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l'amour de toutes chofes. Enfin le corps d'Ifis eft la Terre, non toute forte de Terre; mais celle que le Nil a le Nil a fécondée par fes débordemens, d'où naît Orús, qui dénote ailleurs la température de l'air.

Non-feulement le Nil, mais un fluide quelconque, eft un écoulement d'Ofiris: auffi dans les Sacrifices inftitués en fon honneur, porte-t-on toujours en Procession un vase rempli

d'eau.

Ce Dieu eft donc en quelque façon confondu avec la divinité de l'Eau, connue dans les Auteurs fous le nom de Canope, & dont les monumens font communs, du moins à ce qu'il nous paroît.

Les méchancetés de Typhon indiquent l'idée du bon & du mauvais efprit; & cette idée a été commune à toutes les Nations. Mais les actions détaillées de cet homme, représenté comme roux, & tout ce qu'il a fait contre Ifis & Ofiris, paroiffent avoir eu des principes Phyfiques, & des enveloppes Métaphyfiques, fucceffivement brouillées & confondues. Le nombre & la variété de ces idées font cependant en plus petite quantité, que celles que l'Auteur nous donne d'Ifis.

J'ai dit, en expliquant quelques monumens Egyptiens que les figures auxquelles on donnoit le nom d'Öfiris, étoient plutôt les images des Prêtres, que celles du Dieu.

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Plutarque confirme ce foupçon: Par-tout, dit-il, où Pimage d'ofiris eft en forme d'homme, il eft représenté nud c'est-à-dire, comme Priape, pour figurer fa vertu d'engendrer & de nourrir. Ce paffage, en indiquant le genre de ces représentations, eft une preuve en même-tems de leur rareté; car nous en avons peu de cette efpèce. Il nous apprend encore que les Egyptiens avoient des figures obfcênes, & qu'elles étoient communes & publiques; mais cette obfcénité ne doit jamais avoir été en

action.

On fçait que la Fête de Pamylies étoit une forte de

Bacchanale, dans laquelle on portoit une Statue trèsobfcêne. Ainfi, malgré le nombre des figures Egyptiennes que nous pouvons étudier, nous fommes privés de plufieurs autres, & par conféquent éloignés de les connoître toutes.

Il ne faut pas croire, dit-il, qu'Harpocrate foit un Dien jeune ou imparfait, ou quelques espèces de légumes. S'il préfide aux difcours indifcrets & peu réfléchis que l'on tient fur le compte des Dieux, c'eft pour les rectifier. Ceft pourquoi, le doigt qu'il tient fur la bouche eft le fymbole de la retenue & du filence. Dans le mois Mefori (Mecoph) lorfque les Egyptiens lui offrent des légumes, ils difent: Langue fortune, Langue génie. De toutes les plantes qui croiffent en Egypte, le Pêcher lui eft fpécialement confacré, parce que fon fruit reffemble au cœur, & fa feuille à la langue.

que

Ces emblêmes font des allufions bien forcées, mais elles nous donnent de nouvelles indications d'hieroglyphes. Ifis retrouva tous les membres d'Ofiris, que Typhon avoit difperfés, à la réserve de la partie naturelle trois fortes de poiffons avoient mangée; elle les maudit plus que les autres,& fit faire au naturel un Phallus qu'elle confacra, & dont les Egyptiens célèbrent encore la fete. Ce monument obfcêne, dont on multiplia, fans doute, l'image, n'est point venu jufqu'à nous, excepté qu'on ne veuille dire, que parmi cette quantité immenfe de Phallus de toute efpèce qui nous font demeurés, il y en a qui font des copies faites par les Romains de celui qu'on adoroit en Egypte.

Serapis n'eft autre chofe que Pluton, & Ifis que Proferpine, & l'Oracle de Canobus eft celui de Pluton.

Plutarque appuye ce fentiment du témoignage d'Héraclide le Pontique & d'Archimachus d'Eubée.

Indépendamment des différences que ce paffage nous préfente, on voit que Pluton avoit un Oracle en Egypte, & les Grecs n'en ont point eu, ce me femble, de ce

Dieu des Enfers. Mais il eft plus intéreffant de remar、 quer, ainfi que nous l'avons vû plus haut, que Mercure étoit défigné par la figure du chien; cependant Plutarque nous dit: Anubis, felon quelques Philofophes, eft le Temps; il n'a eu parmi le peuple le nom de Chien, (Kuwv en Grec), que parce que ce mot équivoque Kvar défigne celui qui engendre tout de lui-même, & porte tout dans fon fein. C'eftlà la doctrine fecrette du culte d'Anubis. Le chien jouissoit autrefois en Egypte des plus grands honneurs; mais lorfque Cambyfes eut fait tuer Apis, & difperfer fes membres, le chien feul en ayant goûté, perdit la prérogative d'être le premier & le plus révéré des animaux.

Ce paffage pourroit nous faire croire, que toutes ces figures à têtes de chien précéderoient le règne de Cambyfes; mais Plutarque ne dit pas que ce culte fût aboli; il se contente de nous apprendre qu'il fut diminué : nous fçavons d'ailleurs qu'il fubfifta toujours; car la ville de Cynopolis ne ceffa pas vraisemblablement de rendre une adoration particulière à cet animal, auquel elle étoit

confacrée.

