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pouillée on la jetta à terre en la chargeant d'injures. AN. 1465. Cet indigne fpectacle fe donna le mercredi cinquiéme de Juin. Après quoi le jeune infant Don Alphon. fe qui y avoit toûjours été préfent, monta fur le théatre, fut élevé fur les épaules des principaux feigneurs qui étoient auprès de lui, & placé dans le même trône d'où l'on avoit renversé la ftatuë de Henri fon frere. On le revêtit des mêmes ornemens roïaux, & il fut proclamé roi de Castille. Cette ac tion infolente fut caufe que plufieurs feigneurs se détacherent du parti des rebelles & entrerent fous l'obéïffance de leur roi. Don Garcie de Tolede qui étoit entré dans fes bonnes graces, vint à son secours avec cinq cens lances & mille hommes d'infanterie.Les autres chefs des mécontens voïant que leur ligue fe diffipoit insensiblement, résolurent de faire un dernier effort pour se faifir de la perfonne du roi,afin d'abufer de fon nom & de fon autorité,comme avoient fait les princes d'Arragon fous le regne précedent,

CXLIII.

nent les armes.

Sabellic. 10. Enn. 6,

Sa cour étoit alors à Madrid, & les habitans téLes conjurez pren- moignerent tant de zéle pour Henri, que les conféderez ne purent exécuter leur deffein. Ils jugerent bien que cette entreprise ayant éclaté, il n'y auroit plus de fureté pour leurs perfonnes, & qu'il falloir avoir recours à la force. Ils prirent les armes, & répandirent par tout des manifeftes pour montrer qu'Henri étoit déchû de la couronne, & qu'on ne devoit reconnoître pour roi qu'Alfonfe. Henri se mir en campagne de fon côté avec ceux qui lui étoient demeurez fidéles, & alla chercher fon frere qu'il rencontra auprès d'Oviedo, Les deux armées en vin

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*rent aux mains; le combat fut long & opiniâtre, & les deux partis fe féparerent avec un avantage prefque égal. Les étendards d'Alfonfe, du comte de Placentia, de l'archevêque de Seville, & du marquis de Villena principaux chefs des mécontens demeurerent au pouvoir du roi, & les confederez à leur tour prirent la banniere royale, firent quatre cens prifonniers, & après le combat fe rendirent maîtres de Segovie.

AN. 1465.

CXLIV. Ligue des princes

bien public.

La ligue du bien public éclata dans cette année en France, & furprit d'autant plus le roi Louis XI. en France pour le qu'il y avoit plus de quatre ans qu'elle fe menageoit & que les grands de l'état formoient leurs intrigues, fans qu'il en eut pu rien découvrir, quelques recherches qu'il en fit, & qu'il ne s'en apperçut que quand il n'étoit plus tems d'y remedier. Sa majesté qui ne penfoit qu'à humilier le duc de Bretagne, avoit fait marcher des troupes dans le Poitou dès le mois de Février, & les fuivit accompagné du duc de Berry fon frere, de René d'Anjou, & du comte du Maine. Tannegui du Châtel & Romillé seigneur de la Chefnelaye ambaffadeurs du duc de Bretagne vinrent trouver le roi à Poitiers & furent reçus avec beaucoup de careffes; ils promirent avec beaucoup de foumiffion que leur maître viendroit dans peu donner au roi toute la fatisfaction qu'il fouhaitoit, & furent congediez avec de grands té moignages d'affection. A peine furent-ils partis que le duc de Berry alla les joindre à fix lieuës de - là, & tous enfemble prirent promtement la route de Bretagne, où le comte de Dunois s'étoit déja rendu avec le maréchal de Loheac & d'autres feigneurs. Le Tome XXIII.

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roi apprenant ces nouvelles fut fort outré, mais ce AN. 1465. qui l'irrita davantage fut la désertion du duc de Bourbon, qui avoit levé l'étendard de la révolte dans le Bourbonnois, s'étoit faifi de tout l'argent du roi qui étoit dans les bureaux, & avoit fait arrêter Louis de Cruffol, Guillaume des Urfins & d'Oriole qu'il regardoit comme ses ennemis.

CXLV.

rolois fe met en

campagne.

liv. 1. ch. 2.

