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refte encore à vivre, me permet de vous donner ce trifte éclaircif e fement.

Quelques heures après que le
vaifleau où j'étois eut quitté ce-
lui où j'avois laiffé Don Juan, nous
rencontrâmes un Corlaire Fran-
çois qui nous attaqua. Il fe rendit
maître du vaiffeau de Thunis &
nous mit à terre auprès d'Alican-
te. Je ne fus pas fi-tôt libre que je
fongeai à racheter mon Ami. Pour
cet effet, je me rendis à Valence
où je fis de l'argent comptant; &
fur l'avis qu'on me donna qu'à
Barcelonne il y avoit des Peres de
la Redemption qui fe préparoient
à faire voile vers Alger, je m'y
rendis. Mais avant que de fortir
de Valence, je priai le Gouver-
neur Don Francifco de Mendoce
mon Oncle d'emploier tout le
crédit qu'il peut avoir à la Cour

d'Efpagne pour obtenir la grace
de Zarate, que j'avois deffein de

Tome II.

H

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ramener avec moi & de faire rentrer dans fes biens qui ont été confifquez depuis la mort du Duc de Naxera.

Si-tôt que nous fûmes arrivez à Alger, j'allai dans les lieux que fréquentent les Efclaves, mais j'avois beau les parcourir tous, je n'y trouvois point ce que je cherchois. Je rencontrai le Renegat Catalan à qui ce navire apartient. Je le reconnus pour un homme qui ayoit autrefois fervi mon oncle. Je lui dis le motif de mon voiage & le priai de vouloir faire une exacte recherche de mon Ami. Je fuis fâché, me répondit-il, de ne pouvoir vous être utile. Je dois partir d'Alger cette nuit avec une Dame de Valence qui est Esclave du Dey. Et comment apellezyous cette Dame, lui dis-je ? Il repartit qu'elle fe nommoit Théodora.

La furprife que je fis paroître à

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cette nouvelle, aprit par avance au Renegat que je m'intereflois pour cette Dame. Il me découvrit le deffein qu'il avoit formé pour la tirer d'esclavage ; & comme en fon recit il fit mention de l'Esclave Alvaro, je ne doutai point que ce ne fût Alvaro Ponce lui même : Servez mon ressentiment, dis-je avec transport au Renegat. Donnez-moi les moiens de me venger de mon ennemi. Vous ferez bien-tôt fatisfait, me répondit-il, mais contez-moi auparavant le fujet que vous avez de vous plaindre de cet Alvaro. Je lui apris toute nôtre hiftoire & lorfqu'il l'eut entenduë : c'est asfez, reprit il, vous n'aurez cette nuit qu'à m'accompagner, on vous montrera vôtre Rival, & après que vous l'aurez puni, vous prendrez fa place & viendrez avec nous à Valence conduire Doña Théodora,

Néanmoins mon impatience ne me fit point oublier Don Juan. Je laiffai de l'argent pour fa rançon entre les mains d'un Marchand Italien nommé Francifco Capati qui réfide à Alger & qui me promit de le racheter, s'il venoit à le découvrir. Enfin, la nuit arriva. Je me rendis chez le Renegat, qui me mena fur le bord de la mer. Nous nous arrétâmes devant une petite porte, d'où il fortit un homme qui vint droit à nous & qui nous dit en nous montrant du doigt un homme & une femme qui marchoient fur fes pas : voilà Álvaro & Doña Théodora qui

me fuivent.

A cette vûë je devins furieux. Je mets l'épée à la main, je cours au malheureux Alvaro, & perfuadé que c'est un Rival odieux que je vais fraper, je perce cet Ami fidéle que l'étois venu chercher. Mais graces au Ciel, continua t'il en

s'attendriffant, mon erreur ne lui coûtera point la vie ni d'éternelles larmes à Doña Théodora.

Ah! Mendoce interrompit la Dame, vous faites injure à mon affliction. Je ne me confolerai jamais de vous avoir perdu. Quand même j'épouserois vôtre ami, ce ne feroit que pour unir nos douleurs. Vôtre amour, vôtre amitié, vos infortunes, feroient tout notre entretien. C'en eft trop, Madame, repliqua Don Fadrique, je ne mérite pas que vous me regretiez fi long-tems. Souffrez, je vous en conjure, que Zarate vous épouse, après qu'il vous aura vengée d'Alvaro Ponce. Don Alvar n eft plus, die la veuve de Cifuentes. Le même jour qu'il m'en leva, il fut tué par le Corfaire qui me prit.

Madame, reprit Mendoce cette nouvelle me fait plaifir, Mon ami en fera plûtôt heureux. Sui

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