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AN. 633.

fouvent pour gagner à Dieu un grand nombre d'ames, nos peres ont ufé de ménagement & de condefcendance, fans rien relâcher de l'exactitude des dogmes. Qu'ainfi dans l'occafion préfente, il ne falloit point chicaner fur cet article, qui ne bleffoit en rien la foi, puifque quelquesúns des peres avoient ufe de cette expreffion. Mais Sophrone ne voulut en aucune maniere recevoir ce ménagement; & étant venu à C P. il nous a preffé de faire ôter cet article, ce qui nous a paru dur : comme rompant la réunion de tant de peuples, qui jufques ici ne pouvoient fouffrir le nom de S. Leon, ni du concile de Calcedoine, & à préfent le récitent à haute voix dans les faints myftéres.

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Aprés donc avoir beaucoup parlé fur ce fujet avec Sophrone nous l'avons enfin preffé de nous raporter des paffages des peres, qui nous enfeignaffent expreffement & en propres termes, qu'il faut reconoître deux opérations en JESUS-CHRIST : ce qu'il n'a pû faire. Ainfi voyant que cette difpute començoit à s'échauf fer, & fachant que tels font ordinairement les comencemens des héréfies, nous avons crû néceffaire d'apliquer tous nos foins › pour faire ceffer ces combats inutiles de paroles. Nous avons donc écrit au patriarche d'Alexandrie, que la réunion des schifmatiques étant exécutée, il ne permit plus à perfone de parler d'une ou de deux opérations en JESUS-CHRIST ; mais qu'il ordonât de dire plûtôt comme les conciles œcuméniques, qu'un feul & même JESUSCHRIST opére les chofes divines & les choses humaines ; & que toutes fes opérations procédent indivifiblernent du même Verbe incarné, & fe raportent à lui feul. Car l'expreffion d'une opération, quoiqu'elle fe trouve dans quelquesuns des peres, femble toutefois étrange à quelques

ques-uns, qui craignent qu'elle ne tende à la fu- AN. 633 preffion des deux natures: ce qu'à Dieu ne plaife: & plufieurs font fcandalifes du terme de deux opérations, parce qu'il ne fe trouve dans aucun des peres; & qu'il s'enfuit qu'on doit reconoître deux volontés contraires : en forte que le Verbe voulût l'accompliffement de la paffion, & que l'humanité s'y oposât. Il faudroit donc reconoître deux principes de ces deux volontés ; ce qui eft impie. Car il eft impoffible que le même fujet ait tout enfemble, à l'égard du même objet, deux volontés contraires. Or les peres nous enfeignent, que la chair du Seigneur animée d'une ame raifonable, n'a jamais eu aucun mouVement naturel, féparé ou contraire à l'ordre du Verbe, & pour le dire plus clairement : comme nôtre corps eft gouverné & réglé par l'ame raifonable; ainfi tout le compofé de l'humanité de JESUS-CHRIST étoit toûjours & en foumis à la divinité du Verbe, & conduit

tout,

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de Dieu.

Et enfuite: Enfin nous fommes convenus, que p. 925. C. Sophrone ne parleroit plus d'une ni de deux vofontés: mais qu'il fe contenteroit de fuivre le chemin battu, & la doctrine feure des peres. Nous ayant donc promis d'en ufer ainfi, il nous a demandé fur ce fujet votre réponse par écrit, afin qu'il pût la montrer à ceux qui l'interrogeroient fur cette queftion: ce que nous lui avons accordé volontiers, & il s'eft embarqué pour s'en retourner. Depuis peu l'empereur étant à Edesse nous a écrit d'extraire les paffages des peres contenus dans l'écrit dogmatique de Menas à Vigile, touchant une opération, & une volonté, & de les lui envoyer ce que nous avons exécuté, Nous avons auffi écrit à l'empereur, & à son facellaire, tout le détail de ce que nous avons fait fur ce fujet & l'importance de ne point

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AN, 633. aprofondir. cette queftion, mais de s'en tenir à la doctrine conftante des peres. Sur quoi nous avons reçu de l'empereur une réponse digne de lui. Nous avons cru néceffaire de vous doner conoiffance de tout ceci par les copies que nous vous envoyons. Nous vous prions de les lire toutes: fi quelque chofe manque à nos difcours d'y fupléer, & de nous faire réponse pour décla rer vôtre fentiment.

Sup. n. 10.
Max. difp.

to. 2.op. p. 183.

XLIV. Ré onfe d'Hono

rius.

Telle eft la lettre de Sergius de CP. au pape Honorius, toute remplie d'artifice & de déguifement. Il ne parle point de fes écrits à Theodore de Pharan, à Paul le borgne, & à George Arfa : ni de la lettre de l'empereur à Arcade de Chypre, & fait l'ignorant de la queftion des deux volontés, avant que Cyrus lui écrivit de Phafis. Il apuye toûjours fur le prétendu écrit de Menas à Vigile, fabriqué exprés pour foûtenir le Monothelifme. Il impofe aux peres, en difant que quelques-uns ont enfeigné une opération, & qu'aucun n'a parlé de deux : car le contraire fera prouvé dans la fuite. Enfin l'on va voir, qu'il impofe auffi à faint Sophrone, en difant qu'il étoit convenu de garder le filence fur cetté queftion.

