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c'eft ainsi qu'il parle d'Enoc de Moyfe &c. 11 déclame contre la magnificence de nos Eglifes, & tâ che de décrier le culte que nous rendons aux Reliques des Saints, & à leurs Images. Il parle des decrets Divins & de la force de la grace d'une maniere dont les Gomariftes & ceux à qui leur doctrine fur ce point là ne déplaît pas, feront affurément contens.

L'expofition qu'il fait du Sacrement de l'Euchariftie eft toute Calvinienne. Les tours forcez dont il s'eft fervi pour accommoder fon fyfteme aux paroles & aux actions du Sauveur dans l'inftitution de la Céne montrent bien que la créance de ces Meffieurs n'eft pas fi clairement revélée dans l'Ecriture qu'ils le prétendent, & qu'ils le font acroi re au fimple Peuple de leur communion.

L'Apocalypfe chez lui eft une prédiction manifefte des abaiffe mens, & des triomphes de fon Eglife. La Bête, & l'Image qui parle, c'eft le Pape, fes adorateurs ce font les Catholiques, il eft vray qu'il ne

les nomme pas, mais on voit bien ce qu'il veut dire, les deux témoins que l'Idole tuë, & que l'Esprit de Dieu ranime, reprefentent le petit troupeau des Réformez. Il prétend que les Interpretes modernes, c'està-dire, les Lutheriens, les Calviniftes, & fur tout Mr. Jurieu,ont beaucoup mieux reüffi que les anciens dans le calcul du nombre myfterieux de la Bête, parce que le tems leur a fait voir un grand nombre d'évenemens qu'on n'avoit point encoré vûs dans les Premiers fiecles de l'Eglife, & qui ont répandu de grandes lumieres fur les profondeurs de l'Apocalypse.

Du refte l'Auteur écrit d'une ma niere vive, noble & élevée, fes defcriptions font belles. Les refléxions morales qu'il fait fur les differens évenemens qu'il raconte font pour la plûpart très-fages & très - Chré tiennes, le cœur de l'homme y eft peint avec des couleurs fi naturelles qu'il eft difficile de ne l'y pas recone

noître.

On peut dire cependant que fon ftyle n'eft pas toûjours pur. Il y a des taches confiderables. Car. 1. Les

citations de fes vieilles Bibles Huguenotes, qu'il a affectées, & qu'il a femées en divers endroits de fes difcours hiftoriques, ont quelque chofe de bien dur & de bien choquant. Peut-on fouffrir par exemple la barbarie de ce jargon: Les Gentils font devenus les combourgeois des Saints: En Ifaac te fera appellée femence : Donne moy feulement bien vifte, de ce roux, de ce roux là: Celui-là n'eft point fuif qui ne l'eft qu'en debors je fuis un homme fouillé de lévres: J'ay eu compaßion de toy par une gratuité éternelle,&c.

2. L'ufage qu'il fait de certains mots qui n'ont pas même la fignification qu'il leur donne eft d'une hardieffe furprenante. Le feul exemple que j'en vais rapporter elt bien remarquable. A l'ouïe de fa fentence (il parle de Cain) la terreur entre dans fon ame. A l'ouie de cette nouvelle, dit-ilailleurs. J'aimerois autant qu'il eût dit, à l'oreille de fa fentence, à l'oreille de cette nouvelle. Car l'ouïe & l'oreille font à peu près la même chofe : du moins on ne fçauroit nier que l'ouïe ne foit proprement un

des cinq fens,de même que l'odorat. Ainfi comme on ne diroit pas, à l'odorat de cette Acur, on ne peut pas dire aufli à l'ouïe d'une nouvelle. Il eft vray que la vûë, le toucher, & le goût, fe prennent indifferemment & pour la faculté de fentir & pour le fentiment, c'eft peut-être ce qui l'a trompé.

3. Il n'eft pas affez fcrupuleux à l'égard des tranfpofitions qui rendent le style obfcur & embarraffé un écrivain poli ne fçait ce que c'eft que de renverfer l'ordre naturel de fes pensées & de fes paroles. Mais je conte cela pour rien en comparaifon de fes erreurs. Elles détourne ront fans doute les Catholiques de la lecture d'un livre, que l'Auteur n'a fait, ce femble, que pour les féduire, tout y eft plein de menfonges & d'artifices. Il n'y a pas jufques au lieu de l'impreffion qu'on leur a caché, afin de les furpren dre. Pourquoi donner le nom d'Anvers à Amfterdam & ajouter que c'eft avec privilege qu'on l'a impri mé, fi ce n'eft pour nous tromper, & pour nous faire accroire que c'eft

l'ouvrage d'un Catholique que des Princes & des Docteurs Orthodoxes ont approuvé. Les Herétiques mêmes s'ils agiffent conformément à leurs principes feront fcandalifez de cette multitude d'Images dont il eft rempli. Car comment accorder la doctrine & la conduite de ces Iconoclaites avec le difcours de l'Auteur. Toutes ces figures, dit-il, qu'un burin fin & delicat, conduit par une main hardie a gravées fur le cuivre,& où il paroît beaucoup d'action & de vivacité, ne font propres qu'à aider l'imagination, & à foutenir la memoi

re; mais le Lecteur Chrétien doit chercher dans les hiftoires mêmes l'intelligence de ces figures, qui en eft comme l'ame & la vie. Si les images aident l'imagination & foutiennent la memoire, pourquoi les brifer & les bannir de nos Temples? quand elles n'auroient que cét ufage qu'il approuve, on a dû les y conferver, & on a tort de les avoir brifées.

*Pref. de l'hift. du Nouv.Teft,¦

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