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d'autant plus à cœur les interêts de l'Eglife & de la Religion, qu'il la vit attaquée en Allemagne, par l'herefie la plus dangereufe & la plus facile à infinuer, flattant les hommes dans leurs plus vives paffions, & les déchargeant des Commandemens pénibles de Jefus-Christ & de fon Eglife. C'eft fur tout ce qu'il prit à cœur de bien faire comprendre au Roy, pour le repos de fa confcience, & la tranquillité de fon Royaume. Il lui infpira le même zéle qui avoit animé le Roy Mathias un de fes predeceffeurs, quarante ans auparavant lorfque Jean Hus & Jerôme de Prague ayant femé leurs erreurs en Boheme envoyerent de leurs plus fameux Prédicateurs, pour perfuader à ce Prince de recevoir leur doctrine. Mais ce fage Roy leur ayant donné audiance, fut fcandalife &

offenfe de la nouveauté de leurs dogmes. Il leur défendit sous peine de la vie de prêcher leurs erreurs dans les Etats & fous la même peine d'en fortir au plus vîte. Mais ces Miffionnaires in

,

folens ayant méprifé ce commandement & ces menaces, voulurent infinuer leurs maximes au peuple. Le Roy en étant informé les fit arrêter; il ordonna qu'on creufât une foffe profonde hors d'une des portes de la Ville, qu'il fit remplir de bois & y mettre le feu; il obligea ces Prédicateurs d'y jetter leurs libelles, & les y fit jetter euxmêmes. Comme le Roy Jean n'étoit pas moins religieux, ni fon Miniftre moins zélé pour la foi Catholique, ils fermerent l'entrée du Royaume à toutes les erreurs nouvelles.

Ce n'eft pas une figure pour relever fa Religion par un en

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droit fi remarquable, de bons Hiftoriens ont affùré que pendant que la doctrine de Luther fe répandoit en Allemagne, en Pologne, en Angleterre, & mê. me en France, par l'attention & les ordres de Martinufius ces nouveaux Docteurs n'oférent entrer en Hongrie ; ce ne fut qu'après la mort comme nous le verrons, que ces erreurs y furent prêchées, & y allumérent le feu de la difcorde, qui n'eft pas encore éteint.

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Ce fut ainfi que Martinufius rendit fon administration fi utile & fi neceffaire, que le Roy fe repofa abfolument fur les foins des affaires d'état, & ne s'attacha qu'à celles de la guerre, qu'il foûtint toûjours avec gloire par la vigilance de fon Miniftrc.Mais ce Prince de fon côté étoit attentif aux occafions de relever & reconnoître fes merites. Enfin

il s'en prefenta une telle qu'il la pouvoit fouhaiter, pour l'honorer d'une des plus grandes dignitez de l'Eglife, & du plus important Gouvernement duRoyaume: voici le fait.

Après que Soliman eut rétabli le Roy Jean fur le Trône, il laiffa auprès de lui, comme nous l'avons dit, Louis Griti, fils d'André Griti un des plus fameux Dode Venife. Louis s'étoit établi depuis plufieurs années à Conftantinople, fous la faveur d'Ibrahim grand Vifir, Favori de Soliman, intime ami du Doge

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fon pere; par la protection de ce premier Miniftre il avoit été employé dans plufieurs affaires importantes, dont il s'étoit bien acquitté : le Vifir l'avoit fait connoître à Soliman, qui l'honoroit de fa bienveillance. Cet Empereur, fage politique, pour fe conferver une efpece de domination

en Hongrie , y avoit laiffé ce Louis Griti, comme fon Réfident, avec ordre de lui donner avis de tout ce qui se passeroit. Ferdinand defefperant de chaffer le Roy Jean de la Hongrie, par la force des armes, s'avifa d'employer les négociations, il propofa un accommodement qui pût lui être avantageux dans les fuites, & lui épargner les dépenfes d'une guerre ruineufe. Grit, ne manqua pas d'en donner avis à la Porte, il fut rappellé à Conftantinople, & renvoyé prefque auffi-tôt qu'il y fut arrivé, avec de nouvelles inftructions. Il arriya en Valaquie avec un corps de Cavalerie & de Janiffaires, auquel il joignit en chemin des Compagnies d'Italiens & de Hongrois, jufqu'à fept mille hommes. Si bien accompagné, il fe rendit à l'entrée de la Transilvanie, méditant de grands deffeins:

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