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lan eût defiré qu'un autre eût été élevé à cette dignité, il ne laiffa pas d'ordonner des réjoüiffances publi- AN. 1458, ques dans tous les états au fujet de cette élection. Le duc de Modene qui avoit de l'obligation à Piccolomini, parce qu'il s'étoit employé auprès de l'empereur Frederic pour lui faire donner l'inveftiture de ce duché, ne voulut pas fe montrer ingrat de ses bienfaits, afin qu'il lui continuât fa protection dans un tems où il étoit plus en état de lui faire de bien. Il fit faire un feu d'artifice à Ferrare, enfuite un tournois magnifique, & n'oublia rien pour marquer fa joye & fa reconnoiffance. Les marquis de Mantouë, de Monferrat & de Saluces qui étoient auffi amis du pape firent leur devoir en cette occafion. Les Venitiens & les Florentins ne furent pas contens, parce qu'ils étoient anciens ennemis des Siennois; & ils furent fi peu maîtres de leur reffentiment, que fi quelqu'un de Sienne leur difoit dans les rues en les faluant, Dieu vous conferve, ils répondoient par des injures. Ils ne laifferent pas toutefois d'envoyer des ambassadeurs à Rome pour féliciter le nouveau pape. L'empereur Frederic qui avoit fait donner à Piccolomini le chapeau de cardinal, apprit fon élection avec plaifir. Le roi d'Espagne en reffentit auffi beaucoup de joye. Mais ceux de France, d'Ecoffe, de Dannemarck, de Pologne, de Hongrie & de Chypre n'en parurent pas fort fatisfaits.

LXXII.
Mort du cardinal

Dans le tems qu'on faifoit les obféques du pape Callixte, le cardinal Dominique Capranica mourut. Capranica de FerIl fut beaucoup eftimé pour fon érudition, pour fon mo. experience dans les affaires, & pour fes mœurs; on penfa même à lui pour le faire fucceder à Callixte

Tome XXIII.

H

felon quelques hiftoriens. Tous les gens de bien le •AN. 1458. pleurerent; & Gobelin dit que c'eût été un modele achevé de vertu, s'il eût été moins fujet à la colere. Il a compofé quelques ouvrages qui font une introduction pour le gouvernement du pontificat, un traité de l'art de bien mourir, un difcours à Alphonfe roi de Naples, & quelques autres.

LXXIII.
Mort de Maphée
Vegius.

Dupin, Bibl. des Aut. is. fiecle,pag. 45. tom. XII. edit.

Holl.

LXXIV: Couronnement du pape Pie II.

Dans la même année mourut encore Maphée Vegius de la ville de Lodi proche Milan, dataire de Martin V. Il eft des auteurs de fon fiécle,dit Mr. Dupin, celui qui a écrit le plus utilement, le plus agréablement & le plus élegamment. Le meilleur &le plus. travaillé de ses ouvrages eft un traité de l'éducation chrétienne des enfans, dans lequel il parle avec beaucoup de folidité des devoirs des peres & meres, des études des enfans, & des vertus qu'on doit leur infpirer. Il eft plein d'une morale très-chrétienne & d'une fageffe peu commune. Les fix livres du même auteur, de la perfevérance dans la religion, contiennent une pieté très-folide, & des inftructions. très-utiles pour y faire de grands progrez, & pour entretenir & conferver des fentimens de pieté & de religion; auffi-bien que les difcours des quatre dernieres fins de l'homme, qu'il traite avec beaucoup de nobleffe. Le dialogue de la verité exilée est un jeu d'efprit. On a encore de lui un fupplément du douziéme livre de l'Eneide de Virgile, & quelques pieces de poëfie & d'éloquence.

Pie II. s'étant fait couronner à Rome le troifiéme de Septembre, donna avis de fon élection à tous les Platina in vita princes chrétiens, & demanda humblement leurs prieres. Il écrivit de même à l'univerfité de Paris. Sa

-Rii II.

Eneas Sylvius epist. 334.

LXXV.
Il convoque l'af

femblée de Man-
rode France.

toue, & en écrit au

lettre eft du quatrième du mois de Décembre, Comme il étoit persuadé que les Turcs feroient toujours de AN. 1458. grands progrez, tant que les princes chrétiens seroient divifez, il s'appliqua à les réunir; & comme il étoit très-difpofé à recevoir les confeils de ceux qui doivent contribuer au fecours de la religion chrétienne contre les infidéles, il convoqua une af femblée à Mantouë, comme en un lieu fort commode, & il y invita tous les princes chrétiens, pour déliberer des moyens d'empêcher les conquêtes des Turcs. Quoiqu'il ne fût pas bien intentionné pour la France, à caufe de la pragmatique-fanction dont il avoit été toutefois un des principaux auteurs, lorfqu'il étoit au concile de Bale tout à fait déclaré contre Eugene IV. il ne laissa pas d'écrire au roi Char·les VII. pour le prier de fe trouver à Mantouë en personne dans le mois de Juin de l'année suivante, auquel tems elle étoit indiquée. Sa lettre eft du troifiéme du mois d'Octobre.

