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tout-a

tion, ou par vanité; les autres, par intereft; & quelques-uns, par amour, ou par reconnoiffance. Pour moi, SIRE, je n'ai pas crû devoir me régler fur cet éxemple, bien que je m'y fentiffe convié par tous les plus tendres les plus purs fentimens, qu'un bon &fidéle Sujet puiffe avoir pour Jon Prince.

Je commençai, il y a neuf ans, par un un de vos principaux Miniftres, , depuis, j'ai continué par trois Princes fouverains, tous trois anciens amis & alliez de la France pour monter, comme par degrez, jusques à VOTRE MAJESTE', à qui il me fembloit, que je ne devois pas · m'adreffer, que je n'cuffe fait mes premiers coups d'effai ailleurs; en forte que c'eft de ce Livre, qu'il eft

rai de dire, que la fin couronne l'œuvre.

Mais tout cela n'empêche pas, que je ne tremble encore, & que je ne m'acufe moi-même de témérité, quand je pense à ce que Vous étes, &à ce que je fuis; à ce que vous faites tous les jours, & à ce que je fais aujourd'hui: Et fi je n'eûffe trouvé un aussi babile Homme-de-Cour qu'eft Baltasar Gracian, pour m'introduire auprés de VOTRE MAJESTE, j'avoue, SIRÈ, que j'euffe paffé le reste de mes jours, fans avoir jamais l'honneur de paroître devant Elle. Outre que j'ai crû, qu'Elle prendroit quelque forte de plaifir à entendre parler à un fi célébre Efpagnol une langue, que fes conquêtes font maintenant parler à tant de villes, & de Provinǎ iiij

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ces, qui ont changé de Maître. Tellement que fi Gracian eût vécu encore une vintaine d'années, il eût fans doute ceffé d'apeller fa langue naturelle la Langue Univerfelle, &la clef du Monde a .

Si j'étois homme-de-guerre, je me mêlerois peutêtre de parler de ces conquêtes: mais Dieu m'aiant fait naître d'une profession toute contraire, je crois › que mon filence fera plus agreable à VOTRE MAJESTE, que tout ce que je pourois dire de tant de glorieux exploits, que ceux même, qui ont eu l'honneur d'en être les témoins oculaires, favent mieux admirer, que raconter. Et d'ailleurs, SIRE, comme Vous étes l'Achille de l'Europe, Vous avez toute l'Europe pour Ho

Chap, dernier de fon Diferet.

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mére: Vous étes, à proprement parler, l'homme de la Renommée, de la Fama.

Quand vous alez à la guerre, nous avons autant de joie, que lors

que

yous en revenez, parce que nous fommes affûrez, que vous alez au trionfe. Vous nous avez fi fort acoutumez à vous voir faire de grandes chofes, que nous eûffions ceffé de vous admirer, à cause que cela vous eft ordinaire, fi vous n'eûffiez trouvé le fecret d'en faire tous les jours de nouvelles, & de renaître à nos aplaudissemens: ce que Gracian dit être une des plus certaines marques l'un vrai Héros, & une propriété merveilleufe de l'Aigle ) du Féix b.

En quarante ans de regne, Vous en

Chap. 16. de fon Héros, & I vers la fin de fon Ferdinandy

avez fait autant que quarante Rois: & ce fera de vous, que vos fucceffeurs auront fujet de dire ce que dir un jour, Filipe II. de Ferdinand Le-Catolique, en voiant un de fe portraits: C'est à ce Roi que nou devons tout C.

Mais je ne fai, SIRE, fi ce fucceffeurs, tout redevables qu'il vous feront de la puiffance de cét Monarchie, pouront jamais aime vôtre Mémoire. Car l'impoffibilit de vous imiter fera peutêtre, qu'il vous porteront plus d'envie, que d reconnoiffance, parce que leurs Sujet éxigeront, qu'ils foient tels, qu'il Jauront qu'aura été LOü IS-LE GRAND. Ils feront, comme c'eftl coutume du Peuple d, des comparai fons odieufes entre Vous & ces Prin

c Gracian dans fon Ferdi- d Qui neminem fine amu nand. Gnit. Tac. Annal. 14.

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