dans la premiére Fortereffe. La garnifon de cette derniére confifte ordinairement en 27. Efpagnols, 20. Papaugos, & quelques autres gens des Manilles.

Ils poffédent toute l'Ifle de Tidore, & y ont trois Forts; favoir, celui de Taroula, qui eft dans la grande Ville où le Roi fait fa réfidence. Il eft plus fort que les deux autres par fa fituation qui eft fur une hauteur. La garnifon eft ordinairement deso. Efpagnols, & de 8. ou 1 o. Papaugos. Ilya dix groffes piéces de canon de fonte. Le fecond Fort, eft le vieux Château Portugais que Corneille Baftiaanfz prit, & qu'ils ont relevé. Il y a treize Efp gnols, avec plufieurs Infulaires, & deux piéces de canon.

Le troifiéme fe nomme Marieco, & eft à la vûë de Gammalamma. C'eft une petite Ville bien peuplée des habitans de Ile. La garnifon eft de 14. Caftillans & de quelques Papaugos, & il y a deux piéces de canon. On voit encore dans Fifle d'autres petites Villes qui ne font peuplées que des originaires du lieu. Les guerres ont un peu dépeuplé le païs. On nous a dit que ce qu'il y a d'habitans propres à porter les armes, ne va pas à plus de 1000. hommes. Le Roi de Tidore des fujets de fa dépendance hors de l'Ifle qui lui fourniffent du fagu & du ris.

Ils ont plufieurs Fortsà Gilolo; fçavoir celui de Sabongo, que Don Juan de Silva nous enleva l'an 1611, Ils. l'ont encore fortifié de quatre baftions & d'une demilune à l'entrée de la riviére. La garnison eft de 6. Caftillans & de 50. Papaugos. Mais les habitans ont quitté le parti des Efpagnols, & font allez trouver nos gens à Gamconorre. Ce Fort eft bien pourvu de gros canon.

Le fecond, nommé Gilolo, nous a été auffi enlevé par le même Don Juan de Sil

a. Il y a un Roi particulier, & 50. ou 60. familles Efpagnoles, avec quelques gens venus des Manilles. Ils l'ont fortifié, & y tiennent 5 o.à 6o. Efpagnols en garni fon. Ces deux Forts font fur la côte occi dentale de Gilolo, à 7. lieues de Malaïa.

Le troifiéme fe nomme Aquilamo, & eft, fitué fur la même côte, vis-à-vis de Machian. Il eft au bord d'une petite riviére, environgé de murailles, peuplé de naturels du païs, gardé par un petit nombre d'Ef pagnols, & par 40. Infulaires de Tidore, que le Roi y entretient, pour la fûre, té de ceux qu'il y envoie chercher des vivres. Il y a un baftion avec deux piéces de canon.

Ils ont trois Forts fur la côte de Moro, qui eft la côte Qrientale de Gilolo; favoir, Jolo, Ihau, & Joffougho. Les garnifons

font de 45. Efpagnols & de plufieurs. naturels du pais, qui font prefque tous Chrétiens. Les Efpagnols tirent de cette côte quantité de ris, de fagu, & d'autres vivres pour Ternate & pour Tidore. I ya environ 60. lieues de navigation de Malaia à Gilolo, & enfuite il faut faire environ une journée de chemin par terre.

Les Espagnols tiennent ordinairement en mer une galére, une frégate, & quelques yachts à rames. Ils les font naviger par des esclaves, par des prifonniers, &. encore quand il en eft befoin, par quel ques foldats qu'ils tirent des garnifons, Ils font affez bien pourvûs de munitions de guerre, qu'on leur aporte des Manil les, ainfi que j'ai déja dit; mais ils le font affez mal de munitions de bouche; ce qui fait que leurs domeftiques, le baş peuple, & même les foldats Efpagnols, défertent fouvent,

Pour ce qui regarde leur commerce, Je Roi prend la moitié entiére du prix du clou de gérofle, dans les lieux où il fe vend. Ce ne font prefque que les Por augais qui en trafiquent, pour les tranf porter à Malacca & ailleurs. Depuis fix ans ce négoce ne leur a pas été fort avanta geux, ni au Roi, qui pendant la guerre fait plus de dépenfe qu'il ne tire de revenu,

Mais ils vivent fur l'efpérance, & ils n'el pérent pour l'avenir rien que de grand & de confidérable.

Le Roi d'Espagne fait régir ce qu'il pofféde aux Moluques par un Gouverneur particulier, qui dépend de celui des Manilles. Celui qui y eft à présent fenomme Don Jeronimo de Silva. Il eft parti d'Ef pagne a près la publication de paix dans Europe. Avant fa venue on nous disoit qu'il devoit ratifier la paix dans ces païs-ci.

Ce Gouverneur eft affifté d'un SergentMajor, d'un Contador, d'un Pagador, & d'un Commis du Roi que le Gouver neur n'apelle au Confeil que quand il lui plaît. Outre ces principaux Officiers, il y en a encore d'autres, qui font des Alcaldes, des Barachelos, des Capitaines del Campo, avec beaucoup d'Intretandos & de Retormados, felon la coûtume de las nation.

Don Jer. de Silva entend fort bien la guerre. Il eft orgueilleux & févére, & tache de faire réülir fes afaires par intrigue. Néanmoins dans quelques entretiens que nos gens ont eu avec lui, au fujet de celles de l'Europe, ils l'ont pénétré, & ont découvert que fes ordres font d'entrenir ici la Tréve, ou de recommencer la guerre, felon que les ocations lui feront favorables. Quelques réponfes qu'il

á été obligé de faire, ont achevé de dé couvrir ce fecret.

Comme il a fort bien fervi fon Roi" dans plufieurs afaires importantes, on lui" a donné plus de pouvoir & d'autorité que les précédens Gouverneurs n'en avoient. Il eft oncle du Gouverneur des Philippines, fi bien qu'il y a lieu de croire qu'il fera mieux les afaires des Efpagnols, que fes prédéceffeurs n'ont fait.

Il eft venu des Marchands Portugais de Malacca & d'autres lieux, pour trafiquer à Amboine & à Banda. Nous les avons arrêtez, parce qu'on n'a point encore voulu publier ni ratifier la Tréve dans les Indes; ce qui fait qu'ils fe plaignent fort du Gouverneur Efpagnol. Ils difent, & nous le voions, que les Portugais obfervent la Tréve dans un endroit, & point dans l'autre, felon qu'il leur eft avantageux de l'obferver, ou de ne l'obferver pas. Il est aisé de voir qu'ils l'auroient promptement publiée, fi l'Amiral Wittert eût continué à les incommoder aux Manilles, & qu'il n'eût pas eû le malheur de fuccomber comme il a fait.

Ils ont encore une autre raison d'en ufer ainfi. C'est la prife qu'ils ont faite de nouveau de l'Amiral van Caerden; car ils ont trouvé tous fes papiers, & connu par-là-le peu de forces & de munitions que