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ne fe trouver démentie par aucune expérience formelle & connue jufqu'à ce jour; ce n'eft qu'au tems, à l'obfervation & à l'expérience, à prononcer à cet égard.

Parmi les propriétés de l'air énoncées cideffus, il y en a trois qui méritent toute notre attention: favoir fa fluidité, fa pefanteur, & fon reffort; nous allons les reconnoître fucceffivement.

CHAPITRE I.
De la Fluidité de l'Air.

LA fluidité eft l'état d'un corps dont les parties intégrantes font affez défunies & affez incohérentes pour qu'il n'oppofe point de réfiftance bien fenfible à fa divifion dans tous les fens, en forte néanmoins qu'il reste à ces mêmes parties, affez d'attraction entr'elles pour qu'elles demeurent voifines au point que cette attraction mutuelle foit fenfible. Or, tel eft l'état de l'air; la facilité qu'ont tous les corps à le traverfer; le peu de réfiftance qu'il oppofe à leur mouvement; l'impétuofité avec laquelle il fe porte vers les lieux où il peut trouver accès; tous ces effets ne permettent point de douter que les parties de l'air ne cédent aifément à tout ce qui tend à les divi

fer,

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& qu'elles ne foient elles-mêmes trèsfufceptibles de mouvement. D'un autre côté plufieurs obfervations, qui ont été faites par divers Savans, prouvent que les parties intégrantes de l'Air ont une forte de liaison ou d'adhérence les unes avec les autres, & de plus s'attachent aux corps qu'elles touchent & les mouillent en quelque maniere; quelquesunes de ces obfervations fuffiront pour nous convaincre de cette vérité. Le P. Merfene, qui vivoit dans le fiecle dernier, a le premier remarqué qu'une aiguille d'acier ou de cuivre fe foutient fur l'eau ; elle n'y pose, dit M. Petit (1), que par le milieu de fa partie inférieure, & du refte elle y eft comme portée dans une petite gondole d'air. Huit fois plus pefante que l'eau, s'y foutiendroit-elle fans l'adhérence des particules d'air qui l'y font nager? Elle y demeure fufpendue comme fur une foule de pe tits ballons qui l'environnent de tous côtés; qu'on mouille l'aiguille, on enlévera l'air qui y étoit attaché, l'aiguille tombera au fond du vase,

De petites feuilles de différens métaux, trèsminces & d'une affez grande fuperficie, fe foutiennent fur l'eau & remontent lorsqu'on

(1) Difcours fur l'Hiftoire de l'Académie royale des Sciences de Paris,

les y a plongées; ce double phénomene eft, fuivant le célebre Médecin nommé ci-deffus, l'effet de l'air qui s'attache, tant au contour qu'à la furface des feuilles. Si la cohéfion feule des molécules aqueufes entr'elles les foutenoit,. lorfque les feuilles font plongées, elles ne remonteroient pas; leur poids eft refté le même: ce poids n'ayant pu forcer, lui feul, la réfiftance de l'eau pour le précipiter, ne le pourroit pas davantage pour s'élever; d'ailleurs M. Pétit a chifonné ces feuilles entre fes doigts pour diminuer leur furface; elles font tombées fans remonter; leur poids n'avoit pas augmenté; mais la furface diminuée ne portoit plus un volume d'air capable de les élever. Ce qui pourroit contribuer de nouveau à leur élévation, dans le premier cas, c'eft que les feuilles, outre l'air qu'elles portent avec elles, en trouvent encore dans l'eau. Ce nouvel air qu'elles rencontrent en chemin, augmente lé volume de celui qu'elles ont déjà, en s'y réu niffant : auffi remarque-t-on que plus la feuille plongée s'approche de la furface, plus elle s'élevé rapidėment; c'eft une confirmation de l'adhésion des particules d'air entr'elles. La fluidité eft non-feulement une qualité de l'air' comme nous venons de le elle paroît prouver, encore lui appartenir effentiellement. L'air eft

toujours fluide; & jufqu'à préfent nous ne connoiffons aucun moyen de le rendre folide, en détruifant fa fluidité en tout ou en partie.

L'étincellement que Boerhaave observa dans l'air illuminé des rayons du foleil, & qu'il crut d'abord produit par une congélation de ce fluide, ne procédoit, fuivant la découverte qu'il fit enfuite, que de particules aqueufes flottantes dans l'atmosphere, lefquelles avoient été faifies par le froid & converties en petits glaçons (1). L'air conferve fa fluidité dans un froid artificiel de 44 degrés plus grand qu'aucun froid naturel; enfin la plus forte compreffion qu'on puiffe exercer contre l'air, n'altere pas fenfiblement fa fluidité, quelque tems qu'on le retienne dans cet état de violence.

Quoiqu'on n'aye jamais obfervé dans la nature ni dans les refroidiffemens artificiels, un degré de froid affez fort pour priver l'air de fa fluidité, nous croyons cependant, avec Boerhaave & le plus grand nombre desPhyficiens, que l'air n'eft pas effentiellement fluide par même mais qu'il emprunte cette maniere d'être du feu qui le pénetre, qu'il retient toujours, & dont il eft abfolument inféparable, & qu'une chaleur bien médiocre fuffit pour

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(1) Boerhaave, Elémens de Chymie,

lui

entretenir la fluidité de l'air: ainfi cet élément n'a, fuivant nous, qu'une fluidité médiate ou secondaire, fes parties intégrantes font diminuées de contact, défunies ou même ténues dans un certain degré d'éloignement les unes des autres, par l'interpofition de la matiere du feu ou plutôt de la lumiere; tandis que celle-ci femble être fluide par fa nature, c'est-à-dire que nous concevons la figure de fes parties intégrantes, telle que ces mêmes parties ne peuvent toucher entr'elles que par un point ou un côté infiniment petit, & par conféquent n'avoir entr'elles que peu ou point d'adhérence.

L'air, quoique plus fluide que les liquides, ne paffe pas ou du moins paffe très-difficilement au travers de certains corps, tels que le papier, le parchemin, le carton, &c. ou de tout autre corps de même efpece; tandis que l'huile, l'efprit de vin, l'eau, les fels en diffolution dans l'eau, &c. y paffent avec affez de facilité; c'eft une obfervation connue des Phyficiens, quelques-uns en ont même conclu que les parties intégrantes de l'air étoient plus groffieres que celles des autres fluides. Je penfe, avec plufieurs autres, qu'on doit attribuer cet effet purement & fimplement au jeu des tuyaux capillaires. L'air ne mouille pas ces différens corps à la maniere des liquides; s'il y a attrac

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