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Auffi fon coeur pour toy bruslant d'un si beau feu, 120 N'en fit point dans le monde un lâche desaveu ; Et fon zele hardi toûjours preft à paroiître,

N'alla point fe cacher dans les ombres d'un Cloistre Va le trouver, ma Sœur, à ton augufte nom Tout s'ouvrira d'abord en fa fainte Maison. 125 Ton visage eft connu de fa noble famille. Tout y garde tes loix, Enfans, Sœur, Femme, Fille.

REMARQUES.

que contradiction. Le mot, Nobles renferme dans fa fignification des Idées commencées de Grandeur, de Gravité, de Dignité. Le mot Ardeur offre des Idées de Turbulence, d'Impétuofité, de Rapidité. Tout cela ne me femble pas trop fait pour s'allier enfemble. Enfin, nobles penfées; ces deux mots unis ne me paroiffent pas fignifier grand' chofe. Noble iroit fort bien avec Sentiment.

L'Auteur n'emploie point ici cette Epithète dans le même fens que l'on dit une pensée noble dans ce fens-là même on ne pourroit pas dire une noble penfée. Cela ne fignifieroit plus la même chofe.

VERS 121. & 122.- -paroiflre Cloitre.] Rime vieillie. Paroifre, qui fe prononce univerfellement aujourd'hui : parêtre, ne rime abfolument point avec cloistre qui fe prononce cloê

gre.

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à fon Miniftre? Cette cafcade ne me paroît qu'un allongement. Je fais qu'on me répondra que l'Auteur a voulu nous appren dre allégoriquement que ce fut par un principe de piété, que M. de Lamoignon ne fouffrit pas que le Procès du Chantre & du Tréforier allåt jufqu'au bout, & qu'il fe hâta d'interpofer fon autorité pour terminer une querelle ridicule, qui ne pouvoit pas manquer de caufer du fcandale. J'avouerai que la piété fut le motif,qui fit agir le Premier Préfident. Mais il fera toûjours vrai qu'au fond, ce fut fon autorité qui força le Tréforier & le Chantre d'en paffer par ce qu'il leur prefcrivit. La Juftice devoit donc, en fe rendant aux prières de la Piété fa Sœur, charger elle-même Arifle du foin de la contenter, & ne la lui pas renvoïer.

VERS 125. Ton vifage eft connu de fa noble famille. ] NOBLE eft fix Vers plus haut. D'ailleurs noble famille ne fignifiera jamais que famille noble; & ce n'eft pas ce que l'Auteur a voulu dire; mais fon illuftre, fa refpectable famille. Il falloit donc qu'il s'y prêt autrement.

VERS 126, Touty garde tes loixa

Tes yeux d'un feul regard fçauront le penetrer
Et pour obtenir tout, tu n'as qu'à te monftrer.
Là s'arrefta Thémis. La Pieté charmée

130 Sent renaiftre la joie en fon ame calmée.
Elle court chez Arifte, & s'offrant à ses yeux:
Que me fert, lui dit-elle, Ariste, qu'en tous lieux
Tu fignales pour moy ton zele & ton courage,
Si la Difcorde impie à ta porte m'outrage?
135 Deux puiffans Ennemis par elle envenimez,
Dans ces murs, autrefois fi faints, fi renommez
A mes facrez autels font un profàne infulte,
Rempliffent tout d'effroy, de trouble & de tumulte.
De leur crime à leurs yeux va-t-en peindre l'horreur,
140 Sauve-moy, fauve-les de leur propre fureur.
Elle fort à ces mots. Le Heros en priere
Demeure tout couvert de feux & de lumiere.
De la celefte Fille il reconnoift l'éclat,

145

Et mande au mesme instant le Chantre & le Prélat.
Mufe, c'eft à ce coup, que mon Esprit timide
Dans fa course élevée a besoin qu'on le guide,
Pour chanter par quels foins, par quels nobles travaux
Un Mortel sceût fléchir ces fuperbes Rivaux.

Mais plûtoft, Toy qui fis ce merveilleux ouvrage 150 Ariste, c'est à toy d'en inftruire noftre âge.

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Seul tu peux reveler par quel art tout-puiffant
Tu rendis tout-à-coup le Chantre obeïffant.
Tu fçais par quel conseil rassemblant le Chapitre,
Luy-mesme, de fa main, reporta le Pupitre,
155 Et comment le Prélat de ses respects content

Le fit du banc fatal enlever à l'inftant.

