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que nous venons d'adminiftrer de l'exiftence de l'air inflammable dans la plupart des corps appartenans aux trois regnes de la Nature ainfi que de fon dégagement spontané, nous obferverions qu'une plante indigène de l'Europe, le didame blanc ou la fraxinelle, répand, dans les jours d'été, le foir & le matin, des vapeurs éthérées, inflammables, & en telle abondance que fi l'on place, au pied de cette plante, une bougie allumée, il s'éleve tout-àcoup une grande flamme qui fe répand fur toute la plante.

Nous pourrions rappeler les accidens, affez communs, d'égoûts & de foffes abandonnés de cîternes & de fépulcres, dans lesquels on a vu une lumiere plongée, aulieu de s'éteindre, comme cela arrive le plus communéenflammer au contraire l'air qui y étoit

ment,

renfermé.

Nous donnerons plufieurs exemples d'embrafemens ou d'incendies fpontanés qui ont ravagé plufieurs Villages, & fait abandonner plufieurs mines de charbon de terre, qui brûlent depuis un grand nombre d'années, comme celle de la Mifnie qui brûle depuis 1600.

Nous citerions d'autres exemples d'embrafemens, arrivés également fans causes apparentes à des grains & à des foins ferrés trop

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humides, à des ballots de groffe toile, imprimée d'un côté feulement avec de l'ocre rouge broyée à l'huile, ainsi qu'à plufieurs piéces de ferge & autres étoffes de laine entaffées les unes fur les autres, avant d'avoir été dégraiffées. Enfin nous reconnoîtrions la même cause incendiaire, la production de l'air inflammable, dans le corps des animaux, ainfi que dans celui de T'homme parmi les exemples que nous en pourrions produire, quelques-uns nous paroiffent mériter l'attention de nos Lecteurs; ce font les fuivans.

: Sur la fin du mois d'Octobre 1751, un habitant du Bourg d'Enans, près de Neufchâtel, Bailliage de Beaume en Franche-Comté ayant un bœuf malade depuis quelque tems & extrêmement gonflé, lui fit prendre la valeur d'une bonne charge de fufil de poudre à canon, détrempée dans de l'eau fraîche, ce qui le fit défenfler; mais, comme l'enflure revenoit toujours, & que le remède ne produifoit qu'un effet paffager, il réfolut de le tuer. Plufieurs perfonnes voulurent s'affurer de l'état de la viande; un Boucher tira, avec force hors du corps, le ventricule ou la panfe de l'animal, & creva, fans y faire attention, ce qu'on appelle le panferot; auffi-tôt il fortit avec bruit, par Fouverture, une flamme qui

s'éleva à plus de cinq pieds de haut; elle lui brûla les cheveux, les fourcils, & lui affecta tellement les yeux, qu'il fut long-tems fans pouvoir fouffrir la lumiere. Une jeune fille qui l'éclairoit avec une lampe, eut tous les che→ veux brûlés & eût été peut-être plus maltrai→ tée fi fa mere, qui étoit préfente, ne lui eût jeté fon tablier fur la tête pour éteindre le feu & la préferver; cette flamme dura, en diminuant toujours de grandeur, l'efpace de deux ou trois minutes. A mefure qu'elle continuoit, la panfe fe défenfloit, & il refta dans l'endroit une odeur infupportable. M. de Maillebois fit certifier ce fait à l'Académie royale des Sciences de Paris.

Fortunius Lisetus nous apprend, dans fon Traité de Lucernis antiquorum reconditis, qu'en 1597, le Profeffeur d'Anatomie de Pise, ayant approché une bougie allumée de l'eftomac qu'il venoit d'ouvrir, dans un fujet qu'il difféquoit, il en fortit des vapeurs qui s'enflam merent; Bonami & Ruyfch furent témoins de ce phénomène. Ce dernier en obferva un fem→ blable à l'ouverture de l'eftomac d'une ferme qui n'avoit pris aucune nourriture depuis qua tre jours; mais qui avoit le ventre tellement gonflé, qu'on la foupçonnoit d'être grosse. Ruysch preffant cet eftomac d'une main, pour procurer de la tenfion dans la partie où il

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vouloit faire une ouverture, & un Etudiant présentant en cet endroit une bougie allumée, il en fortit une vapeur qui s'enflamma avec explosion & qui donna une lumiere jaune tirant fur le verd; mais elle fut de peu de durée.

moyens

L'on a reconnu, dans ces derniers tems, que les flatuofités qui fe forment dans le ventre pendant la digestion de nos alimens, & qui en fortent avec éclat, font communément inflammables; pour s'en convaincre, il fuffit de préfenter une lumiere à l'ouverture d'une bouteille dans laquelle on les aura reçus étant au bain. L'air inflammable pouvant être dégagé de tous les corps combuftibles par tous les que nous avons indiqués, & ce fluide furpaffant en inflammabilité les liqueurs mêmes les plns éthérées, ainfi que nous l'avons précédemment obfervé, il n'eft pas néceffaire de demander quelle eft la fubftance qui produit la flamme dans la combuftion de quelques corps folides, tels que les bois: on conçoit qu'elle n'eft autre chofe que l'air inflammable qui s'en échappe alors & qui s'allume au contact de ces matieres déjà embrafées; l'inflammarion, une fois produite, fe communique enfuite aifément au nouvel air inflammable qui continue à fe dégager; & ainfi la flamme est

entretenue jufqu'à ce qu'enfin il ne fe produife plus de ce fluide.

Il n'eft pas moins évident que les liqueurs inflammables, telles que les huiles, l'efpritde-vin, l'éther, & les matieres qui fe liquéfient avant de s'enflammer, comme les graiffes, la cire, les réfines, le foufre, empruntent également, de l'air inflammable qu'elles contiennent, la propriété de brûler avec flamme.

Il eft probable que l'air inflammable, abondamment répandu dans la Nature, concourt, avec l'électricité, à la production de plufieurs effets, attribués cependant jufqu'ici à cette feule & derniere caufe; il paroît, par exemple, que les volcans & les tremblemens de terre font occafionnés par l'air inflammable renfermé dans les cavernes fouterreines & mêlé, avec l'air commun en dofe fuffifante pour pouvoir, étant enflammé par le fluide électrique, développé d'une maniere quelconque, éclater tout-à-coup dans un très-long espace de terrein.

Les aurores boréale paroiffent être également engendrées par l'air inflammable, lequel, vu fon extrême légéreté & l'énorme quantité qui s'en dégage continuellement de toute la furface de la terre & de l'eau, doit fe trouver raffemblé dans les régions fupérieures de l'atmof

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