Il exhorte le roi comme le prince le plus pieux & le principal défenfeur de la religion chrétienne, à honorer cette affemblée de fa présence, parce qu'on tireroit de grands avantages de fes fages confeils dans une affaire de fi grande importance; & que les autres princes, les nations & les royaumes voyant le fils aîné de l'église fe trouver en perfonne à cette aflemblée pour la défense de la caufe commune, auroient honte de ne pas fuivre fon exemple. Il ajoûte que fi fa majesté n'y peut venir elle-même, elle y envoye du moins fes ambaffadeurs avec un plein pouvoir, non-feulement touchant l'affaire pour laquelle on devoit s'assembler, mais auffi pour ce qui regarde la

Eneas Sylvius, epift. 385.

paix ou la tréve avec ceux qui étoient en differend AN. 1458. avec la France;afin que tous les fidéles jouiffant d'une paix conftante & folide, on pût confommer l'ouvra

LXXVI.

Réponse du roi

ge

dans une parfaite union. Il représente au roi qu'il a justement herité de fes prédeceffeurs le nom de TrèsChrétien, pour avoir dignement défendu la religion de JESUS-CHRIST, & que Dieu ne lui a donné une portion de sa puissance, que pour être le protecteur de fon troupeau dans ces facheufes conjonctures. Enfin. il lui fait fçavoir qu'on a exprès choifi Mantouë, de France au pape. afin qu'il y pût venir plus commodement, ou du Æn. Sylviùs epift. moins quelque prince du fang en fa place. Dans la réCochlée hift. Huf. ponte que le roi fit à cette lettre, il loue le pape de fes pieux deffeins, & promet d'affembler les prélats, les grands feigneurs & autres perfonnes confidérables de fon royaume, pour traiter plus mûrement de cette affaire. Il l'affure auffi qu'il lui fera fçavoir ce qu'on auroit déterminé par fes ambaffadeurs aufquels. il donneroit des pleins pouvoirs.

386.

fit lib.

LXXVII.

Le pape écrit à Pogebrac roi de Cachl. hift. Huffit.

Robeme.

Bib. 12. pag. 416.

EXXVIII.

Pie II. écrivit auffi aux autres princes en des termes conformes à leur état & à leur condition: Il inVita pareillement Pogebrac à cette affemblée, & ne fit point difficulté de lui donner la qualité de roi de Boheme,à l'exemple de Callixte III. parce qu'il avoit abjuré au moins exterieurement fon herélie. Pogebrac répondit au pape qu'il ne pouvoit pas fe trouver en perfonne à l'affemblée de Mantouë,ayant à réduire les Silefiens qui perfeveroient dans leur révolte : mais il promit d'y envoyer fes ambassadeurs,

Comme l'empereur étoit par fa qualité celui qui: Le cardinal Bef devoit faire le premier pas & le plus grand éclat, le Rampereur & aur cardinal Beffarion lui fut envoyé par le pape, de mê

rion envoyé à

AN. 145.8.

autres princes d'Allemagne.

me que vers tous les autres princes d'Allemagne, pour les folliciter tous ensemble à concourir unanimement pour un fi noble deffein: mais il y trouva les affaires tellement embarraffées par la méfintelligence de ces princes, & par la disposition qu'il y avoit déja à une rupture ouverte, qu'on n'eut pas feulement le loifir de lui donner audience. Matthias roi de Hongrie étoit irrité contre l'empereur, de ce qu'il refufoit de lui rendre la couronne facrée dont fa majesté Imperiale s'étoit emparée, & fans laquelle néanmoins, fuivant une coutume fuperftitieuse de cet état, il n'avoit que le nom de roi, la poffeffion du royaume ne lui pouvant être justement acquife que par l'impofition de cette couronne. Pogebrac fenfible aux oppofitions ouvertes & fecretes que l'empereur formoit tous les jours, & qu'il continuoit de fomenter contre fon établissement dans le royaume de Boheme, s'ouvroit. de bon.cœur à toutes les pro- Troubles qui re positions qu'on lui faifoit pour détrôner Frederic. gnent en Allema-Albert IV. & Sigifmond I. duc d'Autriche, l'un frere gue. & l'autre coufin germain de fa majefté Imperiale, le prince de Baviere, les électeurs de Mayence, & palatin du Rhin, & prefque toute l'Allemagne, étoient de la partie ; tellement que la tempête groffiffoit tous les jours par le concours des puiffances qui venoient en foule. L'orage étoit prêt à tomber fur Frederic., fi fon bonheur & l'amitié du marquis de Brandebourg, qui s'y oppofa fortement, ne lui euffent: épargné cette difgrace, en le garantiffant d'une chû-te prefqu'infaillible.

Il eft vrai qu'il appaifa Matthias & Pogebrac par les. affûrances fecrettes qu'il leur fit donner, au pre

LXXIX.

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