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cernoit les Genois. Enfin il finit par l'obéïffance qu'il rendit au pape au nom de Charles VII. felon la coûtume obfervée dans tous les tems par les rois de

France.

AN. 1459

au

CXIV.
Le pape répond

difcours de l'évêque de Paris.

Collect. concil. P. Labbe tom. 13. Pr

Le faint pere après l'avoir écouté avec beaucoup d'attention, lui répondit en moins de mots. Son difcours roula sur six articles. Il parla en premier lieu de lui-même, mais en peu de paroles, pour répondre feulement à l'éloge que l'évêque de Paris en avoit fait. Enfuite il releva beaucoup le fiége apoftolique, en ajoûtant qu'il croyoit que tous les princes chrétiens devoient s'y foumettre. En troifiéme lieu il s'étendit fort fur la bonne volonté du roi de France, & fur fon zéle pour prendre les interêts de l'églife Ro. 1751.1765. maine, fur-tout dans la conjoncture préfente; & ce fut en cet endroit qu'il loüa les grandes actions des rois de France, remontant jusqu'aux tems de Charlemagne & même de Clovis, & faifant voir combien cette même église avoit été honorée de l'appui & de la protection des rois très-chrétiens, & fur-tout du prince qui regnoit préfentement, fans lequel il étoit impoffible d'arrêter les progrez des Turcs. Il fit auffi l'éloge du royaume de France, de l'université de Paris, de ses églises & de ses monasteres. Le quatriéme article concernoit le roi de Sicile; & ce qu'il dit en faveur de René d'Ajou, irrita fi fort ceux qui tenoient le parti de Ferdinand, qu'ils voulurent rompre l'affemblée: mais le pape leur impofa filence, & refufa de les écouter. En cinquiéme lieu il répondit à l'article des Genois, qu'il avoüa lui être fort recommandables, puifque leur affaire regardoit le patrimoine de l'église. Enfin le fixiéme article ne roula

que fur l'obéïffance que l'évêque de Paris lui avoit AN. 1459. rendue au nom du roi très-chrétien, dont le souverain pontife rendit de grandes actions de graces, de même que les cardinaux.

ce

txv.

Nouvelle audien

deurs de France de

mandent au pape.

Après ce difcours du pape, les ambassadeurs du roi de Sicile, affiftez des ambaffadeurs de France, lui promirent auffi obeïffance. Ceux de la république de Genes, comme fidéles fujets du roi Charles VII. en firent de même. On lut les lettres patentes des François, qui furent traduites en latin par le confeil des cardinaux d'Eftouteville & d'Avignon ; le pape en entendit la lecture avec beaucoup de plaifir: & la féance finit par l'audience que fa fainteté donna au duc d'Autriche qui voulut affifter à ce consistoire, & combla d'honnêtetez les ambaffadeurs de France, à qui il offrit fon palais pour demeure.

Quelques jours après cette féance, les ambassae que les ambaffa- deurs François allerent trouver le pape, & le prierent de leur accorder une nouvelle audience, dans laquelle ils lui propoferoient quelques affaires qui concernoient le royaume de Sicile, & qu'ils ne vouloient lui exposer qu'en présence de certains ambasfadeurs & non pas de tous. Sa fainteté y confentit, & leur promit d'y appeller ceux qu'ils voudroient. Et comme de nouveaux ambaffadeurs de l'empereur Frederic étoient arrivez depuis peu; sçavoir l'évêque de Trente, le marquis de Bade & un autre, qu'il y avoit un évêque & un cordelier de la part du ro de Castille, & les ambaffadeurs d'Alphonfe roi de Portugal; les François les prierent tous de fe trouver à l'audience que le pape devoit leur donner: & tous enfemble fe rendirent auprès du fouverain pontife

AN. 1459.

CXVI.
Leurs demandes

à qui le bailli de Roüen adressa la parole. Illoüa fort
les grandes actions des François pour la défense de la
religion, & les fervices qu'ils avoient rendus au faint
fiége. Il expofa de quelle maniere le royaume de Si-au pape.
cile étoit échû à la France, & combien il avoit coûté
de fang pour le conquerir. Il ajoûta que fi Alphonfe
s'en étoit rendu maître, c'étoit par la force de fes ar-
mes fans y avoir aucun droit; que le pape s'étoit
comporté d'une maniere indigne en chaffant les
François, pour mettre en leur place le bâtard d'Al-
phonse qui ne méritoit pas un fi grand royaume;
Que c'étoit avoir agi contre toute juftice que d'a-
voir méprifé René veritable roi de Sicile; ce que le
pape Callixte n'avoit jamais voulu faire, quoiqu'A-
ragonnois. Ils demandoient en concluant leur dif-
cours, que puifque les François avoient fouffert cette
injure, le pape revoquât avec déliberation ce qu'il
avoit fait fans avoir confulté perfonne, qu'il accor-
dât ce royaume à René, & qu'il en chaffat Ferdi-

nand.

