellement adhérente au corps, & en deffine fi bien les mouvemens, qu'on croiroit prefque que la figure eft nûe: elle paroît avoir un peu plus. de mouvement dans fa compofition, que les figures Egyptiennes n'en ont ordinairement. On rejetteroit cette fingularité fur la fantaisie de l'Artifte, s'il y avoit apparence que dans un pays plein de fuperftitions, & où les Prêtres dominoient, il eût été permis à un Sculpteur de prendre de femblables licences, feulement pour contenter fon caprice. Quoi qu'il en foit, ce monument nous prouve inconteftablement que la figure principale, & dont j'ai parlé d'abord, eft un Ofiris. Ce qui léve toute difficulté, & condamne plufieurs Auteurs célébres, qui ont été perfuadés que l'on pouvoit prendre ces fortes de figures pour des Prêtres.

No. II.

JE rapporte de la même grandeur que l'original le 'deffus, le deffous & le profil de cet amulette, pour en donner une idée plus complette, & faire mieux fentir le goût des Egyptiens. Il eft percé dans fa longueur, & tant le deffus que le deffous font gravés en creux fur une efpéce de jade, couleur de bois, fans aucune veine ni mêlange d'autre couleur. Un fimple ornement, compofé de feuilles qui forment une double croix, en occupe la partie fupérieure qui eft convexe; & l'on remarque fur la feconde qui eft plate, & qui a pû fervir de cachet, un affemblage de figures, dont il feroit difficile de rendre. compte, à moins qu'on ne le regarde comme un trait de fuperftition, dicté par quelqu'un qui avoit dessein d'invoquer

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