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Beda 111.

fion des Middelangles, deux ans aprés il procu ra celle des Merciens. Il ne pouvoit plus fouffrir hift.c.24. les infultes de leur roi Penda, qui lui avoit tué fon frere, pilloit continuellement fon païs, & vouloit exterminer fa nation. Aprés lui avoir offert de tres-grands préfens pour racheter la paix fans le pouvoir apaifer: il fit vou, s'il venoit à le vaincre, de confacrer à Dieu fa fille, qui n'avoit qu'un an, & de doner douze terres pour bâtir des monafteres. Aprés ce vou, il marcha avec tres-peu de troupes contre Penda, qui en avoit trente fois autant: & toutefois il défic l'armée des payens, & remporta une pleine victoire le dix-neuviéme de Novembre, la treizième année de fon regne, 655. de JESUS-CHRIS T. Penda fut tué, & le royaume de Northumbre non feulement mis en sûreté mais augmenté par la jonction de celui des Merciens, dont Ofui devint le maître. Il accomplit fidellement fon vœu, & dona douze terres ; dont chacune comprenoit dix familles, c'est-à-dire, fix vingts en tout la fille fut mife fous la conduite de la fainte abeffe Hilde; & en fa faveur le roi dona une terre de dix familles, au lieu nomé Streneshal, & Y fonda un monaftere avec une église de S. Pierre, qui fut le lieu de fa fepulture, de la reine fa femme, & de plufieurs autres princes. Ce monaftere étoit double; & de celui des hommes, fortirent plufieurs faints prêtres & plufieurs faints évêques.

6. 21.

6. 22.

Le roi Ofui, aprés fa victoire, s'apliqua à la converfion des Merciens fes nouveaux fujets. Leur premier évêque fut Diuma, l'un des quatre prêtres que le prince Penda avoit amenés ; & Finan évêque de Lindisfarne, l'ordona évêque des Middelangles & des Merciens; car la rareté des évêques obligeoit d'en doner un à deux peuples. Le roi Ofui procura auffi la converfion des

Saxons orientaux, dont la capitale étoit Lon

dres, & qui avoient autrefois chaffé S. Mellit Sup. liv. leur évêque, & renoncé à la foi. Leur roi étoit xxXVII.. afors Sigebert ami du roi Ofui, qu'il venoit fou- 17• vent voir en Northumbre; & celui-ci l'exhortoit à quitter l'idolâtrie, en lui difant: On ne peut faire un Dieu de pierre ou de bois, dont on fait des uftenciles pour l'ufage de la vie, & dont on brûle les reftes. Il faut plûtôt croire que Dieu eft incompréhenfible, tout-puiffant, éternel: qu'il jugera tous les hommes, & donera des récompenfes éternelles à ceux qui feront la volonté. Ĉes difcours perfuaderent Sigebert roi d'Effex, & il fut baptife par l'évêque Finan, dans la maifon royale prés de la grande muraille. En retournant chés lui, il pria le roi Ofui de lui doner des docteurs capables de convertir & de baptifer fa nation : & Ofui envoya en Middelangle, d'où il fit venir un faint prêtre nomé Cedde, avec un autre prêtre, & les envoya prêcher en Effex. Aprés avoir parcouru tout le païs, & formé une grande églife, Cedde retourna chés lui, & vint à Lindisfarne voir l'évêque Finan : qui ayant apris de lui le progrés de l'évangile chés les Saxons orientaux, l'en ordona évêque, étant affifté de deux autres.

baptifer.

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IV.

Cedde étant évêque, retourna en Effex travailler avec plus d'autorité. Il fonda des églifes s. Cedile en divers lieux, & ordona des prêtres & des évêque diacres, pour lui aider à prêcher & à d'Eflex. Il affembla même à Tilabourg fur la Tamife une comunauté où il faifoir pratiquer la vie religieuse, autant que ces nouveaux Chrétiens en étoient capables. Il excomunia un des parens du roi, pour avoir contracté un mariage illicite ; & défendit à qui que ce fût d'entrer dans fa maifon, ni de manger avec lui. Le roi Sigebert étant chés cet excomunié à manger Tome VIII.

prié

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ne laifla

T

pas

Beda 111. bift.c 23.

pas d'y aller. Mais comme il en fortoit, il ren-
contra le faint évêque. Il fut épouvanté, def-
cendit de fon cheval, fe jetta à fes pieds, & lui
demanda pardon. L'évêque qui étoit auffi à che-
val, mit pied à terre : mais étant irrité il toucha
le roi d'une verge, qu'il tenoit à la main, & lui
dit avec l'autorité pontificale: Parce que vous
n'avés pas
voulu vous abftenir d'entrer dans la
maison de cet homme perdu, vous y mourrés.
En effet, ce même homme & fon frere, quoi-
que parens du roi, le tuerent. Et quand on leur
en demanda la caufe, ils ne purent en dire d'au-
tre, finon, qu'ils ne pouvoient fouffrir, qu'il
pardonât fi facilement à fes ennemis. Car fi-tôt
qu'ils lui demandoient grace, il la leur accordoit,
fuivant le précepte de l'évangile.

