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Il n'y a point d'austérités prescrites par la règle; c'est au confesseur ou au directeur de juger de ce qui convient aux besoins spirituels des religieux.

missionnaires, des professeurs pour tous les degrés d'enseignement, spécialement des instituteurs et des institutrices pour les enfants du peuple, par conséquent de fonder des colléges, des écoles, des orphelinats, des ouvroirs, et d'embrasser presque tous les genres de bonnes cœuvres en réunissant les efforts de ces trois ordres religieux.

La congrégation est gouvernée par un seul supérieur général, prêtre, aidé de deux assistants, et par un couseil formé des principaux fonctionnaires généraux résidant à

la maison-mère.

Un chapitre général, composé de tous les supérieurs et des députés élus par les diverses maisons, se réunit tous les trois ans, et règle avec plein pouvoir toutes les affaires graves de la congrégation.

Tous les établissements de la congrégation sont groupés en provinces; chaque province est administrée par un provincial prêtre, assisté d'un conseil permanent et d'un chapitre provincial qui se réunit au moins une fois par an.

Les maisons particulières sont dirigées par des supérieurs, directeurs ou directrices, aidés par des fonctionnaires secondaires ou par des conseillers nommés par les différents chapitres, ou par les supérieurs généraux, suivant la règle.

Les sujets sont liés par des vœux temporaires ou perpétuels. Les ecclésiastiques font leur profession, c'est-à-dire émettent solennellement les trois vœux de pauvreté, de chasteté et d'obéissance, après un noviciat d'un an ou de deux ans au plus, s'ils ont 21 ans accomplis; s'ils sont plus jeunes, ils font les mêmes vœux en particulier, devant leur supérieur, en attendant la profession.

Les frères ne peuvent être admis aux vœux perpétuels ou à la profession, qu'à l'âge de vingt-cinq ans. En attendant, ils font des vœux d'un an, de deux, trois et cinq ans.

Les sœurs peuvent faire leur profession, comme les prêtres, à vingt-cinq ans.

Il y a un quatrième vœu qu'on n'exige de personne, mais qu'on peut faire avec l'avis de son directeur: c'est le vœu des missions étrangères, par lequel on s'engage à aller dans les missions au gré des supérieurs. Ceux qui n'ont pas fait ce vou, ne reçoivent jamais de pareilles destinations qu'avec leur agrément.

Le vœu d'obéissance oblige à obéir aux supérieurs quand ils commandent dans ils commandent dans l'ordre des règles. Le vœu de pauvreté ne dépouille pas de la propriété, puisque la loi ne le permet pas, mais il prive de l'usage des biens qu'on possède et de ceux dont on peut hériter. A la mort des religieux, les biens retournent à leur famille. Le vœu de chasteté ajoute le lien sacré de la religion à l'obligation naturelle d'avoir le cœur pur, de conserver le corps exempt de souillures, et comprend la renonciation perpétuelle à l'état de mariage.

(1) Voy. à la fin du vol., n° 61, 63.

Leur vie est laborieuse et frugaie, mais elle est réglée de manière à ménager leur santé pour les nombreux travaux auxquels ils doivent se livrer.

Il n'y a point d'office la nuit. Les principaux exercices de piété sont l'oraison, la sainte Messe, l'examen particulier, le chapelet, la lecture spirituelle, les coulpes en chapitre chaque semaine, un jour de retraite par mois et une grande retraite par année.

Les travaux auxquels se livrent les religieux et religieuses résultent du but même de la congrégation. Les Salvatoristes devant se livrer surtout à la prédication et à l'enseignement, étudient spécialement soit les sciences ecclésiastiques, soit les lettres et sciences profanes.

Les Joséphistes devant tenir des écoles primaires, devant s'adonner aux travaux manuels, se livrent soit à l'étude des connaissances qu'ils doivent communiquer à leurs élèves, soit aux différents métiers qu'ils doivent exercer, comme l'agriculture, la menuiserie, la serrurerie.

Les Marianistes qui doivent enseigner des jeunes filles, s'y disposent par une préparation convenable; celles qui sont destinées à tenir des lingeries, des infirmeries, des ouvroirs, ou se livrer à d'autres travaux, s'y forment dès leur noviciat, et plus tard dans les différents établissements de la congrégation.

