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AN. 190.

fonts, il lui écrivit fecretement, pour le conjurer de ne point aprouver ce choix. Mais Germain préfet de Rome prévint fon courier: & l'ayant fait arrêter & ouvrir fes lettres, il envoya à l'empereur le décret de l'élection. Maurice rendit graces à Dieu d'avoir trouvé l'occafion qu'il défiroit de procurer cette dignité au diacre Gregoire, & dona fes lettres portant ordre de le facrer.

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Cependant à Rome la pefte continuoit avec une grande violence: & comme on attendoit de CP. la réponse, de l'empereur, S. Gregoire fit un fermon au peuple, & lui parla ainfi : Il faut, mes freres craindre au moins les fleaux de Dieu quand nous les fentons, puisque nous n'avons pas fçu les prévenir. Vous voyez que tout le peuple eft frapé du glaive de fa colere, la most nartend pas la maladie,& enleve le pécheur avant qu'il fonge à faire pénitence. Confiderés en quel état il paroît devant le Juge terrible. Ce n'eft pas une partie des habitans qui périt, tout tombe à la fois : les maifons demeurent vuides & les peres voyent mourir leurs enfans. Rapellons donc le fouvenir de nos fau tes & les expions par nos larmes. Que perfone ne défefpere pour l'énormité de fes crimes: les Ninivites effacerent les leurs par une pénitence de trois jours, & le larron à l'heure même de fa mort. Celui qui nous avertit de l'invoquer montre bien qu'il veut pardoner à ceux qui l'invoquent, S. Gregoire conclut ce ferhonen in diquant une litanie ou proceffion à fept ban les qui devoient marcher au point du jour le mer credi fuivant, fortant de diverfes églifes, pour fe rendre toutes à fainte Marie majeure. La premiere troupe étoit compofée du clergé : la fe→ conde des abbés avec leurs moines: la troifiéme des abbeffes avec leurs religieufes : la quatrieme

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triéme des enfans: la cinquième des hommes AN. 190. laïques la fixiéme des veuves: la feptiéme des femmes mariées. Chaque troupe étoit conduite par les prêtres du quartier. On croit que de cette proceffion générale eft venue celle du jour de S. Marc, qui s'apelle encore la grande litanie. Pendant celle-ci il mourut en une heure quatre-vingts de ceux qui y affiftoient: mais S. Gregoire nel ceffa point d'exhorter le peus ple & de prier, jufques à ce que la maladie füt éteinte. as opiolle.

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Comme il aprit que le préfet Germain avoit Jo. diac, intercepté fes lettres, il voulut prévenir la ré- c. 44. ponfe de l'empereur: jugeant bien qu'elle ferois contraire à fon défir ; & ne pouvant fortir ouver tement des portes de Rome, où l'on avoit mis des gardes, il fe fit enlever par des marchands, Paul, diac. déguifé & enfermé dans une manne d'ofier. Il fe vita n. 11, cacha dans des bois & dans des cavernes pendant trois jours durant lefquels le peuple Romain faifoit des jeunes & des prieres. Enfin ayant été découvert par des indices miraculeux, il fut pris & ramené à Rome. Alors il te rendit, & fut con facré folemnellement dans l'églife de S. Pierre le troifiéme de Septembre 90. au comencement de la neuviéme indiction. Il tint le S. fiége treize ans.

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Greg. I epift.20. Martyr. R. IV. ep. 4.

3. Sept.

re.

II.

Comme on lui faifoit des complimers fur fa nouvelle dignité, il s'en plaignit férieufement à Plaintes de fes amis. Voici comme il en parle au fcholaftiS. Gregoi que Paul, prêt à quitter le gouvernement de Sicile: Je ne me mets pas beaucoup en peine Lib. 1. que les étrangers me félicitent de l'honeur du epift. 3. facerdoce: mais je fuis fenfiblement affligé que ceux qui conoiffent comme vous parfaitement mon inclination, croyent que j'y trouve quelque avantage. Rien ne m'étoit plus utile que d'ob tenir le repos que je défirois. Et à Jean patriar

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AN. 590. Epift. 4.

che de CP. Je fai avec quelle ardeur vous avés voulu fuir la charge de l'épifcopat : & cependant vous n'avés pas empêché qu'on me l'ait impofee. Vous ne m'aimes donc pas comme vous-même, fuivant la régle de la charité. Et à Epift. s. Theoctiste fœur de l'empereur: On m'a ramené

