eu le bonheur de sauver ces études si intéressantes de la destruction dont elles étoient menacées, la plupart se trouvant confondues avec d'autres dessins et des estampes anciennes que des enfans découpoient pour leur amusement.

C'est avec la plus grande satisfaction que nous avons appris aussi que le cit. Legrand se proposoit de graver ou faire graver partie de ces études de Léonard, particulièrement celles qui ont les proportions du corps humain pour objet, et de les joindre à une notice historique sur la vie de Léonard de Vinci, sur le caractère de ses dessins et sur ́les observations qui peuvent aider à constater leur originalité, ou à reconnoître les imitations qui en ont été faites, soit par ses élèves, soit par d'autres artistes.

Nous ne pouvons qu'applaudir à un tel projet qui enrichira le domaine des arts, et nous desirons bien vivement qu'il soit mis promptement à exécution.

Et comme le cit. Legrand nous l'a fait espérer, quelques-uns de ces croquis, remplis de grace et de finesse, peuvent être rendus par la pointe naïve et spirituelle du cit. De

nou, à qui les arts ont déja tant d'obligations,

et qui lui doivent, tout récemment encore, le beau Voyage en Egypte, dessiné, rédigé d'une manière si intéressante, et gravé en partie par lui-même; nul doute que tout le charme des dessins de Léonard ne soit fidèlement transmis dans les gravures que cet amateur veut joindre à la notice du cit. Legrand.

Je ne terminerai pas cette note additionnelle à l'énumération des ouvrages de Léonard de Vinci, sans rappeler à tous les amis de cet homme célèbre et vraiment extraordinaire; le superbe dessin qui a été fait de sa Cène par le cit. Dutertre, peintre français, dessin qui a obtenu, à l'exposition publique au Louvre, il y a quelques années, les suffrages de tous les artistes, et qui est regardé comme un monument d'autant plus précieux qu'il conserve dans toute sa pureté ce chef-d'œuvre de la Peinture, aujourd'hui extrêmement dégradé: il l'étoit beaucoup moins lorsque le cit. Dutertre fit ce beau dessin d'une extrême fidélité, où toutes les expressions sont parfaites. L'artiste avoit pris la précaution, pour que rien ne manquât à son ouvrage, de s'aider de la belle copie de la Cène, exécutée à Milan par Marc Uglone, élève de Léonard, dans le couvent de Saint-Jérôme, je crois près du

canal, et de celle du réfectoire de la Chartreuse de Pavie (1); que le même Marc Uglone y a dessinée et qui a été coloriée par Paul Lomazzo, autre élève de Léonard. Ces belles copies ayant l'avantage d'être beaucoup mieux conservées que l'original, le cit. Dutertre a pu rétablir dans son dessein 'les parties entièrement effacées dans le tableau de Léonard, et ce mérite infini dans ce dessin que nous nous plaisons à citer comme un chef-d'oeuvre, doit faire desirer aux véritables amis des arts qu'un burin aussi gracieux que celui de Morghen transmette une seconde fois à la postérité la Cène de Léonard, qu'on ne sauroit trop multiplier.

(1) Cette belle copie, peinte sur toile, n'a point été détruite pendant les dernières guerres, un particulier l'a achetée lors de la vente des effets de ce monastère,et l'a transportee à Milan où on la grave maintenant. On observera des différences assez remarquables avec l'original qui a été, comme nous l'avons dit, trèsdégradé et souvent retouché, au point que la belle composition de Léonard en a été très-altérée.

y

FIN.

TRAITE

TRAITÉ

D. E

LA PEINTURE.

CHAPITRE PREMIER.

Quelle est la première étude que doit faire un jeune Peintre.

LA perspective est la première chose qu'un jeune Peintre doit apprendre pour savoir mettre chaque chose à sa place, et pour lui donner la juste mesure qu'elle doit avoir dans le lieu où elle est : ensuite il choisira un bon maître qui lui fasse connoître les beaux contours des figures, et de qui il puisse prendre une bonne manière de dessiner. Après cela il verra le naturel, pour se confirmer par des exemples sensibles dans tout ce que les leçons qu'on

A

lui aura données et les études qu'il aura faites, lui auront appris : enfin il emploiera quelque temps à considérer les ouvrages des grands maîtres et à les imiter, afin d'acquérir la pratique de peindre et d'exécuter avec succès tout ce qu'il entreprendra.

Les règles de la perspective dont les Peintres font continuellement usage, et celles de l'architecture qu'ils sont souvent obligés d'employer, appartiennent les unes et les autres à la géométrie: or la géométrie la plus simple et la plus élémentaire entraîne la nécessité de l'arithmétique, pour le calcul des angles et des côtés des figures.

Cet art de représenter les objets sur un plan, selon la différence que l'éloignement y apporte soit pour la figure et la couleur, est un des plus puissans pres Liges de l'illusion que la Peinture fait à nos sens. Tous les peuples qui ont connu le dessin, ont dû avoir une idée plus ou moins juste et plus ou moins étendue de la perspective; et les plus savans Peintres de l'antiquité, comme les modernes, ont possédé cette science par excellence.

La perspective est on spéculative, ou pratique. La spéculative est la théorie des différentes apparences ou représentations de certains objets, suivant les différentes positions de l'oeil qui les regarde, les conséquences qui en dérivent appartiennent an simple raisonnement.

2.