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lui donner d'autre emploi que le mettre à la porte pour diftribuer aux pauvres paffans les aumônes du Monastere.

Cependant cette ignorance groffiere de George, ne fervit qu'à découvrir la vivacité de fon efprit & l'étenduë de fon jugement car ayant prié un des Freres de vouloir bien fe donner la peine de lui aprendre à lire & à écrire, il l'aprit en fi peu de temps & avec une facilité fi grande, qu'on ne douta point qu'il ne fut capable des fciences les plus élevées. Effectivement on l'appliqua au Latin, & il fit paroître une memoire fi heureuse à retenir les principes épineux de la Grammaire, qu'on ne lui montra jamais deux fois la même régle, il en faifoit l'application avec tant de jugement, qu'il entendit & parla parfaitement cette langue,en auffi peu de mois,

que les autres y employent d'années. Quelques Hiftoriens ont écrit qu'il n'avoit apris de Latin qu'autant qu'il en falloit pour dire fon Breviaire, & pouvoir célébrer la Meffe; mais nous verrons dans la fuite, que dans des occafions importantes & dans des affemblées célébres, obligé de parler fur le champ à differentes nations, qui n'entendoient point fa langue naturelle, il s'étoit fervi de la Latine avec toute la force & toute l'éloquence d'un grand Orateur.

Ces heureux commencemens donnerent une grande idée de l'efprit & de l'entendement de George. On le regarda comme un fujet qui feroit honneur à l'Ordre: il fut reçû à la profeffion 1509. tout d'une voix au nombre des Freres du Chœur, deftinez aux Ordres facrez, & peu de temps après il fut jugé digne de les re

cevoir. On l'apliqua enfuite à l'étude de la Philofophie & de la Theologie, & quoique ces fciences fpeculatives, foient bien differentes de celles de pratique, qu'elles demandent un jugement folide, au lieu que les autres ne dépendent que de l'imagination & de la memoire, cependant George y fit un fi grand progrez qu'il devança tous fes compa

gnons.

Après avoir achevé le cours de fes études, pour le former dans toute forte d'emplois, on lui confia l'adminiftration des revenus dú Monaftere ; ce fut dans ce miniftere qu'il fe montra capable de tout également propre à agir & à méditer. Mais en même temps qu'il fit admirer fa pru dence pour les interêts communs, il découvrit l'attention qu'il avoit pour lui même. Quoiqu'il eut grand foin de fournir le necef

faire aux Freres, il en avoit un particulier à procurer l'utile & l'agréable à ceux qui s'étant diftinguez dans les charges, avoient acquis plus de credit dans le Corps. Cette conduite excita des murmures & lui fit des envieux, mais en même temps de bons amis, qui dans la fuite fe déclarerent en fa faveur, & il eut tous leurs fuffrages pour être élevé aux premieres charges. Cependant on lui a toûjours donné la louange de les avoir remplies avec tant de capacité, que les Freres demeuroient d'accord qu'il les devoit moins à la faveur qu'à fon merite.

Ses grands talens le firent confiderer avec diftinction dans tout fon Ordre; fa réputation y devint fi grande que l'Abbé du fameux Monaftere de Ceftoconiano en Pologne étant décedé quoique dans un autre Royaume

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& une Province éloignée, les Religieux s'étant affemblez en Chapitre géneral pour s'élire un autre Superieur, ils jetterent les yeux fur George, & d'une voix: le choifirent pour leur Abbé. Cette election honorable flattoit. fon penchant, cependant il en aprit la nouvelle fans aucune é-: motion, & toûjours il montra ce fang froid en pareilles occafions. Il femble que les dignitez & les honneurs venoient au devant de lui, jamais il ne fit paroître d'em preflement pour les acquerir, & les remplit toûjours avec une grande dignité.

Dès qu'il eut pris poffeffion de fon Abbaïe, il en régla les affaires temporelles avec une prudence & les fpirituelles avec un zéle admirables. Comme il avoit un difcernement fingulier à connoître le caractere des efprits, il diftribua les emplois felon la por

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