Les sœurs qui demeurent dans des maisons où se trouvent des religieux, sont cloîtrées relativement aux personnes de l'intérieur d'un collége, par exemple, et ne communiquent avec elles que par des tours, à moins qu'elles ne soient autorisées à sortir de la clôture par les besoins du service. Les noviciats de sexe différent ne peuvent jamais exister dans le même établissement. (1)

CROIX (CONGREGATION DES SOEURS DE NOTREDAME DE LA).

Maison mère à Murinais, diocese ae Grenoble (Isère).

La congrégation des sœurs de Notre-Dame de la Croix, dont la maison mère est à Murinais (Isère), est née dans l'obscurité comme l'humble violette, et se fait connaître par la bonne odeur de ses vertus; aussi voulaitelle rester dans l'oubli. Le seul désir de fournir une pierre pour l'édifice que l'on élève à Ja gloire de Dieu, et la crainte d'opposer l'ingratitude à tant de bienfaits dont cette communauté a été comblée par le divin Maître, Maître, a décidé Mme la supérieure à nous envoyer quelques notes, bien abrégées sans doute, sur son établissement.

La congrégation des sœurs de Notre-Dame de la Croix à été fondée à la fin de 1832, à Murinais, près Saint-Marcellin, diocèse de Grenoble, par M. Buisson, modeste, mais

zélé curé de cette pauvre petite paroisse qui ne compte pas sept cents habitants, et par Mlle de Murinais, plus recommandable encore par ses vertus et son rare mérite, que par la grandeur de sa naissance. M. Buisson était bien loin alors d'avoir la pensée d'introduire une nouvelle congrégation religieuse dans le champ de l'Eglise; il ne songeait qu'au bien de son cher troupeau; il voulait procurer à ses malades pauvres les secours dont ils sont si souvent privés, et faire donner aux jeunes filles confiées à ses soins une éducation simple et solidement chrétienne, c'était là toute son ambition. Vainement, pour atteindre ce but, il s'adressa à diverses communautés religieuses; il rencontra des obstacles insurmontables, et ne put rien faire; alors, sans se décourager, il s'adressa à trois jeunes personnes de sa paroisse, toutes trois sans fortune, sans aucune éducation; n'ayant à lui offrir que leur dévouement et leur bonne volonté, c'était tout ce qu'il voulait fallait-il autre chose pour soigner des malades et apprendre à des pauvres enfants à connaître et à aimer Dieu? Il les réunit ensuite dans un étroit local que Jui fournit Mlle de Murinais, qui pourvut elle-même à leurs premiers besoins; alors commença pour cette grande âme cette vie d'héroïque dévouement pour cette œuvre qu'on peut appeler son œuvre. Secondant le zèle de M. Buisson, elle voulut elle-même instruire les trois fondatrices. Cette âme noble et généreuse ne recule devant aucun sacrifice; multiplier ses occupations, prendre sur son repos, se dérober souvent aux douceurs d'une famille qui la chérit, furent pour elles des sacrifices journaliers; mais elle puisa dans sa foi vive ce courage constant et sublime que les labeurs d'une œuvre naissante n'affaiblirent jamais. Tout entière à sa pauvre congrégation, elle lui prodigua de plus en plus ses travaux, ses veilles, son temps et ses lumières; toujours occupée de procurer la gloire de Dieu, son zèle et son immense charité savaient surmonter tous les obstacles. Malgré le froid le plus rigoureux, malgré des monceaux de neige capables d'effrayer les hommes les plus courageux, cette pieuse fondatrice se rendait tous les jours, et souvent, bien avant le jour, du château (éloigné d'un quart d'heure) au milieu de sa chère communauté, pour l'instruire, lui prodiguer ses soins et la former à la pratique des vertus dont elle lui donnait de si touchants exemples.

La charité et la tendre compassion pour les malheureux furent toujours les vertus héréditaires de sa noble famille, mais jamais elles ne brillèrent avec plus d'éclat que dans celle qui, pour les étendre et les perpétuer, voulut prodiguer ses soins et doter de son esprit une communauté qui sera toujours fière de sa protection.

