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avec laquelle des deux nations ils aimoient mieux entrer en alliance. Le même jour le Grand Soleil mouilla l'ancre à la même rade.

Cependant les habitans de Néra se fortifioient à la pointe Sud-ouest de l'Ifle, vis-à-vis de l'Ifle Goumeape, où les Portugais avoient autrefois un Fort. Le 11. is députérent vers l'Amiral pour s'excufer de ce qu'ils n'avoient point encore délibéré ensemble; ce qui venoit de ce que leurs confédérez n'étoient pas arti-vez; mais ils efpéroient que ce feroit le Mécredi fuivant. Tout cela n'étoit que pour gagner du tems, & l'emploier à fe mettre en état de défenfe. On difoit aufh qu'un de leurs Saints, nommé Dato, avoit prophétifé qu'il viendroit des hom mes blancs, avec plufieurs vaiffeaux, qui fe rendroient maîtres de leur païs, & l'on eroioit que cette prédiction alloit s'ac complir.

Le 14: dumêine mois d'Avril, les yachts l'Aigle & le Faucon, avec le Commis de Bitter, qui venoient de la côte de. Coromandel, rejoignirent la flote. Le 19. l'Amiral & fon Confeil, accompagnez de 250. Soldats & Matelots, allérent

Lontor, où les Orancaies des Ifles less atendoient, pour traiter au fujet de la conftruction d'un Fort à Néra. Il fut bien ES

reçû, au moins en aparence, par les Orancaies, & l'on alla s'affeoir en rond à la mode du païs.

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Il leur déclara les ordres qu'il avoit du Prince & des Directeurs de la Compagnie, de bâtir un Fort à Néra, & leur prefenta les Patentes qu'il avoit pour cet effet, qui étoient écrites en Portugais, & qu'on leur eut traduites en Malais. Il ne parut pas que cette propofition leur fût fort agréable, & aiant demandé du tems pour en déliberer, l'Amiral s'en retourna fur fon bord.

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La nuit du 22. les Orancaies s'y rendirent, demandant encore trois jours de delai, qui leur furent refufez. Enfin ils confentirent à la conftruction, parce qu'ils virent bien qu'on la pouvoit faire malgré eux. Pour cet effet le vaisseau Je Solek étoit allé déja prendre pofte tout à terre, à la pointe de Néra, où il devoit être joint par deux yachts. Le 24. 'Amiral alla reconnoître la Place où l'on pourroit élever le Fort.

Le 25. étant encore allé à terre avec fon Confeil & 700. hommes fous les armes, pour faire commencer l'ouvrage, il trouva la petite Ville abandonnée, les habitans s'en étant fuïs vers l'autre bout de l'Ifle; ce qui fut d'une grande commodité pour loger les tra

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vailleurs, à chacun defquels on affigna fon quartier, avec défenfes expreffes de le quitter fans congé, ou d'infulter les habitans, & de piller rien qui leur apartint.

Le 3. de Mi 1609. on commença d'abattre des arbres, & de travailler dans la terre. Mais on coanut que le terrein n'étoit pas bon, & l'on vit que d'ailleurs il y avoit un trés-grand travail à faire. Ainfi le Confeil s'étant raffemblé on fut d'avis de relever l'ancien Fort des Portugais, où il y avoit encore une muraille qui fubfiftoit tout autour, & où le terrein étoit bon. On le fit quarré avec quatre angles, deux du côté de la mer, & deux du côté de la terre.

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Le 15 la Patane, qui avoit une partie de fa cargaifon en noix mufcades, & le yacht le Faucon, fe détachérent de la Aote, & prirent la route d'Amboine. On nomma deux Députez du Confeil, pour aller négocier avec les habitans de Jortato, touchant la liberté de commer .ce, & la conftruction d'une nouvelle loge, à quoi Jaques de Bitter avoit écrit qu'ils s'opofoient.

Le 22 les habitans de Néra & les autres Infulaires de Banda députérent verss l'Amiral, pour lui demander qu'il lui: plût de marquer un lieu, où l'on pitt

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conférer enfemble, traiter fur tous les différents, & convenir du prix du macis & du clou, aiant pris réfolution de n'en vendre qu'aux Hollandois. Comme. ils étoient dans la fraieur, ils demandérent des ôtages. On leur envoia de Molre & de Vifcher, qui aiant demeuré quelque tems à Néra, favoient un peu la langue du païs, & on leur donna rendezvous fur le rivage, à une portée de moufquet du quartier, fous un grand arbre.

Aprés-midi, qui étoit l'heure marquée, Amiral & fon Confeil fe- rendirent au rendez-vous, fuivis de la compagnie de foldats de Cronenbourg, & n'y aiant trouvé perfonne, ils allérent s'affeoir fous l'arbre, réfolus d'atendre avec patience. Enfin aprés y avoir été long-tems, ils envoiérent dans la petite Ville Adrien Ilfevier, qui aiant fait un long féjour à Johor, favoir la langue Malaie, pour leur faire favoir qu'il y avoit long-tems que l'Amirak les atendoit.

Ils fortirent tous au-devant de cet Envoié & lui dirent qu'ils avoient peur des Moufquetaires qu'ils voioient, & qu'ils fuplioient l'Amiral & fon Confeil de s'éloigner de cette milice, & de s'aprocher vers le bois. L'Amiral y aiant confenti, fut audi-tôt environné de toutes parts

Alors Jean de Bruin s'écria, M. l'Amiral nous fommes trahis. L'Amiral voiant le danger demanda fes armes. A peine avoit-il parlé qu'il reçût deux ou trois. bleffures, & fut tué avec la plupart de fes, Confeillers.

Les foldats qui étoient fur le rivage,, entendant le bruit qui fe faifoit, y coururent promtement, firent feu, & mirent par terre quelques-uns des affaffins. Les autres pafférent au travers du bois, & s'enfuïrent dans leur petite Ville. Nos gens. étant allez retirer les morts & les bleffez, trouvérent leur Amiral fans tête, & percé de 20. coups J. van Groenewegen étoit dans le même état, auffi-bien que Jean de Bruin, & A. Ilfevier, y en aiant jufqu'à 30. de maffacrez. Les affaffins retirérent auffi les corps de leurs gens, & les emportérent à leur quartier, où ils firent bonne garde toute la nuit.

Le 23. quatre compagnies des nôtres. étant allées battre la campagne pour chercher le refte de ceux qui nous manquoient, & favoir s'ils étoient vivans ou morts, on trouvá les deux ôtages de Molre & de Viffcher, & deux garçons de bord maffacrez, avec plufieurs autres, tout proche de la Ville mais on ne pût les enlever à caufe, de la grande réfiftance des ennemis, & de la multitude d'affagaies qu'ila

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