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racines, de légumes & de falades, avec une variété infinie de fleurs. Entre les poiffons, le maquereau y eft d'une prodigieufe abondance, & l'efturgeon n'y eft guères moins commun, puifqu'il fait l'aliment des pauvres. Les Canaries ont auffi beaucoup de chevaux & de daims.

Lancerotta eft particulierement renommée pour ses chevaux, la grande Canarie, Palme & Ténérife pour les vins, Fuerta-Ventura pour la quantité de fes oiseaux de mer, & Gomera pour les

daims.

La longueur de l'Ile Canarie eft de douze milles, à-peu-près fur la même largeur. Elle eft regardée comme la principale des Iles du même nom, mais par la feule raison qu'elle est le fiége de la Juftice & du Gouvernement. La Cour Souveraine eft compofée du Gouverneur & de trois Auditeurs, qui font en poffeffion de toute l'autorité, & qui reçoivent les appels de toutes les autres Ifles.

La Ville fe nomme en Latin Civitas Palmarum, en Espagnol la Cuidad das-Palmas, & communément Palme ou Canarie. Elle eft ornée d'une magnifique Cathédrale, où les Offices & les Dignités font en fort grand nombre. L'administration ordinaire des affaires civiles eft entre les mains de plufieurs Echevins qui forment un Confeil, La Ville

Canaries.

Grande
Canaries

eft grande, & la plupart des habitans fort riches. Canaries. Le fable dont l'Isle est composée rend les chemins f propres, qu'après la moindre pluie on y marche communément en fouliers de velours. L'air eft tempéré, & l'on n'y connaît jamais l'excès du froid ni du chaud. On recueille deux moiffons de froment, l'une au mois de Février, l'autre au mois de Mai. Il eft d'une bonté admirable, & le pain a la blancheur de la neige. On compte dans la grande Canarie trois autres Villes, qui fe nomment Telde, Galder & Guia. L'Ifle, au temps de Nicols, avait douze manufactures de fucre, qui s'appellent Inganios, & qu'on auroit prifes pour autant de petites Villes à la multitude de leurs ouvriers.

Voici la méthode qui eft en ufage aux Canaries pour le fucre. Un bon champ produit neuf récoltes dans l'efpace de dix-huit ans. On prend d'abord une canne, que les Efpagnols nomment Planta; &, la couchant dans un fillon, on la couvre de terre. Elle y eft arrofée par de petits ruisseaux, qui font ménagés avec une éclufe. Cette plante comme une forte de racine, produit plufieurs cannes, qu'on laiffe croître deux ans fans les couper; on les coupe jufqu'au pied, & les liant avec leurs feuilles, qui se nomment coholia, on les transporte en fagots à l'Inganios, où elles font pilées dans un moulin, & le jus eft conduit par un canal dans

une grande chaudiere, où on le laisse bouillir juf qu'à ce qu'il ait acquis une jufte épaiffeur. On le Canaries. met alors dans des pots de terre de la forme d'un pain de fucre, pour le transporter dans un autre lieu, où l'on s'occupe à le purger & à le blanchir. Des reftes de la chaudiere, qui s'appellent efcumas, & de la liqueur qui coule des pains qu'on blanchit, on compofe une troifieme forte de fucre, qui fe nomme pamela ou netas. Le dernier marc, ou le rebut de toutes ces opérations, fe nomme remiel ou melaffe, & l'on en fait encore une autre forte de fucre, nommé refinado. Au furplus, on peut obferver que cette manipulation du fucre eft à-peu-près la même par-tout.

Lorfque la premiere récolte eft finie, on met le feu à toutes les feuilles qui font restées dans le champ, c'est-à-dire, à toute la paille des cannes; ce qui confume toutes les tiges jufqu'au niveau de la terre; &, fans autre fecours que le foin d'arrofer & de nettoyer le terrain, les mêmes racines produifent dans l'efpace de deux ans une feconde moiffon qui fe nomme zoca. La troifieme, qui arrive dans le même période, eft appellé tertia zoca, la quatrieme quarta zoca, & toujours de même jufqu'à ce que la vieilleffe des plantes oblige de les renouveller.....

L'Ile Canarie produit un vin d'une bonté fpéciale, fur-tout dans le canton de Telde. Ellę

Canaries,

oranges,

n'eft pas moins féconde en excellens fruits, tels que les melons, les poires, les pommes, les les limons, les grenades, les figues, les pêches de diverfes espèces, & fur-tout le plantano ou le plantain. Cet arbre n'est pas propre aux édifices. 11 croît fur le bord des ruisseaux. Son tronc eft fort droit, & fes feuilles font extrêmement épaiffes. Elles ne viennent pas aux branches, mais au fommet de l'arbre, où elles fortent du tronc même. Elles ont une aune de longueur, & la moitié moins de largeur. Chaque arbre n'a que deux ou trois branches, fur lefquelles croiffent les fruits au nombre de trente ou quarante. Leur forme eft à-peu-près celle du concombre. Ils font noirs dans leur maturité, & l'on dit qu'il n'y a point de confiture auffi délicieufe. La plantation ne produit qu'une fois. On coupe l'arbre enfuite. De la même racine il en naît un autre, & l'on recommence ainfi continuellement. L'Ile de Canarie eft fournie de bêtes à cornes, de chameaux, de chèvres, de poules, de canards, de pigeons & de grosses perdrix. Le bois eft ce qui lui manque le plus.

On compte dans la ville de Canarit environ douze mille Habitans; elle n'a guères moins d'une lieue de circuit; fes édifices font fort beaux, & la plupart des maifons ont deux étages, avec

des plates-formes au fommet: il y a dans Canarie quatre couvens, les Dominicains les, Cordeliers, Canaries. les Bernardines, & les Récolets.

L'ifle de Ténérife eft au 27. degré & demi de

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latitude. Sa diftance de l'Ile de Canarie est de Ténérife. douze lieues au Nord. On lui donne dix-fept lieues de longueur; la terre en eft haute. Au milieu de l'lfle s'éleve une montagne ronde, qu'on appelle le Pic de Teithe, & dont la hauteur eft fi prodigieufe, qu'elle a plus de quinze lieues de chemin. Du fommer, qui n'a pas plus d'un demi-mille de tour, il fort quelquefois des flammes & du foufre. A deux milles audeffous, on ne trouve que de la cendre & des pierres de ponce. A deux milles encore, la montagne eft couverte de neige pendant toute l'année; un peu plus bas, elle produit des arbres d'une hauteur furprenante, qui se nomment vi natico, dont le bois eft fort pefant & ne pourrit jamais dans l'eau. Il y en a une autre forte, qu'on appelle barbuzane, & qui eft de la même qualité que le pin; plus bas, on trouve des forêts de dix & douze milles de longueur; le passage en eft charmant par la quantité de petits oifeaux qui font entendre un ramage admirable; on en vante un particulierement, qui eft fort petit, & de la couleur de l'hirondelle, avec une tache noire & ronde au milieu de la poitrine; fon

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