Dans le même tems sa majesté fut informée que Le comte de Cha- le Comte de Charolois s'étoit mis en campagne; que le duc de Bourgogne informé de cette ligue ne s'y Mem. de Comines, étoit point oppofé, qu'il avoit même affuré fon fils. que s'il tomboit dans quelque peril, il n'y demeureroit pas faute de cent mille hommes:que ce comte avoit quatre cens hommes d'armes, huit mille archers, beaucoup d'artillerie & de chariots; que le. rendez-vous étoit devant Paris, où les ducs de Berry & de Bretagne devoient le joindre. Et tout cela étoit vrai. Le comte de Charolois alla d'abord à Cambrai d'où il obligea les feigneurs de Croy de fe fauver en France: il fit un détachement de fon armée dont.il donna la conduite au bâtard de Bourgogne qui entra en Picardie, & prit Roye & Mondidier. Le comte de Nevers empêcha le comte de Charolois de fe faifir de Perronne, & l'obligea à retourner du côté du Pont de fainte Maxence où le lieutenant de roi qui commandoit en l'absence du gouverneur,s'étant laiffé corrompre par argent, livra le paffage & la ville aux Bourguignons. Le comte fit valoir alors le prétexte de la ligue, l'abolition des impôts, le foulagement des peuples, la réforme de l'état & le bien public; il fit brûler tous les regiftres des taxes, il fit donner au peuple le fel pour le même prix qu'il

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CXLVI.
Il arrive à faing

Denis.

coûtoit au roi; & vint en bon ordre jusqu'à saint
Denis proche Paris où le dévoient trouver les ducs AN. 1465.
de Berry & de Bretagne, qui par leur retardement
firent manquer au comte l'occafion de fe rendre maî-
tre de Paris; où il feroit entré aisement, parce qu'il
y avoit alors dans cette ville très-peu de troupes &
beaucoup de mécontens.

Le roi qui étoit alors en Bourbonnois pour arrê-
ter la révolte du duc de Bourbon, envoya Charles de
Melun & Jean Baluë évêque d'Evreux, pour conte-
nir les peuples de Paris dans la fidelité, & pourvoir
à la fûreté de la ville: il donna auffi fes ordres pour
la défense des villes de la Somme; il écrivit dans tou-
tes les provinces pour donner avis de la révolte des
princes, & exhorter les peuples à prendre les armes
contre eux. Il s'avança jufqu'au pont de Cé, & de-
là en Berry à la tête de fon armée,pendant que René
d'Anjou & le comte du Maine allerent couvrir la
Normandie contre les Bretons. Tout le Berry fe fou-
mit,excepté Bourges, où le Bâtard de Bourbon com-
mandoit avec une forte garnison, ce qui empêcha
le roi d'y mettre le fiége; fa majefté s'en alla en Au-
vergne pour réduire le duc de Bourbon qui avoit
quitté Moulins, & s'étoit jetté dans la ville de Riom.
La ducheffe de Bourbon s'étant mêlé d'accommoder
le duc fon époux avec le roi, on en vint à un traité du roi avec le dus
par lequel le duc s'engageoit à mettre bas les armes
& à porter les autres princes confederez à la paix, &
il promettoit de les abandonner s'ils n'acceptoient
pas des conditions raisonnables. Le duc de Nemours
donna fa parole positive au roi de suivre son parti;
mais il ne la tint pas;& le roi s'en vengea dans la fuite

CXLVII.

Accommodement

de Bourbon.

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Auffi-tôt que le traité avec le duc de Bourgogne AN. 1465. fut conclu, le roi fe mit en marche pour aller défendre les Parifrens; mais à peine fut-il parti, que ce duc, le comte de Dammartin, le duc de Nemours & Alain d'Albret manquerent à leur parole,& affem blerent dix mille hommes pour fe joindre aux autres confederez. Le comte de Charolois-las d'attendre les ducs de Berry & de Bretagne voulut faire une tentative fur Paris, il s'avança jufqu'à faint Lazare avec quelques foldats, pour fe rendre maître de la bariere; mais on fit un grand feu fur fes gens qui fe retirerent avec perte. Le comte fur la nouvelle que le duc de Bretagne approchoit paffa la Seine au pont de faint Cloud dont il fe faifit, alla enfuite fe loger au bourg de Longjumeau, & mit fon avant-garde à MontLes deux armées lhery. Le roi apprit cette nouvelle à Orleans, & réfe trouvent en pré-folut d'aller droit au comte pour le combattre avant qu'il eut joint le duc de Bretagne,mais bien-tôt après il changea le deffein, aimant mieux fe jetter dans Paris. Cependant il fut obligé d'en venir à une ac tion. Le fenéchal de Brezé qui vouloit absolument qu'on fe battît, trompa les guides; & le roi fans le vouloir fe trouva à Châtres qui n'eft qu'à une lieuë au-dessous de Montlhery, où le comte de Saint Pol étoit campé avec une partie des Bourguignons.

lence.

CXLVIII.

2

Les uns & les autres furent fort furpris de fe trouver ainfi en présence, & de fe voir obligez d'en venir aux mains. Le comte de Saint Pol qui ne pouvoit décamper fans danger, ou du moins fans paroître fuir, en envoya donner avis au comte de Charolois qui étoit dans la plaine de Longjumeau, & le prioit de le venir joindre au plûtôt. Le comte partie

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