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comme des évêques. On choififfoit les Chre tiens les plus parfaits par confequent les plus humbles & les plus défintereffés, qui ne fongeoient qu'à fe cacher, à fe préferver des tentations, à goûter en filence la beauté des vérités éternelles, à s'unir à Dieu par la priere. II falloit leur faire violence, pour les tirer de ce repos, & les obliger à rentrer dans l'action extérieure & le comerce des hommes, en remex.civit diant à leurs miferes. L'amour de la vérité, dit 6394 faint Auguftin, ne cherche qu'un faint loifir: mais la néceffité de la charité le charge d'affaires juftes.

VII. Solemnité

XVIII. n.19. liv. XVI. 9.16.

L'utilité de ce grand nombre d'officiers, & de leurs ordres differens, paroiffoit dans les affemdes offices, blées de religion, & principalement au faint facrifice. Car on le célébroit pour l'ordinaire, avec toute la folemnité poffible. Vous avés vu quelques occafions, où on faifoit l'oblation en partiHift. liv. culier, & avec moins de cérémonies. Saint Cy1.2.35. prien parle de celles qui fe faifoient dans les pri Hift. liv. fons des martyrs, & veut qu'il n'y ait qu'un prê tre & un diacre: montrant combien le miniftére du diacre étoit jugé neceffaire. Vous avés vu faint Ambroise célébrer à Rome, dans une maifon particuliere ; & faint Gregoire de Nazianze le pere, même dans fa chambre. Voilà des meffes particulieres bien anciennes : mais il faut convenir, que ces occafions n'étoient pas fréquentes MaursChr. & que la meffe ordinaire étoit folemnelle ; c'estM. 39. 40. à-dire, que tous les prêtres ou les évêques, qui c. hift. fe trouvoient au même lieu, s'affembloient en P. 15. &c. une églife avec tout le refte du clergé & du peuple; & concouroient tous à une même action, de la maniere que j'ai décrite.

liv. XXXVI.

On croyoit ne pouvoir jamais affés honorer le fervice divin, l'adminiftration des facremens, particulierement l'euchariftie, où JESUS

CHRIST fe rend lui-même préfent. De-là venoit la magnificence des églifes dont je vous ai doné quelques defcriptions: la multitude des Hift. liv. vafes d'or & d'argent : l'abondance du luminaire .3. X1, 45q & des parfums: le grand nombre d'officiers, 14.11. 10g portiers, menfionaires, facriftains, tréforiers,

pour garder les vafes facrés, & les églises mê

mes,

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les orner & les tenir propres. Tout cela n'étoit point difficile, même dans les villes médiocres ; quand il n'y avoit qu'un feul service, & que tout fe raffembloit en un même lieu. Rien n'étoit plus propre à doner au peuple & aux hommes les plus groffiers, une haute idée de nos myftéres. Les payens mêmes convenoient, que ce facrifice, qu'on leur cachoit avec tant de foin étoit quelque chofe de grand: puifqu'on le préparoit avec un fi grand apareil. D'ailleurs l'unité de prieres & de facrifice, marquoit mieux l'unité de Dieu, & la comunion des faints. Que fi l'on eft en peine comment tout le peuple pouvoit affifter à un feul office, il faut s'en raporter à une experience de plufieurs ficcles; car on ne dira pas, que le nombre des Chrétiens ne fût grand, au moins dés le quatrième. Il eft vrai, que l'on célébroit plufieurs meffes de fuite dans la même églife, quand il étoit besoin, comme le témoigne faint Leon.

Après l'euchariftie, rien n'étoit plus folemnel, que l'administration du baptême, réservé à deux jours de l'année, précedé de longues préparations, accompagné de tant de prieres & de cérémonies, dont nous gardons encore la formule conferé dans un baptiftere magnifique, avec des vafes precieux. Tout cela ne contribuoit pas peu à faire concevoir l'importance de cette action; & à rendre le facrement vénérable, à ceux qui le recevoient, aux fidéles qui en étoient fpectateurs, & aux infidéles qui en entendoient parler.

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Il en étoit de même à proportion de la péni Pénitence. tence. Je vous ai raporté non-feulement les canons pénitentiaux, mais plufieurs exemples de la ma→ MaursChr. niere dont ils étoient mis en pratique. Vous en 7. 25. hift. avés été fans doute étonés, particulierement de liv.v.n.46. ce liv. ix. n. que les plus anciens canons font toûjours les 14. n. 21. plus rigoureux; & que du temps même des perliv. XVII. fécutions, ce n'étoit point par l'indulgence, mais .14.15.16. par la févérité des peines, que l'on prétendoit liv.xix.n. retenir les foibles. Cependant, dés-là que les ca

52.

nons les plus anciens font les plus févéres, il faut conclure, que cette févérité venoit de la tradition des apôtres : c'est-à-dire, de ] Esu S-CHRIST; & par confequent, que c'eft nôtre faute, fi elle nous paroît exceffive.