Nous regrettons que la modestie de la mère Saint-Augustin, supérieure, qui nous fournit cette notice, l'ait empêchée de nous raconter tout ce que les sœurs de la Croix ont d'estime, de vénération et de reconnaissance

pour cette insigne bienfaitrice, et qu'elle ait voulu se contenter de prier le divin Maître d'acquitter lui-même leur dette de reconnaissance, et la récompenser de toutes les vertus qu'elle a tant de soin de leur dérober: des détails auraient contribué à la gloire de Dieu et à l'édification des fidèles.

M. Buisson ne voulant pas assujettir les sœurs de Notre-Dame de la Croix à une exacte clôture qui les aurait empêchées de visiter les malades et les pauvres, voulut cependant les mettre à l'abri des dangers du monde qu'il redoutait pour elles; il les soumit à une très-sévère demi-clôture qui les obligeait à ne sortir qu'avec permission, et seulement par charité ou nécessité. Il leur donna un costume très-simple: robe, pèlerine, tablier, en grosse étoffe de laine noire, pour les sœurs de choeur; rousse pour les sœurs converses, un bandeau noir pour retenir et cacher les cheveux, un bonnet garni d'une mousseline blanche unie, plissée à plis gros comme une plume d'oie; sur ce bonnet et tenant à la pèlerine, une espèce de coiffe appelée calèche, en laine noire, qu'elles abattent pour sortir, en forme de voile, et dont les bouts sont attachés sur la poitrine par une grosse épingle à laquelle est suspendue une croix de bois noir, ayant d'un côté un christ en argent, de l'autre une plaque aussi en argent, avec ces mots : In hoc signo vinces, et ceux : 0 Crux ave, spes unica. Plus tard, il leur fit faire les trois Voeux de religion, et les soumit à une règle que l'on peut résumer en quelques lignes : Se sanctifier elles-mêmes par l'exacte observance des trois vœux de religion et la pratique de toutes les vertus religieuses, surtout de la sainte vertu de pauvreté, sanctifier le prochain en se dévouant toujours au service des malades et des pauvres, et à l'instruction des enfants, particulièrement des enfants de la classe indigente; observer la demi-clôture, c'est-à-dire rester séparées du monde, n'avoir avec lui que les rapports que la charité rendent nécessaires, vivre autant que possible dans le silence et le recueillement, évitant avec soin toutes scrties inutiles, n'allant chez personne, si ce n'est pour soigner et visiter les pauvres et les ma⚫ lades.

Dieu bénit cette œuvre dont le soulagement des pauvres était l'unique but; les malades venaient se faire soigner, ils ne voulaient plus mourir sans avoir près d'eux une sœur de Notre-Dame de la Croix; les enfants accouraient vers elles; les paroisses voisines en envoyèrent un si grand nombre, que les trois fondatrices, accablées de travail, succombaient à la peine; d'autres jeunes filles vinrent se joindre à elles et demandèrent à partager leurs travaux. M. Buisson n'en repoussa aucune, mais il décida qu'on ne les admettrait qu'après de longues épreuves; une prétendance de six mois, un noviciat au moins de deux ans, et cinq ans de vœux annuels devaient préparer aux Voeux perpétuels. Il les divisa en deux classes; les sœurs de choeur pour dire l'oflice et

instruire les enfants; les sœurs converses plus spécialement chargées des soins du ménage et des malades. Mais toutes étaient pauvres; les malades prenaient beaucoup de temps et ne rendaient rien; grand nombre d'enfants étaient reçues pour rien; la faible, rétribution exigée des autres était insuffisante pour nourrir la communauté, et on menaçait sans cesse les sœurs de reprendre le local que Mlle de Murinais avait loué. M. Buisson, sans fortune lui-même, se serait effrayé de notre avenir sans son immense confiance en la divine Providence; et cette confiance, qu'il savait aussi nous inspirer, ne fut pas trompée. Mme la marquise de Murinais, mère de leur chère bienfaitrice, leur vint en aide, pourvut à leurs besoins, et leur fit bâtir une maison, dont elles prirent possession à la fin de 1840.

