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tance, fur qui l'amour conjugale vouloit à toute force l'emporter. Si nos vœux font éxaucez, ( le cœur nous dit, qu'ils le feront ) Dieu, en récompenfe de vôtre parfaite foumiffion à fes ordres, ajoûtera à la durée de vôtre regne le nombre des années, qui, felon le cours ordinaire de la vie, femblent avoir été de manque à celle de céte augufte & vertueuse Princeffe ; & vous rendra, pour la qualité d'Epoux, que vous avez perdue, celle de Bifazeul de Trifaïeul, que pas-un Roi n'a encore eûë de fon vivant.

Je m'aperçois, que ce difcours eft plus long, que ne le doit être celui d'un Homme-de-Cour, qui ne fauroit avoir un plus infupor

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table défaut, que d'être importun. Je finis donc, SIRE, en fupliant tres-humblement VOTRE MAJESTE', de vouloir agréer ce Liare, qui eft un recueil des meilleures, & des plus délicates maximes de la Vie-Civile, & de la Vie-de Cour. Il y en a même quelques-unes, où Elle fe verra reprefentée au vif. Le Defpejo t, auquel la Langue Françoife n'a pu encore trouver de nom affez expreffif, tout enigme qu'il eft, n'en fera point une pour Vous, qui y reconnoîtrez d'abord, que Gracian a fait vôtre définition, en voulant faire celle d'un homme parfait. Au refte, malgré toutes les traverfes de ma vie, je ne laifferai

Maxime 127. & chap. 13. du Héros.

pas de mourir content, quand je faurai, que ce dernier Ouvrage aura eû le bonheur d'être reçû de Vous comme un témoignage autentique du tres-profond respect, avec lequel je fuis,

SIRE,

DE VOTRE MAJESTE

&

Tres-humble, tres- obéiffant
tres- fidele Serviteur & Sujet
AMELOT DE LA HOUSSAIE

PRÉFACE

E Livre, que je vous donne, por te un titre, qui vous en doit donner une haute idée : Et fi les Préfaces ne font néceffaires, que pour expliquer aux Lecteurs le fujet & le deffein des Livres, le mien pouroit bien s'en pas fer, puifque fon titre exprime non feulement tout ce qu'il traite, mais encore à quel ufa ge, & à quelles gens il eft propre.

Il n'eft donc pas propre à tout le mon de, me direz-vous? Non, certes, il ne l'eft qu'au grand monde, & aux perfonnes, qui favent le monde. C'eft un Homme-de-Cour, qui n'eft pas d'humeur à fe familiarifes avec le Vulgaire, & qui ne fe plaît qu'avec fes égaux : Et comme d'ordinaire il ne parle qu'à demi-mot, il ne fauroit s'affujétir à converfer, ni avec les petites-gens, ni avec les petits-efprits, qui n'entendent ce qu'on leur dit qu'à force de paroles. C'est un Homme-de-Cabinet, qui ne parle jamais qu'à l'oreille; encore faut-il l'avoir bien fine, pour ne rien laiffer échaper. C'est un

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Homme-d'Etat, (qui pour ufer des termes de Comines a) fait fon compte, que ni bêtes, ni fimples gens ne s'amuseront point à lire ces Maximes: mais que les Princes, & les autres gens-de-Cour y trouveront de bons avertiffemens.

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Cela fupofe, il ne faut pas s'étonner, fi Gracian paffe pour un Auteur abstrait, inintelligible, & , par conféquent, intraduifible; car c'eft ainfi qu'en parlent la plufpart de ceux, qui l'ont lû: & je fai même, qu'un Jéfuite, à qui un de mes amis difoit, qu'on le traduifoit, répondit, que celui-là étoit bien téméraire, qui ofoit fe mêler de traduire des OEuvres, que les Espagnols mêmes n'entendoient pas. Et j'avoue, que je le ferois véritablement, la cenfure de l'Auteur des Entretiens d'Arifte &d'Eugéne dont je vois que beaucoup d'honnêtes gens s'autorifent, comme d'un autre avispa, étoit auffi raisonable qu'elle eft magiftrale & décifive. Gracian, dit-il, eft parmi les Espagnols un de ces génies incompréhenfibles. Il a beaucoup d'élévation de fubtilité, de force, & même de bon fens mais on ne fait le plus souvent ce qu'il veut dire, & il ne le fait pas peut

Chap. 8. du livre 3. de Bel-Efprit, page 203. de la premiére édition.

Les Mémoires.

b Dans fon Entretien du 1

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