Mais, dirés-vous, tenir des gens en pénitence, pour un feul péché, des quinze & vingt ans, & quelquefois toute leur vie: les tenir des années entieres, hors la porte de l'églife, expofes au mépris de tout le monde: puis d'autres années dans l'églife, mais profternés: les obliger à por ter des cilices, des cendres fur la tête, à fe laiffer croître la barbe & les cheveux, à jeûner au pain & à l'eau, à demeurer enfermés, & renoncer au comerce de la vie : n'étoit-ce pas de quoi défefperer les pécheurs, & rendre la religion odieufe? J'en dirois autant à ne confulter que les idées ordinaires. Mais je fuis retenu, premierement par les faits que je vous ai raportés, Je ne les ai pas inventés ils ne me feroient pas même tombés dans l'efprit; ils font conftans, vous pouvés les vérifier. vous-mêmes. Sur quoi je raifone ainfi: Nous n'avons pas fait nôtre religion; nous l'avons reçue de nos peres, telle qu'ils l'avoient reçue des leurs, jufques à remonter aux apôtres. Donc il faut plier nôtre raison, pour nous foû→ mettre à l'autorité des premiers temps, non-feulement pour les dogmes, mais pour les pratiques,

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Enfuite examinant les raifons, que les anciens nous ont donées de cette conduite fur la pénitence, je les trouve tres-folides. Le péché, difentils, eft la maladie de l'ame : or les maladies ne fe : guériffent pas en un moment. Il faut du temps, pour éloigner les occafions & diffiper les images criminelles pour apaifer les paffions, faire concevoir l'énormité du péché, fonder à fonds tous les replis d'une confcience, déraciner les mauvaifes habitudes, en acquérir de contraires, former des réfolutions folides, & s'affurer soi-même de la fincérité de fa converfion. Car fouvent un homme fe trompe, fans le vouloir, par une ferveur fenfible, mais paffagere. D'ailleurs la longueur de la pénitence, étoit propre à imprimer fortement l'horreur du péché, & la crainte de la rechûte. Celui qui pour un feul adultere, fe voyoit exclus des facremens pendant quinze ans : avoit le loifir de conoître le crime qu'il avoit comis, & de penfer combien il feroit plus horrible, d'être à jamais privé de la vûë de Dieu. Celui qui étoit tenté de comettre un pareil péché, y penfoit à deux fois, pour peu qu'il eût de religion; quand il prévoyoit, qu'un plaifir d'un moment auroit infailliblement, dés cette vie, de fi terribles fuites : ou de faire pendant quinze ans une rude pénitence, ou d'apoftafier & retourner au paganifme. Car un an de fouffrances préfentes frape plus l'imagination, qu'une éternité aprés la mort. L'éclat des pénitences faifoit fon effet non feulement fur les pénitens, mais fur les fpectateurs; l'exemple d'un feul, empêchoit plufieurs péchés, & le refpect humain venoit au fecours de la foi. On recouvre peu à peu, dit faint Au- Aug. ferma guftin, ce que l'on a perdu tour à la fois. Car fi 278. n. z. T'homme revenoit promptement à fon premier bonheur, il regarderoit comme un jeu la chûte mortelle du péché,

al.

34. de

diverf. c. si

Que

Que fi nous en jugeons par les effets, nous verrons encore combien cette rigueur étoit falutaire. Jamais les péchés n'ont été plus rares parmi les Chrétiens; & à proportion que la difcipline s'eft relâchée, les mœurs fe font corrompues. Jamais il ne s'eft converti plus d'infidéles, que quand l'examen des catécuménes étoit le plus rigoureux, & les pénitences des baptifés les plus feveres. Les œuvres de Dieu ne fe menent pas par une politique humaine. Nous le voyons en pecit dans les comunautés religieufes. Celles qui ont relâché leur obfervance, diminuent de jour en jour: quoique le prétexte du relâchement foit d'attirer plus de fujets, en s'accomodant à la foibleffe humaine. Les maifons les plus régulieres & les plus aufteres, font celles où on s'empreffe leplus de trouver place.

pas

Aufli faudroit-il être bien téméraire pour accufer de dureté ou d'indifcrétion, je ne dis les apôtres infpirés de Dieu, mais S. Cyprien, S. Gregoire Thaumaturge, S. Bafile & les autres, qui nous ont laiffé ces régles de pénitence. A ne regarder que les difpofitions naturelles nous ne conoiffons point d'hommes plus fages plus doux, plus polis: la grace venant par-def fus, ne les avoit pas gâtes. Ils fe propofoient toûjours pour modéle, celui qui eft venu fauver les ames, & non pas les perdre, qui eft doux & humble de cœur. Les peuples, qu'ils avoient à gouverner,n'étoient pas non plus des nations du→ res & fauvages: c'étoient des Grecs & des Romains, dont les mœurs dans la décadence de l'empire, n'étoient que trop amolies par le luxe & la fauffe politeffe.

D'où venoit donc cette rigueur des pénitences? de l'ardente charité de ces faints pafteurs, accompagnée de prudence & de fermeté. Ils vou loient ferieufement la converfion des pécheurs,

&

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