Le but de cette œuvre plut à Mgr Philibert de Bruillard, évêque de Grenoble. Il prit sous sa protection cette congrégation naissante, dont il aprouva les constitutions au mois de septembre 1842, à la seule condition que les sœurs de Notre-Dame de la Croix ne borneraient plus leurs soins aux habitants de Murinais, mais qu'elles iraient partout où voudrait les envoyer Mgr l'évêque de Grenoble, qui devait être toujours leur premier supérieur. Ainsi, M. Buisson, qui n'avait songé qu'à sa paroisse, se trouvait malgré lui le fondateur d'une congrégation qui devenait de jour en jour plus nombreuse.

Avant la fin de 1842, on demanda des sœurs pour une assez grande paroisse. Cette première séparation fut bien pénible; mais imonseigneur avait parlé, on se sépara et on obéit, Bientôt de nouvelles demandes furent adressées au pieux fondateur; plusieurs furent repoussées, et cependant, lorsqu'au mois d'octobre 1846, on eut la douleur de le perdre, il y avait cinq établissements dans lesquels les sœurs, accablées de travail, pouvaient à peine vivre. Au mois de février 1847, la communauté perdit la première supérieure générale, que plusieurs des jeunes seurs avaient précédée dans le tombeau, que plusieurs autres suivirent de près. Tant de pertes réitérées semblaient devoir anéantir cette maison, mais Dieu en eut pitié. Après la mort du fondateur, Mgr l'évêque de Grenoble leur avait donné un saint et zélé supérieur. Il soutint leur courage; plusieurs jeunes filles, heureuses de se consacrer au service des pauvres, vinrent combler les vides que la mort avait faits parmi elles; l'œuvre prospéra, elles sont aujourd'hui quatre-vingt-dix-sept sœurs; elles ont seize établissements, elles vont encore en fonder trois autres; grand nombre de sujets se présentent, beaucoup de fondations leur sont de mandées, et cependant elles ne possèdent presque rien. Les maisons qu'elles occupent ne leur appartiennent pas, pas même la maison mère; elles sont très-pauvres partout, elles soignent partout les malades; elles visitent les pauvres, et partout elles sont entourées de jeunes filles pauvres, auxquelles elles

s'efforcent d'inspirer l'amour du travail et de la simplicité. Elles voudraient adoucir toutes les douleurs, soulager toutes les misères, offrir un asile à toutes les jeunes filles exposées à se perdre; elles voudraient pouvoir aller partout où il y a beaucoup de pauvres, et un peu de bien à faire, c'est là vraiment le but et la fin de leur Institut. Aussi vivent-elles partout pauvrement, elles se contentent de peu; elles acceptent avec reconnaissance toutes les aumônes que l'on veut bien leur faire, non pour s'enrichir, mais, comme le disent leurs constitutions, pour pouvoir secourir les pauvres et étendre à un plus grand nombre de jeunes filles pauvres le bienfait de l'éducation religieuse dont elles sont si souvent privées

Quand elles se rappellent l'humble commencement de cette œuvre, et qu'elles jettent les yeux sur leur faiblesse, elles sont étonnées de leurs succès, et aussi effrayées de tout ce qui leur reste à faire pour répondre aux pieuses intentions de leur fondateur et de leurs bienfaiteurs, si elles ne savaient que tous les instruments sont bons entre les mains de Dieu qui se plaît à faire de grandes choses avec rien; aussi veulentelles être toujours petites, toujours dévouées au soin des pauvres, toujours pauvres elles-mêmes, persuadées que, selon la pensée de l'apôtre (II Cor. xi, 9), c'est leur faiblesse qui fera leur force.

Puissent ces quelques détails qui montrent tout ce qu'a fait pour les sœurs de Notre-Dame de la Croix la divine Providence, inspirer à ceux qui les liront une entière confiance en Dieu, augmenter leur amour pour lui et les convaincre de plus en plus de la vérité de cette promesse du Sauveur : Cherchez d'abord le royaume de Dieu, tout le reste vous sera donné comme par surcroît. (Matth. vi, 33.)

CROIX (DÉCORATION RELIGIEUSE ET ÉQUESTRE DE LA).

La croix est devenue un signe distinctif de la chevalerie depuis le temps des croisades, parce que les croisés placèrent sur leur poitrine ou sur l'épaule une croix pour faire connaître pour quelle cause ils allaient combattre et verser leur sang.