STIL

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Mais le pape Honorius ne découvrant pas ces artifices de Sergius, lui répondit ainfi Nous avons reçu vôtre lettre, par laquelle nous avons Conc.6.act, apris, qu'il y a eu quelques difputes & quelques 12.p.928. nouvelles queftions de mots, introduites par un certain Sophrone, alors moine, & maintenant évêque de Jerufalem, contre nôtre frete Cyrus évêque d'Alexandrie: qui enfeigne aux hérétiques convertis, qu'il n'y a qu'une opération en JESUS-CHRIST. Que Sophrone étant venu vers vous, a renoncé à fes plaintes par vos inftructions, & vous les a demandées par écrit. Confidérant la copie de cette lettre à Sophrone,

nous voyons que vous lui avés écrit avec beau- AN. 633. coup de prévoyance & de circonspection ; & nous vous loüons d'avoir ôté cette nouveauté de paroles, qui pouvoit fcandalifer les fimples. Et enfuite: Nous confeffons une feule volonté en p. 929. B. JESUS-CHRIST, parce que la divinité a pris, non pas nôtre péché, mais nôtre nature: telle qu'elle a été créée, avant que le péché l'eût corrompue. Et enfuite: Nous ne voyons point, que p. 932. A. les conciles ni l'écriture nous autorife à enfeigner une ou deux opérations. Mais peut-être quelqu'un a parlé ainfi en bégayant & s'accomodant aux foibles : ce qui ne doit point être tiré en dogme. Car que JESUS-CHRIST foit un feul opérant par la divinité & l'humanité, les écritures en font pleines: mais de favoir si à caufe des œuvres de la divinité & de l'humanité, on doit dire ou entendre une opération ou deux, c'eft ce qui ne nous doit point importer, le laiffons aux grammairiens. Et encore: Nous p. 932. D. devons rejetter ces mots nouveaux, qui scandalifent les églifes; de peur que les fimples, choqués de l'expreffion de deux opérations, ne nous croyent Neftoriens; ou ne nous croyent Eutychéens, fi nous ne reconoiffons en JESUS-CHRIST, qu'une feule opération. Il conclut en difant : Enfeignés ceci avec nous, comme nous l'enseignons unanimement avec vous. C'est la fameuse lettre du pape Honorius, fur la confultation du patriarche Sergius.

& nous

P. 933. B.

XLV.

terre.

Le même pape ayant apris la conversion d'Edoüin roi de Northumbre en Angleterre, lui Eglife écrivit pour l'exhorter à la perfévérance. Il lui d'Anglerecomande la lecture des œuvres de S. Gregoi- Sup. n. 37re; puis il ajoûte : Quant à ce que vous nous Beda 11. avés demande pour l'ordination de vos évêques, hift.6.17. nous vous l'accordons volontiers, & nous enyoyons aux deux métropolitains Honorius &

Pau

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Paulin, à chacun un pallium: afin que quand Dieu retirera l'un des deux, l'autre puiffe lui doner un fucceffeur en vertu de cette lettre. Ce que nous donons à la diftance des lieux : c'està-dire, afin qu'il ne falût pas recourir à Rome. La lettre eft de l'onzième de Juin 634. indiction feptiéme. Jufte archevêque de Cantorberi étoit mort, & Honorius ayant été élu à fa place, vint trouver S. Paulin d'Yorc, qui le facra cinquième évêque de Doroverne ou Cantorberi depuis S. Auguftin. Le pape Honorius écrivit aux Ecoffois, c'est-à-dire aux Hibernois, pour les exhorter à quitter leur obfervance finguliere touchant la pâque ; mais fa lettre fut fans effet.

Le roi Edouin étoit fi zelé pour la foi, qu'il perfuada à Carpuald roi d'Eftangle ou des Anglois orientaux, de l'embraffer avec tout fon peuple. Reduald pere de ce roi avoit autrefois reçu le baptême dans le païs de Cant: mais étant revenu chés lui, il fut féduit par fa femme & par quelques mauvais docteurs; en forte qu'il joignit le culte de fes anciens dieux à celui de JESUS-CHRIST, & que dans le même temple il avoit deux autels, un pour le facrifice de JESUS-CHRIST, & un pour les victimes du démon. Son fils Carpuald fut tué peu de temps. aprés fa converfion, & la province demeura trois ans dans l'erreur, jufques au regne de Sibert fon frere qui s'étoit fait Chrétien en Gaule, y étant exilé. Si-tôt qu'il fut roi, il travailla à convertir toute la province : en quoi il fut bien fecondé par l'évêque Felix, né & ordoné en Bourgogne. Etant venu trouver Honorius archevêque de Cantorberi, & lui ayant découvert le deffein qu'il avoit de précher aux infidéles, l'archevêque l'enwoya à cette nation des Anglois orientaux, où il travailla avec tant de fuccés, qu'il convertit tou

te

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