195 Mais pour un vain bonheur qui vous a fait rimer, Gardez qu'un fot orgueil ne vous vienne enfumer. Souvent l'Auteur altier de quelque chansonnette, Au mefme inftant prend droit de fe croire Poëte. Il ne dormira plus qu'il n'ayt fait un fonnet. 200 Il met tous les matins fix Impromptus au net. Encore eft-ce un miracle, en fes vagues furies, Si bien-toft imprimant fes fottes réveries, Il ne fe fait graver au devant du recueil, Couronné de lauriers par la main de Nanteüil. REMARQUES. VERS 204. un homme de beaucoup d'efprit, d'une converfation charmante, aimant le plaifir, fe fouciant peu de fortune, & faifant agréablement des Vers qu'il récitoit parfaitement bien. Il mourut à Paris le 18. Decembre 1678. âgé de 48. ans. Nôtre Poëte avoit deffein de finir ce Chant par ces deux Vers: Et dans l'Académie, orné d'un nouveau luftre pas déplaire à Meffieurs de l'A■ cadémie Françoife. CHANT III. CHANT III L n'eft point de Serpent, ni de Monftre odieux REMARQUES. eft parfaite, ajoute-t-il, plus nous les regardons avec plaifir. Mais ce plaifir ne vient pas de la beauté de l'original, qu'on a imité ; il vient de ce que l'Efprit trouve par là moïen de raifonner & de s'inftruire. VERS 1. Il n'est point de Ser- femblables. Plus l'imitation en pent, &c.] Cette Comparaifon eft empruntée d'Ariftote Ch. IV. de fa Poetique, & Ch. XI. Propof. XXVIII. du Liv. I. de fa Rhétorique. Rien ne fait plus de plaifir à l'Homme, dit-il, que l'imitation. C'eft ce qui fait que nous aimons tant la Peinture, quand même elle répréfente des objets hideux, dont les originaux nous feroient horreur comme des bêtes venimeufes, des hommes morts, ou mourans & l'autres images La Frefnaie Vauquelin dans le 1. Livre de fon Art Poëtique, avoit fu faire, avant nôtre Auteur,un ufage à peu près femblable du même fonds de Comparaison & des Idées d' Ariftote que M. BroTette vient d'expofer. C'est un Art d'imiter, un Art de contrefaire E 5 Ainfi pour nous charmer, la Tragedie en pleurs D'Oedipe tout fanglant fit parler les douleurs, D'Orefte parricide exprima les alarmes, Et pour nous divertir nous arracha des larmes. Vous donc, qui d'un beau feu pour les Theatre épris, 10 Venez en vers pompeux y difputer le prix, Voulez-vous fur la Scene étaler des ouvrages, Où tout Paris en foule apporte fes fuffrages, REMARQUES. Et nous plaift en peinture une chofe hidenfe, Qui feroit à la voir en effence fachenfe. Comme il fait plus beau voir un finge bien pourtraist Un visage hideux de quelque laid Therfite, Que Le uray naturel qu'un fcavant peintre imite: M. Defpréaux difoit pourtant, en plate peinture, ces imitations plairont d'autant plus, qu'elles approcheront davantage de la vérité; parce que, quelque reffemblance qu'on y trouve, les Ieux, & l'Efprit ne laiffent pas d'y appercevoir d'abord une différence telle qu'elle doit être néceflairement entre l'Art & la Nature. VERS 6. D'Oedipe tout sanglant, &c. 1 Sophocle. DES P. VERS 7. D'Orefie parricide,&c.] Tragédie d'Euripide. Et qui toujours plus beaux, plus ils font regardez, Aille chercher le cœur, l'échauffe, & le remuë. Vos froids raifonnemens ne feront qu'attiedir REMARQUES. VERS 13. plus ils font regardex] pour plus ils font vus. Le terme eft très-impropre. On ne dit point regarder, mais voir une Tragédie, une Comédie, &c. IMIT. Vers 14. Soient au bout de vingt ans, &c.] HORACE, Art Poëtique, Vers 190. Fabula, qua pofci vult, & spectata reponi. IMIT. Vers 16. Aille chercher HORACE, Livre II, Epit. I. Vers le cœur, l'échauffe, & le remue.] 190. meum qui pectus inaniter angit, Irritat, mulcet,falfis terroribus implet. LA FRESNAIE-VAU QUELIN caractérise ainfi la Tragédie dans fon Art Poëtique, Livre troifiéme. le fujet Tragic eft un fait imité: Comme l'efpace me manque, VERS 21. Vos froids raifonne mens, &c.] M. Despréaux ne fe cachoit pas d'avoir dans ce Vers & les trois fuivans, attaqué directement le grand Corneille qui dans la Tragédie d'Othon in troduit fur la Scéne trois Mi Et qui des vains efforts de vostre Rhetorique Juftement fatigué, s'endort, ou vous critique. 25 Le fecret eft d'abord de plaire & de toucher. Inventez des refforts qui puiffent m'attacher. Que dés les premiers vers l'Action préparée, Je me ris d'un Acteur qui lent à s'exprimer, REMARQUES. niftres d'Etat, auxquels il prête beaucoup de raifonnemens politiques. Cette Pièce, l'un des derniers Ouvrages de fon Au. teur, ne laiffe pas d'être remplie de grandes beautés. Mais tout s'y dit pour l'Efprit, & C'est ce que nôtre Poëte appelle Vers 35. un tas de confufes merveilles. Impatiens defirs d'une illuftre vengeance, 66 VERS 32. D'un divertiffement me fait une fatigue. ] DESMA RESTS p. 86. cenfure le dernier Hemiftiche de ce Vers: me fait une fatigue. Cette façon de ,, parler ne vaut rien, pour dire, ,, me fatigue,,. Cette Critique eft mal rendue. Mais au fonds la Locution eft répréhenfible. Le terme de fatigue n'eft pas tout-àfait en oppofition avec celui de |