Chez les anciens le mot croix (crux ) désignait un supplice qu'on faisait subir soit sur un arbre, soit sur un pieu sur lequel on attachait ou on clouait, un coupable. On appelle aujourd'hui communément croix une longue poutre de bois traversée à la partie haute d'un morceau beaucoup plus court pour y fixer les bras du patient, tandis que son corps était fixé sur la poutre. Tel fut l'instrument de supplice sur lequel les Juifs attachèrent Notre-Seigneur Jésus-Christ, et qui depuis est devenu le signe le plus saint, le plus respectable du christianisme. C'était le genre de supplice très - usité chez les Hébreux, puisqu'il en est fait mention dans les chap. xxi el xxu du Deuteronome, mais on ignore si le condamné était attaché sur la

croix avec des clous. Il est certain que le crime de blasphème était puni par la lapidation, c'est pourquoi les Juifs lapidèrent saint Etienne qu'ils aceusaient d'avoir blasphémé. Notre-Seigneur Jésus-Christ fut jugé digne de mort par le conseil des Hébreux parce qu'il avait dit qu'il était Fils de Dieu, c'est pourquoi il fut mis entre les mains des Romains pour qu'il fût condamné. NotreSeigneur avait prédit pendant sa vie que les Juifs le livreraient aux gentils pour être flagellé et crucifié. (Matth. xx, 19.) Jésus, en mourant sur la croix, a racheté, converti et sanctifié le monde, et l'instrument de la croix étant devenu pour les Chrétiens l'objet le plus précieux de notre ineffable rédemption, est devenu celui de notre dévotion et de notre culte.

Depuis l'établissement du christianisme, le signe de la croix a été remarqué sur tous les monuments chrétiens, surtout depuis T'heureuse époque du règne de l'empereur Constantin le Grand, et de la miraculeuse apparition dont il fut favorisé lorsqu'il devait livrer bataille aux portes de Rome contre Maxence, et décider par les armes du sort de l'empire. Obéissant à cet avertissement du ciel, il ordonna de placer le signe de la croix sur le labarum, qui était l'étendard des légions romaines, avec ces mots : Tu vaincras par ce signe, et il remporta une éclatante victoire, quoique avec des troupes bien inférieures à celles de son compétiteur. Après son triomphe, Constantin affirma par serment l'authenticité de cette apparition miraculeuse. Saint Cyrille de Jérusalem raconte que sous l'empereur Constance, dans la ville de Jérusalem, on aperçut pendant plusieurs heures une immense croix formée par une brillante lumière, et entourée de rayons éblouissants, depuis la montagne du Calvaire jusqu'à celle des Oliviers. Le même Père nous apprend qu'un prodige à peu près semblable avait été remarqué par tous les habitants de Constantinople sous Constantin Copronime. Depuis le commencement de l'Eglise le signe de la croix est devenu l'occasion de mille et mille prodiges; la source d'une infinité de grâces pour tous les Chrétiens. Qui n'a entendu parler de la merveilleuse apparition de la croix qui eut lieu à Migné, paroisse qui n'est distante que de demi-heure de Poitiers, chef-lieu du département de la Vienne, au mois de décenibre 1826?

Tandis que dans beaucoup de localités on s'opposait à l'érection des croix, qui avaient toujours lieu à la suite des exercices des missions, pour conserver aux fidèles une vive foi, et pour affermir dans leurs bonnes résolutions, à la vue de l'auguste signe de notre rédemption, ceux qui avaient eu le bonheur de revenir à Dieu pendant ce temps de salut, Dieu voulut donner un éclatant témoignage à ce signe toujours vénéré. C'était le jour de la cloture de la mission; on portait processionnellement l'immense croix qu'on devait planter comme monument des exercices spirituels qu'on venait de donner;

un immense concours composé des habitants des villes voisines, au nombre de 5,000, assistait à cette pompeuse cérémonie, qui attira toujours une si grande affluence. On sortait à peine de l'église lorsque l'on aperçut dans le ciel une immense croix d'une régularité parfaite, longue d'environ 150 pieds, d'une couleur de vifargent, légèrement rosée, s'étendant horizontalement depuis l'église, sur tous les assistants, ce qui fit longtemps l'admiration d'un si grand nombre de témoins. Les étoiles formant comme une couronne brillaient de tout leur éclat. Ce prodige qui eut lieu une demi-heure apres le coucher du soleil et qu'on put admirer pendant longtemps, produisit un si grand étonnement, et toucha si profondément les assistants, qu'il détermina subitement la conversion d'un grand nombre de ceux qui avaient résisté jusqu'alors à la grâce du jubilé.

