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AN. 1585.

VIII. Requête des

préfentée au roi.

8. G.

accufoient. Il finiffoit en demandant au roi, que pour épargner le fang de tant d'innocens, empêcher les violences, les incendies, les défordres que la guerre traîne avec foi, il voulût bien lui accorder la permiffion de vuider ce différend par un combat fingulier, ou de deux contre deux, ou en plus grand nombre. Que ce feroit un grand honneur au duc de Guife d'être appellé en duel par un prince infiniment au-deffus de lui, & qu'on verroit alors pour quel parti Dieu fe déclareroit. Ce manifefte daté du 10. de Juin, fut présenté au roi le 28. & enfuite publié

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Avant la publication de ce manifefte, les chefs chefs de la ligue de la ligue assemblez à Châlons-fur-Marne, avoient De Thou, 1.81. adreffé au Roi une requête au nom du cardinal de Spond. hoc anno, Bourbon & du duc de Guise feulement, par laquelle ils demandoient à sa majesté, qu'elle fit publier une déclaration, pour défendre tout autre exercice que celui de la religion Catholique dans fon roïaume, & priver les hérétiques de toutes charges & dignitez, & qu'elle jurât de l'obferver : Qu'elle ôtât aux Proteftans les villes qu'ils occupoient par la force des armes, s'ils refufoient de les céder: Qu'elle abandonnât la protection de Genève ; & qu'elle déclarât, que toutes les troupes qui étoient au fervice de la li gue, jointes à celles qu'elle leveroit elle-même incefi famment, feroient chargées de l'exécution de cet édit : Qu'à ces conditions, les princes & feigneurs de l'union fe défifteroient des places de sûreté qu'ils avoient demandées, & donneroient leur démiffion de toutes les charges & gouvernemens qu'ils poffédoient, fi telle étoit l'intention du roi. Cette requête

embarraffa beaucoup Henri III. mais enfin, il prit
le parti de contenter la ligue, & transféra les confé-
rences à Nemours. Le duc d'Epernon voulut y affif-
ter, & l'on y dreffa un projet d'accommodement,
qui fut ratifié le 7. de Juillet par
la reine mere & le

duc de Guife.

En conféquence de cet accord, le roi rendit dans ce même mois un édit, dans lequel il difoit, qu'aïant reconnu par tout ce qui s'étoit paffé, que les peuples qui étoient divisez fur la religion, ne pouvoient s'accorder dans les affaires civiles, parce que fuivant la parole de Jefus - Chrift dans fon évangile, tout roïaume divifé fera défolé. A ces caufes, de l'avis de la reine sa mere, des princes & feigneurs de fon confeil, il ordonnoit que la feule religion Catholique, Apoftolique & Romaine, feroit fuivie dans fon roïaume, à l'exclufion de toute autre, fur peine de mort contre les contrevenans, & de confifcation de leurs biens. Qu'il révoquoit par cet édit tous les précédens, par lefquels on avoit accordé aux hérétiques l'exercice libre de leur religion, & la liberté de confcience; ordonnoit aux miniftres de fortir dans un mois de ses états, & aux autres qui refuseroient de se foumettre, dans fix mois, avec permiffion de difpofer de leurs meubles & immeubles. Le même édit déclaroit les Proteftans indignes d'exercer aucunes charges publiques, caffoit les chambres mi-parties dans les parlemens du roïaume, ordonnoit aux hérétiques de remettre au roi toutes les places de sûreté. Enfin, sa Majefté approuvoit tout ce que les ligueurs avoient fait, tant au-dedans qu'au-dehors du roïaume, & enjoignoit à tous fes fujets de s'engager

AN. 1585.

IX. Accommode

ment avec les fuivi d'un édit.

chefs de la ligue,

Dans les Mémoires pour fervir à

hiftoire de France,

t. 1. an. 1585. p.

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par ferment à l'observation de cet édit, qu'il déclaAN. 1585. roit perpétuel & irrévocable : & le roi fe trouva luimême en perfonne à l'enregistrement que le parlement en fit le 18. de Juillet. Le peuple donna de grands éloges a cet édit, mais les gens fages le regarderent comme un préfage des malheurs qui alloient fondre fur le roïaume.

X.

Le roi de Na

Paccord.

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Par un autre article qui fut tenu fecret, sa Majefté accordoit encore à la ligue des villes de sûreté, dont les garnifons feroient entretenues aux dépens de l'état ces villes étoient Châlons-fur-Marne, & faint Dizier en Champagne, Rheims, Touk, Verdun, Soissons, Dijon, Beaune, le faint Esprit, ou Roie en Picardie, Dinan & Concarneau en Bretagne. Sa Majefté promettoit, outre cela, aux cardinaux de Bourbon & de Guife, & à chacun des princes Lorrains, une compagnie d'arquebufiers à cheval pour leur garde; de plus, cent mille écus pour bâtir une citadelle à Verdun, & deux cens mille écus d'or pour paier les troupes étrangeres que le duc de Guife avoit fait lever en Allemagne, & une décharge de tout l'argent qu'ils avoient enlevé des provinces, dans les differentes recettes des deniers

du Roi.

