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tune pour une Demoiselle fans bien; cela fait honneur à la Nobleffe Françoise. J'ai peur que la Marquife d'Epoiffe fa tante n'en meure de joye. J'ai vû votre ami l'Abbé de Broffes; je le trouve un fort honnête homme. Je l'entendrai prêcher lundi, & je battrai des mains qu'il faffe bien ou mal 9 car pour un ami que vous donnez, j'irai jufqu'à la préoccupation. Il trouva hier chez moi Madame de Pifieux un peu chagrine de tous les furvenans parce qu'elle avoit à me parler d'affaires; il fut bien étonné d'elle: c'est un mérite original qui ne reffemble à rien. Voilà l'Abbé de Sufe qui me vient prendre pour aller voir une de mes amies. L'Abbé eft celui de tous mes amis qui m'aime le mieux. Ne vous en déplaife, Monfieur ce feroit lui que je devrois le mieux aimer. La présence d'un ami de ce mérite-là, pourroit bien confoler de l'abfence des autres. Je croi que vous trouverez ma Lettre trop longue, & moi je trouve les vôtres trop courtes. Il me femble qu'à force de couper court les articles, on les rend un peu fecs, & que cela ôte d'une Lettre un certain caractere de tendreffe qui entretient l'amitié. Allongez donc vos articles, Monfieur, & je racourcirai les miens. Notre ami le Duc de Saint-Aignan eft fort occupé dans l'alarme générale que donne à tous nos ports de Mer l'armée navale des Hollandois.

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XIX. LETTRE.

Du Comte de Buffy à Mademoiselle d'Armantieres.

A Buffy, ce 10. Juin 1674.

Ar eu des Lettres de mes amies avant la vôtre, Mademoiselle, mais votre filence n'a pû me réduire à vous oublier. Pour mon Caur, il eft fort libertin, & fur tout en Provin-. ce; j'en étois plus content à Paris. J'ai reçû une Lettre de notre amie la Comteffe de Guiche que je vous garde pour m'aider à la lire. A voir fes Lettres, on mettroit fes mains au feu qu'elle n'a jamais eu de galanterie. L'Amour est un Maître d'école qui, entre autres chofes, aprend à bien écrire. J'ai déchiffré toutes les amitiez que la Comteffe me dit pour vous & pour la Ducheffe Coufine. Vous allez revoir la Cour. Le Roi eft maître de la Franche Comté, avec toute la gloire que donne la réfistance, car les ennemis fe font fort bien défendus.

Il n'y a que Dieu qui puiffe embellir une Carmelite. Ce n'est pas un moindre miracle de lui donner de la joye.

La flote des ennemis trouvera à qui parler', ce ne font plus les maîtres de la Mer.

Voyoz Lett. XIII.

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XX. LETTRE.

De l'Abbé de Broffe au Comte de
Buffy.

A Paris, ce 12. Juin 1674.

Left temps, Monfieur, de vous remercier de vos nouvelles bontez, qui font toûjours dignes d'un ami généreux au point que vous l'êtes. C'eft ainfi que j'appelle la connoiffance que vous m'avez donnée de deux perfonnes admirables en efprit & en bonté, & (ce que j'eftime autant en elles) en affection pour vos interêts. Mais, Monfieur, l'aimable femme que Madame de Scuderi, & qu'elle s'entend bien à faire honneur aux Prédicateurs qu'elle aime ! Je l'ai déja euë à un Sermon où elle a fait tou tes les mines qu'il faut faire pour avertir les gens des beaux endroits.

Je trouvai l'autre jour Madame de Pifieux chez Madame de Scuderi, & comme on parloit de Monfieur de *** qui avoit présenté une Requête au Pape, pour qu'il lui fût permis d'époufer une autre femme; on dit que le faint Siege avoit fait cette grace une fois à un Comte d'Allemagne, auquel fa femme ne pouvant fuffire, il fut permis pour le falut de fon ame, d'en prendre une feconde avec la fienne. Madame de Pifieux qui s'endormoit auparavant, s'éveil. la en cet endroit, & dit en foupirant qu'il ne fe trouvoit plus de maris faits comme celui-là.

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Du Comte de Buffy à Monfieur de Benferade.

IL

A Buffy, ce 13. Juin 1674.

'L me femble qu'il y a affez long-tems que nous fommes amis pour que nous ayons enfemble plus de commerce que nous n'en avons. Outre la vieille amitié, notre Confrairie nous y doit encore obliger. J'ai fu par la Gazette les applaudiffemens que vous avez eus à votre reception dans l'Académie. Cette nouvelle ne me furprit pas; je m'en doutois: mais je voudrois bien voir votre Harangue. Je vous fupplie de me l'envoyer. J'attens avec grande impatience de voir vos Rondeaux.

XXII.

LETTRE.

Du Comte de Buffy à Madame de
Scudery.

A Buffy, ce 10. Juin 1674.

L m'ennuye de ne vous point voir, Mada

*IL

me, mais pas tant que vous voudriez, plus que je ne faifois la premiére fois que je vous écrivis, & moins qu'il ne m'ennuyera quand vous viendrez ici au mois d'Août; tout cela va par degrez, & augmente à mesure que l'abfence eft longue. Je fuis bien-aife que Madame de Lon

*Voyoz. Lett. XVIII,

Longueville ait un peu d'amitié pour moi. Toute celle de Mademoiselle de Portes ne m'incommodera jamais, & je réfifterai à fes exhortations fans me plaindre d'elle, & fans l'en aimer moins.

La converfion de Madame de la Valiere me confirme de plus en plus que Dieu attire les gens à lui par toutes fortes de voyes. Il auroit eu de la peine (fi l'on ofe parler ainfi) de tirer cette pénitente des mains de fon amant, ou même s'il l'eût quittée pour ne rien aimer: mais la jaloufie à fait ce miracle.

Je faifois ces jours paffez réflexion fur le grand bruit qu'elle a fait contre fa vie paffée, & il me paroiffoit qu'elle n'en ufoit pas tant ainsi par humilité que par vengeance, & que fous fon nom elle prétendoit dire des injures à fa rivale.

Savez-vous bien, Madame, que je m'aide encore de la prodigieufe fortune du Grand Maréchal Sobieski, pour me confoler de l'injuftice de la mienne; car quand je ferois Maréchal de France, Duc & Pair; enfin tout ce que je devrois être, auffi-bien que les autres, je regarderois toujours Sobieski à cent piques au deffus de moi. Vous voyez bien, Madame, que je mets toutes mes pierres en œuvre pour ne pas avoir du chagrin, n'ai-je pas raison?

Je voi bien que Mademoiselle de Portes m'avoit amusée de l'efpérance de voir fa niéce la Ducheffe de Briffac, afin que je ne fongeaffe point à la voir par d'autres moyens; mais il ne nous faut plus laiffer mener par le nez.

Je ne fai pas pourquoi vous affurez que Monfieur l'Abbé de Sufe eft celui de tous vos amis qui vous aime le mieux: il faut avoir vu le fond des cœurs pour en juger ainfi ; fi ce n'eft qu'il ait été affez heureux pour trouver les occafions

de

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