Le bruit de cet événement miraculeux retentit dans toute la France, et fut pendant plusieurs années le sujet de toutes les conversations; on fit des enquêtes dans lesquelles on ne négligea aucune des précautions qui pouvaient inspirer la confiance à la déclaration qui serait faite; on appela des savants, des protestants mêmes, qui avaient été présents et qui attestèrent à l'unanimité, qu'il était impossible d'expliquer naturellement un pareil phénomène, surtout en ayant égard à toutes les circonstances qui l'avaient accompagné. Par ses deux brefs du 18 avril et du 17 août 1827, le Pape Léon XII déclara que d'après son jugement particulier il ne doute pas que cette apparition ne soit miraculeuse; il envoya une croix d'or avec une portion de la vraie croix, et accorda indulgence plénière à tous ceux qui visiteraient l'église de Migné le troisième dimanche de l'Avent.

Après l'établissement du christianisme, et surtout depuis que Constantin eut fait placer le signe de la croix sur le labarum, comme nous l'avons dit, on voit le signe de la croix sur une grande quantité de médailles et sur d'autres monuments antiques. La croix est placée entre les mains de la victoire, ou entre celles de l'empereur; sur le globe impérial qui, depuis Auguste, était devenu le signe de l'empire du monde, et qui fut ensuite regardé comme celui de la victoire. On la voyait sur les boucliers, sur les cuirasses, sur les casques et sur les bonnets. La croix isolée devint le signe des pièces de monnaie qui furent battues à Constantinople, sous les rois francs, sous Clovis et

ses successeurs.

Non-seulement le signe de la croix fut destiné à sanctifier les armes, les ornements impériaux et tout ce qui pouvait servir en public, mais les Chrétiens, en particulier,

employaient pour tout ce qui était consa cré à leur usage particulier, tels que les ornements pour les cérémonies de la religion. Ils la faisaient peindre, graver, marquer sur les plats, les gobelets, les lampes, les portes de leurs maisons, même sur le pain, sur

celui surtout qui servait pour le saint sacrifice et pour les oblations, comme on le lit dans Berlendi pages 12 et 19 de son ouvrage intitulé Delle oblazione. Marri nous apprend que l'usage de placer le signe de la croix sur les ornements sacrés est de la plus haute antiquité dans l'Eglise grecque, comme dans l'Eglise latine. Baronius, dans l'année 336 de l'Histoire de l'Eglise, le fait remonter jusqu'à saint Marc.

Les Chrétiens qui vivaient dans les premiers siècles de l'Eglise, commencèrent à placer la croix surtout sur les tombeaux, et sur les sarcophages, y ajoutèrent plusieurs autres attributs ainsi l'alpha et l'oméga, première et dernière lettres de l'alphabet grec, placés aux deux côtés, indiquaient que Dieu est le commencement et la fin de toutes choses. La croix placée entre deux agneaux, ou portée par un agneau, désignait l'amour de Jésus-Christ s'offrant en sacrifice pour le salut des hommes. Bosius, dans son ouvrage Roma subterranea, p. 626, remarque que l'agneau avec la croix hiéroglylique de Jésus-Christ, fut en usage chez les Chrétiens dès les premières années du règne de Constantin. Le P. Mamachi, dans son livre De costumi primitivi Christiani, nous apprend qu'on avait l'habitude de sculpter l'arbre du paradis terrestre, qui fut l'occasion de la désobéissance d'Adam et d'Eve, de leur prévarication et de leur chute, pour se souvenir de la croix, pour inviter les pécheurs à la pénitence, et à recouvrer la grâce de Dieu qui était le but de leur création. Il ajoute, à la p. 186, qu'on avait coutume de représenter l'image du Rédempteur avec la croix à la main, comme trophée de salut du genre humain, tandis que sur d'autres monuments on la figurait comme un signe de joie, pour rappeler le prix et la vertu de ce divin sacrifice, par respect pour le nom de Jésus-Christ. Les Chrétiens formaient l'anagrame de ce nom avec les deux premières lettres de ce nom en langue grecque, c'est-à-dire X et P. En unissant ensemble ces deux lettres, et en formant une figure semblable à la croix pour signifier la victoire remportée sur le démon par le signe salutaire de la croix. Dans son ouvrage De antiq. Ecclesiæ ritibus (t. III, page 577), le P. Martène nous dit que la pieuse coutume de placer le signe de la croix en tête des inscriptions sépulcrales, et sur la tête des défunts, est très-ancienne, Nous ajouterons avec Durand, que les Chrétiens en agissaient ainsi parce qu'ils savaient que le démon redoute le signe de la croix et qu'il n'ose approcher des lieux qui sont marqués par cet auguste et salutaire signe. On trouve le signe sacré de notre rédemption sculpté sur les pierres sépulcrales en quatre endroits différents, quelquefois en trois, ou en deux, mais toujours au moins au commencement de l'épitaphe. On nous pardonnera cette digression dans la quelle nous sommes entrés à l'occasion de la croix qui est devenue pour tout l'univers chrétien un signe de distinction et de décoration publique à l'époque des croisades.

