AN. 1459. XCII. Le pape nomme niftrateur de l'é glife. me, Ce qui excita de nouveaux troubles dans ce royaufut que le pape y envoya Venceflas docteur en droit canon, & déja doyen de l'églife catholique de à Prague un admi- Prague, pour être administrateur de l'archevêché. Ce doyen partit de Rome & vinr à Prague; il y fit lire publiquement les lettres apoftoliques par lesquelles il étoit pourvû de cette dignité. Le premier magiftrat de la ville, & les partifans de Rocquefane s'y oppoferent fortement, parce qu'ils prétendoient que l'archevêché ayant été promis au même Rocquefane dès le tems de l'empereur Sigifmond, ils ne vouloient point d'autre administrateur que lui seul. Les deux parties eurent recours au roi qui fe trouvant également preffé par les uns & par les autres promit de les proteger tous, & laiffa néanmoins l'af faire indécise ; enforte qu'il y eut pendant plusieurs années deux adminiftrateurs, l'un Catholique, & l'autre Huffite. Ce fut alors que Rocquefane fit un long traité des facremens de l'église felon la foi univerfelle contre la fecte des Thaborites, afin de fe juftifier dans l'efprit des Catholiques, de la doctrine defquels il paroiffoit ne fe pas beaucoup éloigner. Mais pour revenir au voyage du pape, fa fainteté partit de Sienne pour se rendre à Florence,où le fameux Cofme de Medicis qui gouvernoit abfolument cette république,& qui paffoit pour le plus riche particulier de l'Europe, le reçut avec beaucoup d'honneur & de magnificence. Il étoit né le vingt-feptiéme de Septembre 1399. fut Gonfalonnier de Florence, & mourut l'an 1464. âgé de foixante-cinq ans trois mois & vingt jours, amaffa des trésors immen- · Les par fon commerce dans tous les pays d'Europe & d'Afie, d'Afie. Son bonheur lui fufcita beaucoup d'envieux par les intrigues defquels il fut exilé avec fon frere. AN. 1459. Il fe retira à Venise où il fut reçu comme un fouverain, & quelque tems après les Florentins le rappellerent avec beaucoup d'honneur, le reçurent avec un applaudiffement universel, & l'honorerent du titre de pere du peuple, & de liberateur de la patrie. Comme il aimoit les fciences & les fçavans, il en attira par fes liberalitez à Florence plufieurs qui travaillerent à rendre son nom immortel par plufieurs ouvrages. Il fit une très-belle bibliothéque enrichie de manufcrits rares & de bons livres que Catherine de Medicis partagea depuis avec son frere le duc de Tofcane. Quelques-uns de ces manufcrits grecs & latins ont été apportez en France. Enfin le pouvoir de Cosme de Medicis fut fi grand, qu'il ne lui manquoit que le titre & le nom de roi, & que la plupart des villes & des fouverains d'Italie fuivoient fes confeils, parce qu'il étoit exactement informé de tout ce qui fe paffoit dans l'univers, par fes correspondances avec les marchands de tous les pays. Comment, Pii I lib. 2. XCIV. Florence. Vincent Maynard Trithem Bel Pendant que le pape étoit à Florence, saint Antonin fon archevêque mourut le deuxième jour de May nin archevêque de un mercredi veille de l'Afcenfion, à l'âge d'environ foixante-dix ans. Il étoit religieux de faint Domini- in vita S. Antonini. que., & étoit né à Florence 1389. de Nicolas Pier- larm, de feript, ecrozzi, fecretaire publique de la ville, & de Thomafie clesiast. fon épouse. Il palla avec honneur par toutes les charges de fon ordre. Cofme de Medicis lui donna dans toutes les occasions des marques d'estime & de bienveillance. La république de Florence l'employa auffi en diverses ambaffades, auprès des papes Nicolas V. Tome XXIII. K liv. 109. de cette 128. Callixte III. & Pie II. Il étoit fçavant dans la JurifAN. 1459. prudence civile & canonique, & dans l'hiftoire ecVoyez fon élection cléfiaftique. Le pape Eugene IV. le nomma en 1446. boven. 127. à l'archevêché de Florence qu'il remplit après Zabarella de Padouë. Pie II. qui l'eftmoit beaucoup, venoit de le charger avec plusieurs autres de travailler à la réforme des eccléfiaftiques & des laïques. Pie II. voulut être préfent à fes funerailles. On, porta le corps du Saint de la cathédrale au couvent des Dominiquains, où il avoit choisi le lieu de sa sépulture, que Dieu honora bien-tôt d'un grand nombre de miracles qui s'y opererent par l'interceffion de ce faint archevêque. Le XCV. pape affifte à Les funerailles. XCVI. Ouvrages de S. Antonin. 