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au fiécle fous prétexte de l'épifcopat. J'y fuis chargé de plus de foins temporels, que je n'en avois étant laïque. J'ai perdu la joye de mon repos ; & paroiffant monter au-dehors, je fuis tombé au-dedans. Je m'efforçois tous les jours de me tirer hors du monde, hors de la chair, d'éloigner de mon efprit toutes les images corporelles, pour voir fpirituellement la joye céPf. 26.8. lefte. Et je difois du fond du cœur : Je cherche Seigneur vôtre vifage, Ne défirant & ne craignant rien en ce monde, j'étois, ce me femBloit, au-deffus de tout. Mais l'orage de la tentation m'a jetré tout d'un coup dans les alarmes & les frayeurs: car encore que je ne craigne rien pour moi, je crains beaucoup pour ceux dont je fuis charge. Je fuis battu des flots de tous côtés : & quand aprés les affaires je yeux ren trer en moi-même, le tumulte des vaines pen fées m'en empêche, & je trouve mon intérieur loin de moi, Et enfuite L'empereur doit s'imputer toutes mes fautes & mes négligences d'avoir confié un fi grand miniftére à une perfone fi foible. Il dit encore au Patrice Narles: Je fuis tellement accablé de douleur qu'à peine puisje parler : j'ai l'efprit environé de ténébres: je ne vois rien que de trifte, & tout ce que croit agréable, me paroît affligeant. Car je pense de quel comble de tranquillité je fuis tombe, & en quelles occupations je fuis relegué loin de la face du Seigneur. Et à Anaftafe patriarche d'AnEpift. 7. tioche: Vous qui m'aimiés fpirituellement, il me femble que vous ne m'aimes plus que tem

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porellement, en me chargeant d'un fardeau qui AN. 190. m'abbat jufques à terre, & ne me permet plus de m'élever aux penfées du ciel. Mais quand vous me només la bouche & le flambeau du Seigneur, & quand vous dites que je puis être utile à plu fieurs: c'eft le comble de mes iniquités de recevoir des louanges, au lieu des châtimens que je mérite. Et à André du rang des illuftres: Sur la Epift. 19, nouvelle de mon épifcopat, pleurés fi vous m'aimés: car il y a ici tant d'occupations temporelles, que je me trouve par cette dignité presque feparé de l'amour de Dieu. Et au Patrice Jean, qui avoit contribué à son élévation: Je me plains Epift.30. de vôtre amitié, de m'avoir tiré du repos que Vous fçaviés que je cherchois. Dieu vous rende les biens éternels pour vôtre bone intention : mais qu'il me délivre comme il lui plaira de tant de perils. Car comme mes péchés le méritoient, je fuis moins l'évêque des Romains que des Lombards. Voilà où vôtre protection m'a conduit. Jean évêque de Ravenne ayant repris S. Gregoire avec amitié & modeftie de s'être caché Paftoral de S. Gregoipour éviter l'épifcopat, lui qui en étoit fi capa- re. ble: ce reproche lui dona occafion de compofer Paul. vita un livre dans ces comencemens, fur les devoirs . 12. des évêques ; & c'est le Paftoral fi fameux depuis Greg. praf. dans toute l'églife. Son deffein eft de juftifier fa in paftor. réfiftance, en expliquant tout ce qu'il penfoit fur la grandeur de cette charge. L'ouvrage eft divife en quatre parties. La premiére eft fur la vocation à l'épifcopat: afin que celui qui y eft apellé examine avec quelles difpofitions il y vient. S'il a la fcience, la vertu, le courage, la fermeté, l'amour du travail: s'il eft exempt de toutes les imperfections figurées par les défauts corporels, qui fuivant l'ancienne loi excluoient Levit, xxt. des fonctions du facerdoce. La feconde partie 17. montre comment le pasteur apellé légitimement A ij

doit

III.

AN. $90.

doit s'acquiter de la charge, qu'il n'a point recherchée. Quelle doit être fon aplication à la priére, à l'inftruction, au foulagement du prochain: fon humilité, fon zéle, fa difcrétion. La troifiéme partie marque les différentes inftructions proportionées à la diverfité des perfones: fuivant le fexe, l'âge, les conditions, les inclinations, les difpofitions permanentes ou paffagéres. Sur quoi S. Gregoire entre dans un grand détail. Dans la quatrième partie il marque en peu de mots comment le pafteur doit faire de fréquentes réflexions fur fa conduite, pour s'inftruire Xepift.22. lui-même, & conferver l'humilité. Cet ouvrage fut fi eftimé dés-lors, que l'empereur Maurice en demanda une copie au diacre Anatolius, qui réfidoit à C P. pour les affaires de l'église Romaine; & qu'Anaftafe patriarche d'Antioche le tra duifit en grec pour l'ufage des églifes d'Orient.

IV. Mort de

fainte Ra

degonde. Greg. Tur X. hift...

Greg. IX.

hift. c. 2.

Un diacre de Gregoire de Tours, qui s'étoit trouvé à Rome lors de la mort du pape Pelage, & avoit été témoin de l'ordination de S. Gregoi re, lui en raconta les particularités, & raporta des reliques que S. Gregoire encore diacre lui avoit donées. Il arriva à Tours la même année 590. quinziéme du roi Childebert: & trouva l'évêque Gregoire occupé avec plufieurs autres à apaifer un grand fcandale arrivé au monaftére de fainte Croix de Poitiers. Sainte Radegonde qui en étoit la fondatrice, l'avoit recomandé à tous les évêques, par une lettre où elle dit qu'elle l'a fondé par les libéralités du roi Clotaire, fous la régle de S. Cefaire d'Arles, & y a établi du confentement des évêques l'abbeffe Agnés, qui a été benite par S. Germain. Elle les prie de ne jamais permettre que l'on viole la régle, ni que l'on diffipe les biens du monaftére ; & conjure les princes de lui accorder leur protection. Cette lettre eft comme le teftament de fainte Rade

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