en faffiez, vous ne devez pas néanmoins le regarder comme une Relation régulière, complerte, exacte', telle qu'eft l'Ouvrage du P. du Halde, qui, fans avoir été à la Chine, a travaillé affidument durant un grand nombre d'années fur une quantité prodigieufe de mémoires qui lui ont été. envoyés de ce pays-là. « Quand des » gens défintéreffés, dit-il, & d'ail» leurs éclairés, écrivant en différens »tems & de différens lieux du même » Empire, racontent les mêmes cho» fes, dont ils font témoins oculaires, » comme s'ils les euffent concertées » ensemble,il faudroit être déterminé » à ne rien croire, pour ne fe pas fier » à leur témoignage. D'ailleurs, con» tinuë-t-il, les fréquens entretiens, » que j'ai eus avec quelques Miffion naires revenus de la Chine, pendant »le féjour qu'ils ont fait en Europe, » & encore plus les correfpondances » nécelfaires & continuelles où je fuis depuis vingt-quatre ans avec les » autres Miffionnaires répandus dans les diverfes Provinces de l'Empire, m'ont mis en état de recevoir » les fecours & les éclairciffemens » dont j'avois befoin. Quelques-uns d'eux ont eu même la complaifance » de traduire avec un grand foin cer » tains Livres d'habiles Chinois, qui » devoient ent.er dans cet Ouvrage, » & qui fourniffent la preuve d'une grande partie des faits que je rap, دو » porte. » L'Auteur met au nombre des plus grands fecours qu'il ait eus pour la per fection de fon Ouvrage, la révision qui en a été faite par un Jefuite habile & expérimenté, nommé le P. Con tancin, qui après avoir demeuré tren te-deux ans à la Chine, dont il en avoit pallé dix aPeking,vint en France il y a quelques années. Il lut plufieurs fois cet Ouvrage, & l'éxamina avec l'attention la plus férieufe, & avec la plus févére critique. « C'eft, dit l'Au- ' teur, en profitant de fes lumieres, » foit pour difcurer certains faits dou » teux, foit pour y ajouter des parti cularités intéreffantes, que je me fuis » affuré de l'entiere exactitude de tout » ce que j'avance » Plût à Dieu que les Hiftoriens, que nous eftimons le plus, euffent toujours pris de femblables précautions! Combien ont écrie fur des mémoires peu fûrs, & ont né gligé de vérifier tout ce qu'ils ont avancé? Nous fommes fouvent les due pes de leur pareffeufe crédulité. Dans le premier volume du Livre dont il s'agit, l'Auteur donne d'abord une idée générale de l'Empire de la Chine, & expofe fommairement tout ce qu'il doit enfuite expliquer en détail. C'est une efpéce d'Introduction abrégée, où l'on ne parle que des différentes Jurifdictions ou Tribunaux de la Chine. On entre prefqu'auffi-tôt dans le détail des noms de chaque Province & des Villes qui en dépendent, & on met fous les yeux ce qu'il y a de plus particulier & de plus curieux dans chaque Province, par rapport aux plantes, aux animaux terreftres, aux oiseaux, aux mines, ** aux pierres, aux cristaux, aux édifices publics ** * * L'Auteur dit que la Poule-d'or, dont il fait une defcription magnifique, eft peut-être l'oifeau de tout l'Orient qui mérite d'être le plus fouhaité en Europe. On voudroit fçavoir pourquoi il n'y a pas encore été apporté. ** Il y a la Chine, dans la Province de Yun-nan, des mines de cuivre blanc. Quand il eft bien préparé, il reffemble à l'argent. Ceux qui veulent lui conferver fa belle couleur, Y mêlent la cinquième partie d'argent. T. i. p. 30. * ** L'Architecture chez les Chinois eft bien différente de la nôtre On n'y remarque rien qui reffemble à nos chapiteaux, ni à nos corniches : ce qui a quelque rapport à nos frifes eft d'une hauteur qui choque un œil EuroA vj AYLOR INST OXFLIK aux canaux, aux rivieres, aux lacs, & aux différentes fortes de Poiffons, * L'Auteur donne enfuite une defcription très-ample de la grande muraille, élevée deux cens vingt-un ans avant Jefus-Chrift. Elle borne la Chine au Septentrion, & la fépare de la Tarta péen; mais cette hauteur plaît aux Chinois, parce qu'elle donne place aux ornemens qui bordent les infcriptions qu'ils y font fouvent graver. La magnificence des Chinois éclate fur tout dans les Ponts & dans les Quais. Il y a un Pont dans la province de Fo-kien, qui a plus de cent arches bâties de pierre blanche, & garnies fur les deux côtés de baluftres en fculpture, fur lesquelles s'élevent de dix en dix pieds de petits pilaftres quarrés. Le Pont de Suentcheou-fou, bâti fur la pointe d'un bras de mer, à deux mille cinq cens vingt pieds Chinois de longueur, & vingt pieds de largeur. Il eft foutenu de deux cens cinquante-deux gros piliers, cent vingt fix de chaque côté. Toutes les pierres, tant celles qui traverfent d'un pilier à l'autre en largeur, que celles qui portent fur ces traverfiers, & qui les joignent enfemble, font d'une égale longueur, & de la même couleur, qui eft grifâtre, l'épaiffeur eft auffi la même. Sous ce Pont paffent de gros bâtimens qui viennent de la mer, & il est d'ailleurs très-or- . né. Pages 33. 34. Dans le grand fleuve Yang-tfe-kiang, il s'affemble en certain tems de l'année un nombre prodigieux de barques, pour y acheter des femences de poiffons. On y puise de l'eau mê rie. Ce qu'on lit au fujet des peuples nommés Si-fan ou Tou-fan, eft trèsneuf,& je ne connois aucun Geographe qui en ait fait mention. Leurs mœurs font fort différentes de celles des Chinois. Ces peuples, habitans d'une affreufe contrée, ont en leur difpofition la Rhubarbe, qui croît en abondance fur leurs terres. On trouve ici un détail hiftorique au fujet des différens Princes qui ont gouverné les Toufan. L'année 1227. eft l'époque de la ruine entiere de cette Nation, que les Chinois méprifent aujourd'hui & laiffent en repos. L'Auteur parle encore de plufieurs autres peuples, que les Miffionnaires Géographes ont connus & pratiqués, en parcourant les frontieres de la Chine. Il donne enfuite la route que tinrent les PP. Bouvet, Fontanay *, Ger lée de femence, & on en remplit plufieurs vafes, pour la tranfporter dans diverfes Provinces. Pag-35. Ce qu'on lit au même endroit fur le Poillon d'or, eft fort curieux. Je ne fçai fi les Ichthylogiftes en ont parlé jufqu'ici, & s'ils ont connu auffi le Hai-feng, qui flate beaucoup le goût des Chinois, & fort peu celui des Européens. * J'ai connu le P. Fontanay à la Fleche, od il eft mort en 1710, Recteur du College. C'é toit un homme d'efprit, mais dur & sévére. |