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rables que ceux que nous pourrions affigner. Dans la zone tempérée, où nous habitons nous n'arrivons que par degrés du froid extrême de l'hiver à la chaleur exceffive de l'été; ce paffage eft très-lent, & il occupe l'efpace de plufieurs mois; voilà pourquoi nous n'avons point d'idée d'un degré extrême qui foit, pour ainfi dire, le nec plus ultra de notre sensation. Cela eft fi vrai, que lorfque ce paffage eft fubit, comme il arrive quelquefois dans certains jours d'été, nous nous récrions fur la chaleur, quand la liqueur du thermomètre monte, par exemple, à 23 ou 24 degrés; & ces 23 ou 24 degrés nous femblent enfuite marquer un air aflez tempéré, lorfque nous avons cette chaleur après des jours où la liqueur a monté à 29 ou 30 degrés, tandis qu'il y a des pays où l'on a à foutenir des chaleurs de 38 degrés, comme dans le Sénégal.

Nous devons avoir de la peine à concevoir que des hommes de notre pays puiffent résister à une pareille chaleur, nous qui étouffons même dans nos appartemens les plus frais, lorfqu'il arrive, ce qui eft bien rare, que l'air extérieur faffe monter le thermomètre aux environs de 29 degrés, voilà cependant 8 degrés pardelà une chaleur qui nous permet à peine de refpirer; &, ce qui doit rendre encore les

chaleurs du Sénégal plus difficiles à foutenir que ne font celles de plufieurs autres pays fitués auffi près de la ligne, tel que Pondichéri, c'eft que les variations en font confidérables; le paffage d'un air, qui feroit tempéré dans certains pays, a un air brûlant, y eft affez prompt; car on remarqua que de 38 degrés où la liqueur s'étoit élevée le 12 Avril, elle étoit descendue le 15 à 14 degrés, & il est à préfumer qu'elle s'éleve dans certains tems auffi brufquement qu'elle étoit defcendue dans celui qui fait le fujet de notre observation.

L'éducation, l'habitude que nous avons contractée de jeuneffe, peut mettre notre corps à l'épreuve de très-grands degrés de chaleur ou de froid, fans qu'il paroiffe en fouffrir. Les expériences que M. Tillet a faites fur cette matiere, font trop curieufes pour que je ne les faffe pas connoître.

MM. Duhamel & Tillet fe chargerent, en 1760 & 1761, de détruire un infe&te qui dévoroit les grains de l'Angoumois (1). Le moyen qu'ils employerent confiftoit à faire périr l'infecte dans le grain avant qu'il l'eût encore beaucoup endommagé, & cela en faifant paffer les bleds

(1) Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année 1764,

au four, & en leur faifant éprouver un degré de chaleur que l'animal ne pût pas foutenir. Tandis qu'ils faifoient l'expérience, dans un four banal, il fe trouva, parmi les fpectateurs, une fille attachée au fervice du four qui s'offrit, à M. Tillet pour entrer dans le four, & y marquer la hauteur du thermomètre que

ce Savant defiroit de connoître.

M. Tillet fut effrayé de la propofition de cette fille, & comme il hésitoit à l'accepter, cette fille fourit & entra dans le four, munie d'un crayon qu'il lui donna. Quoique la cha◄ leur du four fut prefque triple des plus grandes chaleurs que nous éprouvons dans ce climat, la liqueur du thermomètre étoit montée effectivement à 112 degrés, & marquoit par conféquent une chaleur plus grande que celle de l'eau bouillante; cette fille cependant, ne fortit du four qu'après y avoir demeuré près d'un quartd'heure; elle en fortit ayant le vifage fort rouge, mais ne paroiffant pas plus incommodée qu'on ne l'est quelquefois dans les grandes chaleurs de l'été, & n'ayant rien fur-tout de pénible, ni de précipité dans la refpiration. Ces expériences furent répétées l'année suivante par M. Marantin, Commiffaire des guerres, à qui M. Tillet s'adreffa, & il fut bien prouvé que les perfonnes habituées à fouffrir la cha

leur du four, peuvent la fupporter, fans incommodité, 10 minutes lorfque le thermomètre marque 112 degrés, & que quand il va à 130 degrés, elles ne peuvent y refter que 5 minutes. Ces expériences furprenantes engagerent M. Tillet à les répéter fur des animaux; on en peut voir le détail dans fon Mémoire; d'où il réfulte que les hommes & les animaux peuvent foutenir des degrés de chaleur bien fupérieurs à ceux qu'on auroit pu penfer, & que l'incommodité qu'ils en reçoivent n'a pas pour cause principale l'air trop chaud qu'ils refpirent, mais plutôt celui qui les entoure & qui les pénetre de toutes parts.

Les obfervations que l'on a faites, du thermomètre de M. de Réaumur, dans les pays fort éloignés & fitués à des latitudes très-différentes, nous ont inftruit d'un fait qui n'eft pas moins étonnant que celui que je viens de rapporter ; c'eft que le degré de chaleur, en été, eft le même par-tout; que la liqueur du thermomètre ne monte pas plus haut fous la ligne que fous le cercle polaire; que l'on peut paffer la ligne, habiter des pays fitués entre les tropiques, fans courir rifque d'être exposé à des chaleurs infupportables. Le plus grand degré de chaleur que M. de la Condamine ait éprouvé au Pérou, fitué fous la ligne, fut de

28 degrés, terme de chaleur qui n'eft point extraordinaire dans notre climat, où la liqueur s'éleve fouvent plus haut. Il y a plus, on éprouve, fur les montagnes du même pays, de très-grands froids, qui vont jufqu'à faire defcendre la liqueur à 4 ou 5 degrés au-deffous de la congélation.

Mais, fi la liqueur du thermomètre ne s'éleve pas plus haut entre les tropiques que dans ce pays-ci, elle y éprouve auffi bien moins de variation du matin au foir, de maniere que la chaleur y eft bien plus conftante, & par conféquent bien plus fenfible que dans notre climat.

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Les Phyficiens ne fe font pas contentés de chercher à connoître les degrés de pefanteur & de température de l'atmosphère, ils ont voulu auffi déterminer & comparer fes différens degrés de féchereffe & d'humidité; de-là l'invention de l'hygromètre, autrement appelé notiomètre.

On igore en quel tems on a fait la décou verte de cet inftrument, & à qui on la doit; car on ne peut ajouter foi à ce que l'hiftoire rapporte à ce fujet. Elle nous apprend qu'en élevant un obélifque à Rome, fous le

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