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pardonner leur foibleffe, font. eux-mêmes des témoins affidus detous leurs pas, ou la font obferver par une Duégne dévouée à leur tirannie. Helas il avoit en ma vertu une confiance dont un jeune mari adoré feroit à peine capable. D'ailleurs, fa complaifance étoit infinie, & j'ofe dire qu'il faifoit fon unique étude d'aller au-devant de tout ce que je paroiffois fouhaiter. Tel étoit Don André de Cifuentes. Vous jugez bien, Mendoce, que l'on n'oublie pas aifément un homme d'un caracte re fi aimable. Il-eft toûjours prefent à ma pensée, & cela ne contribue pas peu fans doute à dé tourner mon attention de tout ce que l'on fait pour me plaire:

Don Fadrique ne pût s'empê cher d'interrompre en cet endroit Doña Theodora : Ah! Madame, s'écria til, que j'ai de joie d'a prendre de vôtre propre bouche

que ce n'eft pas par averfion pour ma perfonne que vous avez méprifé mes foins. J'efpere que vous vous rendrez un jour à ma constance. Il ne tiendra point à moi que cela n'arrive, reprit la Dame, puifque je vous permets de me venir voir & de me parler quelquefois de vôtre amour. Tâchez de me donner du goût pour vos galanteries. Faites enforte que je vous aime. Je ne vous cacherai point les fentimens favorables que j'aurai pris pour vous; mais fi mal gré tous vos efforts vous n'en pouvez venir à bout, fouvenez-vous, Mendoce, que vous ne ferez pas en droit de me faire des reproches.

Don Fadrique voulut repliquer; mais il n'en eut pas le tems, parce que la Dame prit la main du Toledan, & tourna brufquement fes pas du côté de son équipage. Il alla détacher fon cheval qui étoit attaché à un arbre, & le ti

rant après lui par la bride, il fuivit Doña Theodora, qui monta dans fon caroffe avec autant d'agitation qu'elle en étoit décenduë. La cause toutefois en étoit bien differente. Le Toledan & lui l'accompagnérent à cheval jufqu'aux portes de Valence, où ils fe féparérent. Elle prit le chemin de fa maifon, & Don Fadrique emmena dans la fienne le Toledan.

Il le fit repofer, & après l'ayoir bien regalé, il lui demanda en particulier ce qui l'amenoit à Valence, & s'il fe propofoit d'y faire un long séjour. J'y ferai le moins de tems qu'il me fera poffible, lui répondit le Toledan. J'y paffe feulement pour aller gagner la Mer & m'embarquer dans le premier vaiffeau qui s'éloignera des côtes d'Espagne, car je me mets peu en peine dans quel lieu du monde j'acheverai le cours d'une vie infortunée, pourvû que ce

foit loin de ces funeftes climats

Que dites-vous, repliqua Don Fadrique avec furprife? Qui peut vous révolter contre vôtre Patrie, & vous faire hair ce que tous les hommes aiment naturellement ? Après ce qui m'eft arrivé, repartit le Toledan, mon Païs m'eft odieux, & je n'afpire qu'à le quitter pour jamais. Ah! Seigneur Cavalier, s'écria Mendoce attendri de compaffion, que j'ai d'impatience de fçavoir vos malheurs ! Si je ne puis foulager vos peines, je fuis du moins difpofé à les partager. Vôtre phifionomie m'a d'abord prévenu pour vous vos manieres me charment, & je fens que je m'intereffe déja vivement à vôtre fort.

C'eft la plus grande confolation que je puiffe recevoir, Seigneur Don Fadrique, répondit le Toledan, & pour reconnoître en quelque forte lés bontez que vous me

témoignez, je vous dirai auffi qu'en vous voiant tantôt avec Alvaro Ponce, j'ai penché de vôtre côté. Un mouvement d'inclination que je n'ai jamais fenti à la premiére vûe de perfonne, me fit craindre que Doña Theodora ne vous préférât vôtre Rival, & j'eus de la joie, lorfqu'elle fe fût déterminée en vôtre faveur. Vous avez depuis fi bien fortifié cette premiere impreffion, qu'au lieu de vouloir vous cacher mes ennuis, je cherche à m'épancher & trouve une douceur fecrete à vous découvrir mon ame. Aprenez donc mes malheurs.

Tolede m'a vû naître, & Don Juan de Zarate eft mon nom. J'ai perdu prefque dès mon enfance ceux qui m'ont donné le jour; de maniere que je commençai de bonne heure à jouir de quatre mille ducats de rente qu'ils m'ont laiffez. Comme je pouvois difpofer

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