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qu'ils nous refuférent avec beaucoup de dureté. Enfin pour éviter les grands frais qu'il en auroit coûté à la Compagnie, nous primes la réfolution de paffer par les Roïaumes de Partabaffa, de Décan & de Golconda, & d'aller à Mafulipatan.

Aprés avoir donné les ordres néceffaires au comptoir de Suratte, nous partîmes au nombre de 103. Hollandois & 29. Indiens, & nous rendîmes au Bourg de Lafpour, puis à Nosharri, où demeurent plufieurs Perfans, & où il fe frabrique beaucoup de Braftas tant gros que fins, & enfuite à Gandivi, qui eft à 18. Cos de Suratte,puis au village de Dagau,qui eft à 4. Cos de Gandivi, nous y arrivâmes à minuit.. Le lendemain nous partîmes avant jour, & gagnâmes jufqu'au Bourg d'Armau, qui eft à 7. lieues de Dagau, & la derniere place de la frontiere de Gufuratte.Le lendemain nous marchâmes fur les terres du Roi de Partabaffa, paffant par les villages deCaüendi & Carondi, jufqu'à celui d'Onni, à j. Cos d'Annau, où on vouloit, nonobstant nôtre paffe-port du Roi, que nous païaf fions un impôt de 5. mamoudis pour chaque homme & pour chaque boeuf chargé, & 7. mamoudis pour chaque cheval. Nous n'en voulûmes rien faire, & fur le minuit nous continuâmes nôtre marche, par le Bourg de Serion jusqu'à Camela, qui est

a. lieues d'Onni, où l'on recommença de nous parler de paier les droits.

Le lendemain de bon matin nous marchâmes en montant fur la montagne, où nous fûmes environnez d'une groffe troupe de gens, qui avoient abattu des arbres pour fermer les paffages, & qui fondirent fur nous avec des cris fi horribles, que tout en retentiffoit, & il fembloit que l'Univers alloit périr.

Nos gens fe rangérent en ordre, & on tira vingt-cinq coup de moufquet dans le gros, fur quoi les Indiens s'arrêtérent tout court. J'envoiai, deux de nos cavaliers leur parler, qu'ils n'oférent attendre, & qui pourtant firent un prifonnier, qu'un Japonois fendit en deux par le milieu du dos, fans ordre. Nous continuâmes de monter, & l'on continua de nous tirer des fléches; ce qui ceffa lorfque nous eûmes fait une feconde décharge.

Nous arrivâmes au foir dans le bourg de Nanotra, à 7. Cos de Camela, & dont les habitans s'en étoient fuis, fi bien que nous pûmes avoir de vivres. Nous marchâmes le lendemain, enfeignes déploiées, paffant par une montagne dont le chemin étoit fort rude, & par le bourg de Tawer, jusqu'à celui auffi de Gandebarri, à huit Cos de Gannotra, dont les Habitans avoient pris : la fuite.

A minuit nous continuâmes de marcher fur la montagne, paflant par le bourg de Malganhan, & à midi nous arrivâmes avec beaucoup de peine au bourg de Gandeberi, qui eft à trois Cos de Gandebarri. Nous crûmes prendre-là quelque repos, étant proche des terres du Roïaume de Décan. Mais nos domeftiques Indiens ne nous le confeillérent pas,étant affez prés d'une For tereffe du Roi de Partabaffa...

En éfet, quand nous fûmes defcendus de la montagne, il s'affembla une multitude de gens, qui couroient à nous de tous côtez, avec leurs bruits ordinaires, & crioient Tue, Tue ces Chiens, Mahar cotta, Mahar cotta. Nous nous remîmes en ordre, & avançâmes toujours jufques auprés d'un petit bois où il y avoit encore d'autres gens poftez. Je fis faire une décharge de mouf queterie fur eux, & étant entré avec une partie de mes gens dans le bois, nous ne vîmes plus perfonne.

Mais quand nous eûmes paffé le bois, nous rencontrâmes le Gouverneur avec environ 300. cavaliers bien montez & bien armez, qui crioient auffi Tuë, Tue ces Chiens d Infideles, croiant qu'ils aloient faire paffer leurs chevaux par-deffus nous. Quand ils fe furent approchez à la diftance de la longueur de trois piques, le tiers de ma Compagnie fit une décharge, qui a

batit le Gouverneur avec deux de fes gens. Nous achevâmes de le tuër, & prîmes for cheval.

A cet afpect le refte de fes cavaliers fut tellement épouvanté, qu'à peine se pouvoient-ils tenir à cheval & ils s'écartoient de nous de tous côtez fans ordre. Il vint deux autres gros de cavalerie, qui prétendirent mieux faire, que nous forçâmes oncore à faire retraite. Ils fe raillérent hors de la portée du moufquet, & nous tâchames de gagner toûjours païs. Néanmoins leurs gens de pié, cachez dans les brouffailles, nous incommodoient beaucoup de leurs fléches & de leurs longs fufils, fe fervant auffi de dards ardens & d'autres tels artifices, & nous conduifant ainfi jufqu'à la frontiére de Décan.

Enfin aprés avoir toûjours marché en combattant, depuis midi jufques au foir, Dieu permit que les habitans de Décan, en guerre avec ceux-ci, vinffent à notre fecours. Le Gouverneur de Décan nous re

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çut fort bien, & nous fit conduire plus de demie-lieuë fur fes terres, fous les montade Gatos, où il nous envoia des foldats pour nôtre fûreté. Nous eûmes trois hommes de tuez, & 28. de griévement bleffez de fléches, ou de coups de fufils. Nous emploiâmes la nuit prefque entiére à les penfer..

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Le lendemain ce Gouverneur nous fit efcorter par 8. à 10. cavaliers, jusques au bourg de Callara, qui eft fur une des plus hautes cimes des montagnes de Gatos, où l'on nous demanda auffi le paiement du tribut. Nonobftant le paffe-port du Roi, il fallut paier 3o. réales de huit. Nous y apprîmes avec certitude, combien nos perfécuteurs avoient perdu de monde.

Outre le Gouverneur de la Fortereffe, dont la mort caufa celle de ces 5. miférables femmes, de fes domeftiques, & de tous fes efclaves, qui fe jettérent dans le feu où fon corps fut brûlé, nous leur avions tué 9. cavaliers, & 76. hommes de pied, avec 7. chevaux, & 2. que nous leur avions pris. Si nous n'euffions paffé dès cette nuit-là fur les terres de Décan, il ne feroit pas réchapé un feul d'entre nous; car tout le païs étant en rumeur, il s'étoit affemblé pendant la nuit une armée entiere. Cette nation de Partabaffa, ou de Rafpouts, fournit au Grand Mogol fes meilleures troupes, fi l'on excepte celles des Pha

tannes.

Le lendemain nous allâmes à une petite Ville, prés d'une Fortereffe nommée Wandanderin, parce qu'il n'y avoit point d'aparence de demeurer avec tant de bleffez, fi proche des frontiéres. Le Gouverneur nous avertit de nous tenir bien fur

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