A cette époque, les souverains, les grands maîtres des ordres, et les Souverains Pontifes, voulant honorer et récompenser quelques personnes qui avaient rendu de grands services, les admettaient dans un ordre de chevalerie, et pour les distinguer des autres chevaliers, leur faisaient cadeau d'une croix, qui était la principale décoration de l'ordre, enrichie de brillants et de pierres précieuses. Les croix d'honneur étaient de formes différentes et avec des ornements divers, quoique du même ordre, suivant les grades, qui étaient ordinairement ceux de chevalier, de commandeur et de grand'croix. Les uns la suspendaient au cou, d'autres sur une bande de soie placée en travers et en forme d'écharpe, d'autres sur le côté droit, ceux-ci sur le côté gauche. Quelques-uns croient qu'on commença à porter des croix après Constantin le Grand, en imitation de celle qu'il fit confectionner en or et en pierres précieuses, pour rappeler le souvenir de celle qui lui était miraculeusement apparue. On peut consulter pour cela Donat De' sagri Dittici, p. 189. L'habitude de voir les croix enrichies d'or et de pierres précieuses introduisit celle d'orner les croix qui distinguaient les chevaliers. Le P. Menochius, t. III, p. 147 de son ouvrage Degli ordini religiosi militari, che in diversi tempi sono stato instituiti, e ghe nellabito loro portano la cruce, donne des notices pleines d'érudition sur la forme, les qualités, les couleurs des croix des divers ordres de chevalerie qui furent formés les premiers.

CROIX (FILLES DE LA ) à Liége.

En 1841, l'administration communale de la ville de Liége confia des filles repenties aux religieuses dite sFilles de la Croix, qui s'étaient jusqu'alors chargées de l'instruction des enpauvres, fants et du service des malades à domicile. Cet essaieut les plus heureux résultats. La douce autorité de quelques sœurs, abandonnées à elles-mêmes, et sans le secours d'aucun homme, a sufli pour établir, en si peu de temps, une discipline et un ordre admirables dans cette maison; il y règne depuis un silence qui n'est interrompu que par les prières et le chant des cantiques; les conversions y sont nombreuses. Dès la première année, vingt-six femmes perdues, dont douze n'avaient pas atteint l'âge de dix-huit ans, revinrent sincèrement à Dieu. Cette même administration appréciant le bien accompli, proposa aux sœurs de se charger de l'hôpital des femmes atteintes de maladies honteuses, offre que les sœurs acceptèrent. Pour préserver de la rechute les femmes repenties, M. Chabeis, curé de Sainte-Croix, fondateur et directeur de la congregation des filles de la Croix, établit deux ans après, avec la permission de Mgr l'évêque de Liége, une maison de refuge, où ces femmes sont éprouvées durant un assez long temps, pour se raffermir dans la vertu, contracter l'habitude d'ordre, du travail, d'une vie chrétienne, et devenir ainsi dignes de rentrer honorablement dans

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