Imágenes de páginas
PDF
EPUB

puiffions l'interdire aux Chinois, il nous ouvrira fans doute celui de la Chine..

J'ai auffi parlé au Roi d'Affon, & il m'a promis de nous vendre tout le bois de fantal que fon païs peut fournir. Ces deux Rois font les principaux de Timor : ils font tous deux idolâtres; mais on peut mieux fe fier fur leur parole que fur celle des Maures. Il y a chez eux beaucoup de cire, & elle s'y donne à bon marché. JeanG. de Vrye y demeure pour avoir l'œil fur ces commerces; il nous en rendra bon compte.

Les amitiés & les ofres que nous font les Rois Maures de Solor ne font pas moindres que celles des Rois de Timor; & quoi-qu'il n'y ait pas tant de profits à faire à Solor, il eft pourtant bon de ne pas négliger la confervation de cette Ifle, parce qu'elle nous affure celle de Timor. D'ailleurs on en pourra tirer commodément des vivres pour les Moluques,, & il y a encore diverfes raifons qui doivent nous engager à nous y maintenir.

[ocr errors]

Voici ce que j'ai apris de plufieurs pri fonniers ou déferteurs Portugais touchant les deffeins de cette nation, & touchant les préparatifs qui fe font dans les païs où elle domine. Mais je dirai aupara-vant, que nous avons un grand interêt à pourvoir à la fûreté des Indiens

qui nous font comme foumis, & à leur commodité, parce que dès que nous les laifferons embaraffez, ils nous abandonneront. Les Ternatois même feront les premiers à le faire, quelque étroitement qu'ils paroiffent être unis avec nous, dès que cette liaifon que nous avons enfemble, pourra les expofer à quelque foufrance, ou à quelque péril.

Il eft certain qu'on voit rouler de gros nuages fur nos têtes dans les Indes. Il y a toute aparence qu'ils font prêts à crever fur les Moluques, fur Amboine, & fur Banda, & que ce fera dès cette préfente année.

Le prétendu Monarque Univerfel de 'Europe, n'a reculé dans notre patrie, que pour avoir du tems, & raffembler fes forcés, afin de nous acabler dans les Indes,. & de nous en chaffer, aiant efpérance de reprendre enfuite fes deffeins dans l'Eu rope, & de les y pouffer avec plus de fuccès. Ainfi nous devons nous atendre à tout ce que font capables de faire, fa diffimulation, fa mauvaife foi, fa haine & fa tirannie. Mais fa diffimulation n'eft pas moins à craindre pour nous auprès des Indiens que le refte.

Un Pilote Portugais m'a dit fort fincérement qu'il paffoit pour conftant à la Cour &parmi les peuples d'Efpagne & de Por

tugal, que nos forces ne venoient que de nôtre commerce dans les Indes, & que ce n'eft que par-là que nous nous fommes trouvez en état de réfifter à leur Roi.

Il m'a auffi affuré que les 1 3. derniers vaiffeaux qui font venus ici, ont été fuivis par 13.galions, jufqu'au cap de Bonne-Efperance, fous le commandement du jeune Don Loüis Faïarde. Cette efcadre avoit mis à la mer fous prétexte d'aller croifer fur les Corfaires. Mais le bruit couroit parmi les Espagnols qu'elle alloit aux Manilles, quoi-qu'on n'en eût pourtant point de certitude.

Il m'a encore déclaré que Chriftophe de Schotte, qui a été Gouverneur de Gammalamma, fut envoié des Manilles, für la fin du mois de Décembre dernier, par Don Juan de Silva, vers le Vice-roi de Goa, auquel il porta beaucoup d'argent comptant, & des lettres de change, pour faire équiper promptement 7. grands navires, & 20. frégates, qu'il doit conduire à Ma lacca, & enfuite aux Manilles quand la faifon fera venue pour y joindre les forces qui y font, & aller faire un grand éfort aux Moluques, dans le mois de Decembre prochain.

Il fait, de plus, que le même Gouver neur des Manilles a envoié à Macao un Général Espagnol nommé Tolledo, pour

en amener un galion que les Efpagnols ont fait acheter. Le même Tolledo a aut ordre d'en ramener fix galions, qui y font allez de Malacca, & de les conduire aux Manilles.

J'ai apris qu'il eft venu deux vaiffeaux d'Espagne exprés pour aporter des avis au Vice-roi de Goa, & des ordres pour envoier les forces qu'il a dans ces Indes, joindre celles qui font aux Manilles, afin que tout fonde à la fois fur les Hollandois. C'eft à cette même fin qu'on fait conftruiretrois grands vaiffeaux dans un lieu qu'on nomme Pintados.

Ceux qu'ils ont à Cayta font, le Gouda & l'Amfterdam, que montoit l'Amiral Wittert, tous deux pris fur nous; l'Esprit San te; le S. Juan Bapta, le tean de Lupas qui eft un des plus grands navires; le S. An dre; le S. Marc, qui eft un affez petit bâti. ment; & l'on y en attend deux qui viennent de Caftille, & quiaménent des gens & des munitions pour cette flote.

On conftruit aux Manilles trois nouvelles galéres, & il y en a une autre depuis long-tems. On tient que la flote fera com pofée de 18. gros navires, zo, frégates & 4. galéres, & outre les équipages elle fera montée de 5ooo. hommes de troupes réglées. Mais pour les fix vaiffeaux qui font allez à Macao, on doute qu'ils puiffent

s'y joindre. Ce fera Don Juan de Silva qui commandera cette armade, & c'eft par cette raifon qu'il eft demeuré dans le gouvernement des Manilles, quoi-que fon tems fût fini.

J'ai encore été informé que Don Jeronimo de Silva, après la prifè de Maricque, avoit envoie une frégate à Malacca, porter des avis à Chriftophe de Schotte, qui devoit conduire l'armade Portugaife de Goa à Malacca, ainfi qu'il a été déja dit, pour la mener enfuite aux Manilles, & delà fe rendre aux Moluques dans le mois de Décembre, ou dans celui de Janvier prochain.

Cette frégate avoit relâché à Botton pour faire de l'eau ; mais le Roi a fait arrêter le Pilote, qui étoit defcendu à terre. Ce Prince & Henri van Raay ont tâ ché de fe rendre maîtres de la frégate; maiss un traître en fit donner avis à l'équipage.

Pendant que je fuis ici, il y eft venu un Kitchil de Macaffar, avec d'autres Dépu tés, & 33. corcorres, qui aportoient dess préfens au Capitaine de ce Fort, à qui ilss ont démandé permiffion de parler; ce que je n'ai pas voulu leur acorder. Ils préten doient éxiger un tribut des habitans de Selor, qui ont répondu qu'ils n'étoient tri butaires que du Roi de Ternate. Je ne me fuis fervi, en cette ocafion, que de raifonss pour les combattre.

M-55

« AnteriorContinuar »