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Ouvrage, & qu'il met au nombre des Dieux des Perfes & des Cappadociens? Il n'eft pas douteux qu'ils n'ayent été des Dieux naturels, car nous ne voyons pas que les Perfes en ayent d'abord admis d'autres. Nous venons de voir que leurs premieres Divinités étoient le Feu, le Soleil, la Lune, l'Eau & la Terre, & qu'ils ne connoiffoient point anciennement les Dieux animés. Ainfi les plus fçavants Mythologues ont cru qu'Omanus étoit le Soleil, & Anaïtis, la Lune. Cepen(1) De Idol. dant Gerard Voffius n'eft pas de leur avis. Omanus, dit-il (1), eft toujours joint par Strabon avec Anaïtis, qui eft indubitablement Venus, ou Diane; ainfi ce Dieu n'eft pas le Soleil que les Perfes honoroient fous le nom de Mithras; mais le Symbole de ce Dieu; c'est-à-dire, le feu perpetuel, que les Perfes entretenoient avec tant de foin dans leurs Pyrées, comme la veritable representation du Soleil, qui est le feu par

1.2. C. 9.

excellence.

Mais, n'en déplaife à ce Sçavant, fa remarque n'est pas jufte elle prouve au contraire que fi Anaïtis eft Diane, ou : la Lune, comme elle l'eft en effet, Omanus doit être le Soleil, qui peut-être portoit ce nom, ainfi que celui de Mithras, chez les anciens Perfes, ou plutôt chez les Cappadociens, qui en avoient tiré prefque tous les dogmes de leur Religion. J'ajoute chez les Cappadociens, car Strabon confond, comme nous l'avons déja remarqué (a), les Dieux de ces Peuples. Plutarque ne laiffe aucun lieu de douter qu'Anaïtis n'ait été la même que la Lune, puifqu'il dit dans la vie d'Artaxerxès Mnemon, que ce Prince établit Aspasie, sa Concubine, Prêtreffe de la Diane que les habitans d'Ecbatane, appellent Anaïtis, afin qu'elle pafsât le refte de fes jours dans la continence & dans la retraite. Si pour confirmer cette verité on avoit befoin de nouvelles preuves, je citerois Paufanias, (2) In Lae. qui nous apprend (2), que les Lydiens avoient un Temple de Diane fous le nom d'Anaïtis

Il eft vrai que Strabon dit de cette Déeffe des chofes qui conviennent mieux à Venus qu'à Diane, ou la Lune; puifqu'il en parle ainfi. « Les Medes & les Armeniens ont une grande dé

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(a) Voyez le commencement de ce Chapitre.

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votion pour les Dieux des Perfes ; & ces derniers furtout honorent très-particulierement Anaitis, à laquelle ils ont » bâti un Temple dans l'Acilifene, & en d'autres lieux. Ils confacrent à cette Déeffe leurs Efclaves, tant hommes que femmes; ce qui n'eft pas étonnant : mais ce qui l'eft beauအ coup, c'est que les premiers de la Nation lui confacrent leurs filles ; & après qu'elles fe font proftituées en l'hon»neur de la Déeffe, on les marie, & il n'y a perfonne qui » faffe difficulté de les époufer.

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Cet usage a certainement un grand rapport avec ce qui fe pratiquoit dans les Temples de Venus; mais il n'est pas furprenant que les Armeniens & les Cappadociens ayent fait quelque changement dans le culte d'une Déeffe, dont la connoiffance leur étoit venue de Perfe; encore moins qu'ils ayent confondu le culte de Diane & de Venus, c'est-à-dire, des deux Planetes qui portoient ces noms. Toûjours eft-il certain qu'Omanus & Anaïtis étoient des Dieux naturels, tels qu'étoient tous ceux des premiers Idolatres.

