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Il y a dix-huit races de Gentives, qui ne fe mêlent point par mariage les unes avec les autres. Pour faire les mariages, les parens du jeune homme vont trouver le pere de la fille, & la lui demandent, lui promettant une fomme d'argent convenable à fa qualité. Ils marient leurs enfans à 9.6. & même à 4. ans. Lorfqu'une fille en a déja 1 2. qui eft le tems où on les tient capables d'avoir la compagnie d'un homme, ils la regardent comme trop vicille, & perfonne n'en veut plus. C'eft une marque que ce n'eft pas une honnête perfonne,ou qu'el Je ne vient pas d'honnêtes gens: car ils font exacts au dernierpoint à ne confondrepoint Je fang de leurs races avec celui des autres nations, ou des autres races, & ils ne veulent point de femmes puiffent qu'ils fou pçonner d'avoir pû fe mêler avec d'autres gens. Je ne fçai pourtant fi cela n'arrive point lorfque les femmes font une fois mariées; mais il faut qu'ils s'en confolent comme les autres, car on ne peut pas parer à tout, & ils font ce qu'ils peuvent fur ce point.

Pour les jeunes hommes, ils peuvent attendre auffi long-tems qu'ils veulent à fe marier. Mais ils n'ofcroient fe rafer la bar be que lorsqu'ils fe marient; ce qu'ils font avec beaucoup de cérémonie & de fuperftition, comme je l'ai vû fouvent. Quand

la premiere femme ne donne point d'enfans à fon mari, elle confent qu'il en épousé une feconde, & même une troifiéme; mais la premiere demeure toûjours fupérieure aux autres. Néanmoins il arrive de grands défordres dans ces fortes de ménages, dequoi j'ai eu fouvent connoiffance.

Ils font tous les ans, en certains lieux dont ils conviennent, des affemblées géné rales, qu'ils nomment Tierton. C'eftà peu prés comme les Kermiffes des Hollandois, ou les affemblées des jours de confécra tions des Eglifes parmi les Romains. Car les peuples s'y rendent en foule à l'honneur de leurs Idoles, dont ils ont des mul titudes. Les unes font des figures humaines avec quelque chofe de trés fingulier, par exemple, plufieurs bras ou plufieurs têtes. D'autres ont des corps humains, & dés têtes de bêtes. Il y en a qui font dans des postures lafcives. Les unes font des ftatues, les autres font des peintures. J'ai vû quantité de ces abominations dans divers Pagodes.

Devant chacune de ces Pagodes, il y a ordinairement une figure d'un boeuf, taillée en pierre, fort artiftement faite. La plupart des Pagodes font auffi bâties de pierre, & l'on ne peut affez s'étonner de voir ces grands édifices, quand on fait te peu d'outils dont le fervent ceux qui tes font. Cela paroît incompréhenfible,

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& l'on ne peut s'empêcher de conclure, que ceux qui les ont conftruits, avoient d'autres inftrumens & d'autres machines que leurs fuccefleurs n'en ont aujour d'hui. Il faut que les arts fe, foient amortis parmi eux, par les guerres continuelles qu'ils ont eues, & qu'il y foit péri un grand nombre d'antiquités, fur-tout dans les lieux où il y a des Maures.

Ce n'eft pas une chofe moins étonnante de voir comme ils s'affujettiffent aux Maures. Dans des lieux où il y a 1000. Gentives contre un Maure, ils font foumis, & fouffrent tout ce qu'il plaît à cette impérieuse nation de leur impofer. Cela m'a donné lieu de les étudier, & aprés avoir bien confideré toutes leurs manié-S res, j'ai trouvé que les Gentives font làches, fans courage, élevez dans des fenti mens d'efclaves, attachez à leurs interêts auffi-bien que les Maures, âpres fur le point d'honneur, & qui agiffant fouvent contre les loix de l'honneur & de la probité, & en étant convaincus, fe rétablissent pourtant bien-tôt, & font regardez comme s'il ne s'étoit rien paflé.

Ils ne font guéres de Fêtes, ni d'allemblées, ou de jeux, que les femmes publiques n'y foient apellées, pour leur donner le plaifir de la danse & de la mufique; ce qui

fe fait particulierement lorsqu'il arrive des étrangers dans leur païs; autrement ils croiroient ne leur avoir pas fait affez d'hon

neur.

Dans les lieux où ils font les maîtres, il faut qu'elles aillent tous les jours danfer dans les Pagodes, & leur affigne pour cela des penfions, Mais parmi ceux qui font fous la domination des Maures cette pratiqué n'a point de lieu. Il n'y a qu'au mois d'Avril, qu'elles font toutes mandées publiquement par un Maldaar, qui eft comme un Huiffier, & elles doivent se transporter de tous les endroits du Roïaume à Baganagar, pour célébrer par des danfes la mort du premier Roi Maure; coûtume qui m'a paru auffi ridicule qu'extraordinaire. Les femmes qui danfent tous les jours dans les Pagodes, ne doivent fe proftituer à aucuns Chrétiens, Maures, ou Parrias; finón elles font caffées aux gages, & traitées avec beaucoup d'infâmie.

les

Les corps des Bramines & des Gentives font brûlcz aprés leur mort. Il y a une race parmi eux, qui y eft en grande eftime, dont gens font tous fculpteurs, ou faifcurs de torches & de flambeaux. Ils portent une certaine pierre liée à leur cou, ou à leur bras, ou dans leurs cheveux, & étant morts ils font enterrez à leur féant. Ceux des autres races qui portent la même

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pierre, font auffi enterrez de la même ma

niére.

Les femmes qui ne fe jettent pas dans le bûcher où l'on brûle les corps de leurs matis, & qui veulent pourtant rétablir leur honneur, fe coupent les cheveux, fe tiennent dans la folitude, menent un grand deüil, & pleurent leur perte pendant quelque tems. C'eft une grande honte pour elles de fe remarier. On les egarde alors comme des débauchées. Pour les hommes ils fe remarient quand ils veulent.

Les parens font un feftin 8. ou 10.jours aprés la mort d'un homme, où on le pleurent de nouveau. Ce jour là le plus proche parent du mort va raflembler fes cendres,& les porter auprésd'une riviere, où ils les mêlent avec d'autres cendres, & les jettent peu à peu dans l'eau, en faifant quelques priéres. Quand la commodité le permet on dreffe les bûchers le long des riviéres, des étangs, ou des viviers, s'il n'y a point de riviéres, & fouvent ils y apportent des vivres, pour les offrir au mort, ou plûtôt pour les donner en proie aux cor

-beaux.

Je leur ai vû célébrer tous les ans à Nyfampatnam une fête qui me paroiffoit fort étrange. Une heure avant jour ils vont fe faire enterrer jufques au cou; ce

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