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SCENE IV.

MOMUS feul.

E croi qu'il a juré par le Stix ; il n'y a pas ici à badiner; quand un Dieu jure par le Stix, il ne peut violer fon ferment, fut-ce un ferment amoureux. Ne me voilà pas mal, être banni pour jamais du Ciel, ou être vingt-qua tre heures fans médire ; quelle cruelle atternative! Mais Jupiter ne défend que les difcours à mon efprit fatirique.. il ne lui défend pas les penfées. Penfons... eh! comment produire fes penfées fans parler?... bon, il me vient une idée originale... heureufe...commode... Inventons des fables ... Ne nommons pas les Dieux, mais empruntons hardiment pour eux les noms des animaux,des hommes, tout cela eft égal. Je pourrai auffi intro→ duire fur la fcene les meubles, je ferai parler » le Miroir aux belles & la Tabatiere aux petits maîtres, peut-être même ferai-je affez heu»reux pour trouver parmi les plantes quelques » Phénomene potager digne d'être pre enté à Jupiter... oui, devenons Fabulifte, puisqu'on me contraint de l'être; je n'ai que cet expédient pour foulager ma bile, & pour frauder impunément la loi qu'on vient de me faire. Me voici pofté à merveille pour le métier que j'entreprens aujourd'hui : tous les Dieux & les Déeffes attirez par l'amour ou la curiofité ne vont pas manquer de fe rendre au palais du Deftin, c'en eft ici la route la plus frayée. Oh! que je vais enfanter de fables! je n'aurai ma foi pas befoin de prologues pour groffir mon livre.

ככ

SCENE V.

MOMUS, MERCURE,

MERCURE à part.

De fonderende lupitivala, je ne fuis pas le E confident de Jupiter auprès de Venus,

feul dans le monde qui allie ces deux emplois

là.

MOMUS à part.

Mercure paroît, & il m'eft défendu de mé dire! voilà ce qui s'appelle une fituation.

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MERCURE.

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Bonjour Mercure, quelles nouvelles !
MERCURE.

Je n'ai jamais vû Jupiter fi amoureux,
MOMUS.

...

Et fi ouf, j'ai pensé laiffer fortir une vérité toute nue, & cependant je fuis obligé d'habiller toutes celles qui s'offriront aujour d'hui à môi; qu'il m'en va coûter de drape

rie!

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MOMUS, MERCURE, NEPTUNE.

NEPTUNE ́à part. ·

Llons de bonne heure au temple du Def

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fait ick

avec le fincere Momus, mon neveu Mercure, qui eft un fourbe fieffé,

MERCURE.

Mon oncle Neptune ne farde pas fes ne

veux.

MOMUS.

Honneur au Dieu de la mer.

NEPTUNE.

Bonjour, Momus. Vous, mon neveu Mercure, parlez,mon frere Jupiter prétend-il toû jours faire mauvais ménage avec fa femme & galantifer Venus, qui doit être la mienne seIon toutes les apparences?

MOMUS.

Voulez-vous que je vous dife la vérité ? vỡtre frere est un franc.... Se reprenant. Võus l'aimez fortement, vous, cette charmante Venus?

NEPTUNE.

Ce n'eft pas fans raifon que je l'aime, elle a de certains égards pour moi.

MOMUS..

Et quels font ces égards s'il vous plaît
NEPTUNE.

Oh! nous fommes difcrets nous autres marins. Il feroit joli que le Dieu des Poiffons ne feut pas le taire.

1

MERCURE.

Il est aisé d'être discret quand on n'a rien à

dire.

NEPTUNE.

Vous voulez me tirer les vers du nez; vousêtes un fripon, mon neveu, Momus en cons viendra,

MOMUS.

Pardonnez-moi, j'ai fait une partie de mentir jufqu'à demain, je vais louer tout le monde.

NEPTUNE..

Par ma foi, Momus devient raisonnable j'en fuis ravi; je vois qu'il aprouvera les prétentions que j'ai fur le coeur & la main de Venus. Peut-on m'en disputer la poffeffion? C'est une Déeffe née dans mon empire, & je suis fon Tuteur juridique.

MOMUS.

Vous êtes le Tuteur de Venus, & vous vou

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Vous aurez mon étrenne; écoutez une petite fable, Seigueur Neptune.

C

FABLE I

Le Saumon Tuteur.

Ertain Saumon, Tuteur d'une Anguille legere,

Près de qui barbotoient cent poiffons amou

reux,

Vouloit triompher d'eux

Pardevant un Notaire.

Le droit de fon amour lui paroiffoit fort fur
Je fuis Tuteur de la belle,
Ergo, je fuis fon futur,

Difoit-il, car j'ai fur elle

Une autorité grande & prefque paternelle :

C'est un titre cela pour fe faire adorer.
Dans le moment nôtre imbecile,
Muni d'un fi beau titre alla fe déclarer
A fa chere Pupile.

Du Tuteur quel fût le destin?
Il furprit la jeune commere,
Avec un Eturgeon dans la chaîne legere.
D'un mariage clandestin.

Il vouloit fe fâcher, citer fon droit de peres
Fy donc, lui dit un loup marin,

Procureur des Poiffons, vous plaideriez en

vain;

Ignorez-vous pauvre cervelle,

Que le fils de Venus n'eft jamais en tutelle,

Et

que

les cœurs que fes traits ont frapez Sont tout d'abord émancipez?

MERCURE à Neptune.

Mon oncle comment trouvez-vous cette

fable?

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Et pourquoi prenez-vous le parti du Saumon? C'eft un fot animal de croire que le nom

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