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Mais je ne dois pas finir cet article, fans rapporter un trait d'Hiftoire qui regarde la Déeffe dont il eft queftion: c'eft de Pline que je l'emprunte (1). « Dans une expédition que fit » Antoine contre l'Armenie, le Temple d'Anaïtis fut faccagé, & fa Statue qui étoit d'or, mife en pieces par les Soldats, ce qui en enrichit plufieurs. Un d'eux qui s'étoit établi à Boulogne en Italie, eut le bonheur de recevoir un jour Augufte dans fa maifon, & de lui donner à fou» per. Eft-il vrai, lui dit će Prince pendant le repas, que celui qui porta les premiers coups à la Déeffe, perdit auffi» tôt la vûe, fut perclus de tous fes membres, & expira fur » le champ? Si cela étoit, répondit le Soldat, je n'aurois pas le bonheur de voir aujourd'hui Augufte chez moi, étant » moi-même celui qui lui donnai le premier coup, dont bien m'en a pris; car fi je poffede quelque chofe, j'en ai toute l'obligation à la bonne Déeffe ; & c'eft d'une de fes jambes, Seigneur, que vous foupez aujourd'hui ».

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Toutes reflexions faites, comme nous ne connoiffons Amanus & Anandratus que par Strabon, & que cet Auteur dit feulement qu'ils étoient des Genies chez les Perfes, Пeporxãv Oooo

Tome I.

(1) Liv. 32. ch. 23.

Auμovas, il eft inutile de faire à ce fujet des recherches, & de debiter des conjectures qui ne feroient appuyées d'aucun fondement.

La Déeffe Bellone étoit auffi fort honorée en Cappadoce, furtout à Comane. Il y avoit deux Villes principales de ce nom; l'une dans la Cappadoce, & l'autre dans le Royaume de Pont: elles étoient l'une & l'autre confacrées à cette Déeffe, & obfervoient à peu près les mêmes cerémonies dans le culte qu'elles lui rendoient. Le Temple qu'elle avoit à Comane de Cappadoce, doté de beaucoup de terres, étoit deffervi par un grand nombre de Miniftres fous l'autorité d'un Pontife, Homme d'un grand crédit, & d'une telle confideration, qu'il ne voyoit que le Roi au-deffus de lui, & on le prenoit pour l'ordinaire dans la Famille Royale: fa dignité étoit à vie. Strabon qui parle du culte que les Cappado(1) Liv. 12. ciens rendoient à cette Déeffe (1), dit qu'au temps qu'il c. 135.& 137. voyagea dans ce Pays, il y avoit plus de fix mille perfonnes, tant hommes que femmes, confacrées au fervice du Temple de Comane.

(2) P. 525.

Comme l'Auteur que je viens de nommer, ajoûte (2) qu'on croyoit que c'étoient Orefte & Iphigenie qui avoient porté dans la Cappadoce le culte qu'on rendoit à Diane dans la Tauride, d'où ils venoient, il y a apparence que la Bellone dont il s'agit, étoit la même que Diane. Ce qui confirme ma conjecture, c'eft que le même Auteur parlant de la Ville 3) P. 537 de Castaballe dans la Cilicie, dit (3), qu'il y avoit un Temple de Diane Perafie, où les Prêtreffes,difoit-on, marchoient impunément nuds pieds fur des charbons, & qu'on croyoit que c'étoit en cet endroit que fe paffa ce que l'on raconted'Orefte & de Diane, furnommée Tauropole, & qu'elle fut appellée Perafie, parce qu'elle avoit paffé la Mer en cet en(4) Voyez droit (4). Je n'entreprends pas prefentement d'examiner quelle route prirent Orefte & Iphigenie, lorfqu'ils fortirent de la Tauride, pour retourner dans la Grece; mais je crois qu'on pourroit penfer qu'ils aborderent dans le Pont, où ils établirent le culte de Diane, principalement dans la Vile de Comane d'où il paffa dans l'autre Ville de ce nom qui étoit dans la Cappadoce, & de-là dans la Cilicie & dans les Provinces voifines

cette Hiftoire,

Tome. III.

Ce qui confirme cette conjecture, c'est que le même Strabon affure (1), qu'Apollon étoit honoré dans toute la Cap- (1) P. 537. padoce, & que Jupiter l'étoit particulierement par les Peuples qu'il nomme Venafins (a), où il y avoit un Temple magnifique, trois mille Prêtres, & un Souverain Pontife, dont l'autorité étoit prefque auffi grande que celle du Pontife de Comane: mais comme les Peuples que je viens de nommer, avoient reçu des Grecs le culte de ces Dieux, je referve ce que j'ai à en dire, pour le Tome II.