12. pag. 59. Saints. Il nous refte de lui quelques ouvrages, dont le principal est la Somme historique ou chronique tri• Dupin, Biblioth partite depuis le commencement du monde jufqu'à des Auteurs, tom. l'année de fa mort 1459. Il eft divifé en trois parties. Bailles, Vies des La premiere s'étend depuis la création du monde jufqu'au pontificat de faint Sylveftre, & l'empire de Conftantin. La feconde contient ce qui s'est passé depuis ce prince jufqu'en 1198. fous Innocent III. pape, & Henri VI. empereur. Et la derniere finit dans cette année. C'est une compilation tirée de plufieurs historiens fans beaucoup de choix, dans laquelle on voit clairement, fur-tout dans les chofes éloignées du tems de l'auteur, que fon application ou plûtôt fon loifir n'a pas toûjours également répondu à l'amour qu'il avoit pour la verité, ni à l'engagement où le mettoit la qualité d'hiftorien, pour difcerner le vrai d'avec le faux, ou démêler le certain d'avec le douteux. Cet ouvrage fut imprimé à Venife pour la premiere fois en 1480. à Nuremberg en 1484. à Bafle en 1491. & à Lyon en 1586. Sa Somme théologique imprimée plufieurs fois en Allemagne, eft le AN. 1459. plus confiderable & le plus travaillé de tous, & il n'y mit la derniere main que peu de tems avant fa mort; elle est divifée en quatre parties. Il a fait encore une Somme fur la confeffion, un traité de l'excommunication, & des autres cenfures eccléfiaftiques, un écrit fur les difciples allant à Emmaüs, un traité des vertus, & des notes fur la donation de Conftantin. XCVII. Florence à Boulo- Brutus lib. 5. hift. Flor. Le pape, après les obféques de faint Antonin, quitta Florence, & vint à Boulogne ville du domaine de l'églife, qui souvent se révoltoit contre fon fouverain, & qui même alors n'étoit pas encore dans une parfaite foûmiffion. Auffi fa fainteté n'y futelle pas long-tems, & fe rendit bien-tôt à Ferrare, où elle fut reçuë très-magnifiquement par le marquis d'Eft qu'on appelloit bâtard Borfio, & qui avoit ufurpé la principauté fur Hercule fon frere a qui elle apartenoit, dans la réfolution toutefois de ne fe point marier, afin de la rendre à son héritier légitime. Ce prince s'étoit flatté que le pape lui accorderoit le titre de duc de Ferrare, & le reconnoîtroit pour tel fans payer aucun tribut: mais il fe trompa, & fut obligé pour avoir ce titre, d'attendre le pontificat de Paul II. Pie II. fut harangué par beaucoup de fçavans qui étoient alors à Ferrare, par le Guarini de Veronne, qui avoit enfeigné long-tems les langues grecque & latine avec beaucoup de réputation, par Jean Aurifpe Sicilien très-fçavant, âgé de près de quatre-vingt-dix ans, & d'autres. Pogge Brac par ciolini né à Terra-nuova au territoire de Florence le Florentin. XCVIII. Mort de Pogge lib. 2. elog. edit. In fafciculo re l'an 1380. mourut le vingt-neuviéme d'Octobre de AN. 1459. cette année 1459. à Florence, où Cofme de MediComment. Pii II. cis l'avoit appellé. On a de lui une defcription de la Paul. Fov. in mort de Jerôme de Prague adreffée à Leonard Aretin, & qu'on trouve dans le recueil de Grotius, dans rum, tom. 1. ult. Van-der-Hard, & ailleurs. Il a auffi laiffé les oraifons funebres des cardinaux Zarabelle, Albergat & de Laurent de Medicis, quatre livres de la varieté de la fortune, adreffez à Nicolas V. un difcours de l'autorité & de la puissance du pape & du concile ; un traité de la nobleffe, & un traité de la mifere hu`maine: fans parler d'autres ouvrages profanes remplis d'un grand nombre de plaifanteries plus. honteufes que divertiffantes. XCIX. Arrivée du pape à Mantouë. Comment. Pii II. Enfin le pape arriva à Mantouë, & y fit son entrée le vingt-feptiéme de May. Louis de Gonzague qui en étoit gouverneur, l'y reçut avec beaucoup Raynald. annal. d'honneur ; & le premier jour de Juin on commença Collect concil. l'ouverture de l'affemblée, le fouverain pontife defLabbe tom 13. pag. cendit du palais à l'église avec les cardinaux de fa fui lib. 3. ad hunc annum. 178. C. te, les évêques, le clergé, & tous les religieux de chaque ordre. On célébra folemnellement la meffe, après laquelle l'évêque de Coronne fit un discours fur les pieux deffeins du pape, le fujet de cette convocation & la néceffité des affaires préfentes. A peine eut-il fini, que le pape de deffus fon trône prit la à l'ouverture de parole, & dit en peu de mots, qu'il avoit efperé trouver dans la ville à fon arrivée les ambaffadeurs des rois & des princes qui devoient le préceder, que le petit nombre qu'il y voyoit étoit une preuve que les Chrétiens ne prenoient pas fort à cœur les interêts de la religion, qu'on ne pouvoit s'en prendre à la brié Difcours du pape l'affemblée de Mantouë. |