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même nombre de feuilles du même arbre, avoit reçu du foleil. Le réfultat de ces deux expériences fut, que l'air obtenu des feuilles placées près du feu, étoit méphitique, tandis que celui des feuilles expofées au foleil, étoit de l'air déphlogistiqué.

Le même Phyficien renferma un nombre égal de feuilles de noyer dans deux bocaux de la même dimenfion; il plaça l'un fur un mur à un beau foleil, & l'autre fous des framboifiers fort touffus & impénétrables aux rayons du foleil. Ce dernier bocal fut ainfi laiffé pendant toute la journée, & il avoit acquis un degré de chaleur égal à celui de l'atmosphère. Le bocal expofé au soleil, ny fut pas laiffé affez long-tems pour avoir acquis un degré de chaleur égal à celui de l'atmosphère; les feuilles, placées à l'ombre, avoient donné très-peu d'air, & celui-ci étoit moins bon que l'air commun; pendant que les feuilles expofées au foleil, & qui avoient reçu très-peu de chaleur, avoient produit une quantité confidérable d'air déphlogiftiqué.

Les plantes ne donnent pas d'air déphlogiftiqué dans une chambre, quelque foit la chaleur qui y regne, fi le foleil ne donne pas lui-même fur le bocal qui contient les feuilles. Quoique la production de ce fluide aérien

femble être dûe à l'influence de la lumiere fur les feuilles, cette lumiere n'eft cependant pas capable de produire le même effet au milieu de l'hiyer, dans un temps très-froid; la raison en eft peut-être que les plantes, dans cette faifon, font engourdies; mais fi elles n'élaborent pas alors de l'air véritablement déphlogistiqué, celles qui font toujours vertes ne font pas tout-à-fait inactives dans le froid de l'hiver; car, M. Ingen-Houf a trouvé qu'elles ont la faculté de corriger l'air, gâté par la respiration & par la flamme d'une chandelle, aux mois de Janvier & Février 1780, étant alors dans le voisinage de Paris.

Le pouvoir de corriger l'air commun, altéré & gâté par la refpiration & la combustion n'eft pas réservé feulement aux plantes conftamment vertes. Toutes les autres efpeces de plantes poffedent le même pouvoir, & l'exercent lorfqu'elles végétent au foleil ou au grand jour; il s'étend à l'air vicié, non-feulement par la respiration des animaux, par toute efpece de combuftion; mais encore par la putréfaction des matieres animales & végétales, ainfi que par la présence des plantes elles-mêmes, privées de la lumiere du foleil. Toute plante, en général, peut, au milieu du jour, à l'air libre & dans un lieu bien éclairé, donner, en

peu d'heures, à un air incapable d'entretenir la flamme d'une bougie, la bonté de l'air atmofphérique, fur-tout lorfqu'on a soin que la racine de la plante ne foit pas hors de terre ou hors de l'cau, ou que la branche qu'on a employée à cette expérience foit en contact avec lui; il y a cependant des plantes, qui, même fans eau, rendront à un tel air fa pureté primitive: une feuille de vigne, enfermée par M. Ingen-Houfz dans un flacon mefurant une once d'eau & plein d'air infecté par la respiration, rétablit celui-ci en un heure & demie.

Cette action des plantes, fur l'air impur, n'eft pas la même dans toutes. Les plantes aquatiques, & celles qui aiment le voisinage des eaux & des marais, ont cette propriété au plus haut degré; il paroît même, par quelques expériences de M. Ingen - Houfz, que les femences de creffon végetent aussi bien dans une bouteille pleine d'air inflammable qu'à l'air libre, au moins jusqu'à un certain point; en fecond lieu, que les racines des plantes aquatiques abforbent une bonne partie de l'air' inflammable qui s'engendre au fond des eaux bourbeufes où elles croiffent, & empêchent par conféquent que l'atmosphère ne fe charge d'une plus grande quantité de cet air nuifible. Enfin, il y a des expériences de M. Priefiley,

par lesquelles il eft démontré que les plantes ne végetent pas auffi bien dans l'air déphlogiftiqué que dans l'air commun & encore moins bien dans celui-ci que dans un air putride ou rendu impur par la respiration ou par la combustion, ou de toute autre maniere (1).

Ce petit nombre d'obfervations fuffit pour établir que les végétaux ont beaucoup de part dans l'opération, par laquelle la nature conserve la maffe de l'atmosphère dans le degré de pureté néceffaire à notre confervation ; qu'ils en absorbent l'air tel qu'il eft, c'est-àdire chargé des particules feptiques ou putrides & phlogistiques, dont le nombre infini des animaux & tant d'autres caufes infectent continuellement ce fluide; que cet air est digéré ou élaboré par les organes des plantes, de maniere que le phlogiftique, & tout ce qui lui eft étranger en eft féparé, & extrait comme une nourriture ou un aliment qui leur eft propre, & qu'elles le rejettent enfuite en air déphlogistiqué, comme un Auide devenu nuifible à elles-mêmes, mais alors très-falu

(1) Expériences & Obfervations fur différentes efpeces d'air, t. IV.

Expériences & Obfervations fur différentes branches de la Phyfique, tom. II, pag. 91 & fuiv,

taire aux animaux; que ceux-ci, après avoir fait leur profit de cet air purifié, en le refpirant, le rendent à leur tour aux plantes, chargé des mêmes principes dont elles fe font déjà alimentées; qu'enfin, le grand avantage procuré aux animaux pat les plantes, ne dépend pas feulement de l'acte de la végétation, mais encore de l'influence de la lumiere du jour, qui excite un mouvement inteftin dans la fubftance des feuilles que la plupart des plantes étalent dès que la chaleur fe renouvelle.

S'il eft vrai, comme on ne peut en douter, que l'action puiffante du foleil & de la chaleur, pendant l'été, foit une cause très-marquée de corruption, & par conféquent d'infection de l'air, ne doit-on pas admirer la fageffe fuprême qui a couvert la terre d'une immenfité de végétaux, dont l'un des usages eft de rendre l'air falubre, & dont les feuilles, qui font, les agens de cette falubrité, fe confervent auffi long-tems que la chaleur, qui eft la fource générale de la corruption, rend leur présence néceffaire? Auffi les voit-on tomber dès que le froid fe fait fentir, parce qu'il eft un obftacle encore plus puiffant à la corruption; tandis qu'elles fubfiftent dans les contrées où la chaleur & la corruption, fe foutenant perpétuellement, rendent leur action continuelle,

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