On ignore fi les Parthes, qui fuccederent aux Perfes, eurent la même Religion qu'eux. Il y a apparence qu'ils en prirent plufieurs dogmes, & qu'ils y en ajouterent de nouveaux. Nous fçavons feulement qu'ils mirent quelquefois leurs Rois au nombre des Dieux, & Ammian Marcellin nous apprend (2) qu'Arfacès après fa mort fut placé parmi les Aftres, c'eft (2) Liv. 23. à-dire, qu'à l'exemple des autres Nations de l'Orient, ils avoient des Dieux naturels & des Dieux animés.

La grande Divinité des Armeniens étoit, comme parmi les Perfes, le Soleil, auquel ils immoloient comme eux, un Cheval, ainfi que nous l'apprenons de Strabon (3).

(a) Ces Venafins étoient, felon Strabon, dans la Morimene. Pomponius Mela" parle apparemment de ces Peuples, fous le nom de Morranes ; & Ifaac Voffius croit que c'étoit les Mariandinyens. Voyez les Remarques fur le Chap. 2. du premier Livre de ce Geographe.

(3) P. 567.

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Des Dieux des Scythes, & de quelques autres Peuples

du Nord

UOIQUE les Pays du Nord fuffent occupés par un grand nombre de Peuples differents, les Grecs qui ne les connoilloient gueres, les comprenoient tous fous le nom general de Scythes, ou de Celto-Scythes. Par les premiers, ils entendoient tous ceux qui occupoient les Parties feptentrionales de l'Afie; & par les feconds, ceux qui étoient au Nord de l'Europe. Rien ne feroit plus inconnu que la Religion de ces Peuples, la plufpart errants & vagabonds, fans Oooo ij

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Herodote qui nous en apprend quelques particularités : encore ne fçait-on aufquels des Scythes en particulier, on doit attribuer ce qu'il en dit.

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Cet Hiftorien, après avoir parlé dans quelque détail de ces Peuples & de leurs Conquêtes, vient à ce qui regarde Ils ne (1) Liv. 3. leurs Coutumes & leurs Cerémonies religieufes (1). font, dit-il, de Sacrifices, qu'aux Dieux que je vais nommer. Premierement, à Vesta; enfuite à Jupirer, & à la Terre qu'ils regardent comme la femme de ce Dieu : après ceux-là, ils adorent Apollon, Venus Uranie, Mars, & Hercule, que tous les Scythes croyent être au nombre des Dieux. Ceux qu'on nomme les Scythes Royaux, facri» fient auffi à Neptune. Ils appellent en leur langue Vefta, Tabiti; Jupiter, Papée; la Terre, Api; Apollon, Etofy» rus; Venus Uranie, Artimpefa; & Neptune, Thamimasadès. → Ils n'ont ni Idoles, ni Autels, ni Temples, excepté pour le Dieu Mars. Ils font tous leurs Sacrifices de la même » maniere, & avec les mêmes Cerémonies. On prefente la » Victime ayant les deux pieds de derriere liés ensemble : » celui qui doit l'immoler se tient derriere, & après avoir » ôté fa Tiare, il la frappe; & dans le temps qu'elle tombe, il commence à invoquer le Dieu auquel elle eft immolée. Après cela il lui met une corde au col, qu'il ferre avec un bâton, & la traine jufqu'à ce qu'elle foit étranglée : le feu n'eft point encore allumé, & il n'a fait aucune Libation. Après avoir dépouillé la Victime, il se dispose à la faire > cuire; mais comme le bois eft très-rare chez les Scythes, pour » faire cuire l'animal qui vient d'être immolé, ils feparent les >os de la chair, la mettent dans des chaudieres qui reffem» blent aux Coupes des Lesbiens, excepté qu'elles font plusgrandes, & avec les os ils la font bouillir jufqu'à ce qu'elle foit cuite. Quand i's n'ont point de chaudieres, ils mettent la chair dans le ventre de la bête, & la font cuire avec les » os. Enfuite le Sacrificateur jetre à terre une partie des chairs des entrailles, comme les premices du Sacrifice. Les Vitimes au refte font des boeufs & d'autres animaux, mais principa'ement des Chevaux.

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Ces fortes de Sacrifices étoient destinés aux Dieux qu'on

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