Quoique Cedde fut évêque d'Effex, il ne laiffoit pas de retourner quelquefois en fon païs de Northumbre, pour y exhorter les fideles. Edilvard fils du roi Ofuald, qui regnoit dans la province de Deïre, avoit auprés de lui un frere de l'évêque nomé Celin, qui étoit prêtre, l'inftruifoit lui & fa famille, & leur adminiftroit les facremens. Le roi par le moyen de ce frere, conoiffant la vertu de l'évêque, l'excita à lui demander quelque terre pour bâtir un monaftere, où le roi lui-même pût venir faire fes prieres & ouir les inftructions, & où l'on enterrât les morts, Car il croyoit, qu'ils y feroient fort aidés par les prieres des moines. L'évêque choi

fit
un lieu dans des montagnes rudes & écartées ;
& demanda permiffion au roi d'y demeurer en
priere durant le carême, qui étoit proche. Pen
dant tout ce temps, il jeûnoit jufques au foir
tous les jours, hors les dimanches ; & ne pre-
noit qu'un peu de pain avec un œuf, & un peu
de lait mêlé d'eau. Par où l'on voit, qu'en ce
païs-là les laitages, ni même les œufs, n'étoient

pas

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pas défendus en carême. C'étoit l'ufage des AN. 654 moines, chés qui le faint évêque avoit été élevé, de confacrer par des prieres & des jeûnes le lieu où ils devoient bâtir un monaftére ou une églife. Comme il reftoit encore dix jours du carême, le roi le fit apeller ; & il pria le prêtre Cymbelle fon frere, d'achever cette préparation du lieu. Car ils étoient quatre freres, tous prêtres; Cedde, Cymbelle, Celin & Ceadda, dont le premier & le dernier furent évêques. Ainfi fut fondé le monaftere de Leftington, fuivant la regle, de Lindisfarne, où l'évêque Cedde avoit été élevé. Il y mit pour abbé aprés lui, fon frere Ceadda.

V.

S. Martin

à C P.

Commem.

Cependant le pape S. Martin étoit dans l'ifle de Naxe, où les évêques & les fidéles du païs lui envoyoient fouvent, & en grande quantité, de quoi foulager fes befoins. Mais auffi-tôt fes gardes pilloient tout en fa préfence, le char- c. to. 6. geant de reproches injurieux. Ils maltraitoient cons. p. 66. même de paroles & de coups, ceux qui aportoient les prefens, & les chaffoient, en difant: Quiconque aime cet homme, eft ennemi de l'état. Le faint pape fentoit plus vivement les injures de fes bienfaiteurs, que les douleurs de fa goute, & fes autres incomodités. Etant partis de Naxe, & arrivés à Abyde, ceux qui le conduifoient, envoyercnt à C P. doner avis de fon arrivée : le traitant d'hérétique, d'ennemi de Dieu & de rebéle, qui foulevoit tout l'empire. Enfin faint Martin arriva à C P. le dix-feptiéme jour de Septembre 614. On le laila au port depuis le matin, jufques à quatre heures aprés midi, dans le vaiffeau, couché fur un grabat, expofé en fpectacle à tout le monde. Plufieurs infolens, & même des payens, s'aprochoient, & lui difoient des paroles outrageantes. Vers le coucher du foleil, vint un fcribe nomé Sagoleve, avec pluTij fieurs

AN. 554.

Epift. 14. to. 6. conc. p. 63.

fieurs gardes. On tira le pape de la barque, on l'emporta fur un brancard, on le mena dans la prifon nomée Prandearia; & Sagoleve défendit que perfone de la ville ne fçût qu'il y étoit. Le pape demeura donc enfermé dans cette prifon, fans parler à perfone, pendant quatre-vingt-treize jours, qui font trois mois, c'est-à-dire, depuis le dix-feptiéme de Septembre, jufques au quin

ziéme de Decembre.

Ce fut aparemment de là qu'il écrivit les deux lettres à Theodore. Dans la premiere, il se justifie contre les calomnies dont on le chargeoit ; premierement par le témoignage que le clergé de Rome avoit rendu de fa foi en prefence de l'exarSup. n. z. que Calliopas, enfuite par la proteftation qu'il fait lui-même de la défendre jufques à la mort. Puis il ajoûte: Je n'ai jamais envoyé aux Sarrafins, ni argent, ni lettres, ni l'écrit que l'on dit, pour leur marquer ce qu'ils doivent croire. J'ai feulement doné quelque peu de chose à des ferviteurs de Dieu, qui venoient chercher des aumônes mais ce n'étoit pas pour les Sarrafins, Quant à la glorieufe Vierge Marie Mere de Dieu, ils ont porté faux témoignage contre moi, Car je déclare anathême, & en ce monde, & en l'autre, à quiconque ne l'honore pas au-deflus de toutes les créatures, excepté fon Fils NôtreSeigneur,

Epift. 15. Sup. n. 2.

Sup. liv.

XXXVIII. n. 20.

p. 65. C.

:

Dans l'autre lettre, il raconte comme il fut enlevé de Rome, & comme l'exarque Calliopas prefenta un ordre de l'empereur, pour faire élire un autre pape à fa place. Sur quoi il dit : On ne l'a encore jamais fait ; & j'efpere qu'on ne le fera jamais: car en l'abfence de l'évêque, l'archidiacre, l'archiprêtre & le primicier tiennent fa place. Ayant raconté ce qu'il a fouffert dans le voyage, il ajoûte à la fin: Il y a quarante-fept jours que je n'ai pû obtenir de me laver ni d'eau

chaude,

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