Dès qu'on eut commencé à parler de cet accomvarre écrit au roi modement, le roi de Navarre écrivit de Nerac à pour empêcher Henri III. pour l'en détourner, & pour lui reprefenDe Thou, 1. 81. ter que les Guifes ne cherchoient qu'à contenter leur des guerres civiles, ambition; que la religion n'étoit chez eux qu'un Mem. de la ligue, prétexte pour couvrir leurs deffeins féditieux, &

Davila, hiftoire

1. 7. p. 490.

ε. 1. p. 278.

qu'également ennemis du roïaume & du roi, ils n'avoient pris les armes que pour caufer du trouble,

Qu'il voïoit bien que c'étoit à lui qu'on en vouloit, mais que fi fa Majefté s'uniffoit avec fes ennemis AN. 1585. pour l'accabler, il ne lui reftoit que de déplorer les malheurs de l'état, qui ne pouvoient gueres finir que par fa ruine entiere; que pour lui le témoigna ge de fa confcience, & la vûe de fon innocence feroient fa confolation. Qu'il efperoit que Dieu feroit fon défenfeur, parce que fa caufe étoit jufte, & que dans cette confiance il ranimeroit tout fon courage, & rassembleroit toutes fes forces, pour s'oppofer aux injuftes projets de fes ennemis, qui étoient en même tems ceux de sa Majefté; mais ces lettres arriverent trop tard; tout étoit déja reglé.

pour

y

Le Roi de Navarre aïant fçu que l'accord étoit confommé, fe ligua avec le prince de Condé, & engagea Henri duc de Montmorenci, gouverneur du Languedoc, dans fes intérêts; tous trois publierent un manifefte, qui fut rendu public le 10. d'Août. Ceux au nom de qui il étoit fait, après avoir retracé toutes les conjurations que les Guifes avoient tramées en France depuis le regne de François II. fe rendre maîtres du gouvernement, troubler le repos du roïaume, & fe défaire des princes du fang par leurs calomnies & leurs fauffes accufations, y reprefentoient l'origine & le fuccès des guerres qu'ils avoient caufees, & n'imputoient le dernier édit qu'à la malignité de ceux qui obfédoient le Roi & la reine mere, & qui déguifans habilement les malheurs qui menaçoient la France, avoient empêché fa majefté d'y apporter de bonne heure les remedes néceffaires. Ces feigneurs ajoutoient que, parce qu'ils fe croioient obligez, tant

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par leur naiffance que par leurs charges, de prendre AN. 1585. foin du roi & de la nation, ils protestoient contre la violence des Guises, qu'ils regardoient comme les plus grands ennemis de fa majefté & de fes états, conformément à ce que le roi lui-même en avoit publié par fes patentes envoyées & vérifiées en parlement. Que pour obéir à fes ordres, ils avoient réfolu de les pourfuivre comme des criminels de lézemajesté, traitres à leur patrie, & de repouffer par les armes l'injustice & la violence de ceux qui les vouloient opprimer, offrant de prendre fous leur prote Ation tous ceux, qui n'ayant point foufcrit à la ligue, voudroient s'unir à eux. Ces princes difpofés à foutenir la guerre, fe retirerent enfuite les deux premiers en Guienne, & Montmorenci en Languedoc.

XII.

Le roi avant

dre la guerre,

des marchands.

liv. 7. p. 497.

gule, t. I. P. 292.

a

Ce manifeste ayant été publié à Paris, le peuple que d'entrepren- n'en témoigna que plus d'ardeur pour demander la mande au Louvre ruine des Proteftans: on blâmoit même hautement le premier préfident & le prevôt le roi de leur avoir accordé fix mois pour fortir du De Thou, l. 81. roïaume. Sur cette plainte, Henri III. manda au Davila ut fup, Louvre le 11. du mois d'Août, les chefs du parleMem, de la li- ment, le prevôt des marchands, & le doyen de l'églife cathédrale de Paris; & voulut que le cardinal de Guife y fût préfent. Dès qu'ils furent arrivés, ce prince leur dit qu'il fe réjouiffoit d'avoir été fi bien confeillé, & d'avoir fur leur avis révoqué le dernier édit de pacification en faveur des Calvinistes : que quoiqu'il eût été long-tems à s'y déterminer, ces délais n'avoient point été caufés par un défaut de zele pour la religion Catholique, mais parce qu'ayant éprouvé fouvent les fuites funeftes de la guerre, il

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