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Puis quand ces deux grands hymenées,
Dont le fatal embraffement

Doit applanir les Pyrenées,

Auront leur accomplissement,
Devons-nous douter qu'on ne voie,
Pour accompagner cette joie,
L'encens germer en nos buiffons,
La myrrhe couler en nos ruës,
Et fans l'ufage des charruës,
Nos plaines jaunir de moiffons?

Quelle moins hautaine espérance
Pouvons-nous concevoir alors,
Que de conquêter à la France
La Propontide en fes deux bords? (8)
Et vengeant de fuccès profperes
Les infortunes de nos peres,
Que tient l'Egypte enfevelis,
Aller fi près du bout du monde,
Que le foleil forte de l'onde
Sur la terre des fleurs de lis?

Certes ces miracles vifibles

Excédant le penser humain,

(8) La Propontide, grand Golphe entre l'Hellefpont & le PontEuxin ou la Mer noire, nommé aujourd'hui la Mer blanche ou Mer de Marmara.

Ne font point ouvrages poffibles
A moins qu'une immortelle main;
Et la raison ne se peut dire,
De nous voir en notre navire
A fi bon port acheminez:
Ou fans fard & fans flatterie,
C'eft Pallas que cette MARIE,
Par qui nous fommes gouvernez.

Quoi qu'elle foit, Nymphe ou Déeffe, De fang immortel ou mortel,

Il faut que le monde confeffe

Qu'il ne vit jamais rien de tel;
Et quiconque fera l'histoire

De ce grand chef-d'œuvre de gloirę,
L'incrédule poftérité

Rejettera son témoignage,

S'il ne la dépeint belle & fage,

Au-deçà de la vérité.

Grand HENRI, grand foudre de guerre,

Que, cependant que parmi nous

Ta valeur étonnoit la terre >

Les Deftins firent son époux :

Roi dont la mémoire eft fans blâme,

Que dis-tu de cette belle ame,

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Quand tu la vois fi dignement
Adoucir toutes nos abfinthes,
Et fe tirer des labyrinthes
Où la met ton éloignement ?

Que dis-tu; lors que tu remarques
Après fes pas ton héritier,

De la fageffe des Monarques
Monter le pénible sentier,

Et pour étendre sa couronne,

Croître comme un fan de lionne?

Que s'il peut un jour égaler

Sa force avecque sa furie,

Les Nomades (9) n'ont bergerie

Qu'il ne fuffife à défoler.

Qui doute que,

fi de fes armes

Ilion avoit eu l'appui,

Le jeune Atride avecque larmes

Ne s'en fût retourné chez lui;

Et qu'aux beaux champs de la Phrygie,

De tant de batailles rougie,

Ne fuffent encore honorez

Ces ouvrages des mains célestes,

(9) Peuples d'Afrique, qui n'ayant point d'habitation fi campoient dans leurs pâturages avec leurs troupeaux.

Que jufques à leurs derniers reftes

La flâme Grecque a devorez!

FRAGMENT

Au fujet de la même guerre des Princes. 1614. ALLEZ

LLEZ à la malheure, allez, AMES tragiques, Qui fondez votre gloire aux miferes publiques,

Et dont l'orgueil ne connoit point de loix. Allez, fléaux de la France & les peftes du monde, Jamais pas un de vous ne reverra mon onde: Regardez-la pour la derniere fois,

STANCE S.

Paraphrafe du Pfeaume CXXVIII, au nom du Roi Louis XIII, à l'occafion de la premiere guerre des Princes. 1614.

LES funeftes complots des ames forcenées,

Qui pensoient triompher de mes jeunes années
Ont d'un commun affaut mon repos offensé.

Leur rage a mis au jour ce qu'elle avoit de pire :
Certes je le puis dire,

Mais je puis dire auffi qu'ils n'ont rien avancé.

J'étois dans leurs filets, c'êtoit fait de ma vie :
Leur funefte rigueur qui l'avoit poursuivie,
Méprifoit le confeil de revenir à foi;

Et le coutre aiguifé s'imprime fur la terre
Moins avant, que leur guerre

N'efpéroit imprimer fes outrages sur moi.

Dieu, qui de ceux qu'il aime est la garde éternelle Me témoignant contre eux fa bonté paternelle,

A felon mes fouhaits terminé mes douleurs.

Il a rompu leur piége; & de quelque artifice
Qu'ait ufé leur malice,

Ses mains qui peuvent tout m'ont dégagé des leurs.

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