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hommes, pour retirer quelques marchan difes, qui avoient été amenées & fauvées fous leurs murailles. Trente de nos foldats, dont la plupart avoient trop bû, aiant été commandez pour efcarmoucher avec eux, furent repouffez, & dans leur retraite ily eût deux Sergens de tuez, & quelques foldats de bleffez.

Le 30. du même mois de Juillet, on envoia des gens vers les Caffres, avec des prefens, pour tâcher de les attirer dans nôtre parti; mais on n'en pût venir à bour. Le 3. on éleva deux batteries l'une de deux canons de demi-calibre du côté du Nord, & l'autre de quatre pareils canons, du côté du Sud. La nuit fuivante on fit pofter devant le Fort quatre chaloupes armées chacune de fix moufquetaires pour empêcher que perfonne n'y entrât, ni n'en fortit.

Le 1.d'Août, le Confeil ordonna qu'on déchargeroit la carraque échouée, puifqu'on n'avoit pû la remettre à flot. Mais les ennemis nous prévinrent. Ils la firent brûler jufqu'à fleur d'eau, & l'on n'en fauva rien que quelque pillage que firent les Matelots, & quelques piéces de

canon.

Le 2. le feu fut mis dans une petite maifon, tout proche de nôtre parc aux poudres. On ne douta point que ce ne fût un

coup des Portugais, & on porta les munitions de Guerre dans l'Eglife. Le 3. on fit aprocher les canots du Fort, pour le ferrer de plus près, & ils furent commandez par Corneille Cornelifz 'tHart, Maître du yacht le Griffon.

Le 4. on envoia un Trompette & un Négre au Fort avec une lettre, pour le fommer de fe rendre. Le Négre fut retenu, & le Trompette renvoié avec une réponse qui portoit que le Gouverneur ; à qui le Roi de Portugal fon Maître avoit confié cette Place, n'avoit pas intention de la rendre, à la vûë d'une fimple lettre: que ceux qui defiroient de s'en ren dre maîtres, n'avoient qu'à chercher d'autres mains que celles qu'ils avoient déja emploiées, pour y parvenir : que ce n'étoit pas un chat à prendre fans mitaines. Cette réponse n'étoit fignée que par le Ca pitaine du baftion de S. Gabriël, le Gou verneur, par une fierté Portugaife, aiant voulu témoigner qu'il fe croioit trop grand Seigneur, & qu'il n'avoit pas daigné s'abaiffer jufqu'à la figner.

Nous favions auffi très- certainement. qu'il y avoit peu de vivres dans la Place. Mais pour nous ôter cette penfée, ou pour nous empêcher de la concevoir, le Trompette fut régalé de bifcuits, qu'on fervit devant lui en abondance, avec une infini

té d'oranges. Outre cela on chaffoit quelquefois de la Place des chèvres & des pourceaux fur les ramparts, comme pour s'en décharger, parce qu'il y en avoit trop.

Le 8. d'Acût les affiégez firent une fortie de 50. hommes, qui ataquérent les fentinelles, & chafférent les affiégeans de leurs tranchées; puis ils fe retirérent en bon ordre emportant deux de nos tambours, & quelques moufquets. Cette action obligea nos Commandans à faire. une nouvelle batterie de deux piéces fur l'Eglife; & enfuite on atacha le mineur: mais les affiégez jettérent tant de pots à feu qu'il fut impoffible de travailler.

Le 11. on fit des préparatifs pour la retraite, & la nuit on rembarqua trois piéces de canon.

Le 12. les affiégez mirent le feu à un vieux bâtiment dégradé, qui étoit au pié du Fort, pour découvrir quelle mancuvre nous faifions.

La nuit du 13. nous prîmes un Noir qui fortoit de la Place, & qui dit qu'il y entroit toutes les nuits des canots avec des rafraîchiffemens, nonobftant les fentinelles que nous avions pofées; mais qu'on y manquoit d'eau,

Le 5. on rembarqua le refte du canon. Le même jour un foldat de la compagnie de Cronenburg aiant deferté, & s'étant jetté

dans la Place, l'Amiral y envoia un Trompette avec une lettre pour le demander. Le Gouverneur fit répondre qu'il étoit allé au Fort volontairement, qu'en le recevant on lui avoit donné parole de le garder, & qu'on vouloit lui tenir ce qu'on lui avoit promis.

Le 17. on lia tous les prifonniers, on les conduifit à la tranchée, & l'on cria aux affiégez que s'ils ne rendoient à l'inftant le deferteur , on les maflacreroit tous à leur vuë. La réponse fut que les Hollandois en uferoient comme il leur plairoit, & que s'ils maltraitoient leurs prifonniers, le Viceroi uferoit de repréfailles fur tous leurs gens qui pourroient être pris le long de la côte: que quand ils auroient 100. Portugais, au lieu qu'ils n'en avoient que 34. il les laifferoit périr, plûtôt que d'abandonner un homme qui s'étoit venu jetter entre fes bras, & à qui il avoit promis fa pro tection. Sur cette réponse on caffa la tête aux prifonniers à coups d'arquebufe.

Le 18. l'armée fut rangée en ordre de bataille, & en même tems l'on brûla la Ville; puis on marcha vers le bout: occidental de l'Ifle, en pillant & ruïnant tout ce qu'on rencontroit. Enfuite on fe rembarqua dans les chaloupes, fans. que la garnifon parût pour s'y opposer ou pour nous harceler. En faifant la

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revûë à bord, on trouva qu'il manquoit 2. ou 3. foldats de la même compagnie de Cronenbourg, qui avoient deferté.

Il nous fut tué 30. hommes à ce fiége, & nous en eûmes 80. de bleffez. Nous tirâmes 1250. coups de canon fur la Fortereffe, qui eft la plus confidérable que les Portugais poffédent dans les Indes Orientales, aiant quatre bastions, & trois remparts.

Comme on a vû la defcription de Mofambique, dans les précédens Voiages, particuliérement dans celui de l'Amiral: Paul van Caerden, il n'eft pas néceffaire de la faire encore. Mais puifque le puiffant Empire des Abiffins, dont l'Empereur fe nomme le Prête-jan, eft vis-à-vis de cette Ifle, dans le continent, il femble que c'eft. ici le lieu de dire ce qu'on en fait.

Tous ceux qui dans leurs Relations ont parlé de la puiffance & des forces de ce Monarque, & des païs qu'il pofféde, femblent avoir fait le recit de ce qui regardoit fes prédeceffeurs, plûtôt que de ce qui le regarde lui-même aujourd'hui. Quelques-uns étendent fa domination depuis un des Tropiques jufqu'à l'autre, c'eft-à-dire qu'ils lui affujettiffent autant de païs en largeur qu'il y en a fous 50. degrés, qui font 1400. lieues de Fran ce, ou depuis la mer Rouge jufqu'à la

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