:

Parle donc c'est à Toy d'éclaircir ces merveilles.
me fuffit
pour moy d'avoir sceû, par mes veilles,
Jufqu'au fixieme Chant pousser ma fiction,

160 Et fait d'un vain Pupitre un fecond Ilion.

165

Finissons. Auffi-bien, quelque ardeur qui m'infpire,
Quand je fonge au Heros qui me refte à décrire,
Qu'il faut parler de Toy, mon Efprit éperdu
Demeure fans parole, interdit, confondu.

Arifte, c'eft ainfi qu'en ce Senat illustre,
Où Themis, par tes foins, reprend fon premier luftre,

REMARQUES.

VERS 16. Le fit du banc fatal enlever à l'inftant. ] M. le Premier Préfident fit comprendre au Tréforier que ce Pupitre n'aïant êté anciennement érigé vis-à-vis la place du Chantre, que pour la commodité de fes Prédéceffeurs, il n'êtoit pas jufte que l'on obligeât M. Barrin à le fouffrir, s'il lui êtoit incommode. Néanmoins, pour accorder quelque chofe à la fatisfaction du Tréfo

rier, il fit confentir le Chantre à remettre le Pupitre devant fon fiége, où il demeureroit un jour; & le Tréforier, à le faire enlever le lendemain ce qui fut execu té de part & d'autre. BROSS.

:

IMIT. Vers 160. Et fait d'un vain Pupitre un fecond Ilion. ] Cette penfée eft prife du Taffone qui la tourne autrement dans la dédicace de fa Secchia rapita, Chant I. Stance 2. Vedrai, s'al cantar mio porgi l'orecchia, Elena transformarfi in una Secchia. C'eft-à-dire, 66 Tu verras fi tu prêtes l'oreille à mes Chants, Helène fe transformer en un feau Le tour du Poëte Itaen eft beaucoup plus vif & plus

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Poëtique que celui du Poëte
François.

VERS 166. reprend fon premier lufire, ] Cet Hémistiche eft encore d'une grande dureté.

Quand la premiere fois un Athlete nouveau

Vient combattre en champ clos aux joustes du Barreau Souvent, fans y penfer, ton augufte presence 170 Troublant par trop d'éclat fa timide éloquence, Le nouveau Ciceron tremblant, décoloré,

Cherche envain fon difcours fur fa langue égaré:

Envain, pour gagner temps, dans fes tranfes affreufes
Traifne d'un dernier mot les fyllabes honteufes;

175 Il hefite, il begaye, & le trifte Orateur
Demeure enfin muet aux yeux du Spectateur.

REMARQUES.

VERS 169. Souvent, fans y penfer, ton augule prefence ] L'Infinitif avec la Prépofition fans eft la même chofe que le Gerondif avec une Négation. Ainfi fans y penfer, c'eft-à-dire, En n'y penfant pas. Le Gérondif doit fe rapporter au Nominatif ou de la Phrafe entière, ou de la Phrafe incidente dans laquelle il fe trouve. En n'y penfant pas ne fauroit fe rapporter au Nouveau Cicéron, Nominatif de la Phrafe entière. Il faut donc qu'il fe rapporte au Nominatif de la Phrafe incidente, c'eft-à-dire à Ton augufte préfence. Qu'on me dife préfentement ce que c'est que cette efpèce de Phrafe-ci? Souvent ton auguste préfence, troublant, fans y penfer, par trop d'éclat fa timide loquence. Je ne vois pas qu'on puifle attribuer la pensée à la préfence, L'Auteur a voulu dire, fans que tu le veuilles, fans que tu y

penfes. Nos Poëtes font pleins de fautes femblables.

VERS 171. Le nouveau Ciceron tremblant, décoloré, ] Ce dernier Terme eft bien dur dans un Vers, & d'ailleurs il n'eft guè re en ufage dans la Langue.

VERS 1739 & 174. Envain, pour gagner temps, dans fes transes affreuses, Traifne d'un dernier mot les fyllabes honteufes. ] L'arrangement de la Phrafe fembloit demander que le Verbe traifne ne parut pas ici fans le Pronom il.

VERS 176. Demeure enfin mueɛ aux yeux du Spectateur. ] L'Orateur demeurant muet, les Auditeurs ne font plus que Spectateurs. Notre Poëte a eu en vue B... D. à qui ce malheur arriva, & qui depuis ne plaida plus.

IMIT. Ibid. Demeure enfin muet.]
TERENCE dans le Phormion, A
II. Sc. I.

-Poftquam ad Judices
Ventum eft, non potuit cogitata proloqui:
Itd eum tum timidum ibi obflupefecit pudor

ODES, EPIGRAMMES,

POËSIES DIVERSES,

ET

FRAGMEN S.

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