Imágenes de páginas
PDF
EPUB

tois, quand ils n'auront point de canon. On mettroit aifément ces places en fûreté fi c'étoit-là que fe recueillit le clou. Mais dans tous les lieux où l'on a des Forts il ne s'en recueille que très peu, hormis à Larique & à Ourie.

La plus grande quantité de gérofles d'Amboine eft dans la jurifdiction de Hittou, qui compofe une petite république particuliere, laquelle eft en alliance avec les habitans de la côte de Céram, où il en croît beaucoup, Suivant le Traité fait avec eux, ils font obligez de nous le donner bienconditionné, à 60. réales de huit la barre Portugaife, quoiqu'ils ne l'aïent pas fait depuis plufieurs années. Ils l'ont vendu aux étrangers 100. réales & jufqu'à 120. ce qui eft un appas pour eux qu'on ne leur fera pas aifément abandonner, & fi l'on veut l'avoir au prix dont on eft convenu, il faudra déformais les y ranger par l'autorité & par la force. fans quoi il ne faut pas efperer qu'ils nous en livrent. Les remontrances n'y ont rien fait, & n'y fe- ront rien, tant qu'ils trouveront un fou plus qu'on ne leur veut donner.

[ocr errors]

Pour les amener au point où on les dé fire, il faudroit commencer par chaffer les Négocians étrangers Malais, Javanois, & ceux de Macaffar. Quand mê meils feroient déja dans les Ports, il fau

droit les y aller enlever, ou les brûler Cela fe peut aifément executer dans la plû-part des havres, ainfi que j'en ai été informé. Il n'y a qu'à regarder fi l'on veut foutenir la guerre contre eux, en cas qu'ils vinflent à la déclarer, ainsi qu'il y a beau coup d'aparence.

Cependant c'eft l'unique moien de réta blir les afaires en ce païs-là. Autrement il ne faut plus efpérer de clou de la côte de Céram, quelque beau femblant qu'on nous y faffe. Il eftyrai qu'on ne viole pas les rades & les ports: mais c'eft lors qu'on n'a point de raifon valable pour le faire, comme eft celle de la violation de la foi des Traitez, fur-tout quand ils ont été fuivis d'une exe cution qui a duré long-tems. Ceux de Ternate, de Lohou, de Cambelle & de Liffidi, ne nous tiennent aucune parole, & ne feroient pas obligez d'en tenir, parce qu'ils nous regardent comme des infidéles. Ils ne trafiquent pas avec nous comme avec des alliez, & fur le pié de l'alliance: ils n'y trafiquent que pour leur profit, & s'ils croient qu'il n'y en a point pour eux, ils fe moquent des Traitez. Ils s'en fervent bien, & veulent que nous les obfervions dans les points qui leur font avantageux; mais pour. ceux qui nous le font, ils ne veulent pas en entendre parler.

Ain fiils vendent volontiers leur clou au

plus ofrant, ils opriment nos fujets Chré riens; ils débauchent nos fujets Maures; ils enlevent les uns & les autres, comme il arriva dans le tems que j'y féjournai. Un champan d'Amboine fortit pour aller pêcher : il y avoit deux de nos Bourgeois & fept autres tant Chinois qu'efclaves Noirs. Ils allérent à l'Ifle de Noffelau, fur la côte de Céram. Quatre corcorres de Ifle de Boano, qui apartient au Roi de Ternate, allérent une nuit les prendre, tuérent les deux Hollandois, & firent pri fonniers les Chinois & les efciaves. Il fallut les reclamer, & on les fit rendre a près cinq jours de prifon. Cependant il en avoit coûté la vie aux deux Hollandois..

Ce fut inutilement que le Gouverneur Gorcum envoia demander juftice à Kimalaha Liliatte, Gouverneur de Lohou pour le Roi de Ternate, qui réfide à Lucielle. Il s'excufa fur ce qu'il ne favoit ce que c'étoit, & prétendit que l'excufe fût bonne, promettant pourtant que s'il pou voit être bien informé de la vérité du fait, il en feroit raifon. Ce fut tout ce qu'on en eut, & quelque follicitation qu'on fît depuis, on ne pût rien obtenir de plus. Des incidens à-peu-près femblables, arrivent tous les jours.

"

Le Confeil s'étant affemblé à Amboine pour délibérer fur les moiens qu'il y auroit,

de pourvoir à ces défordres, & fi l'on devoit fe réfoudre à la guerre, on trouva de trop grands inconveniens à prendre ce parti. Il fut donc réfolu qu'on prendroit patience encore quelque tems, & qu'on fermeroit les yeux fur la conduite des Infulaires, jufques à ce qu'on eût des forces fufifantes pour les mettre à la raifon : que néanmoins on feroit toutes les inftances poffibles pour obliger Kimalaha Liliatte à faire juftice du meurtre nouvellement commis par ceux de Boano : que s'il n'avoit point d'égard à nos requêtes, on atendoit une ocafion favorable pour ufer de repréfailles : que cependant on ne feroit paroître aucun reffentiment. contre lui, ni contre le Capitaine Hittou, afin que la livraifon du clou de Hittou nous puiffe être faite, l'aparence étant qu'il y en aura une très-bonne récolte.

Jamais les afaires de la Compagnie n'iront tout-à-fait bien, que toute l'Ifle d'Amboine ne lui foit foumife. En ce cas, on en pourroit tirer 600. bares de clou par an. Mais on ne réüffira dans ce deffein qu'en extirpant les Maures, & les contraignant d'abandonner, & en introduiduifant de nouveaux Chrétiens à leur place: ce feroit le vrai moien de tenir en bride ceux de Céram...

Pour cet éfet, je croi qu'il faudroit me--ner 1000. hommes à Amboine, & les y faire féjourner cinq ou fix mois. Ils fufiroient avec les autres Infulaires qui nous font afectionnez, pour en chaffer le Capitaine Hittou, nonobftant le secours que lui donneroient ceux de Cambelle. Il eft vrai que quand on l'auroit chaffé, & ceux. de fa faction, il faudroit fans doute cinq ou fix ans pour repeupler l'Ile d'envi ron 2400. hommes pour le moins, nonfeulement afin de recueillir les cloux, mais pour s'opofer aux entreprises du Ca-t pitaine & de fa faction.

Car il faudroit faire fon compte que dans les commencemens ils feroient tous les éforts imaginables pour entrer dans leur païs, duquel ils ne perdroient pas ai fément le fouvenir, non plus qu'ont fait ceux de Banda, & ils feroient puiffam-. ment aidez par les Ternatois. Il faut donc, avant que de mettre la main à l'œuvre, préparer un nombre de Chrétiens pour remplir la place de Maures qu'on chafferoit, & c'eft par-là qu'il faut commen. cer; car d'entretenir une fi groffe garni fon pendant tant d'années, il y auroit bien plus de perte que de gain.

Le Gouverneur Corcum a fait un réglement fort utile en obligeant chaque homme des fujets du Fort de planter & cultiver

[ocr errors]
« AnteriorContinuar »