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Lupérieures; leur raifonne ment eftoifif, leur entende ment meurt fans avoir profité de rien. C'est pour cela, que beaucoup de Grans ne furpafLent les autres gens qu'en la

A

commodité de contenter leurs fens, qui eft la plus vile fone tion de la vie, & qu'ils font auffi pauvres d'entendement, que riches de pauvres biens, |

MAXIME XXIII

N'avoir point de tache.

Toute perfection il y a un si, ou un MAIS. Il y a tres-peu de gens, qui foient fans défauts, foit dans les mœurs, ou dans le corps. Mais il y en a beaucoup, qui font vanité de ces défauts, qu'il leur feroit aifé de corriger. Quand on voit le moin dre défaut dans un homme accompli, l'on c'eft dommage, parce qu'il ne faut , que qu'un nuage pour éclipfer tout le Soleil. Ĉes défauts font des taches, où l'envie s'atache d'abord pour contrôler. Ce feroit un grand coup d'habileté de les changer en perfections, comme fit Jules-Céfar, qui étant chauve, couvrit ce défaut de l'ombre de fes Lauriers,

dit.

MAXIME XXIV.

Modérer fon imagination.

E vrai moïen de vivre heureux, & d'ê tre toûjours eftimé fage, eft

LE

eft, ou de

la corriger, ou de la ménager. Autrement, elle prend un empire tirannique fur nous, & fortant des bornes de la fpeculation, elle fe rend fi fort la maîtreffe, que la vie eft heureuse ou malheureufe, felon les diférentes idées, qu'elle nous imprime 1. Car il y en a, à qui elle ne reprefente que des peines, & dont la folie la fait devenir leur boureau domeftique : & d'autres, à qui elie ne propofe que des plaifirs & des grandeurs, fe plaifant à les divertir en fonge, Voilà tout ce que peut l'imagination, quand la raifon ne la tient pas en bride.

...

Les peines & les dou leurs font diférentes, dit Comines: celles du corps font les moindres & celles de l'entendement les plus grandes. Celles des fages font d'une façon, & celles des fous d'une autre mais le fou porte beaucoup plus de douleur & de paffion que le fage, & fi y a moins de réconfort.. Si je voulois écrire les paffions que j'ai vu porter aux Grans, depuis trente ans feulement, j'en ferois un gros livre: Ceux qui ne les pratiquoient point de fi prés que moi, les réputoient être bienheureux, & fi ai vù fouvent leurs déplaifirs &douleurs être fondez en fi peu de raifon, qu'à grand'peine l'euflent voulu croire les gens qui ne les hantoient point; & la plupart étoient

fondez en foupçons & ra ports qui cft une maladie cachée, qui regne aux maifons des grans Princes, dont mal avient, tant à leurs perfonnes qu'à leurs fujets & s'en abrege tant leur vit, que depuis Charlemagne ne s'eft vu aucun Roi en France avoir paffé foixante ans. Pour cette caufe quand le Roi Louis X. aprocba de ce ter

me,

fe jugeoit déja mort. Son pére Charles VII. étant malade, fe mit en fantaiste qu'on le vouloit empoisoner, & pour ce ne voulut plus manger. Autres fufpicions eut le Roi Charles VI. qui devint fou. Charles VIII. avoit peur de fon Fils unique, qui n'avoit pas trois ans. Bel enfant, dit encore Comines, & qui ne craignoit point les chofes, que les au

tres enfans ont accoutumé de cet enfant ne fut grand,
craindre. Auffi le pére paffa
aifément le deuil de fa mort,
ašant déja doute, que tôt

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que continuant les conditions, il ne lui diminuât l'aus torité & puiffance.

MAXIME XXV.

Eftre bon entendeur.

AVOIR difcourir, c'étoit autrefois la fcience des fciences: aujourd'hui cela ne fufit pas, il faut deviner, & fur-tout en matiére de fe défabufer. Qui n'eft pas bon entendeur, ne peut pas être bien entendu. Il y a des efpions du cœur & des intentions. Les véritez qui nous importent davantage, ne font jamais dites qu'à demi 1. Que P'homme d'efprit en prenne tout le fens ferrant la bride à la crédulité dans ce qui pa roît avantageux, & la lâchant à la créance de ce qui eft odieux.

La Vérité, ajoute-t-il dans fon Diferet, chap. Buen entendedor, eft une demoiselle auth honteufe que belle, &

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pour ce fujet elle va toûjours masquée. Voïez la note de le Maxime 210.

MAXIME XXVI.

Trouver le foible de chacun.

'EST l'art de manier les volontez. & de faire venir les hommes à fon but. Il y a plus d'adreffe que de réfolution, à

Lavoir par où il faut entrer dans l'efprit de chacun. Il n'y a point de volonté qui n'ait fa paffion dominante; & ces paffions font diférentes felon la diverfité des efprits. Tous les hommes font idolâtres, les uns de l'honneur, les autres de l'intérest 1, & la plûpart de leur plaifir. L'habileté eft donc de bien connoître ces idoles, pour entrer dans le foible de ceux qui les adorent: c'est comme tenir la clef de la volonté d'autrui. Il faut aler au premier mobile: Or ce n'eft pas toûjours la partie fupérieure, le plus fouvent c'est l'inférieure; car en ce monde le nombre de ceux qui font déréglez, eft bien plus grand que celui des autres. Il faut premiérement connoître le vrai caractére de la perfonne, & puis lui tâter le pouls, & l'ataquer par fa plus forte paffon: & l'on eft affuré par-là de gagner la partie.

1 Le Cardinal de Riche- neur, & le Cardinal Mazahieu étoit idolâtre de l'hon-rin de l'intérêt.

MAXIME XXVII,

Préférer l'intension à l'extension.

A perfection ne confifte pas dans la

tout

ce qui eft tres-bon, il y en a toûjours tresĆ iiij

peu; ce dont il y a beaucoup, eft peu eftime Et parmi les hommes même les geans y paffent d'ordinaire pour les vrais nains r. Quelques-uns eftiment les livres par la grolleur, comme s'ils étoient faits pour charger les bras, plûtôt que pour exercer les efprits. L'extenfion toute feule n'a jamais pû paffer les bornes de la médiocrité, & c'eft le malheur des gens univerfels, de n'exceller en rien, pour avoir voulu exceller en tout. L'intenfion donne un rang éminent, & fait unhéros fi la matiére eft fublime.

1 Cela eft dit dans un fens figuré relatif au proverbe, Homo longus rarò fapiens. El grande de cuerpo, no es muy

hombre, dit-il dans la critique 7. de la premiére partie de fon Criticon.

MAXIME XXVIII

N'avoir rien de vulgaire.

Que celui-là avoit bon goût, qui fe déplaifoit de plaire à plufieurs ! Les Sages ne fe repaiffent jamais des aplaudiffemens du Vulgaire. Il y a des caméléons de goût fi populaire, qu'ils prennent plus de plaifir à humer un air groffier, qu'à fentir les doux zéfirs d'Apollon. Ne te laiffe point éblouir à la vue des miracles du Vulgaire. Les ignorans font toûjours dans

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