Quoi qu'il en foit, ce témoignage nous met dans l'impoffibilité de décider fi les figures à tête de chien font l'emblême du Temps, ou de Mercure.

Ce n'eft pas-là le feul exemple de l'obfcurité qui régnoit en Egypte lors même qu'elle jouiffoit de toute sa fplendeur. Le mystère répandu fur la Religion, étoit encore plus impénétrable aux Etrangers, auxquels on pouvoit toujours facilement en impofer. Plutarque peut être regardé comme un exemple de l'obfcurité avec laquelle on leur parloit.

Je crois avoir prouvé dans le premier Volume, que les figures en gaîne ont eu l'ignorance des Arts pour principe. C'eft ainfi que la Grèce nous a présenté dans fes premiers temps une colonne qui repréfentoit le corps de Minerve. Les Mumies emmaillotées ont été capables

de perpétuer en Egypte un auffi mauvais ufage, & fi éloigné de l'imitation de la Nature. Nous voyons que les Egyptiens ont donné dans la fuite plus de mouvement à leurs figures, & leur ont féparé les jambes, fans qu'on puiffe marquer le temps de ce changement. Cette variété qui ne peut être dépendante que d'une plus grande connoiffance dans l'Art, doit cependant avoir été fort ancienne; car elle avoit eu le temps d'être embellie, ou du moins liée à des idées métaphyfiques.

Les Egyptiens prétendent, felon Eudoxe cité par Plutarque, que les deux cuiffes de Jupiter fe prirent & s'unirent tellement enfemble qu'il ne pouvoit plus marcher, enforte que de honte il fe tenoit à l'écart; mais qu'Ifis les lui coupa, les divifa, & le mit en état de marcher.

Plutarque détruit l'efpérance que l'on pourroit avoir d'entendre les Hieroglyphes, lorfqu'il dit :

Ceux qui veulent ramener la Religion Egyptienne à des principes philofophiques, difent qu'Ofiris eft le Nil, & Typhon la Mer, dans laquelle le Nil va fe perdre. Témoin cet Hymne facré, où l'on pleure celui qui naît à la gauche, & qui périt à la droite: en effet, les Egyptiens croyent que le Levant eft le vifage du monde, le Nord fa droite, & le Midi fa gauche. Or, comme le Nil vient du Midi, & qu'il fe jette dans la Mer au Nord, on a quelque raifon de dire qu'il prend naiffance à la gauche, & qu'il trouve la mort à la droite. C'est pour cela que les Prêtres ont la Mer en horreur, & qu'ils appellent le fel, l'écume de Typhon. Auffi eft-ce une chofe defendue parmi eux de fervir du fel à table. C'est par la même raifon qu'ils ne faluent point les Pilotes, parce qu'ils vont fur mer, & qu'ils en tirent leur fubfiftance. Ces mêmes Prêtres n'ont point d'autre motif pour rejetter le poisson, qui même eft l'emblême de la haine : du moins voyoit-on repréfentés au veftibule du Temple de Minerve à Saïs, un enfant, un vieillard, un épervier, un poisson, & enfin un hippopotame. Ce fymbole fignifioit: Arrivans & partans,

Dieu

Dieu hait l'impudence. Car l'enfant & le vieillard figurent ceux qui naiffent & qui meurent. L'Epervier figure Dieu, le Poiffon la haine, à caufe de la mer, comme on l'a déja dit, &Hippopotame l'impudence, parce qu'on dit qu'ayant tué fon pere, il fit violence à fa mere.

Il est heureux qu'on ait expliqué à Plutarque cette efpèce d'Infcription: elle peut nous apprendre que l'on tenteroit envain de concevoir le fens de ces emblêmes, toujours susceptibles de différentes interprétations. Il est vrai, que par une convention tacite & générale, on reconnoiffoit aux fignes reçus les objets dont ils étoient les images; mais ces fignes étoient fouvent arbitraires. La néceffité d'en admettre une plus grande quantité produifoit de la confufion; & fi l'on se bornoit à un plus petit nombre, on étoit forcé de donner à chacun plufieurs fignifications différentes. D'ailleurs, les Prêtres avoient intérêt de rendre inintelligible une Langue facrée, sur laquelle ils fondoient leur crédit & leur puiffance. Ainsi les Egyptiens auroient été embarraffés eux-mêmes de former une Table ou un Dictionnaire de ces fortes de caractères. Mais je ne m'étendrai pas davantage fur une matière traitée plufieurs fois par des hommes plus fçavans que moi. Je finis en rapportant les fignes qui caractérisent, felon Plutarque, quelques Divinités Egyptiennes. Cette indication pourra fervir à ceux qui voudront étudier ces matières fur les Monumens,

On repréfentoit Ofiris par un ail & un fceptre : Os fignifioit plufieurs, & Iris œil.

Un Roi, ou le climat Méridional par une feuille de figuier.

L'Afpic, la Belette & l'Efcarbot défignent la Divinité. L'Auteur nous donne les raisons qui faifoient accorder une pareille prérogative à tous ces animaux & à d'autres. En effet, il obferve à la tête de ce Chapitre : « Que parmi les Animaux adorés en Egypte, les uns l'étoient

* B

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