CXVII.

mandes.

Ce difcours releva le courage des ennemis de la FranRéponse que le ce, qui ne croyoient pas que le pape ofât y répondre. pape fait à ces deMais le faint pere, fans s'étonner, dit en peu de mots, qu'il avoit compris les reproches qu'on lui avoit faits au travers de tout ce qu'on venoit de dire en faveur de René d'Anjou: Qu'il ne croyoit pas les mériter n'ayant rien fait dans l'affaire du royaume de Sicile, qu'après avoir confulté les cardinaux. Que fi l'on exigeoit qu'il revoquât ce qui avoit été fait, il étoit jufte de demander auparavant le confeil des mêmes cardinaux ; & que quand il les auroit consultez, il répondroit à leurs plaintes & à Tome XXIII.

a

M

leurs demandes. Après ces paroles il congédia l'afAN. 1459. semblée, parce qu'il étoit incommodé d'une toux violente & de grands maux d'eftomac. Mais les François ayant publié que la maladie du pape étoit une maladie feinte, & qu'il n'agiffoit ainfi que pour ne leur pas répondre, parce qu'il étoit dans l'impuiffance de le faire, le pape informé de ces bruits,leur fit dire qu'il leur répondroit, quand il devroit mourir au milieu de l'affemblée, que la douleur ne diminueroit rien de fon courage, & que fes infirmitez ne l'en empêcheroient pas.

tom. VIII.

Il tint en effet fa parole; il affembla d'abord les cardinaux aufquels il communiqua la réponse qu'il devoit faire aux ambassadeurs de France, il fit enfuite venir tous les ambaffadeurs des autres princes; & le fouverain pontife, quoique languiffant & fouffrant même de violentes douleurs, fortit de fa chambre, fe rendit dans une grande falle où l'on avoit élevé un trône sur lequel il monta, & ayant prié qu'on l'écoutât fans l'interrompre, il parla près de Spicileg. Dachery trois heures. Il parutau commencement fi pâle & fi inquiet, qu'à peine pouvoit-il ouvrir la bouche; mais quand il fut un peu animé, les expreffions fe préfentoient d'elles-mêmes. Le pape fe juftifia d'afa conduite à l'é- bord fur la conduite qu'il avoit tenue à l'égard du royaume de Sicile; il fe plaignit de la maniere peu mefurée dont ils l'avoient traité, fans aucun égard à fa qualité de fouverain pontife & de chef de l'églife. Il releva beaucoup la gloire des François, & ajouta qu'il avoit eu de bonnes raifons pour investir Ferdinand, que ce prince étoit près à fondre fur le patri-moine de l'églife, & que les François étoient trop

P CXVIII.

Le pape justifie

gard du royaume de Sicile.

éloignez pour le défendre : que d'ailleurs il avoit fait mettre dans l'acte d'inveftiture ces mots, sauf A N. 1459. le droit d'autrui; ce qui mettoit le droit de René d'Anjou en fureté. En effet dans la réponse qu'il avoit fait publiquement à ces mêmes ambassadeurs, ce prince avoit été qualifié roi de Sicile, ce qui avoit fort choqué les ambassadeurs de Ferdinand qui s'en étoient plaints.

CXIX.

Il fe plaint de la

En adreffant la parole en particulier aux ambasfadeurs de France, & de René d'Anjou, il leur dit pragmatique-fanc qu'il étoit furpris que la France attendît de lui une

tion.

grande grace que celle de l'inveftiture du royaume pour un prince François, tandis qu'on continuoit d'y foutenir la pragmatique fanction, & qu'on fuivoit dans la pratique une fi damnable regle, & qu'on regardoit comme une ordonnance de l'églife l'acte le plus injurieux à l'autorité pontificale qui eût jamais été fait. Les François pouvoient répondre à ces plaintes du pape, comme ils le firent fans doute, que cette pragmatique-fanction avoit été reçuë & approuvée par lui-même dans le concile de Bafle, dont il fut un des plus zelez défenseurs & des plus forts appuis; & qu'elle étoit l'ouvrage de ce concile. Mais Æneas Sylvius élevé sur la chaire de S. Pierre changea de fentiment en changeant d'état & de nom. Il n'étoit plus fimple particulier fecretaire du concile de Basle; c'est ce qui fut cause sans doute parlant de la pragmatique dans ce discouts, il affura qu'il ne pouvoit dire des François, ce que S. Paul dit Epift. 2. ad Corint. des Chrétiens: Je vous ai fiancé à cet unique époux qui eft Jesus-Christ, pour vous presenter à lui comme une Vierge toute pure, tant qu'ils porteroient

que

cap. 11. Y. 2.

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